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28/01/2014 | FRANCE | N°12/00660

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 28 janvier 2014, 12/00660


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 28 Janvier 2014
ARRÊT N pc/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00660.
Jugement Au fond, origine Conseil de prud'hommes-Formation de départage d'ANGERS, décision attaquée en date du 24 Février 2012, enregistrée sous le no 10/ 00318

APPELANT :
Monsieur Pascal X... ... 49430 BARACE
présent, assisté de Maître Arnaud BARBE, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
Société REV HABITAT CHOLET ZI la Bergerie 49280 LA SEGUINIERE
représentée par Maître Valérie BURGAUD, avocat a

u barreau de LA ROCHE SUR YON-No du dossier 1276A

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispos...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 28 Janvier 2014
ARRÊT N pc/ jc
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00660.
Jugement Au fond, origine Conseil de prud'hommes-Formation de départage d'ANGERS, décision attaquée en date du 24 Février 2012, enregistrée sous le no 10/ 00318

APPELANT :
Monsieur Pascal X... ... 49430 BARACE
présent, assisté de Maître Arnaud BARBE, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
Société REV HABITAT CHOLET ZI la Bergerie 49280 LA SEGUINIERE
représentée par Maître Valérie BURGAUD, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON-No du dossier 1276A

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2013 à 14H00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Paul CHAUMONT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne LEPRIEUR, conseiller Monsieur Paul CHAUMONT, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 28 Janvier 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE
M. X... a été engagé par la société Rev Habitat par contrat à durée indéterminée du 17 septembre 2001 en qualité de voyageur représentant placier (VRP) exclusif.
Le contrat prévoyait qu'à partir du 7ème mois, la rémunération serait composée d'une partie fixe de 5 500 francs brut, et d'une commission de base sur le chiffre d'affaires mensuel hors taxe (HT) supérieur à 100 000 francs, dont le taux était variable selon les produits (Polyalrev : 6 %, façade : 8 %, PVC : 5 %, volet roulant : 6 %), et précisant " qu'en cas de remise sur le tarif, ou dans le cas d'une vente à un client dont les coordonnées ont été fournies par une hôtesse le taux de commission serait revu suivant le barème établi (QRC) " (article V 2).
Par ailleurs, le contrat stipulait que " le taux de commission comprend le remboursement au représentant de la totalité de ses frais professionnels. Ces frais professionnels seront donc intégralement à la charge du représentant " (article VII) et il prévoyait la mise à disposition d'un véhicule de fonction.
Le 3 octobre 2005, la société a mis à la disposition de M. X... un nouveau véhicule et, à cette occasion, les parties ont signé deux documents prévoyant que :
. au cas où la responsabilité du salarié serait engagée lors d'un accident, le montant de la franchise, soit 182 euros, serait à sa charge ;. seraient également à la charge du salarié : la vignette, la vidange tous les 7500kms, l'entretien courant, la courroie de distribution tous les 80 000 kms et les pneumatiques.
A la suite, d'une part, d'un courrier de l'inspection du travail du 5 avril 2007 invitant la société à proposer aux VRP un avenant précisant " quel taux de commission constitue la rémunération et quel taux supplémentaire vient couvrir les frais professionnels engagés ", et, d'autre part, de deux réunions, du 14 décembre 2007 et du 6 mars 2008, avec la délégation unique du personnel, la société a proposé à M. X... un avenant à son contrat de travail prévoyant :
