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20/05/2014 | FRANCE | N°12/01414

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 20 mai 2014, 12/01414


COUR D'APPEL d'ANGERSChambre Sociale
ARRÊT N clm/jc Numéro d'inscription au répertoire général : 12/01414.Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 06 Juin 2012, enregistrée sous le no 21 920
ARRÊT DU 20 Mai 2014
APPELANTE :
LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE 178 avenue Bollée72033 LE MANS CEDEX 9représentée par Madame Emilie X..., munie d'un pouvoir
INTIMEE : LA SAS FPEE INDUSTRIESZone Industrielle de la Champagne Route Sillé72350 BRULONreprésentée par Maître Damien HOMBOURGER,

avocat au barreau de CHATEAUROUX - No du dossier 36560
COMPOSITION DE LA COUR :
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COUR D'APPEL d'ANGERSChambre Sociale
ARRÊT N clm/jc Numéro d'inscription au répertoire général : 12/01414.Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 06 Juin 2012, enregistrée sous le no 21 920
ARRÊT DU 20 Mai 2014
APPELANTE :
LA CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE 178 avenue Bollée72033 LE MANS CEDEX 9représentée par Madame Emilie X..., munie d'un pouvoir
INTIMEE : LA SAS FPEE INDUSTRIESZone Industrielle de la Champagne Route Sillé72350 BRULONreprésentée par Maître Damien HOMBOURGER, avocat au barreau de CHATEAUROUX - No du dossier 36560
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2014 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne LEPRIEUR , conseiller Monsieur Paul CHAUMONT, conseillerGreffier : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 20 Mai 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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FAITS ET PROCÉDURE : Le 18 décembre 2010, M. Pascal Z..., salarié de la société FPEE Industries en qualité de soudeur, a établi une déclaration de maladie professionnelle afférente à cinq pathologies, à savoir : un syndrome du canal carpien droit, une compression cubitale droite (GEO droite), une épicondylite droite (coude), une tendinite du sus-épineux droit (épaule douloureuse), une NCB droite avec paresthésies C7-C8. Cette déclaration de maladie professionnelle, réceptionnée par la Caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe (ci-après : la CPAM de la Sarthe ou la caisse) le 18 janvier 2011, était accompagnée d'un certificat médical initial établi le 5 novembre 2010 par le Dr Bernard Y..., diagnostiquant : "une NCB droite avec paresthésies C7-C8, tendinopathie du sus-épineux D, épicondylite D + compression du canal carpien et du cubital Droites". Il ne fait pas débat que la pathologie dite "NCB droite avec paresthésies C7-C8" a donné lieu à une décision de refus de prise en charge de la part de la CPAM de la Sarthe et que la pathologie dite GEO (syndrome de la gouttière épitrochléo-olécrânienne) a fait l'objet d'une instruction différente en ce que l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles a été sollicité.La société FPEE Industries reconnaît avoir reçu, par pli recommandé du 15 février 2011 dont elle a accusé réception le 17 février suivant, un courrier de la CPAM de la Sarthe lui transmettant la copie de la déclaration de maladie professionnelle souscrite le 18 décembre 2010 par M. Pascal Z... "au titre du dossier relatif à l'épicondylite droite". Le 16 mars 2011, elle a renseigné un imprimé de la caisse, daté du 15 février 2011, dit "questionnaire activité professionnelle pluri-pathologies" qu'elle a retourné à l'organisme social accompagné d'un rapport complémentaire dit "descriptif de postes de travail".Après avoir eu recours au délai complémentaire d'instruction, par courriers séparés du 27 avril 2011 relatifs, notamment, à la tendinite du sus-épineux droit et au syndrome du canal carpien droit, la CPAM de la Sarthe a fait parvenir à l'employeur des avis de clôture de l'instruction en lui précisant qu'avant la prise de décision relatif au caractère professionnel de chacune des maladies concernées qui interviendrait le 17 mai 2011, il pouvait venir consulter les pièces constitutives du dossier.
