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27/05/2014 | FRANCE | N°12/00457

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 27 mai 2014, 12/00457


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N al/ jc Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00457. Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 02 Février 2012, enregistrée sous le no 11/ 00239

ARRÊT DU 27 Mai 2014
APPELANTE :
Madame Marie-Joëlle X... épouse Y...
...49070 BEAUCOUZE représentée par Maître André FOLLEN, avocats au barreau d'ANGERS

INTIMEE : Madame Khatouna Z...

...49100 ANGERS comparante, assistée de Monsieur Nicolas A..., délégué syndical


COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civil...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N al/ jc Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00457. Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 02 Février 2012, enregistrée sous le no 11/ 00239

ARRÊT DU 27 Mai 2014
APPELANTE :
Madame Marie-Joëlle X... épouse Y...
...49070 BEAUCOUZE représentée par Maître André FOLLEN, avocats au barreau d'ANGERS

INTIMEE : Madame Khatouna Z...

...49100 ANGERS comparante, assistée de Monsieur Nicolas A..., délégué syndical

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Février 2014 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne LEPRIEUR, conseiller chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne LEPRIEUR, conseiller Monsieur Paul CHAUMONT, conseiller Greffier lors des plaidoiries : Madame LE GALL, greffier. Greffier lors du prononcé : Madame BODIN, greffier. ARRÊT : prononcé le 27 Mai 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCEDURE
Mme Marie-Joëlle Y... a engagé en qualité de femme de ménage Mme Khatuna Z... selon contrat à durée indéterminée du 9 janvier 2008 afin de faire le ménage d'une maison d'habitation et de bureaux situés respectivement à Beaucouzé (49) et Angers (49). Il était prévu un horaire de travail hebdomadaire de 16 heures ainsi que le paiement des salaires et charges par le moyen du chèque emploi service. Les relations entre les parties étaient régies par la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999. Par lettre datée du 6 janvier 2011, la salariée a pris acte de la rupture en les termes suivants : " je romps le contrat de travail qui nous lie, à vos torts et griefs pour les raisons suivantes : non-respect du contrat de travail : ne sont respectés ni le lieu de travail, ni les heures ni les nombre d'heures, changés sans aucun délai de prévenance, malgré mes demandes réitérées de respecter mes droits. (...) "

