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14/01/2014 | FRANCE | N°11/03005

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 14 janvier 2014, 11/03005


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 03005.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 24 Octobre 2011, enregistrée sous le no 10/ 00959

ARRÊT DU 14 Janvier 2014

APPELANTE :

La Société STREAM INTERNATIONAL 23 Avenue Louis Breguet BP 257 78147 VELISY CEDEX

représentée par Maître CAPUS de la Selas FIDAL, avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :

Monsieur Jacques X...... 49100 ANGERS
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br>représenté par Maître TOUZET de la SELARL LEXCAP-BDH, avocats au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En appl...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N clm/ jc

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 03005.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 24 Octobre 2011, enregistrée sous le no 10/ 00959

ARRÊT DU 14 Janvier 2014

APPELANTE :

La Société STREAM INTERNATIONAL 23 Avenue Louis Breguet BP 257 78147 VELISY CEDEX

représentée par Maître CAPUS de la Selas FIDAL, avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :

Monsieur Jacques X...... 49100 ANGERS

représenté par Maître TOUZET de la SELARL LEXCAP-BDH, avocats au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Novembre 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Catherine DUFAU, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 14 Janvier 2014, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Stream International a pour activité la fourniture de prestations de services informatiques de maintenance pour les clients utilisateurs de l'outil informatique. Elle emploie 30 000 salariés à travers le monde, dont 350 sur son site d'Angers et ses relations avec son personnel sont régies par la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils et sociétés de conseils (SYNTEC).
Suivant contrat de travail à durée déterminée du 28 septembre 2007 conclu pour la période du 1er octobre au 1er décembre 2007, elle a embauché M. Jacques X...en qualité de Technicien Support, position 1. 4. 1- coefficient 240, pour un horaire hebdomadaire de travail de 18, 75 heures et moyennant un salaire brut mensuel de 695, 90 ¿, le motif indiqué de recours au CDD étant " un accroissement temporaire d'activité lié au démarrage expérimental d'un nouveau support ". Par avenant no 1 du 28 septembre 2007, les parties ont convenu que, pour la période du 1er au 26 octobre 2007, l'horaire hebdomadaire de travail du salarié serait de 36, 50 heures moyennant une rémunération brute mensuelle de 1 300 ¿. Par avenant no 2 signé le 29 novembre 2007, ce premier contrat de travail à durée déterminée a été renouvelé jusqu'au 31 mai 2008 aux conditions du contrat initial.

Aux termes d'un nouveau contrat de travail à durée déterminée du 3 juin 2009 conclu pour la période du 8 juin au 30 septembre 2009, M. Jacques X...a été embauché par la société Stream International en qualité de Technicien Support à temps plein moyennant une rémunération brute mensuelle de 1 419, 06 ¿, aux mêmes position et coefficient que précédemment, le motif indiqué de recours au CDD étant " un accroissement temporaire d'activité lié à l'augmentation prévisionnelle des flux. ".
Suivant contrat de travail à durée déterminée du 4 février 2010 conclu pour la période du 8 février au 31 août 2010, la société Stream International a embauché M. Jacques X...en qualité de Technicien Support, aux mêmes position et coefficient que précédemment, pour un horaire hebdomadaire de travail de 12, 25 heures et moyennant un salaire brut mensuel de 496, 25 ¿, le motif indiqué de recours au CDD étant " un accroissement temporaire d'activité lié à une augmentation des flux d'appels ". Par avenant no 1 du 4 février 2010, les parties ont convenu que, pour la période du 8 au 21 février 2010, l'horaire hebdomadaire de travail du salarié serait de 36, 50 heures moyennant une rémunération brute mensuelle de 1419, 06 ¿.

