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21/01/2014 | FRANCE | N°12/02656

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 21 janvier 2014, 12/02656


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 21 Janvier 2014
ARRÊT N ACM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02656.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SARTHE, décision attaquée en date du 14 Novembre 2012, enregistrée sous le no 22 116

APPELANTE :
Madame Mireille X... ... 72220 ECOMMOY
représenté par Maître Gérard BERAHYA LAZARUS, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF (CPRP-SNCF) 17 Avenue du Général Leclerc 13347 MARSEI

LLE CEDEX 20
représenté par maître FROGET, avocat substituant la SCP LANDRY ET PAUTY, avocats au...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 21 Janvier 2014
ARRÊT N ACM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02656.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SARTHE, décision attaquée en date du 14 Novembre 2012, enregistrée sous le no 22 116

APPELANTE :
Madame Mireille X... ... 72220 ECOMMOY
représenté par Maître Gérard BERAHYA LAZARUS, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF (CPRP-SNCF) 17 Avenue du Général Leclerc 13347 MARSEILLE CEDEX 20
représenté par maître FROGET, avocat substituant la SCP LANDRY ET PAUTY, avocats au barreau du MANS-No du dossier 20120138

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Novembre 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne DUFAU, président Madame Laure-Aimée GRUA, conseiller Madame Anne-Catherine MONGE, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT : prononcé le 21 Janvier 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame DUFAU, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE :
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 18 février 2012, Mme Mireille X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans d'un recours formé contre la décision de la commission spéciale des accidents du travail de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (la CPRP) du 2 janvier 2012 qui rejetait sa demande de prise en charge au titre de la législation professionnelle d'un accident survenu le 29 mars 2011.
Elle expliquait qu'alors que lui avait été promise une mutation rapide, elle a appris, le 29 mars 2011, à l'occasion d'un entretien avec le responsable du site que sa mutation n'interviendrait pas avant 2012. Elle précisait qu'elle avait alors " craqué ", que le lendemain ses collègues l'avaient vue en pleurs et que le surlendemain, 31 mars 2011, elle avait consulté son médecin traitant qui avait diagnostiqué un épisode anxio-dépressif réactionnel majeur. Elle indiquait avoir été hospitalisée pendant quatre jours et avoir fait sa déclaration d'accident du travail le 1er avril 2011.
Par jugement du 14 novembre 2012, le tribunal a rejeté son recours et confirmé la décision de la commission.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reçue au greffe le 6 décembre 2012, Mme X... a relevé appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 26 avril 2013, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il conviendra de se référer et qui peuvent se résumer ainsi qu'il suit, Mme X... demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire que l'annonce du refus d'acter, par la signature de l'imprimé 630, la mutation au 1er mars 2011 comme convenu dans le cadre de la reconversion de Mme X..., cette mutation ne devant intervenir qu'en 2012, constitue un événement précis ponctuel et datable, de dire que cet événement constitue bien un accident du travail au sens de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale et qu'à ce titre le bénéfice de la législation professionnelle doit lui être accordée et de condamner la CPRP SNCF au paiement d'une indemnité de procédure de 2 000 euros.
