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13/05/2014 | FRANCE | N°12/00165

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 13 mai 2014, 12/00165


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N pc/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00165.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Décembre 2011, enregistrée sous le no F 10/ 01301

ARRÊT DU 13 Mai 2014

APPELANTS :

Monsieur Patrick X......49100 ANGERS

Madame X......49100 ANGERS

comparants, assistés de Maître Stéphane CONTANT, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
Madame Maria de Grace Y...... 49800 TRELAZE

représentée

par Maître BRETON, avocat substituant Maître Henri LOISEAU, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En ap...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N pc/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00165.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Décembre 2011, enregistrée sous le no F 10/ 01301

ARRÊT DU 13 Mai 2014

APPELANTS :

Monsieur Patrick X......49100 ANGERS

Madame X......49100 ANGERS

comparants, assistés de Maître Stéphane CONTANT, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
Madame Maria de Grace Y...... 49800 TRELAZE

représentée par Maître BRETON, avocat substituant Maître Henri LOISEAU, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mars 2014 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Paul CHAUMONT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne LEPRIEUR, conseiller Monsieur Paul CHAUMONT, conseiller

Greffier lors des débats : Madame BODIN, greffier.
ARRÊT : prononcé le 13 Mai 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Y...a été engagée par M. et Mme X...le 1er octobre 2006 en qualité d'employée de maison à raison de trois heures par semaine moyennant paiement d'un salaire mensuel brut de 162, 47 euros.

Elle a été placée en arrêt de travail du 15 septembre au 25 octobre 2009 puis, à compter de cette date, en congé maternité jusqu'au 12 février 2010.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 5 mars 2010, reçue le 10 mars 2010, elle a écrit à M. et Mme X...dans les termes suivants :
" Suite à notre conversation téléphonique du 4 mars 2010 afin de vous signaler ma reprise de travail suite à mon congé maternité, vous m'avez dit que vous ne me repreniez plus étant donné que vous m'avez remplacé, et que vous me donniez congé de mon poste. Sachez que je me suis renseignée de mes droits et selon la loi, vous pouvez me remplacer le temps de mon absence, mais vous ne pouvez pas me licencié. Nous n'avions pas de contrat écrit mais un contrat oral dans lequel j'effectuai un service à la personne une fois par semaine d'une durée de trois heures et ce depuis plusieurs années, ce qui équivaut à un CDI. Donc, aujourd'hui, c'est à vous de prendre vos dispositions, en sachant que si vous ne voulez plus me garder, vous devez engager une procédure de licenciement (...) ".
En réponse, les époux X...lui ont écrit la lettre suivante, datée du 16 mars 2010 : " nous accusons réception de votre courrier du 5 mars 2010. Nous nous étonnons du ton adopté dans ce courrier. Ayant cherché à plusieurs reprises à vous joindre par téléphone sans succès, ce que nous regrettons, nous revenons vers vous par écrit. Il nous paraissait clair d'un côté comme de l'autre que vous mettiez un terme à notre collaboration le 31 juillet 2009. En conséquence, nous avons fait le nécessaire pour trouver une personne qui a pris la suite logique de votre activité. Durant ces derniers mois, vous ne vous êtes manifestée ni verbalement ni par écrit et lors de votre visite amicale du mois de février, vous n'avez nullement évoqué la reprise de votre activité chez nous. Nous sommes donc extrêmement surpris par le revirement de la situation huit mois après votre arrêt définitif et nous nous interrogeons sur vos réelles intentions (...) ".
Mme Y...a saisi le conseil de prud'hommes de Laval en annulation du licenciement et en condamnation de M. et Mme X...à lui payer diverses sommes et à lui remettre les documents sociaux.

