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14/10/2014 | FRANCE | N°12/02013

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 14 octobre 2014, 12/02013


COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale

ARRÊT N
ic/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02013.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 06 Septembre 2012, enregistrée sous le no 11/ 00200

ARRÊT DU 14 Octobre 2014

APPELANTE :

LA SARL Miroiterie-Aluminium-PVC (M. A. P.)
5 rue Marcelin Berthelot
BP 1212
53012 LAVAL

non comparante-représentée par Maître BENARD, avocat substituant Maître Bernard BOULIOU de la SCP DESBOIS-BOULIO

U, avocats au barreau de LAVAL

INTIME :

Monsieur Joseph X...
...
53960 BONCHAMP LES LAVAL

comparant-assisté de Maî...

COUR D'APPEL
d'ANGERS
Chambre Sociale

ARRÊT N
ic/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02013.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 06 Septembre 2012, enregistrée sous le no 11/ 00200

ARRÊT DU 14 Octobre 2014

APPELANTE :

LA SARL Miroiterie-Aluminium-PVC (M. A. P.)
5 rue Marcelin Berthelot
BP 1212
53012 LAVAL

non comparante-représentée par Maître BENARD, avocat substituant Maître Bernard BOULIOU de la SCP DESBOIS-BOULIOU, avocats au barreau de LAVAL

INTIME :

Monsieur Joseph X...
...
53960 BONCHAMP LES LAVAL

comparant-assisté de Maître André BELLESSORT, avocat au barreau de LAVAL

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Septembre 2014 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller chargé d'instruire l'affaire et Madame LECAPLAIN-MOREL, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne JOUANARD, président
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller
Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.

ARRÊT : prononcé le 14 Octobre 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS et PROCÉDURE

Monsieur X...a été engagé à compter du 1er juillet 1997 en qualité de menuisier poseur par la société Miroiterie-Aluminium-PVC (MAP) dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet.
En dernier lieu, il occupait un poste de menuisier aluminium sur des chantiers impliquant de petits et grands déplacements.

La société MAP, qui applique la convention collective nationale du bâtiment, employait en mai 2011 un effectif de plus de dix salariés. Son siège social est situé à LAVAL.

Monsieur X...a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 29 avril 2011.
Par courrier du 6 mai 2011, Monsieur X...a reçu notification de son licenciement pour faute. Il a été dispensé d'activité durant la période de préavis de deux mois qui a été rémunéré.

Le 27 octobre 2011, Monsieur X...a saisi le Conseil de Prud'hommes de LAVAL pour contester la mesure de licenciement et obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement en date du 6 septembre 2012, le Conseil de Prud'hommes a :
- dit que le licenciement de Monsieur X...était dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamné la société MAP à payer à Monsieur X...:
- la somme de 13 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- la somme de 1500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de dommages et intérêts de Monsieur X...en réparation d'une atteinte à sa vie privée,
- rejeté la demande de la société MAP d'indemnité pour les frais irrépétibles,
- condamné la société MAP aux dépens.

Les parties ont reçu notification de ce jugement les 12 et 18 septembre 2012.
La société MAP en a régulièrement relevé appel général par déclaration faite au greffe le 1er octobre 2012.

PRÉTENTIONS et MOYENS des PARTIES
Vu les conclusions enregistrées au greffe le 29 août 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience, aux termes desquelles la société MAP demande à la Cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- de dire que le licenciement de Monsieur X...repose sur une cause réelle et sérieuse,
- de débouter Monsieur X...de l'ensemble de ses demandes,
- de le condamner au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société MAP soutient que Monsieur X...a commis un dépassement important du temps de travail dans le cadre d'un chantier de COURCOURONNES réalisé à compter du 28 février 2011, en consacrant 246 heures à des travaux évalués à 137 heures ; que le salarié n'a pas tenu compte des précédents avertissements adressés en octobre 2009 pour non-respect du planning de travail et en mars 2011 pour manquement à la discipline de l'entreprise ; que la mesure de licenciement du 6 mai 2011 est justifiée au regard de la qualification d'ouvrier spécialisé de Monsieur X....

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 1er septembre 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience selon lesquelles Monsieur X...demande à la Cour :
- de confirmer le jugement en ce qu'il a reconnu l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et de l'infirmer sur le quantum des indemnités allouées,

- de condamner la société MAP au paiement de la somme de 25 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de celle de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Monsieur X...a contesté vivement les griefs évoqués par son employeur s'agissant du chantier de COURCOURONNES, en ce que l'estimation de 137 heures pour la réalisation d'un mur rideaux (façade vitrée) de 55 m ² était purement théorique, qu'il n'a pas consacré tout son temps de travail sur cet ouvrage et a participé à la réalisation d'autres travaux ; que l'employeur n'a fourni ni le détail ni la répartition des heures de travail réalisées par le salarié sur l'ensemble du chantier ; que le nombre d'heures (233 heures au lieu de 137 heures) évoqué par la société MAP à l'appui du licenciement est erroné et ne repose sur aucun élément objectif.
Il a ajouté que les avertissements se rapportent, pour le premier à la reconduction du contrat de travail d'un intérimaire incombant selon un usage au responsable de chantier mais sans l'accord préalable de l'employeur et, pour le second, à une sanction collective après la perte des éléments d'un échafaudage en location alors qu'ils sont sans aucun lien avec le grief invoqué à l'appui du licenciement..
Le salarié a porté sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 25 000 euros au regard de son ancienneté, des conditions vexatoires de son licenciement, du manque à gagner (800 euros par mois) et des répercussions sur la situation financière de son couple et sur la vente de sa maison acquise à crédit.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement

L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse.
En cas de litige, le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement datée du 6 mai 2011, fixant les limites du litige, est ainsi
libellée :
".. Sur le chantier COURCOURONNES, vous deviez réaliser des travaux dans un temps déterminé à savoir 137 heures. Ces travaux consistaient à réaliser 55 m ² de murs rideaux, nous avons constaté un dépassement du temps prévu à savoir 233 heures pour 137 heures. De plus, vos travaux ont nécessité des reprises.
De tels faits ne sont pas admissibles au regard de votre qualification.
Nous vous rappelons que par courrier en date du 23 octobre 2009, nous vous avons adressé un courrier d'avertissement pour des manquements graves à votre contrat de travail.
De plus, le 8 mars 2011, nous vous avons adressé un autre courrier pour manquement à la discipline de l'entreprise.
Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien, n'ont pas permis de modifier notre appréciation des faits et montrent que vous refusez de vous plier à la discipline de l'entreprise. En conséquence, nous entendons procéder à votre licenciement...... "

L'employeur a évalué à 137 heures la durée d'exécution des travaux confiés à Monsieur X...à l'occasion de la réalisation d'un mur rideaux de 55 m ². Toutefois, cette évaluation repose sur la base d'un temps de pose théorique de 2 heures 30 le m ² selon une " fiche d'exploitation " établie le 25 février 2011 par Monsieur Y..., responsable du chantier de l'école Jacques Brel de COURCOURONNES.
Rien ne permet de conclure que cette fiche interne, non signée, ait été communiquée à Monsieur X...et que le responsable du chantier ait fixé au salarié des délais impératifs d'exécution.
Aucun décompte du temps consacré par Monsieur X...de manière exclusive à la réalisation de l'ouvrage n'a été fourni par l'employeur alors que le salarié soutient sans être contredit qu'il travaillait en équipe avec des menuisiers dont il n'était pas le supérieur hiérarchique. Au cours de la même période, il n'est pas contesté que le salarié a été affecté sur un chantier extérieur et remplacé sur le site de COURCOURONNES par un menuisier intérimaire tel qu'il en résulte de l'attestation d'un collègue Monsieur A.... Les rapports de chantier sont difficilement exploitables s'agissant de copies partiellement reproduites et d'un simple planning de pose durant la semaine 12 susceptible de modifications. Les deux attestations établies par Monsieur B..., collègue de travail, n'ont pas été retenues au regard des versions divergentes rapportées par le témoin.
Il s'ensuit que la société MAP ne justifie ni de la réalité du dépassement du délai d'exécution ni des malfaçons en lien avec d'éventuels manquements imputables à Monsieur X...s'agissant d'un chantier de longue durée (février-avril 2011).
Les griefs ne sont donc justifiés ni dans leur matérialité ni dans leur gravité à l'encontre de Monsieur X....
Enfin, selon le principe " non bis in idem ", une même faute ne peut pas faire l'objet de deux sanctions successives. La société MAP n'est donc pas fondée à invoquer à l'appui du licenciement les faits visés dans les précédents avertissements du 23 octobre 2009 et du 8 mars 2011 qui constituent déjà des mesures disciplinaires.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement de monsieur X...était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes d'indemnisation,

En application de l'article L 1235-3 du code du travail, une indemnité de six mois au moins de salaire est allouée au salarié en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle est fixée au regard de l'ancienneté, du montant salaire, de l'âge, de la reprise ou non d'un emploi.
Monsieur X...était âgé de 42 ans lors du licenciement et justifiait d'une ancienneté de 14 ans. Il percevait un salaire moyen de l'ordre de 2 073 euros brut par mois.
Il indique avoir retrouvé un emploi moins bien rémunéré sur la base de 1 600 euros par mois, avoir vendu sa maison faute de revenus lui permettant de régler son prêt immobilier. Il fait valoir que son épouse a dû reprendre un travail en 2X8 et qu'il ne peut plus occuper un emploi nécessitant des grands déplacements en raison de ses charges familiales.

Au vu de ces éléments, il convient de fixer, dans la limite de la demande, à la somme de 25 000 euros net l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L 1235-3 du code du travail.
Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société MAP à payer à Monsieur X...la somme de 1 500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Il convient d'y ajouter en cause d'appel la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande d'indemnité présentée par la société MAP partie perdante sera rejetée.

Les conditions d'application de l'article L 1235-4 du code du travail étant réunies, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage payées au salarié du jour de son licenciement et ce à concurrence de six mois

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant, publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris SAUF en ce qu'il a condamné la société Miroiterie-Aluminium-PVC à payer à Monsieur X...la somme de 13 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Statuant de nouveau du chef et y ajoutant,

CONDAMNE la société Miroiterie-Aluminium-PVC à payer à Monsieur X...:
- la somme de 25 000 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêt au taux légal à compter de l'arrêt,
- la somme de 2 000 euros en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

ORDONNE le remboursement par la société Miroiterie-Aluminium-PVC à payer à Monsieur X...aux organismes intéressés comme Pole Emploi les ayant servies, des indemnités de chômage versées au salarié au jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage.

DEBOUTE la société Miroiterie-Aluminium-PVC à payer à Monsieur X...de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la société Miroiterie-Aluminium-PVC à payer à Monsieur X...aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODINAnne JOUANARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02013
Date de la décision : 14/10/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-10-14;12.02013 ?
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