Le 17 mai 2011, la société FPEE Industries a adressé à la caisse un courrier recommandé ayant pour objet de lui apporter un "complément d'information". Par trois courriers séparés du 17 mai 2011, la CPAM de la Sarthe a notifié à l'employeur les décisions de reconnaissance du caractère professionnel de l'épicondylite droite, de la tendinite du sus-épineux droit (épaule douloureuse) et du syndrome du canal carpien droit. Le 13 juillet 2011, la société FPEE Industries a saisi la commission de recours amiable de la CPAM de la Sarthe d'une contestation contre la décision de prise en charge de la tendinite du sus-épineux droit au titre de la législation professionnelle.
En l'absence de décision explicite de cette commission, par lettre recommandée postée le 18 octobre 2011, elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans d'une demande tendant à ce que la décision de prise en charge lui soit déclarée inopposable. Par jugement du 6 juin 2012 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le tribunal a reçu la société FPEE Industries en son recours et lui a déclaré inopposable la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la pathologie de l'épaule douloureuse droite (tendinite du sus-épineux droit) déclarée par M. Pascal Z... le 18 décembre 2010 et ce, au motif que la CPAM de la Sarthe ne justifiait pas avoir adressé à l'employeur la copie de la déclaration de maladie professionnelle concernant cette pathologie. La CPAM de la Sarthe a régulièrement relevé appel de cette décision.Les parties ont été convoquées à l'audience du 19 septembre 2013 lors de laquelle l'affaire a été renvoyée au 11 mars 2014 pour permettre à l'intimée de répondre aux écritures de la caisse.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Vu les conclusions et observations orales des parties à l'audience des débats du 11 mars 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés ; Vu les conclusions dites "récapitulatives" enregistrées au greffe le 4 mars 2014, régulièrement communiquées, reprises et complétées oralement à l'audience aux termes desquelles la CPAM de la Sarthe demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de juger opposable à la société FPEE Industries la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la tendinite du sus-épineux droit (épaule douloureuse droite) déclarée par M. Pascal Z... le 18 décembre 2010. Elle soutient que, le 15 février 2011, elle a adressé à la société FPEE Industries un pli recommandé dont cette dernière a accusé réception le 17 février suivant et qui contenait : - la déclaration de maladie professionnelle souscrite par M. Pascal Z... le 18 décembre 2010 globalisant toutes les pathologies déclarées ; - 4 courriers séparés de "transmission de déclaration de maladie professionnelle" informant l'employeur de l'ouverture d'une instruction pour chacune des maladies déclarées suivantes : l'épicondylite droite, la tendinite du sus-épineux droit, le syndrome du canal carpien droit et le GEO droit (syndrome de la gouttière épitrochléo-olécrânienne;- le "questionnaire activité professionnelle pluri-pathologies" relatif aux gestes et postures appelés par le travail du salarié ;- le courrier à l'intention du médecin du travail. Elle fait valoir que:- rien ne lui interdisait de procéder ainsi par un envoi "groupé", ce qu'elle a fait par souci d'économies ; - le respect du principe du contradictoire n'impose pas l'envoi des courriers en recommandé et, s'agissant d'un fait juridique, elle peut en rapporter la preuve par tous moyens, y compris par présomptions, ce qu'elle fait en apportant un faisceau d'indices desquels il découle que la société FPEE Industries a bien reçu la déclaration de maladie professionnelle établie par M. Pascal Z... relative, notamment, à la tendinite du sus-épineux droit et le courrier l'informant de l'ouverture d'une instruction du chef de cette pathologie, étant rappelé que l'instruction des dossiers afférents à toutes les maladies déclarées par M. Pascal Z... a été menée de façon concomitante ; - l'employeur ne peut pas sérieusement soutenir qu'il n'aurait pas eu connaissance de la déclaration de maladie professionnelle relative à la tendinite du sus-épineux alors qu'il a renseigné le questionnaire qu'elle lui a adressé du chef de cette maladie, qu'il lui a même adressé un courrier constitutif d'un "complément d'information" aux termes duquel il fait expressément référence "au dossier relatif aux déclarations de maladies professionnelles effectuées par Monsieur Z..." et fait des observations distinctes du chef des différents maladies déclarées par le salarié, notamment, au titre de la tendinite du sus-épineux droit, formulation mentionnée dans le courrier de transmission de la caisse et qu'il reprend expressément à son compte ; - il n'est pas crédible qu'une entreprise de l'importance de la société FPEE ait pu accepter de renseigner le questionnaire relatif aux gestes de travail sans avoir pris connaissance de la déclaration de maladie professionnelle établie par son salarié.