Par jugement du 22 décembre 2011, prononcé en dernier ressort, le conseil a :

. Annulé le licenciement de Mme Y...du 4 mars 2010 ;
. Condamné les époux X...à payer à Mme Y...les sommes de :
. 167, 67 ¿ à titre d'indemnité de rupture du contrat de travail ;. 3 090, 73 ¿, somme évaluée à la date du jugement, soit 19 mois multipliés par le salaire de base à titre de préjudice découlant de la nullité du licenciement ;

. Débouté Mme Y...de sa demande en paiement de la somme de 162, 67 ¿ au titre de la réparation de son préjudice découlant de l'irrégularité du licenciement ;

. Condamné les époux X...à délivrer à Mme Y...l'attestation pôle emploi ainsi qu'un certificat de travail ;

. Condamné les époux X...à payer à Mme Y...la somme de 1 200 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

. Condamné les époux X...aux dépens ;
M. et Mme X...ont relevé appel.
Les deux parties ont conclu.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 24 septembre 2013, soutenues oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens et prétentions, les époux X...sollicitent l'infirmation du jugement et demandent à la cour de débouter Mme Y...de ses demandes ainsi que de la condamner à leur payer 3 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir en substance que :
. Leur appel est recevable dès lors que Mme Y...avait saisi le conseil de prud'hommes de demandes indéterminées ;
. Le licenciement n'est pas nul en ce que :
. Le 31 juillet 2009, Mme Y...les a informés qu'elle attendait un enfant et qu'elle n'envisageait pas de reprendre le travail, elle a pris ses congés au mois d'août 2009 puis a été placée en arrêt de travail et en congé maternité sans qu'ils en soient informés ;

. L'initiative de la rupture du contrat de travail a été prise par Mme Y...et non par eux ;

. Cette rupture du contrat de travail doit être qualifiée de démission.
Dans ses dernières écritures, déposées le 17 mars 2014, reprises oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens et prétentions, Mme Y...demande à la cour de :
. Déclarer l'appel de M. et Mme X...irrecevable, le jugement ayant été rendu en dernier ressort ;
. Confirmer le jugement ;
. Condamner les époux X...à lui verser 3 000 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient essentiellement que :
. La rupture du contrat de travail à l'initiative de M. et Mme X...s'analyse en un licenciement qui est nul en raison de son état de grossesse au moment de ladite rupture, en application de l'article L. 1225-4 du code du travail ;
. Elle a droit à une indemnité de rupture qui doit être évaluée à 162, 67 ¿ mais également à une indemnité résultant du caractère illicite du licenciement, au moins égale à celle prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, ainsi qu'à une indemnité pour procédure irrégulière.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'appel :

Attendu que le conseil de prud'hommes ayant statué sur la nullité du licenciement et la remise des documents sociaux, qui sont des demandes indéterminées, sa décision, qu'il a qualifiée à tort de jugement rendu en dernier ressort, est susceptible d'appel en application de l'article 40 du code de procédure civile ;
Que l'appel de M. et Mme X...sera déclaré, en conséquence, recevable ;
Sur le fond :
Attendu que l'article L. 1225-4 du code du travail dispose qu'" aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constatée et pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l'expiration de ces périodes ; Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa " ;
Qu'aux termes de l'article L. 1225-71 " l'inobservation par l'employeur des dispositions des articles L. 1225-1 à L. 1225-28 (...) peut donner lieu à l'attribution de dommages-intérêts au profit du bénéficiaire, en plus de l'indemnité de licenciement. Lorsque, en application du premier alinéa, le licenciement est nul, l'employeur verse le montant du salaire qui aurait été perçu, pendant la période couverte par la nullité " ;