Le 25 mai 2010, le service " recrutement " de la société Stream International a fait part à l'ensemble de son personnel d'opportunités de recrutement par la société Stream Ireland Ldt à Dublin pour assurer le support utilisateurs de la console de jeux vidéo " X BOX ". M. Jacques X...s'est porté candidat et des courriers électroniques ont été échangés jusqu'au 23 août 2010 sans que le projet de son embauche par la société Stream Ireland Ldt à Dublin aboutisse.
Le 31 août 2010, date de fin de son contrat, il s'est vu remettre l'attestation d'employeur destinée à Pôle emploi.
Le 28 septembre 2010, il a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de requalification des CDD en CDI et paiement de diverses indemnités.

Par jugement du 24 octobre 2011 auquel le présent renvoie pour plus ample exposé, estimant que le premier CDD devait être requalifié en CDI, le conseil de prud'hommes d'Angers a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire prévu par l'article 515 du code de procédure civile, condamné la société Stream International à payer les sommes suivantes à M. Jacques X...:

-1 419 ¿ d'indemnité de requalification du CDD en CDI,-3 121, 80 ¿ d'indemnité compensatrice de préavis congés payés inclus,-1 064, 25 ¿ d'indemnité de licenciement,-1 419 ¿ de dommages intérêts pour procédure de licenciement irrégulière,-8 514 ¿ de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-100 ¿ de dommages et intérêts pour défaut de visite médicale d'embauche,-200 ¿ de dommages intérêts pour clause d'exclusivité nulle,-1200 ¿ au titre des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991. Le conseil a débouté M. Jacques X...de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et la société Stream International de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, et il l'a condamnée aux dépens à recouvrer conformément aux dispositions sur l'aide juridictionnelle.

Ayant reçu notification de ce jugement le 16 novembre 2011, la société Stream International en a régulièrement relevé appel général par lettre recommandée postée le 8 décembre suivant.
Par ordonnance de référé du premier président de la présente cour du 25 janvier 2012, elle a été déboutée de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire et condamnée à payer à M. Jacques X...une indemnité de procédure de 1 500 ¿ et à supporter les dépens.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 9 avril 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société Stream International demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;- de l'infirmer en toutes ses autres dispositions et de débouter M. Jacques X...de l'ensemble de ses prétentions ;- de le condamner à lui payer la somme de 2 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Expliquant les circonstances de fait qui ont présidé à la conclusion de chacun des trois CDD, pour s'opposer à leur requalification en CDI, l'appelante fait valoir que le motif de recours au CDD est, à chaque fois, parfaitement valable et l'accroissement temporaire d'activité justifié. Elle ajoute que le salarié est malvenu à contester la légalité du recours au CDD dans la mesure où, à l'époque à laquelle les contrats litigieux ont été conclus, tant sa situation juridique de ressortissant étranger titulaire d'un simple titre de séjour étudiant ne l'autorisant à travailler que dans la limite de 60 % de la durée annuelle du travail, que sa situation matérielle d'étudiant ne lui permettaient pas d'occuper un emploi permanent.

Si elle ne conteste ni l'absence de visite médicale d'embauche au titre du premier CDD, ni le caractère tardif de cette visite s'agissant du second contrat, elle décline toute responsabilité à cet égard, opposant que c'est en vain qu'elle s'est mise en rapport avec les services de la médecine du travail pour organiser ces visites dans les délais impartis par la loi, ces derniers n'étant pas à même de satisfaire à ses demandes en raison de la pénurie d'effectifs les affectant. Elle ajoute qu'il n'en est résulté aucun préjudice pour le salarié.