La salariée a saisi la juridiction prud'homale le 16 mars 2011. Par jugement du 2 février 2012, le conseil de prud'hommes d'Angers a jugé que la prise d'acte devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une part, faute d'un accord conclu entre les parties sur la modification du nombre d'heures et des jours travaillés et, d'autre part, en raison de ce que les prestations effectuées sur des chantiers de la société ne correspondaient pas aux prévisions contractuelles. Il a condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes : *4 800 ¿ de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; * 500 ¿ de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure ; * 1 597, 18 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis ; * 327, 28 ¿ à titre d'indemnité légale de licenciement ; * 2 593, 59 ¿ de rappel de salaires pour la période du 9 janvier 2008 au 6 janvier 2011 sur la base d'un horaire hebdomadaire contractuel de 16 heures ; * 1 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; * 2 000 ¿ de dommages-intérêts pour préjudice moral. Les premiers juges ont en outre ordonné l'exécution provisoire par application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile " en la subordonnant à la constitution d'une garantie fixée à 4 000 ¿ qui sera versée à la Caisse des dépôts et consignations " et condamné l'employeur aux entiers dépens qui " comprendront les éventuels frais d'huissier pour l'exécution ". L'employeur a régulièrement interjeté appel.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES L'employeur, dans ses conclusions parvenues au greffe le 13 septembre 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, sollicite l'infirmation du jugement, le débouté de la salariée de toutes ses demandes et sa condamnation à lui payer la somme de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, il indique que la salariée ne s'est pas toujours montrée ponctuelle et assidue et qu'elle était rémunérée sur la base des heures qu'elle indiquait avoir faites, sans aucune espèce de vérification ou de contestation. En début d'année 2009, la salariée ayant indiqué avoir trouvé un autre travail le jeudi et ne plus souhaiter travailler chez Mme Y... ce jour-là, son planning de travail a été modifié et son horaire hebdomadaire ramené à 14 heures. Ses absences se sont faites plus fréquentes au cours de l'année 2010. A compter du mois de décembre 2010, elle n'est plus venue travailler.
Il fait ainsi valoir que la salariée n'a jamais été empêchée de venir travailler conformément à l'horaire hebdomadaire contractuel, que le changement intervenu en 2009 concernant une nouvelle durée de travail et une nouvelle répartition de l'horaire de travail au sein de la semaine a été fait sur sa demande et a fait l'objet d'un accord entre les parties. La convention collective prévoit la possibilité d'horaires irréguliers. C'est à la salariée d'apporter la preuve de ce que son employeur l'a empêchée de venir travailler. Si la salariée a effectué à 2 ou 3 reprises quelques heures sur des chantiers traités par l'entreprise de son employeur, le travail lui étant demandé était conforme aux prévisions du contrat. Elle a bénéficié de congés payés réguliers dont les dates étaient connues à l'avance puisqu'elles correspondaient aux périodes de fermeture du magasin. La salariée ne rapportant pas la preuve qui lui incombe de manquements graves de son employeur, elle doit être déboutée de toutes ses prétentions. A titre infiniment subsidiaire, les décomptes de rappels de salaires établis par la salariée sont erronés puisqu'elle ne tient pas compte de ses arrêts de travail pour maladie ni des jours fériés. La différence entre ce qui lui a été réglé et ce à quoi elle aurait eu droit serait de 617, 21 ¿ en retenant un horaire contractuel de 16 heures puis de 14 heures à compter de janvier 2009, et de 2 593, 59 ¿ si la cour devait retenir une base de 16 heures hebdomadaires pour l'ensemble de la période. Aucune indemnité de procédure n'est due en tout état de cause en cas de prise d'acte de la rupture. La salariée ne justifie par ailleurs nullement de l'existence d'un préjudice moral. La salariée, dans ses conclusions parvenues au greffe le 20 décembre 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, sollicite la confirmation du jugement en ce qui concerne les indemnités de rupture, les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et licenciement irrégulier, ainsi que les frais irrépétibles de première instance. Formant appel incident des autres chefs, elle sollicite la condamnation de Mme Y... à lui verser les sommes suivantes : * 5 151, 59 ¿ de rappel de salaires brut et 515, 20 ¿ de congés payés afférents ; * 4 000 ¿ de dommages-intérêts au titre du préjudice moral et des préjudices causés par les inexécutions fautives de l'employeur ; * 2 000 ¿ au titre des frais irrépétibles d'appel. Elle soutient avoir subi des changements d'horaires soudains et fréquents, été contrainte de travailler le lundi, contrairement aux prévisions du contrat de travail, et d'accomplir des tâches chez des clients de l'entreprise, ce qui sort du cadre autorisé par le chèque emploi service. Ses droits en matière de congés payés ont été méconnus, puisqu'elle n'a jamais bénéficié de 5 semaines de congés par an. Surtout, bien qu'en permanence à la disposition de son employeur, il ne lui a pas été fourni du travail à hauteur des 16 heures contractuellement convenues. Elle n'a pas donné son accord à la modification de son contrat de travail, lequel comportait des horaires réguliers, l'employeur ayant décidé unilatéralement de réduire le nombre d'heures de travail et de modifier son planning. Ainsi, la prise d'acte de son contrat reposant sur des fautes de l'employeur, elle doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il lui est dû un rappel de salaires à hauteur de 5 151, 59 ¿ et 515, 20 ¿ de congés payés afférents, puisqu'il n'y a pas lieu de déduire les périodes de congés ou d'absences non démontrées, périodes durant lesquelles en réalité l'employeur n'a pas fourni de travail à la salariée.

MOTIFS DE LA DECISION En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission. Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur et donc, le manquement suffisamment grave de celui-ci empêchant la poursuite du contrat de travail. A titre préliminaire, on peut noter que les parties s'accordent pour convenir de ce que toutes les heures travaillées ont été payées. Par ailleurs, il n'est justifié d'aucune réclamation de la salariée vis-à-vis de son employeur pour quelque cause que ce soit, durant toute la période d'exécution du contrat de travail.