Attendu qu'il résulte des attestations d'emploi du centre national du chèque emploi service universel produits par Mme Y...(ses pièces 1-1 à 1-25) que celle-ci a travaillé au service de M. et Mme X...jusqu'au 31 juillet 2009 ;
Qu'il n'est pas contesté qu'elle a pris ensuite ses congés au mois d'août et qu'elle n'a pas repris le travail avant son arrêt de travail du 15 septembre au 25 octobre 2009 auquel a succédé son congé maternité jusqu'au 12 février 2010 ;
Que, dans le courrier du 5 mars 2010 qu'elle a adressé à ses employeurs Mme Y...a manifesté son intention de reprendre le travail ; que, dans leur courrier du 16 mars 2010, les époux X...ont exprimé leur refus en indiquant à Mme Y...qu'elle avait mis fin au contrat de travail le 31 juillet 2009, et qu'ils avaient embauché une personne qui l'avait remplacée à son poste de travail ;
Qu'en cet état, la cour juge que le contrat de travail a été rompu le 31 juillet 2009, date du dernier jour de travail de Mme Y...;
Attendu que l'affirmation de M. et Mme X...selon laquelle Mme Y...aurait manifesté son intention de rompre le contrat de travail, qui n'est étayée par aucun élément de preuve, est contestée par Mme Y...;
Que la non-reprise du travail après le 31 juillet 2009 ne peut constituer de la part de la salariée une manifestation de volonté non équivoque de démissionner, d'autant moins que par son courrier du 5 mars précité, elle a exprimé le souhait de reprendre le travail ;
Que la démission ne se présume pas ;
Qu'en l'absence de démission claire et non équivoque, la rupture s'analyse en un licenciement ;
Attendu que, dans leurs conclusions (p. 3, alinéa 1er), les époux X...indiquent que, le 31 juillet 2009, Mme Y...les a informés qu'elle attendait un enfant ; qu'il n'est pas contesté qu'à cette date, elle était en état de grossesse médicalement constatée ;
Que, dès lors, Mme Y...bénéficiait de la protection de l'article L. 1225-4 précité, l'employeur ne pouvant résilier le contrat de travail en l'absence de faute grave non liée à l'état de grossesse ou de l'impossibilité où il se trouve, pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement de maintenir le contrat ;
Que le licenciement étant intervenu en l'absence de l'un de ces motifs est nul, comme l'a jugé à bon droit le conseil de prud'hommes, sauf à préciser que la date de rupture du contrat de travail est le 31 juillet 2009 ;
Qu'en conséquence, les époux X...seront condamnés à payer à Mme Y..., qui ne sollicite pas sa réintégration, la somme de 97, 60 ¿ au titre de l'indemnité légale de licenciement prévue par les articles L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail, dont les dispositions s'appliquent à tous les salariés y compris les employés de maison, la liste des textes mentionnés à l'article L. 7221-2 n'étant pas limitative ;
Qu'ils seront également condamnés à lui verser la somme de 1 260, 69 euros, correspondant aux salaires qui auraient été perçus du 1er août 2009 au 22 mars 2010, dont ne seront pas déduits les éventuelles rémunérations ou revenus de remplacement perçus pendant cette période, ainsi qu'une indemnité de 976, 02 ¿ équivalent aux salaires des six derniers mois ;
Que le jugement sera donc réformé en ce qu'il a alloué à Mme Y...les sommes de 162, 67 ¿ et 3 090, 73 ¿ ;
Attendu que le jugement sera infirmé, en revanche, en ce qu'il a débouté Mme Y...de sa demande d'indemnité pour procédure irrégulière, étant relevé que les époux X...n'ont pas notifié à cette dernière de lettre de licenciement et qu'ils ne l'ont pas convoquée à un entretien préalable ;
Qu'il sera alloué de ce chef à Mme Y...une somme de 100 ¿ ;
Attendu que le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné les époux X...à remettre à Mme Y...les documents sociaux ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

DECLARE l'appel de M. et Mme X...recevable ;
CONFIRME le jugement sauf en ce qui concerne la date de la rupture du contrat de travail et le montant des indemnités allouées et en ce qu'il a débouté Mme Y...de sa demande d'indemnité pour procédure irrégulière ;
Statuant à nouveau,
DIT que la date de rupture du contrat de travail est le 31 juillet 2009 ;
CONDAMNE M. et Mme X...à payer à Mme Y...les sommes de :
. 97, 60 ¿ à titre d'indemnité légale de licenciement ;. 1 260, 69 euros correspondant aux salaires qui auraient été perçus pendant la période légale de protection ;. 976, 02 ¿ à titre d'indemnité de licenciement nul équivalent aux salaires des six derniers mois ;. 100 ¿ à titre d'indemnité pour procédure irrégulière ;

CONDAMNE M. et Mme X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, REJETTE la demande de M. et Mme X...; les CONDAMNE à payer à Mme Y...la somme de 800 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel ;
DEBOUTE les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires ;

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODINCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00165
Date de la décision : 13/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-05-13;12.00165 ?
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