Au second moyen, la caisse oppose que la pathologie déclarée par M. Pascal Z... correspond bien à la maladie professionnelle "épaule douloureuse" inscrite au tableau no 57 des maladies professionnelles et que toutes les conditions posées par ce tableau sont réunies, y compris celle relative à l'exposition au risque, le rapport de l'employeur et les réponses apportées par le salarié mettant en évidence que les gestes effectués dans le cadre du travail sollicitent "l'ensemble des bras" et induisent des mouvements répétés de l'épaule.
Vu les conclusions dites "No 2" enregistrées au greffe le 11 mars 2014, régulièrement communiquées et reprises oralement à l'audience aux termes desquelles la société FPEE Industries demande à la cour de débouter la CPAM de Maine et Loire de son appel et de ses prétentions, et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions. Elle soutient que la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la tendinite du sus-épineux déclarée par M. Pascal Z... doit lui être déclarée inopposable, à titre principal, parce que la CPAM de la Sarthe a violé son obligation d'information et de respect du contradictoire en ne lui transmettant pas la déclaration de maladie professionnelle au titre de cette pathologie, à titre subsidiaire, parce que les conditions du tableau no 57 A ne sont pas toutes remplies, la condition relative à l'exposition au risque faisant défaut. Sur le premier point, l'intimée indique qu'elle ne conteste pas avoir réceptionné, sous pli recommandé du 15 février 2011, la déclaration de maladie professionnelle établie par M. Pascal Z... le 18 décembre 2010 "pour le dossier relatif à l'épicondylite", mais elle fait valoir qu'elle ne l'a pas reçue pour les autres "dossiers concernés", à savoir, la tendinite du sus-épineux (épaule douloureuse), le syndrome du canal carpien et le syndrome de la GEO alors qu'il incombe à la caisse de rapporter la preuve qu'elle a bien transmis spontanément à l'employeur la déclaration de maladie professionnelle pour chacune des maladies déclarées, l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ne prévoyant pas d'envoi groupé en cas de pathologies multiples. Elle conteste d'ailleurs que la CPAM de la Sarthe ait procédé à l'envoi groupé dont elle se prévaut.S'agissant de la tendinite du sus-épineux, elle admet qu'il est constant que la CPAM de la Sarthe a mis en oeuvre une instruction afin d'apprécier le caractère professionnel de cette pathologie en lui adressant, par lettre simple datée 15 février 2011, une demande de renseignements comportant un questionnaire mais elle considère que la caisse devait également lui transmettre, au titre de cette pathologie, un double de la déclaration de maladie professionnelle établie par le salarié le 18 décembre 2010.Elle ajoute que, si la caisse verse aux débats des courriers de "transmission d'une déclaration de maladie professionnelle" pour chacune des pathologies déclarées par le salarié, elle ne rapporte pas la preuve de leur envoi, et encore moins celle de leur réception par ses soins, en ce qui concerne les maladies autres que l'épicondylite droite, et elle oppose que les copies d'écran informatique ne sont pas susceptibles d'en justifier. Elle dénie qu'il puisse se déduire de son courrier du 11 mai 2011 qu'elle a bien reçu la déclaration de maladie professionnelle pour la tendinite du sus-épineux arguant de ce que c'est seulement par référence au "questionnaire pluri-pathologies" auquel elle a répondu qu'elle a elle-même mentionné cette maladie dans son complément d'information. L'employeur conteste que M. Pascal Z... ait accompli de façon habituelle des mouvements forcés de l'épaule et il soutient que la durée quotidienne et la fréquence d'accomplissement de mouvements d'antépulsion et de mouvements de l'épaule au-delà du plan sagittal ne permettent pas de caractériser des mouvements répétés tels que requis par le tableau no 57 A. Il conclut que la caisse ne pouvait donc pas prendre en charge la maladie litigieuse au titre de la législation professionnelle sans recueillir l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, ce qu'elle n'a pas fait.
