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28/01/2014 | FRANCE | N°12/00815

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 28 janvier 2014, 12/00815


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 28 Janvier 2014

ARRÊT N pc/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00815.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 04 Avril 2012, enregistrée sous le no 11/ 00467

APPELANTE :
Madame Stéphanie X... ... 49490 BREIL (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013 002858 du 31/ 05/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)
représentée par Maître Elisabeth POUPEAU, avocat au barreau d'ANGERS



INTIMEES :
LA SCEA VERGERS DE LA CROIX DE PIERRE La Croix de Pierre 49490 MEON
en prés...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 28 Janvier 2014

ARRÊT N pc/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00815.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 04 Avril 2012, enregistrée sous le no 11/ 00467

APPELANTE :
Madame Stéphanie X... ... 49490 BREIL (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013 002858 du 31/ 05/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ANGERS)
représentée par Maître Elisabeth POUPEAU, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEES :
LA SCEA VERGERS DE LA CROIX DE PIERRE La Croix de Pierre 49490 MEON
en présence de Madame Y...

LA SCEA LA MENIGAUDIERE La Croix de Pierre 49490 MEON
en présence de Madame Z...,

représentées par Maître TOUZET, avocat au barreau d'ANGERS-No du dossier 13102981

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2013 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Paul CHAUMONT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne LEPRIEUR, conseiller Monsieur Paul CHAUMONT, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 28 Janvier 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE
Mme X... a été embauchée par la société civile d'exploitation agricole Vergers de la croix de pierre qui a pour activité la production, la récolte, le calibrage et le conditionnement de pommes, en contrats à durée déterminée du :
. 02/ 09/ 1998 au 31/ 10/ 1998 pour la cueillette ;. 02/ 11/ 1998 au 23/ 12/ 1998 pour le calibrage et le conditionnement ;. 04/ 01/ 1999 au 31/ 03/ 1999 pour le calibrage et le conditionnement ;. 01/ 06/ 1999 au 30/ 06/ 1999 pour l'éclaircissage ;. 18/ 08/ 1999 au 31/ 10/ 1999 pour la cueillette ;. 02/ 11/ 1999 au 23/ 12/ 1999 pour le calibrage et le conditionnement ;. 04/ 01/ 2000 au 30/ 04/ 2000 pour le calibrage et le conditionnement.
Au cours des mois de mars et avril 2000, la société de la croix de pierre a scindé ses activités : elle a conservé, sous la dénomination de la société civile d'exploitation agricole de la Ménigaudière (la société de la Ménigaudière), celles de calibrage et de conditionnement des fruits récoltés.
Une nouvelle SCEA a été créée, sous l'ancienne dénomination la société Vergers de la croix de pierre, pour assurer les activités de cueillette et d'éclaircissage.
Mme X... a été embauchée en contrats à durée déterminée :
. Par la société Vergers de la croix de pierre du :
. 05/ 06/ 2000 au 30/ 06/ 2000 pour l'éclaircissage,. 28/ 08/ 2000 au 30/ 11/ 2000 pour la cueillette ;
. Par la société de la Ménigaudière du :
. 04/ 12/ 2000 au 22/ 12/ 2000 : pour le calibrage et le conditionnement,. 02/ 01/ 2001 au 27/ 04/ 2001 : pour le calibrage et le conditionnement ;
. Par la société Vergers de la croix de pierre du :
. 02/ 07/ 2001 au 13/ 07/ 2001 : pour l'éclaircissage,. 17/ 09/ 2001 au 23/ 11/ 2001 : pour la cueillette ;
. Par la société de la Ménigaudière du :
. 26/ 11/ 2001 au 21/ 12/ 2001 : pour le calibrage et le conditionnement,. 02/ 01/ 2002 au 18/ 04/ 2002 : pour le calibrage et le conditionnement ;
et ainsi de suite, au cours des années 2002 à 2011, le dernier contrat à durée déterminée étant conclu avec la société de la Ménigaudière du 4 janvier 2011 au 31 mars 2011 pour le calibrage et le conditionnement.
Par courrier du 31 mars 2011, la société de la Ménigaudière lui a confirmé que son contrat à durée déterminée était arrivé à échéance en raison de la baisse de l'activité de l'entreprise en ajoutant que " vos collègues se sont plaintes de votre manque d'investissement et de solidarité. Ce qui a pu à maintes occasions pénaliser l'équipe. En outre nous avons pu constater à plusieurs reprises que vous étiez à l'origine de la baisse de cadence de l'équipe par vos bavardages incessants. Compte tenu de ces faits, nous vous tiendrons ultérieurement informée si nous avons besoin de vos services ".
Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers pour obtenir principalement la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée, et le paiement de diverses sommes.
Par jugement du 4 avril 2012, le conseil de prud'hommes l'a déboutée de ses demandes.
Mme X... a relevé appel.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 3 décembre 2013, soutenues oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens et prétentions, Mme X... sollicite l'infirmation du jugement et forme les mêmes prétentions qu'en première instance.
Ainsi, elle demande à la cour de condamner la société Vergers de la croix de pierre et la société de la Ménigaudière à lui payer :