Quant à la clause d'exclusivité dont elle ne discute pas le caractère illicite, elle indique qu'il s'agit d'une clause de style qui n'a jamais reçu application et qui n'a causé aucun préjudice au salarié qui ne pouvait exercer qu'une activité accessoire à ses études.
Enfin, elle conteste être intervenue dans les échanges qui ont eu lieu entre M. Jacques X...et la société Stream Ireland Ldt et être en quoi que ce soit à l'origine de l'échec de ces pourparlers et du projet de travail du salarié à Dublin.
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 31 mai 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, formant appel incident, M. Jacques X...demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives à la requalification des CDD en CDI et aux sommes allouées au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis congés payés inclus, de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité de procédure ;
- de l'infirmer pour le surplus et de condamner la société Stream International à lui payer les sommes suivantes : ¿ 1 500 ¿ d'indemnité de requalification, ¿ 10 000 ¿ nets de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ¿ 1 500 ¿ de dommages et intérêts pour manquement à la visite médicale d'embauche, ¿ 2 000 ¿ nets de dommages et intérêts pour clause d'exclusivité nulle, ¿ 5 000 ¿ nets de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, ¿ 2 500 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- de condamner la société Stream International aux entiers dépens. A l'appui de sa demande de requalification des CDD en CDI, le salarié fait valoir que :- l'accroissement temporaire d'activité devant correspondre à une augmentation temporaire de l'activité habituelle de l'entreprise, le motif énoncé dans le premier contrat d'un accroissement temporaire d'activité lié " au démarrage expérimental d'un nouveau support " n'est pas un motif valable de recours au CDD " dès lors que cela relève de son activité normale " ;- en tout cas, l'employeur ne rapporte la preuve de la réalité de l'accroissement temporaire d'activité pour aucun des trois CDD ;- il ressort de l'examen du registre des entrées et sorties du personnel que la société Stream International a pour habitude de recourir massivement à des CDD, mais aussi aux contrats de travail temporaire, ce qui caractérise un recours abusif aux contrats précaires pour faire face à un besoin structurel de main-d'¿ uvre ;- l'indemnité à laquelle il peut prétendre ne peut pas être inférieure à un mois de salaire.

S'agissant de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, il soutient que les différents échanges et entretiens qu'il a eus en vue de son embauche à Dublin ont été positifs, que lui et son épouse ont accompli les démarches administratives nécessaires à leur entrée sur le territoire irlandais et à leur déménagement, cette dernière ayant quitté son emploi, les enfants ayant été descolarisés et le congé donné pour l'appartement qu'ils prenaient en location ; que, contre toute attente, après que toutes les démarches aient été accomplies, la société Stream International n'a plus donné aucune suite et n'a apporté aucune réponse à son dernier courriel du 23 août 2010 ; que, les démarches en vue de son embauche à Dublin ayant été accomplies avec sa supérieure hiérarchique, Mme Y..., l'employeur est bien intervenu dans ce projet d'embauche et a sa part de son responsabilité dans son échec.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande de requalification des CDD en CDI :
Attendu que le premier contrat de travail à durée déterminée du 28 septembre 2007 a été conclu pour la période du 1er octobre au 1er décembre 2007, prolongée jusqu'au 31 mai 2008 par avenant du 29 novembre 2007 et ce, au motif d'" un accroissement temporaire d'activité lié au démarrage expérimental d'un nouveau support " ;
Attendu que, pour expliquer le contexte dans lequel elle a recouru au CDD pour recruter M. Jacques X..., la société Stream International expose qu'à la fin de l'année 2007, la société ORANGE a décidé de faire appel à des prestataires de service extérieurs pour assurer auprès de ses abonnés à l'internet un service d'assistance et de maintenance à distance de leur outil informatique et qu'avec d'autres entreprises, elle a été retenue pour assurer ces prestations consistant à prendre en main à distance l'ordinateur du particulier contactant l'assistance internet ; qu'elle précise que la société ORANGE, qui assurait auparavant directement cette prestation au niveau national, a décidé, dans un premier temps, de la sous-traiter régionalement à titre expérimental avant de la sous-traiter définitivement ; Attendu que l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise compte parmi les cas de recours valables au CDD énumérés à l'article L. 1242-2 du code du travail ; qu'il correspond à une augmentation temporaire de l'activité normale et habituelle de l'entreprise ;