MOTIFS DE LA DÉCISION : 1) Sur la recevabilité du recours de la société PFEE :Attendu que la recevabilité du recours formé par la société FPEE Industries devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la CPAM de la Sarthe n'est pas discutée en cause d'appel ; que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef, ce recours ayant été diligenté dans le respect des forme et délai requis par la loi ;
2) Sur la demande d'inopposabilité de la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la tendinite du sus épineux : - sur le respect de l'obligation édictée par l'article R. 441-11 II du code de la sécurité sociale :
Attendu que l'article R. 441-11 II du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret no 2009-938 du 29 juillet 2009 dispose : "La victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle. Un double est envoyé par la caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail." ; Attendu que le défaut de transmission par la caisse à l'employeur du double de la déclaration de maladie professionnelle établie par le salarié est sanctionné par l'inopposabilité de sa décision de prise en charge à l'employeur ;Attendu qu'en l'espèce, de même que le médecin traitant de M. Pascal Z... a, le 5 novembre 2010, établi un seul certificat médical du chef des cinq maladies diagnostiquées chez ce patient, le salarié a, le 18 décembre 2010, établi une seule déclaration de maladie professionnelle du chef de ces cinq maladies parmi lesquelles est expressément mentionnée une tendinite du sus épineux droit ; Attendu que la société FPEE Industries reconnaît que la CPAM de la Sarthe lui a envoyé cette déclaration de maladie professionnelle par pli recommandé contenant également une lettre datée du 15 février 2011 portant en "objet" : "Transmission d'une déclaration de maladie professionnelle" et l'informant d'une instruction en cours au titre de l'épicondylite droite (coude) ; qu'il est constant que l'employeur a accusé réception de ce pli le 17 février 2011, l'avis de réception étant versé aux débats par la caisse ;Que cette dernière soutient que ce pli contenait également trois autres lettres datées du 15 février 2011, qu'elle verse aux débats et qui apparaissent sur ses captures d'écrans informatiques, portant en "objet" : "Transmission d'une déclaration de maladie professionnelle", la première, relative à la tendinite du sus-épineux droit, la deuxième, relative au syndrome du canal carpien droit et la troisième, à la pathologie dite "GEO" droite, chacune informant l'employeur d'une instruction en cours au titre de la maladie considérée ; que l'intimée conteste avoir été destinataire de ces trois courriers, notamment, de celui relatif à la tendinite du sus-épineux droit ; Attendu que la société FPEE Industries reconnaît également avoir été destinataire d'un courrier qu'elle verse elle-même aux débats (sa pièce no 1), établi par la CPAM de la Sarthe le 15 février 2011, portant en objet "Demande de renseignements sur une maladie professionnelle" et l'invitant, en ces termes, à lui retourner le "questionnaire activité professionnelle pluri-pathologies - employeur" joint à ce courrier: "Afin d'instruire le dossier de maladie professionnelle concernant Monsieur PASCAL Z..., salarié(e) de votre entreprise, des éléments complémentaires sont nécessaires sur le travail effectué et l'origine éventuelle de la maladie (tendinite sus épineux droit). Aussi, je vous invite à me retourner dès que possible un rapport (cf documents explicatifs en annexe) décrivant les postes de travail successivement tenus par votre salarié(e) et permettant d'apprécier les risques d'exposition." ;
Attendu que l'employeur a :- d'une part, renseigné ce questionnaire comportant, outre la fiche dite "identification de la victime", quatre fiches concernant et identifiant expressément chacune des quatre maladies objet de l'instruction, à savoir, la première : "l'épaule douloureuse simple (tendinopathie de la coiffe des rotateurs) Epaule enraidie succédant à une épaule douloureuse rebelle tableau no 57 A", la deuxième : "coude (syndrome de la gouttière épitrochléo olécrânienne) tableau no 57 B", la troisième : "main - poignet (syndrome du canal carpien) tableau no 57 C" et la quatrième : "coude (épicondylite) tableau no 57 B" ; - d'autre part, assorti ce questionnaire d'un rapport dactylographié, illustré de photographies, établi le 16 mars 2011 par son animateur santé / sécurité ; Attendu qu'après avoir