. Un salaire fixe de 914, 72 euros brut ;. Une commission brute suivant les taux fixés dans le barème QRC correspondant pour partie au carburant pour le montant réel sur présentation de justificatifs dans la limite de 2 860 ¿ annuels, pour l'autre partie à la commission nette ;. La prise en charge par le salarié du remplacement des pneumatiques de marque Michelin, les autres frais d'entretien restant à la charge de la société ;
. La prise en charge par le salarié d'une franchise de 221 euros au cas où sa responsabilité serait engagée lors d'un accident.
M. X... a refusé de signer cet avenant.
Par courrier du 28 avril 2010, il a pris acte de la rupture de son contrat de travail pour les motifs suivants :
" Malgré mes réclamations et celles de mon syndicat ainsi que de la décision de l'inspection du travail, je suis au regret de constater que vous persistez dans la violation flagrante de vos obligations contractuelles et légales.
En effet, vous continuez à ne pas vouloir rembourser les frais professionnels et à appliquer une clause de mon contrat de travail dont l'inspection du travail vous a confirmé expressément le caractère illicite.
De plus, je constate qu'en date du 15 avril 2010 vous avez embauché en la personne de M. Y... un commercial dans le même secteur d'activité que le mien c'est à dire le ravalement et l'isolation par l'extérieur. En même temps, vous demandez à deux autres de mes collègues spécialistes en véranda de participer à une formation commerciale du 28 avril 2010 sur ces mêmes produits.
Une telle situation ne manque pas de m'être très préjudiciable tant professionnellement que financièrement et personnellement.
En conséquence, je me vois malheureusement contraint de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail à vos torts et griefs exclusifs ce qui constitue juridiquement un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes les conséquences qui en découlent ".
Il a ajouté qu'il cesserait son activité à l'expiration du délai de préavis.
M. X... a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers en paiement de diverses sommes consécutives à la prise d'acte.
Par jugement du 24 février 2012, le conseil l'a débouté de ses demandes en retenant qu'il ne démontrait pas la violation grave, par la société, de ses obligations susceptible de justifier une prise d'acte.
M. X... a relevé appel.
Les deux parties ont conclu.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 3 mai 2013, soutenues oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens et prétentions, M. X... sollicite l'infirmation du jugement et demande à la cour de condamner la société Rev Habitat à lui payer :
. À titre de dommages-intérêts :
. 25 500 ¿ en réparation de la perte de chance de remboursement des frais professionnels ;. 39 624 ¿ pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;. 67 691 ¿ pour violation du statut protecteur ;. 5 000 ¿ pour imposition d'un préavis indu ;. 1 000 ¿ pour privation du droit individuel à la formation ;
. À titre d'indemnité de rupture : 14 449 ¿ ;. À titre d'indemnité de procédure : 4 000 ¿.
Il fait valoir en substance que :
. La clause du contrat de travail relative à la prise en charge de ses frais professionnels (article VII), qui ne distingue pas le taux de commission couvrant ces frais de celui constituant la rémunération est illicite et, comme telle, réputée non avenue et inopposable au salarié, de sorte qu'il doit être considéré qu'aucuns frais professionnels ne lui ont été remboursés ;
. Les frais restés à sa charge peuvent être évalués à 0, 70 % de son chiffre d'affaires, soit en moyenne une somme de 3 000 ¿ par an ;
. L'avenant qui lui a été proposé ne corrigeait pas cette illicéité ;
. Le grief relatif aux frais professionnels exprimé dans la lettre de prise d'acte de rupture est suffisamment grave et sérieux pour justifier celle-ci ;