Attendu que l'assistance à distance ainsi décrite par l'appelante relève de son activité habituelle et normale de fourniture de prestations de services informatiques de maintenance pour les clients utilisateurs de l'outil informatique, et son caractère " expérimental " avancé dans le contrat de travail n'est nullement justifié par les pièces versées aux débats, à savoir, d'une part, un document " power point " constitué de 15 slides, établi par l'appelante le 16 janvier 2008 à partir de documents fournis par France Telecom-ORANGE, destiné à présenter en interne la gamme des prestations " Assist @ net ", l'intérêt de cette prestation pour l'opérateur de téléphonie et pour ses clients, les procédures, la tarification etc... (pièce no 6. 1) sans aucune indication de son caractère expérimental, d'autre part, un graphique, dont l'origine est parfaitement indéterminée, intitulé " Prévisions d'appels présentés " établi à partir, en abscisse, des mois de l'année de novembre 2007 à mars 2011, en ordonnée, d'un nombre d'appels mensuels de 30 000 à 80 000 par tranches de 5 000 appels ; que, ce graphique prévisionnel est loin d'être propre à justifier du caractère seulement expérimental de la prestation " Assist @ net " en ce qu'il couvre plus de trois années ;

Attendu qu'en l'absence de preuve du caractère purement expérimental et temporaire de cette prestation " Assist @ net " relevant de l'activité normale et habituelle de l'entreprise, l'accroissement temporaire d'activité ne peut pas être considéré comme un motif valable de recours au CDD pour embaucher M. Jacques X...le 28 septembre 2007 ;
Qu'en outre, comme l'ont exactement relevé les premiers juges, l'employeur s'avère totalement défaillant à rapporter la preuve de la réalité de l'accroissement temporaire d'activité allégué dans la mesure où, tout d'abord, le graphique susvisé, seule pièce produite à cette fin, est dépourvu de valeur probante en ce qu'il apparaît être une pièce que l'appelante s'est établie à elle-même et où, en second lieu, ce graphique prévisionnel n'est pas de nature à rendre compte de l'activité globale de l'entreprise ni même de celle du seul site d'Angers en ce qu'il est présenté par l'appelante aux termes de ses explications (page 5 de ses écritures) comme se rapportant à la seule prestation " Assist @ net " pour le client ORANGE et non à l'activité globale de l'entreprise ou à l'activité globale du seul site d'Angers ;
Attendu que la société Stream International ne rapporte pas plus la preuve de la réalité de l'accroissement temporaire d'activité s'agissant des deux autres CDD en ce que le tableau comparatif des appels prévus et des appels présentés au cours de la période de mai 2009 à décembre 2010 (sa pièce no 10), seule pièce produite avec le graphique ci-dessus au soutien de ce prétendu accroissement, n'a aucune valeur probante s'agissant d'un document qu'elle s'est établi à elle-même et qui n'est corroboré par aucune pièce rendant objectivement compte de l'évolution des appels traités et prestations fournies ;
Attendu qu'il est indifférent à la solution du présent litige que le salarié ait pu, au cours de la période considérée, être étudiant et, en regard de la législation relative à la situation des étrangers en France, dans une situation administrative ne l'autorisant pas à travailler à temps plein, un CDI pouvant parfaitement être conclu pour un temps partiel ; Que le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a requalifié en CDI le CDD conclu entre les parties le 28 septembre 2007, la relation de travail entre les parties étant, en conséquence, réputée à durée indéterminée depuis cette date ;
Qu'il s'avère ainsi que le premier contrat de travail à durée déterminée, autant que les suivants, ont été conclus pour pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ;
Attendu que les premiers juges ont fait une exacte appréciation de l'indemnité de requalification devant être allouée au salarié en application de l'article L. 1245-2 du code du travail, la somme de 1 419 ¿ retenue n'étant pas inférieure à un mois de salaire, étant observé qu'il ressort des bulletins de salaire et de l'attestation Pôle emploi versés aux débats qu'au cours de chacun des trois derniers mois de travail de juin à août 2010, M. Jacques X...a, en fait, travaillé à temps plein ou quasiment à temps plein, son salaire du mois d'août 2010 s'étant élevé à la somme de 1 327, 51 ¿ ;
Sur la rupture de la relation de travail :
Attendu, dès lors que le contrat de travail à durée déterminée du 28 septembre 2007 est requalifié en contrat de travail à durée indéterminée et que la société Stream International a mis fin à la relation de travail par la seule arrivée du terme du contrat, laquelle ne peut pas constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, sans respecter la procédure de licenciement qui est d'ordre public, ni énoncer un quelconque motif de licenciement, ni respecter le préavis, la rupture s'analyse en un licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse qui ouvre droit pour M. Jacques X...à l'indemnité compensatrice de préavis, à l'indemnité de licenciement et à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, voire à l'indemnité pour licenciement irrégulier sous réserve de cumul possible de cette indemnité avec celle allouée pour licenciement injustifié ;
Attendu que le jugement déféré sera confirmé s'agissant des sommes allouées au salarié au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de licenciement, lesquelles ont été exactement appréciées en considération, notamment, d'un délai congé de deux mois, de l'ancienneté du salarié et de sa rémunération, et ne sont pas discutées dans leur montant par l'employeur tandis que l'intimé ne forme pas d'appel incident de ces chefs ;
Attendu, M. Jacques X...justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, qu'il peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, selon lequel l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, lesquels se sont élevés en l'espèce à la somme de 6 742, 70 ¿ ; Attendu qu'en considération de la situation particulière du salarié au moment de la rupture, notamment de son âge (22 ans), d'une ancienneté de 2 ans et 11 mois dans l'entreprise, du bénéfice de l'allocation de retour à l'emploi du 10 février au 1er juin 2011 pour un montant mensuel de l'ordre de 800 ¿, de sa faculté à retrouver un emploi manifestée par la signature d'un CDI le 21 novembre 2011 en qualité de " technicien service desk " moyennant une rémunération brute mensuelle de 1 650 ¿, les premiers juges ont fait une exacte appréciation de son préjudice en lui allouant la somme de 8 514 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il y a également lieu à confirmation sur ce point ;