S'agissant des congés, ceux-ci étaient rémunérés, le salaire convenu étant majoré de 10 % au titre des congés. La salariée fait valoir " ne pas avoir eu ses propres dates de congés ", " raison pour laquelle elle affirme ne pas avoir bénéficié de périodes de congés de son propre chef ". L'employeur fait valoir qu'il prenait cinq semaines de congés par an à des dates fixées à l'avance puisque correspondant aux dates de fermeture de son magasin et qu'ainsi, la salariée était en congés à ces dates (cf. en ce sens l'attestation de Mme B..., pièce no 10 de l'employeur). Selon l'article 16 de la convention collective applicable, " sauf accord entre les parties, la date de départ en congé est fixée par l'employeur, avec un délai suffisamment long (2 mois au minimum) précisé dans le contrat de travail, pour permettre au salarié l'organisation de ses vacances ". Aucun manquement précis à ce délai de prévenance n'est articulé et encore moins établi. Aucune pièce probante de nature à établir un manquement de l'employeur à ses obligations en matière de congés n'est produite. Sur la fourniture du travail, s'il est constant que la salariée n'a pas accompli chaque mois le nombre d'heures convenu, alors même que son contrat ne prévoyait pas des horaires irréguliers, là encore l'intéressée ne produit strictement aucune pièce de nature à établir que l'employeur ne lui a pas fourni de travail à hauteur de l'horaire hebdomadaire et a donc manqué à ses obligations. Au contraire, l'employeur produit une attestation (sa pièce no 10) selon laquelle Mme Z... " faisait les heures qu'elle voulait ", était fréquemment absente, surtout en 2010, faisant répondre aux appels téléphoniques de son employeur qu'elle était souffrante ou fatiguée. Il n'est pas établi un manquement de l'employeur à son obligation de fourniture de travail. Sur la modification du contrat de travail, consistant à passer d'un horaire de 16 heures à 14 heures à compter de janvier 2009, la réalité de ladite modification est acquise. La salariée ne prouve nullement que cette modification lui a été imposée. En tout état de cause, les horaires successivement établis établissent l'existence de discussions puis d'un accord verbal sur la modification de l'horaire. Sur la modification du lieu de travail, la salariée ne fournit aucune pièce de nature à établir son refus d'un changement occasionnel de lieu de travail. Elle n'indique pas à combien de reprises elle aurait été amenée à travailler sur des chantiers pour le compte de l'entreprise gérée par Mme Y..., se bornant à produire deux relevés d'heures (ses pièces 6 et 7) qui seraient afférents à de telles tâches. Elle ne conteste pas les allégations de son employeur selon lesquelles elle avait été conduite sur les chantiers dont il s'agit. Elle ne précise pas où se situaient ces lieux de travail. En cet état, la réalité d'un manquement de l'employeur à ses obligations envers la salariée n'est pas plus établi, étant noté que l'éventuel manquement de l'intéressé à ses obligations vis-à-vis de l'URSSAF ou des services fiscaux est sans incidence en ce qui concerne la présente instance.

Sur la modification de la répartition des heures de travail, il s'avère en réalité que deux plannings ont été successivement convenus, plannings prévoyant les jours et heures travaillés, le premier pour 16 heures hebdomadaires (pièce no 1 de l'appelante) et le second pour 14 heures (pièce no 2 de l'appelante), ce dernier prévoyant des heures de travail le lundi. Aucune pièce de nature à établir que l'employeur aurait modifié les jours de travail sans respect d'un délai de prévenance n'est produite. Il n'est même à cet égard articulé aucun fait précis et circonstancié. En conséquence, force est de constater que la salariée ne rapporte aucunement la preuve des manquements qu'elle invoque, se bornant à de simples allégations. Dans ces conditions, elle sera purement et simplement déboutée de toutes ses demandes, par voie d'infirmation du jugement.

PAR CES MOTIFS, La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Mme Marie-Joëlle Y... de sa demande formée au titre des frais irrépétibles ; Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ; Dit que la prise d'acte, le 6 janvier 2011, par Mme Khatuna Z... de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'une démission ; Déboute Mme Khatuna Z... de toutes ses demandes ; Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ; Condamne Mme Khatuna Z... aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
V. BODINCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00457
Date de la décision : 27/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-05-27;12.00457 ?
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