Elle expose que salariée de la SNCF, elle a été affectée à un nouveau poste dans un nouvel établissement dénommé " le Technicampus " à compter du 8 novembre 2010, cette affectation s'accompagnant d'une période d'essai de 3 mois à l'issue de laquelle la mutation était réalisée si les qualités de service étaient satisfaisantes, et dans le cas contraire, elle devait rejoindre son ancien établissement, le centre d'ingénierie du matériel. Elle précise qu'alors que courant février 2011, M. Yvon Y..., responsable du pôle support au Technicampus lui avait appris que la signature de l'acte de mutation se ferait très prochainement avec effet au 1er mars 2011, le 29 mars 2011 au matin, avant la réunion de bureau, M. Y... lui a annoncé devant ses collègues qu'elle ne serait pas mutée avant 2012, sans plus d'explication. Elle ajoute que le lendemain elle s'était effondrée en présence de ses collègues. Elle relate que l'après-midi, après avoir géré les activités sportives de son fils, et alors qu'elle ne cessait de pleurer, elle a contacté les urgences puis l'hôpital du Mans pour une prise en charge immédiate et rencontré le lendemain le Dr Z... qui, catégorique, a diagnostiqué " un épisode anxio-dépressif réactionnel majeur avec état mélancolique et idées noires suite contrariétés et trouble relationnel au travail. Hospitalisation au centre hospitalier spécialisé ". Elle explique qu'elle a séjourné quatre jours à l'hôpital spécialisé d'Alonnes où le Dr A... a conclu sur son compte-rendu d'hospitalisation à un " tableau anxio-dépressif, réactionnel à une situation de conflit au travail ". Elle indique que le 1er avril 2011 elle a effectué sa déclaration d'accident du travail et que du 31 mars 2011 au 7 novembre 2011, elle a été en arrêt de travail.
Elle rappelle qu'est considéré comme un accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail. Elle soutient que la cause, en l'espèce, est clairement établie par les deux témoins de l'annonce du report de sa mutation et les quatre témoins du lendemain. Elle en déduit l'absence de doute sur le fait que l'événement s'est produit aux lieu et temps du travail. Elle soutient que la jurisprudence n'exige pas que l'événement résulte d'un comportement ou de propos agressifs mais exige uniquement que l'événement soit traumatisant et qu'il soit survenu soudainement sur le lieu du travail à une date certaine, ce qui, selon elle, est le cas en l'espèce.
Dans des écritures déposées au greffe le 13 novembre 2013 et reprises oralement, la CPRP SNCF demande à la cour de confirmer le jugement déféré, de débouter Mme X... de toutes ses demandes et de la condamner au paiement d'une indemnité de procédure de 1 000 euros, outre les dépens.
Elle rappelle que l'accident est caractérisé par l'action violente et soudaine d'une cause extérieure provoquant, au cours du travail, une lésion de l'organisme et que le salarié ne peut bénéficier de la présomption d'imputabilité que s'il apporte la preuve, par des éléments objectifs, de la réalité d'une lésion apparue au temps et au lieu du travail.
Elle conteste que Mme X... prouve avoir été victime soudainement d'une lésion au temps et au lieu du travail ni, s'agissant de lésions psychologiques, que celles-ci soient en lien avec un événement traumatisant, tel qu'une altercation, une agression, des humiliations ou une sanction. Elle explique que M. Y... s'est borné, le 29 mars 2011, à informer Mme X..., chef de secteur administratif, détachée au Technicampus dans le cadre d'un reclassement professionnel de ce que sa mutation ne pouvait se réaliser, comme initialement prévu, le 1er mars 2011 mais le 1er janvier 2012, lui garantissant qu'elle continuerait à travailler au Technicampus et ne retournerait pas au Centre d'ingénierie du matériel qui l'avait détachée. Elle en déduit que les conditions de travail de Mme X... sont demeurées inchangées, seule la date de sa mutation, toujours à l'ordre du jour, étant différée. Elle estime, ainsi que l'a retenu le tribunal, que les troubles dépressifs de Mme X... trouvent leur origine dans une série de contrariétés et un état préexistant. Elle observe que le médecin n'a fait que relater les dires de Mme X... quant à l'origine de son état dépressif.