Qu'en outre, s'il est exact que la procédure de licenciement n'a pas été respectée en ce que, notamment, le salarié n'a pas été convoqué à un entretien préalable et que la rupture ne lui a pas été notifiée par un écrit, dès lors que trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, il ne peut pas prétendre au cumul de l'indemnité pour irrégularité de la procédure avec l'indemnité pour licenciement injustifié ; que le jugement entrepris doit en conséquence être infirmé en ce qu'il lui a alloué une indemnité de 1 419 ¿ pour irrégularité de la procédure et l'intimé débouté de ce chef de prétention ;
Attendu qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement par la société Stream International à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. Jacques X...du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage ;
Sur la demande de dommages et intérêts au titre des visites médicales d'embauche :
Attendu que la société Stream International ne conteste pas que, contrairement aux exigences de l'article R. 4624-10 du code du travail, le salarié n'a pas bénéficié d'une visite médicale d'embauche à la faveur du premier CDD conclu le 28 septembre 2007 et que la visite médicale d'embauche relative au deuxième CDD a été réalisée hors délai, en l'occurrence, le 2 juillet 2009, soit postérieurement à l'expiration de la période d'essai de 10 jours prévue par le contrat de travail conclu le 3 juin 2009 à effet au 8 juin suivant ; Attendu que l'appelante verse aux débats un courrier adressé le 11 février 2008 par le président du conseil d'administration et le médecin coordonnateur du Service médical inter-entreprises de l'Anjou (SMIA) au directeur régional du travail et de l'emploi exposant l'impossibilité dans laquelle ce service s'est trouvé, en 2007, et se trouvera, en 2008, d'assurer l'ensemble des visites médicales " systématiques " en raison de la pénurie d'effectifs ; Mais attendu qu'il ressort de ce courrier qu'en 2007, les visites médicales d'embauche faisaient partie des visites priorisées et que, pour 2008, seul était envisagé l'abandon des visites d'embauche concernant les salariés saisonniers et CDD d'une durée inférieure à 45 jours, ce qui ne correspond pas à la situation de M. Jacques X...; qu'en tout état de cause, les difficultés ainsi justifiées du SMIA pour répondre à certaines de ses missions ne sont pas de nature à exonérer l'employeur de sa responsabilité dès lors qu'il ne justifie pas avoir accompli de quelconques démarches pour soumettre le salarié, ou le soumettre en temps utile, à la visite médicale d'embauche alors que, débiteur en la matière d'une obligation de résultat, il lui incombait de mettre en oeuvre les démarches nécessaires en vue de l'organiser ;