reçu les avis de clôture du 27 avril 2011 l'informant de ce que les décisions interviendraient le 17 mai suivant, la société FPEE Industries a adressé à la caisse un courrier recommandé du 11 mai 2011 intitulé "complément d'information", débutant en ces termes : "Nous revenons vers vous suite à l'envoi du questionnaire "Activité professionnelle Employeur" ainsi que le rapport établi par notre animateur santé/ sécurité sur les postures de travail qui vous ont été envoyés le 16 mars 2011 dans le dossier relatif aux déclarations de maladies professionnelles effectuées par Monsieur Z.... Nous attirons votre attention sur quelques points qui apparaissent essentiels dans l'instruction par vos soins du dossier de Monsieur Z...." et suivent des développements sur trois pages dont le point a) est consacré à la question de "la répétitivité des gestes au titre de la pathologie "tendinite du sus épineux droit", l'employeur soutenant que le "risque lésionnel est absent" ; Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, tout d'abord, que la société FPEE Industries a bien été destinataire de la part de la CPAM de la Sarthe, le 17 février 2011, d'une copie de la déclaration de maladie professionnelle établie le 18 décembre 2010 par M. Pascal Z... ; qu'ainsi, la caisse a satisfait à l'obligation telle que strictement mise à sa charge par le texte susvisé et ce, à supposer même que le pli recommandé du 15 février 2011 n'ait pas contenu les trois autres courriers dits de "Transmission d'une déclaration de maladie professionnelle" afférents à la tendinite du sus-épineux droit, au syndrome du canal carpien droit et à la pathologie dite "GEO" droite, aucune disposition n'imposant à l'organisme social, à peine d'inopposabilité de sa décision, d'accompagner la transmission de la déclaration de maladie professionnelle d'un courrier répondant à un formalisme particulier ; que, de même, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, aucune disposition n'impose à la caisse d'adresser à l'employeur la copie de la déclaration de maladie professionnelle en autant d'exemplaires que de maladies déclarées ; Attendu qu'en second lieu, il apparaît que, comme elle le reconnaît elle-même, la société FPEE Industries n'a pas pu se méprendre sur la mise en oeuvre par la caisse d'une instruction relative, notamment, à la tendinite du sus épineux droit, puisqu'elle a été destinataire, de ce chef particulier, d'un courrier du 15 février 2011 répondant aux prévisions du III de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret no 2009-938 du 29 juillet 2009, étant observé qu'il est indifférent à la solution du litige que ce courrier ait pu être inclus dans le pli recommandé dont elle a accusé réception le 17 février 2011 ou qu'il ait fait l'objet d'un envoi distinct par lettre simple ; Et attendu que, sans manifester le moindre étonnement ni la moindre interrogation au sujet de la portée du questionnaire "pluri-pathologies" qui lui a été transmis, lequel rappelait la déclaration de maladie professionnelle établie par M. Pascal Z... et sa réception par la caisse le 18 janvier 2011, et dont l'une des fiches était expressément afférente à l'épaule douloureuse simple, l'employeur y a répondu de façon précise et détaillée pour chacune des pathologies en cause en y ajoutant même un rapport illustré de photographies décrivant avec précision la nature du risque auquel était exposé son salarié ; Qu'enfin, les termes très précis et circonstanciés de son courrier du 11 mai 2011 ne laissent aucun doute sur le fait que la société FPEE Industries avait parfaitement compris, d'une part, que son salarié avait déclaré plusieurs maladies ("...le dossier relatif aux déclarations de maladies professionnelles effectuées par Monsieur Z......") parmi lesquelles une tendinite du sus épineux droit, dont il demandait la prise en charge au titre de la législation professionnelle, d'autre part, que l'instruction menée par la CPAM de la Sarthe, à laquelle l'employeur a participé activement, concernait quatre de ces pathologies, dont l'épaule douloureuse droite ; Qu'il suit de là que la CPAM de la Sarthe a satisfait à son obligation de transmettre à la société FPEE Industries une copie de la déclaration de maladie professionnelle établie par M. Pascal Z... le 18 décembre 2010 et à son obligation d'information à son égard s'agissant de la tendinite du sus épineux droit, étant observé que l'intimée reconnaît avoir reçu au sujet de cette