. Il s'ajoute à celui lié à l'exclusivité dont le concluant bénéficiait de fait sinon de droit et aux représailles, brimades et situation discriminatoire dont il a fait l'objet ;
. La prise d'acte doit produire les effets non seulement d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais également d'un licenciement nul prononcé en violation du statut protecteur puisqu'il était salarié protégé, membre titulaire de la délégation unique du personnel, et que son mandat expirait le 12 avril 2012, soit 20, 5 mois après la prise d'effet de la prise d'acte ;
. Il peut prétendre à des dommages-intérêts pour compenser :
. la perte de chance d'obtenir le remboursement des frais professionnels, soit 25 500 ¿ équivalent à 3 000 euros multipliés par 8, 5 années ;
. le préjudice causé par le licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit un an de salaire ;
. la réalisation du préavis qu'il a proposé d'effectuer par erreur et dont l'exécution lui a été imposée par la société ;
. la violation de son statut protecteur (3 302 euros bruts x 20, 5 mois) ;
Il peut également prétendre à l'indemnité de rupture spécifique aux VRP (article 13 de l'ANI) et à l'ISR (article 141 de l'ANI).
Dans ses dernières écritures, déposées le 4 décembre 2013, reprises oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens et prétentions, la société Rev Habitat demande à la cour de :
. Confirmer le jugement ;. Débouter M. X... de ses demandes ;. Le condamner au paiement de 5 000 ¿ à titre de dommages-intérêts outre 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait essentiellement valoir que :
. Dès lors que le taux de commissions fixé dans le contrat, incluait la part représentative des frais professionnels, M. X... ne peut prétendre qu'il a subi un manque à gagner de ce chef ni qu'il a été victime d'une inexécution contractuelle à ce titre pouvant justifier sa prise d'acte ;
. L'embauche d'un commercial le 15 avril 2010 sur le même secteur d'activité que le sien, qui était autorisée, ne justifie pas non plus une prise d'acte, pas plus que les brimades et les représailles alléguées, qui sont inexistantes ;
. Il doit donc être débouté de ses demandes liées à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'autant qu'il n'a pas subi de préjudice puisqu'il a été engagé, dès le 1er septembre 2010 pour exercer une activité concurrente par une autre société constituée par d'anciens salariés de la société Rev Habitat ;
. Il doit être également débouté de ses demandes de dommages-intérêts :
. Au titre du préavis, puisqu'il a volontairement exécuté celui-ci ;. Pour perte de chance d'utiliser ses droits au droit individuel à la formation puisque ses droits à ce titre lui ont été rappelés dans son certificat de travail ;. Pour violation du statut protecteur, dès lors que la prise d'acte n'est pas justifiée et, subsidiairement, dès lors qu'il a présenté sa demande plus d'un après l'expiration de la période de protection.
. La procédure qu'il a initiée en appel étant abusive, il doit être condamné à verser à la concluante des dommages-intérêts.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prise d'acte :
Attendu qu'aux termes de l'article VII du contrat du 17 septembre 2001, les parties sont convenues que la totalité des frais exposés par M. X... pour les besoins de son activité professionnelles lui seraient remboursés, ces frais étant inclus dans le montant des commissions ;
Que l'absence de précision de la quote-part, dans le taux de commission, correspondant à ces frais ne signifie pas qu'ils n'ont pas été pris en charge par l'employeur, contrairement à ce que soutient M. X..., qui ne démontre ni même n'allègue que les frais réels qu'il a supportés ont été supérieurs à l'avantage qui lui a été consenti ;
Que, dès lors, et même si l'employeur aurait dû, comme l'inspecteur du travail le lui a rappelé, faire apparaître le taux correspondant aux frais compris dans la rémunération, cette lacune, qu'il a imparfaitement comblée dans l'avenant que M. X... a refusé, à bon droit, de signer, ne justifie pas la prise d'acte de ce dernier ;
Attendu que, par ailleurs, comme l'a jugé le conseil de prud'hommes, la société n'a pas méconnu ses obligations à l'égard de M. X... en embauchant un salarié et en formant deux autres dans son secteur d'activité, puisque ceci n'était pas contraire au caractère d'exclusivité attaché à sa qualité de VRP, qui signifie seulement, conformément à l'article L. 7313-6 du code du travail, qu'il ne pouvait pas représenter d'autres entreprises ;
Attendu qu'enfin, M. X... ne justifie pas avoir avoir subi des brimades, des représailles ou une discrimination de la part de son employeur ;
Que la cour relève qu'il n'a pas contesté judiciairement l'avertissement qui lui a été notifié le 25 mars 2010 et que la politique d'ostracisme menée par la direction à son égard, qu'il a alléguée dans ses courriels des 12 mars, 23 mars et 11 mai 2010, et dont il ne démontre pas l'existence, ne l'a pas empêché, comme il l'a signalé lui-même dans son courriel du 11 mai 2010 et dans sa lettre du 17 mai 2010, de réaliser ses objectifs commerciaux pour la période de janvier à avril 2010 et d'avoir les meilleurs résultats de l'agence d'Angers ;
Que, M. X... ne rapportant pas à l'encontre de son employeur la preuve de manquements suffisamment graves pour justifier sa prise d'acte aux torts de ce dernier, elle doit, comme l'ont justement retenu les premiers juges, produire les effets d'une démission ;
Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur les autres demandes de M. X... :
Attendu que M. X... a exécuté un préavis de trois mois conformément à l'article III de son contrat de travail ; qu'il ne peut prétendre à une indemnité à ce titre ;
Que sa prise d'acte n'étant pas justifiée, aucune indemnité des chefs de violation de son statut protecteur résultant d'un licenciement, ni aucune indemnité de rupture conventionnelle, ni indemnité résultant de la perte de chance d'utiliser les droits acquis au titre du droit individuel à la formation ne lui est due ; qu'il n'a pas droit non plus à l'ISR ;
Que les frais professionnels lui ayant été remboursés, il doit être également débouté de sa demande d'indemnisation fondée sur la perte de chance d'en obtenir le paiement ;
Sur la demande reconventionnelle de la société Rev Habitat :
Attendu que ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure, ne caractérisent l'abus du droit d'agir en justice de la part de M. X... ;
Que la société Rev Habitat sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts à ce titre ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement :
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
DEBOUTE la société Rev Habitat Cholet de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
CONDAMNE M. X... aux dépens de la procédure d'appel ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, REJETTE les demandes ;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00660
Date de la décision : 28/01/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 17 septembre 2015, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 septembre 2015, 14-14.608, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-01-28;12.00660 ?
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