MOTIFS DE LA DECISION :
Attendu qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale " est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise " ;
Que constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci ;
Que pour bénéficier de la présomption d'imputabilité instituée par le texte susvisé, il incombe à Mme X... de rapporter, autrement que par ses propres allégations, la preuve d'un fait accidentel, survenu au temps et au lieu du travail, dont il est résulté une ou des lésions ;
Attendu qu'en l'espèce, les lésions déclarées par Mme X..., le 1er avril 2011 sont intitulées " choc psychologique " ;
Que la salariée précisant les circonstances de ce choc, dans sa déclaration, relate qu'il a fait suite à l'annonce du refus d'acter, par la signature de l'imprimé 630, la mutation au 1er mars 2011 comme convenu dans le cadre de sa reconversion et se prévaut de premiers soins dispensés le 31 mars 2011 à 14h50 par le Dr Z..., son médecin traitant ;
Que, s'agissant de l'entretien litigieux, invoqué comme fait accidentel, il résulte des déclarations souscrites par Mme B... et M. C... (pièce no 9 de Mme X...) que ceux-ci étaient présents, le 29 mars 2011, lorsque M. Y... a annoncé, dans son bureau, à leur collègue que sa mutation au sein de l'établissement serait effective en janvier 2012 ;
Que M. D..., M. E..., M. F... et M. G... (pièce no 10 de Mme X...) ont tous attesté que le lendemain de cette annonce, le 30 mars 2011, Mme X... leur était apparue, dans son bureau, perturbée et aux bords des larmes ou tout à fait en larmes, qu'elle leur avait fait part de l'annonce du report de sa mutation et qu'elle reliait le trouble psychologique où ils la voyaient à cette annonce ;
Que M. Y..., dans son attestation écrite (pièce no 9 de la CPRP), explique, que répondant, le 29 mars 2011, à la question que lui avait posée Mme X... sur la " finalisation " de sa mutation au sein du Technicampus par la signature de l'imprimé " 630 ", il l'avait informée de ce qu'un problème administratif d'organisation empêchait cette mutation avant le 1er janvier 2012, mais que cela ne modifierait en rien son travail au Technicampus et qu'elle ne retournerait pas à son ancien établissement ;
Qu'il précise n'avoir, ce jour-là, pas remarqué de réaction particulière de la part de Mme X... ni sur le moment, ni dans l'après-midi, mais que le lendemain, 30 mars 2011, celle-ci l'avait accueilli froidement et que M. D... était venu lui conseiller de la prendre en entretien, ce qu'il avait fait en constatant, alors, qu'elle était très perturbée ;
Qu'il ajoute que Mme X... lui avait relaté l'ensemble des problèmes qu'elle avait rencontrés dans ses différents postes depuis 1995 et qu'il l'avait rassurée sur son maintien au Technicampus où elle donnait satisfaction, lui confirmant qu'il pouvait le lui écrire si elle le souhaitait ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que le jour-même de l'entretien qu'elle incrimine, Mme X... n'a eu aucune réaction particulière à l'annonce du report de sa date de mutation ;
Qu'en particulier, les deux témoins directs de son entretien avec M. Y... ne font état d'aucun signe trahissant une émotion quelconque, pas même l'impatience, la colère, la contrariété ou la déception ;
Qu'ils n'allèguent d'ailleurs aucune agressivité particulière dans les propos tenus par M. Y... ni dans leur forme ni dans leur contenu, étant fait ici observer que Mme X... à laquelle avait été annoncée à l'issue de sa période d'essai qu'il pourrait être procédé à sa mutation au sein du Technicampus à compter du 1er mars 2011 ne pouvait ignorer, le 29 mars suivant, que cette date précise ne serait matériellement pas respectée ;
Que le certificat médical établi le surlendemain par le Dr Z... mentionne un " épisode anxio-dépressif réactionnel majeur avec état mélancolique et idées noires suite contrariété et trouble relationnel au travail " sans faire allusion à cet entretien précis ;
Que dès lors Mme X... ne justifie pas que les crises de larmes qu'elle a eues le lendemain aient été le résultat de cet entretien dénué de toute violence ;
Que c'est à juste titre que le tribunal a retenu que le syndrome dépressif réactionnel diagnostiqué trouvant son origine dans une série de contrariétés qui s'étaient prolongées dans le temps sans pouvoir se rattacher à un événement soudain, était incompatible avec la notion d'accident du travail ;
Que le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu que Mme X... succombant en son appel sera néanmoins dispensée du paiement du droit prévu à l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que l'équité commande de ne pas faire, en l'espèce, application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que Mme X... et la CPRP seront déboutées de leurs prétentions respectives de ce chef ;

PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME le jugement déféré,
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
DISPENSE Mme X... du paiement du droit prévu à l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/02656
Date de la décision : 21/01/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-01-21;12.02656 ?
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