maladie l'avis de clôture, qu'elle verse elle-même aux débats, et ne conteste pas avoir disposé du délai de dix jours francs prévu par l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret no 2009-938 du 29 juillet 2009 pour prendre connaissance du dossier et faire valoir ses observations ; - sur le respect des conditions du tableau no 57 A des maladies professionnelles:Attendu que, dans sa rédaction applicable à la l'espèce, le tableau 57 A des maladies professionnelles, relatif à l'épaule douloureuse simple (tendinopathie de la coiffe des rotateurs) fixe un délai de prise en charge de sept jours et vise des "travaux comportant habituellement des mouvements répétés ou forcés de l'épaule" ;
Attendu que l'employeur ne conteste ni que la pathologie diagnostiquée chez M. Pascal Z... correspond bien à la maladie du tableau no 57 A "épaule douloureuse simple", ni que le délai de prise en charge de sept jours a été respecté ;que seule est discutée la troisième condition du tableau relative à l'exposition au risque ; Attendu que la société FPEE Industries a pour activité la fabrication de menuiseries (volets, fenêtres, portes d'entrée, portails) en PVC et aluminium ; que M. Pascal Z... y travaille depuis le mois de novembre 1988 et a été affecté, d'abord au poste "pose de vitrages", puis, depuis mai 1991, au poste soudeur opérateur machine; que la durée hebdomadaire de travail est de 36 heures, selon un rythme en 2x8, avec des horaires de 5 h à 12 h 30 (équipe du matin) et de 12h30 à 20h15 (équipe de l'après-midi du lundi au jeudi avec une pause de 15 minutes et des horaires de 5 h à 12h15 et de 12h à 18h30 le vendredi avec une pause de 15 minutes ; Attendu qu'il résulte du rapport établi par l'employeur qu'à ce poste de soudeur, M. Pascal Z... alterne les tâches suivantes : 1) - approvisionnement des soudeuses en profilés, 2) - approvisionnement de la chaîne en dormants avec seuils en aluminium, 3) - changement des cales des soudeuses ; Qu'il ressort du descriptif des tâches fourni tant par l'employeur que par le salarié qu'au poste : "approvisionnement des soudeuses en profilés", ce dernier :- doit d'abord manutentionner un chariot d'1,80 mètre de hauteur chargé de profilés ("habituellement difficile à manutentionner" indique l'employeur), dont le poids (non précisé) varie en fonction de son chargement, ce qui implique une saisie en force par la main ;- pousse ensuite ce chariot jusqu'aux deux soudeuses qu'il va alimenter, une soudeuse "ouvrants", une soudeuse "dormants" ;- alimente les soudeuses selon le processus suivant : pour un dormant par exemple, il prend sur le chariot les profilés indiqués par un ordinateur en réseau : d'abord le profilé gauche qu'il insère dans la machine, puis, pour valider la pose, il appuie sur un bouton qui insère des contre-cales, ensuite il prend sur le chariot les profilés du bas et du haut, les insère dans la machine, appuie sur le bouton, puis il prend le profilé droit l'insère appuie sur le bouton ; la machine procède seule au soudage ;
- pendant que la machine procède automatiquement au soudage, le salarié alimente la seconde soudeuse selon le même procédé et ainsi de suite, la menuiserie soudée passant de manière automatisée sur un tapis pour être acheminée à l'étape suivante ; Que, selon le rapport de l'employeur lui-même, M. Pascal Z... soude par jour 120 à 150 dormants et 200 à 250 ouvrants soit la manipulation d'au minimum 1280 profilés à la journée, de poids et de tailles différentes (pour les plus grands: 2,80 mètres, environ 6kg), le poids dépendant de la longueur mais aussi de la présence ou non de renforts (poids moyen : 3 à 5 kg) ; que ce poste implique des mouvements de saisie en force avec la main, de pronation du coude (au moment du retournement du profilé long), de flexion et extension des membres supérieurs (au moment de la pose des profilés dans la soudeuse) et de flexion extrême du bras en attente de la pose du profilé suivant que l'opérateur porte ; Attendu qu'au poste : "approvisionnement de la chaîne en seuils", le salarié récupère quelques mètres plus loin les châssis de seuil (grands cadres) stockés sur des chevalets en les hissant et il va les disposer sur le tapis afin qu'ils rejoignent la chaîne dans un ordre imposé par l'ordinateur ; qu'il manipule ainsi journellement 20 à 40 châssis de seuil de taille et de poids variables (poids moyen : 5 à 6 kg, poids maximum : 7kg selon l'employeur), ce poste impliquant, pour