. A titre d'indemnité de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :. la société Vergers de la croix de pierre : 1 501, 83 ¿. la société de la Ménigaudière : 1 501, 83 ¿ ;
. A titre de rappel de salaires :. la société Vergers de la croix de pierre : 10 317, 67 ¿ outre l'incidence de congés payés de 1 031, 76 ¿ ;. la société de la Ménigaudière : 188, 52 ¿ outre l'incidence de congés payés de 18, 85 ¿ ;
. la société Vergers de la croix de pierre et la société de la Ménigaudière solidairement :
. 7 509, 15 ¿ à titre de rappel de prime de fin d'année ;. 3 003, 66 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;. 300, 36 ¿ à titre d'incidence de congés payés ;. 4 255 ¿ à titre d'indemnité légale de licenciement ;. 1 200 ¿ au titre du droit individuel à la formation ;. 27 000 ¿ à titre de dommages-intérêts, correspondant à dix huit mois de salaire, en réparation du préjudice causé par un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse ;. 2 500 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir en substance que :
1) Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée :
. Les contrats à durée déterminée avaient pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, et non de permettre l'exécution d'une tâche précise et temporaire à l'occasion de contrats saisonniers ;
. Elle a ainsi occupé à temps plein pendant plus de treize ans un poste d'ouvrière arboricole au sein d'une société dont l'activité perdure tout au long de l'année ;. En agriculture, seuls doivent être considérés comme saisonniers, au regard de l'article L. 1242-2 du code du travail, les travaux qui doivent, par suite des contraintes inhérentes à l'évolution du cycle végétal, être menés à terme dans un temps limité, ce qui oblige souvent l'exploitant à recourir à un surcroît important de main-d'oeuvre extérieur à l'exploitation, tels la récolte et le conditionnement, mais pas l'éclaircissage et le calibrage ;
. Compte tenu du caractère abusif du recours aux contrats à durée déterminée de la période de 1998 à 2000, il doit être considéré qu'elle était liée par un contrat à durée indéterminée à la société Vergers de la croix de pierre, dès son embauche initiale en septembre 1998 ;
2) Sur l'irrégularité de certains contrats à durée déterminée :
. Celui du 4 décembre 2000 ne précise pas les travaux pour lesquels il est fait recours au contrat à durée déterminée saisonnier en violation de l'article L. 1242-12 ;
. Celui du 20 août 2003 comporte un avenant qui lui a été remis pour signature le 25 août suivant, en méconnaissance de l'article L. 1242-13 ;
. Ces deux contrats doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée ;
3) En conséquence de cette requalification, il doit être considéré que :
a) Le licenciement est irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse puisque la procédure de licenciement n'a pas été respectée et qu'il repose sur des motifs qui ne sont pas réels et sérieux ;
b) Les employeurs ont méconnu l'article L. 3123-15 du code du travail et un rappel de salaire est dû à la concluante dès lors qu'elle aurait dû bénéficier d'une mensualisation ;
c) Ils doivent également lui verser la prime de fin d'année prévue par la convention collective.
Dans leurs dernières écritures, déposées au greffe le 10 décembre 2013, reprises oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens et prétentions, la société Vergers de la croix de pierre et la société de la Ménigaudière demandent à la cour de confirmer le jugement et de condamner Mme X... à leur verser, à chacune, la somme de 2 000 ¿ au titre des frais irrépétibles.
Elles font valoir essentiellement que :
. L'exploitation est soumise au schéma suivant :
. Eclaircissage : juin et juillet ;. Cueillette : fin août-début septembre à fin novembre ;. Calibrage et conditionnement : décembre à fin mai ;
1) Sur les contrats à durée déterminée :
. Leurs activités sont bien saisonnières en ce qu'elle se répètent chaque année, à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ;
. Les articles L. 1244-1 et L. 1244-3 lui permettaient de conclure avec Mme X... des contrats saisonniers successifs pendant plusieurs saisons consécutives et sans limite ;
. Il convient de différencier les contrats conclus avec la société Vergers de la croix de pierre, de ceux conclus avec la société de la Ménigaudière, dès lors qu'il s'agit d'entités juridiquement distinctes ;

2) Sur la régularité des contrats
. Le contrat du 4 décembre 2000 mentionne qu'il s'agit d'un contrat de travail saisonnier, de sorte que le motif du recours est précisé, d'autant que la nature des travaux est ensuite indiquée ;
. Celui du 20 août 2003 a été signé à cette date ;
3) a) La rupture du contrat de travail du 4 janvier 2011 est intervenue au terme de l'activité conditionnement/ emballage ;
b) L'article L. 3123-5 ne concerne que les contrats à temps partiel et l'utilisation régulière d'heures supplémentaires et l'article L. 3242-1 sur la mensualisation n'est pas applicable aux contrats saisonniers ;
c) Mme X... ne justifiant pas d'une présence de douze mois de présence continue au 31 décembre de l'année, sa demande de rappel de prime de fin d'année n'est pas fondée.

MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur la requalification des contrats à durée déterminée
Attendu qu'aux termes de l'article L. 1242-2- 3o du code du travail, un contrat à durée déterminée peut être conclu pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, dans le cas d'emplois à caractère saisonnier ;
Que le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes en fonction du rythme des saisons ;
Que, par ailleurs, la faculté pour un employeur de conclure des contrats à durée déterminée successifs avec un même salarié afin de pourvoir un emploi saisonnier n'est assortie d'aucune limite de temps au delà de laquelle s'instaurerait entre les parties une relation de travail globale à durée indéterminée ;
Attendu qu'en l'espèce, Mme X... a été embauchée par la société Vergers de la croix de pierre par neuf contrats à durée déterminée au cours de la période du 2 septembre 1998 au 30 avril 2000 pour procéder successivement à la cueillette de pommes, puis au calibrage et au conditionnement des fruits récoltés, et enfin à l'éclaircissage des pommiers ; qu'elle a ensuite été employée par la société Vergers de la croix de pierre et par la société de la Ménigaudière pour accomplir les mêmes travaux, par 40 contrats à durée déterminée sur la période du 5 juin 2000 au 31 mars 2011 ;
Que ces tâches, qui suivent le rythme des saisons de l'arboriculture et se répètent chaque année à des dates à peu près fixes, doivent être qualifiées de saisonnières ; que les contrats à durée déterminée litigieux conclus pour les accomplir sont des contrats saisonniers ;
Attendu que les contrats litigieux ne sont pas assortis d'une clause de reconduction pour la saison suivante, qu'ils sont conclus pour des durées variables, qu'ils ne se chevauchent pas puisqu'ils sont séparés chaque fois de plusieurs jours ou de plusieurs semaines, et qu'ils ne sont pas destinés à couvrir toute la durée de fonctionnement de la société Vergers de la croix de pierre et de la société de la Ménigaudière, qui, au surplus, n'ont pas une activité intermittente ;
Qu'il s'en déduit que, même s'ils se sont multipliés, ces contrats à durée déterminée ne doivent pas être requalifiés en contrat à durée indéterminée ;
Que Mme X... sera déboutée de sa demande de ce chef ;

2) Sur la régularité des contrats
a) Sur le contrat du 4 décembre 2000 :
Attendu que le contrat mentionne qu'il s'agit d'un contrat saisonnier ; que si les travaux ne sont pas mentionnés dans la rubrique " objet du contrat ", il est indiqué, dans la rubrique " rémunération ", qu'il s'agit de calibrage chambre froide ;
Qu'ainsi, le contrat comporte la définition précise de son motif conformément à à l'article L. 1242-12 du code du travail ;
b) Sur le contrat du 20 août 2003 :
Attendu que Mme X... n'établit, ni même ne prétend, que ce contrat ne lui aurait pas été transmis dans les deux jours suivant son embauche ; qu'elle soutient que ce contrat comporte un avenant qui lui a été remis uniquement le 25 août suivant en violation de l'article L. 1242-13 du code du travail ; que cependant, la cour relève qu'il ne s'agit que d'un avenant et non du contrat de travail lui-même qui seul doit être transmis dans le délai précité ; qu'en toute hypothèse, Mme X... ne soutient pas que cet avenant, en date du 25 août 2003, lui aurait été transmis après cette date ;
Qu'ainsi, Mme X... ne peut qu'être déboutée de sa demande de requalification fondée sur l'irrégularité prétendue de ces deux contrats ;
3) Sur les autres demandes
Attendu que les sociétés Vergers de la croix de pierre et de la Ménigaudière n'étaient pas tenues de respecter la procédure de licenciement applicable aux contrats à durée indéterminée, dès lors que Mme X... n'a été embauchée que par contrats à durée déterminée ;
Que Mme X... sera également déboutée de ses demandes liées à la violation de cette procédure ;
Attendu qu'elle ne peut utilement se prévaloir d'une méconnaissance de l'article L. 3123-15 du code du travail qui n'est applicable qu'aux contrats à temps partiels alors qu'elle n'a occupé, comme elle l'admet elle-même, que des contrats à temps plein ;
Attendu qu'elle ne peut davantage se prévaloir d'une mensualisation alors que l'article L. 3242-1 n'est pas applicable aux contrats saisonniers, comme le soulignent les intimées ;
Attendu qu'elle ne peut prétendre non plus à la prime de fin d'année alors que celle-ci est réservée, par la convention collective, aux salariés présents au 31 décembre de l'année, ce qui n'était pas son cas ;

PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE Mme X... aux dépens de la procédure d'appel ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, REJETTE les demandes.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00815
Date de la décision : 28/01/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-01-28;12.00815 ?
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