Attendu que l'absence de visite médicale d'embauche en 2007 et le caractère tardif de la visite effectuée en 2009 ont nécessairement causé au salarié un préjudice dont les premiers juges ont toutefois assuré la juste réparation ; que ce chef de décision sera également confirmé ;
Sur la clause d'exclusivité :
Attendu que le premier et le troisième CDD contiennent une clause d'exclusivité aux termes de laquelle le salarié s'engage à ne pas s'intéresser ou collaborer professionnellement de quelque façon que ce soit et pendant toute la durée d'exécution du contrat à d'autres affaires, mêmes non concurrentes de celles de la société Stream International ; que cette dernière ne méconnaît pas le caractère illicite d'une telle clause, qui porte atteinte à la liberté du travail, en ce qu'elle est imposée à un salarié employé à temps partiel ;
Attendu que les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice qui est résulté pour M. Jacques X...de cette clause illicite et ce dernier, qui était étudiant au moment des faits, ne caractérise d'ailleurs pas de préjudice plus ample et ne produit aucune pièce pour en justifier ; que le jugement déféré sera également confirmé sur ce point ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :
Attendu qu'il ressort des courriers électroniques échangés en anglais, entre M. Jacques X...et, soit Mrs Jill Z..., responsable des ressources humaines de la société Stream Ireland Ldt, implantée à Dublin, soit Mrs Katarzyna A..., assistante de cette dernière pour le recrutement, entre le 28 mai et le 3 août 2010, que le projet d'embauche de l'intimé à Dublin a échoué en raison de l'impossibilité pour la société irlandaise d'effectuer pour lui une demande de permis de travail du fait des restrictions imposées sur ce plan aux employeurs par l'administration irlandaise à l'époque concernée ;
Qu'il n'est justifié d'aucune attitude fautive de la société de droit irlandais ou de la société appelante dans l'échec de ce projet, étant observé que cette dernière s'est contentée, au départ, de relayer l'annonce des perspectives d'emplois existantes au sein de la filiale de droit irlandais et d'assister M. Jacques X...dans ses quêtes de renseignements ; que la circonstance que ce dernier l'ait rendue destinataire " joint " de ses e-mails échangés avec ses interlocutrices irlandaises n'est pas de nature à établir qu'elle aurait pris une quelconque part active dans les négociations engagées entre lui et la filiale irlandaise ;
Que la preuve d'une attitude fautive de l'appelante fait donc radicalement défaut autant que celle du préjudice allégué, l'intimé procédant par voie d'affirmation pour soutenir que son épouse aurait démissionné de son emploi, qu'ils auraient donné congé de leur logement et que ses enfants auraient été déscolarisés sans produire aucun justificatif de ces faits ; Que le jugement entrepris sera dès lors également confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;

Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu, la société Stream International succombant amplement en son appel principal et M. Jacques X...succombant en son appel incident, que chaque partie conservera la charge de ses dépens et frais irrépétibles d'appel, le jugement étant confirmé de ces chefs ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Stream International à payer à M. Jacques X...la somme de 1 419 ¿ à titre d'indemnité pour procédure de licenciement irrégulière et le confirme en toutes ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Ordonne le remboursement par la société Stream International à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. Jacques X...du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage ;
Déboute M. Jacques X...de sa demande d'indemnité distincte pour procédure de licenciement irrégulière ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens et frais irrépétibles d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/03005
Date de la décision : 14/01/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2014-01-14;11.03005 ?
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