saisir les châssis, des mouvements de légère rétropulsion et élévation des épaules avec abduction des membres supérieurs et saisie en force des deux mains et, lors de la pose du châssis sur le tapis, des mouvements d'extension des membres supérieurs avec le dos légèrement courbé ;Attendu que le "changement des cales des soudeuses" est un travail réalisé à chaque changement de gammes de profilés, soit 2 à 6 fois par jour pendant une durée de 15 minutes, une cale pesant environ 3 kg ; que ce travail, également accompli en station debout, tête penchée vers le bas et dos légèrement courbé implique la réalisation de mouvements de flexion-extension des poignets et, coude à la hauteur des épaules, des mouvements d'abduction et de flexion du membre supérieur droit, une action de saisie en force lors de la mise en place des cales et une action de serrage de la main droite ;
Attendu qu'il ressort de ces éléments, confortés par les indications concordantes de l'employeur et du salarié sur les fiches qu'il ont renseignées, que les travaux accomplis par ce dernier à son poste de soudeur impliquent ainsi, tour à tour tout au long de la journée de travail, l'accomplissement de mouvements de franchissement du plan sagittal à tout le moins avec le bras droit, des mouvements d'antépulsion à tout le moins du bras droit, des mouvements impliquant de lever les bras vers le haut et de les mettre vers l'arrière, ainsi que des mouvements d'abduction de l'épaule (bras levé de côté), la majeure partie de ces mouvements étant accompagnée du port de charges d'un poids moyen de 5 kg ; attendu que l'existence de mouvements répétés est caractérisée dans la mesure où chacune des tâches du poste de soudeur implique la mobilisation des épaules de sorte que cette mobilisation s'opère pendant toute la journée de travail et ce, à une cadence plus particulièrement importante au cours de l'opération d'approvisionnement des soudeuses en profilés, puisque, selon l'employeur lui-même, le salarié manipule "au minimum" 1280 profilés par jour de travail ; qu'enfin, le poste de soudeur occupé par M. Pascal Z... implique également des travaux comportant habituellement des mouvements forcés de l'épaule, ceux-ci étant particulièrement caractérisés lors de la tâche de manutention des châssis de seuils pour alimenter la chaîne (châssis hissés du chevalet où ils sont entreposés pour les apporter jusqu'à la chaîne), étant rappelé que sont manipulés chaque jour 20 à 40 châssis d'un poids moyen de 6 kg ; Attendu qu'en considération de la nature des travaux accomplis par M. Pascal Z..., de leur durée journalière (7 h environ) et de l'ancienneté du salarié au poste en cause (19 ans au moment de la déclaration de maladie professionnelle), la société FPEE Industries apparaît particulièrement mal fondée à contester la réalité de l'exposition au risque ce qu'elle fait notamment en isolant de manière artificielle chacun des gestes accomplis, en l'occurrence au niveau de l'épaule, alors que ces gestes doivent être appréciés dans leur globalité ; Que, toutes les conditions du tableau no 57 A étant réunies, la présomption d'origine professionnelle édictée par l'article L. 461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale trouve à s'appliquer à la tendinite du sus-épineux droit déclarée le 18 décembre 2010 par M. Pascal Z... et la CPAM de la Sarthe n'avait pas à saisir le CRRMP; Attendu que, les deux moyens étant rejetés, par voie d'infirmation du jugement déféré, il convient de déclarer opposable à la société FPEE Industries la décision de la CPAM de la Sarthe du 17 mai 2011 de reconnaissance du caractère professionnel de la tendinite du sus épineux droit déclarée par M. Pascal Z... le 18 décembre 2010 ;
PAR CES MOTIFS : La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société FPEE Industries recevable en son recours ;L'infirme en toutes ses autres dispositions ;Statuant à nouveau, déclare opposable à la société FPEE Industries la décision de la CPAM de Maine et Loire du 17 mai 2011 emportant reconnaissance du caractère professionnel de la tendinite du sus épineux droit déclarée par M. Pascal Z... le 18 décembre 2010 ; Rappelle que la procédure est sans frais.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODIN Catherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/01414
Date de la décision : 20/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-05-20;12.01414 ?
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