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17/12/2013 | FRANCE | N°12/00259

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 17 décembre 2013, 12/00259


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/00259.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 27 Janvier 2012, enregistrée sous le no 11/ 00297

ARRÊT DU 17 Décembre 2013

APPELANT :

Monsieur Hervé X...... 49000 ANGERS

présent, assisté de la SCP SULTAN-SOLTNER-PEDRON-LUCAS, avocats au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
SAS ARO WELDING TECHNOLOGIES 1 Avenue de Tours 72500 CHATEAU DU LOIR

représentée par Maître Jean-luc JACQUET

, avocat au barreau du MANS COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 d...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/00259.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 27 Janvier 2012, enregistrée sous le no 11/ 00297

ARRÊT DU 17 Décembre 2013

APPELANT :

Monsieur Hervé X...... 49000 ANGERS

présent, assisté de la SCP SULTAN-SOLTNER-PEDRON-LUCAS, avocats au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
SAS ARO WELDING TECHNOLOGIES 1 Avenue de Tours 72500 CHATEAU DU LOIR

représentée par Maître Jean-luc JACQUET, avocat au barreau du MANS COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Octobre 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne DUFAU, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 17 Décembre 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame Y..., greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******* FAITS ET PROCÉDURE :

La sas ARO WELDING TECHNOLOGIES dont le siège est à Château-du-Loir dans le département de la Sarthe, est spécialisée dans la conception et la réalisation de systèmes robotisés de sondage.
Elle a le 9 juillet 1992 embauché en contrat de travail à durée indéterminée M. Hervé X..., comme responsable du développement électronique. Celui-ci est devenu, en 2004, responsable des projets de recherche avancée, avec le statut de cadre.
En 2006 la société s'est restructurée, et après le refus de M. X... de voir son poste rattaché à celui de M. Y..., responsable de recherche avancée processus assemblage, elle lui a notifié son licenciement par lettre du 30 mai 2006, avec dispense partielle (du 6 au 8 juin 2006 et du 12 au 15 juin 2006) d'exécuter le préavis, dont le terme a été fixé au 30 novembre 2006.
Le 2 juin 2006, les parties ont signé un protocole transactionnel prévoyant la renonciation à toute action ou instance qui pourrait résulter de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, avec le paiement à M. X... par la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES d'une " indemnité globale et forfaitaire de 68 300 ¿ nette de charges sociales salariales, n'ayant pas valeur de salaire, versée à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par M. X... eu égard à son licenciement " ; cette somme a été perçue par M. X... le 2 juin 2006.
Ce même 2 juin 2006, la société ARO WELDING TECHNOLOGIES et M. X... ont encore signé un deuxième document, ainsi libellé : « En complément de l'indemnité transactionnelle et conformément à nos discussions, je vous confirme notre accord pour vous faire bénéficier de 50 % des sommes qui seraient récupérées par ARO dans le cadre de la suppression de la contribution DELALANDE et du remboursement qui serait effectué par les ASSEDIC au bénéfice de ARO, dans le délai maximum d'un mois. Il en serait de même si ARO était dispensé du versement de cette contribution DELALANDE ».

M. X... a retrouvé un emploi au sein de la sas SAITEK, en qualité de chef de projet, le 1er septembre 2006.
En début d'année 2008, il a sollicité l'exécution de l'engagement complémentaire au protocole transactionnel, pris par la société ARO WELDING TECHNOLOGIES à son égard le 2 juin 2006.
Par courrier du 1er août 2008, la société ARO WELDING TECHNOLOGIES lui a opposé une fin de non recevoir pour les motifs suivants : " Nous vous informons que la suppression de la contribution DELALANDE est applicable pour toute fin de contrat de travail intervenue après le 1er janvier 2008, ce qui, en l'occurrence, n'est pas votre cas. De plus, nous vous précisons que la société ARO n'a jamais été dispensée du versement de cette contribution. En conséquence, nous ne pouvons rendre exécutoire les termes du courrier en date du 2 juin 2006. "

M. X... a renouvelé sa demande par courrier du 27 août 2008, et le 12 octobre 2008, la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES a réitéré son refus.
M. X... a saisi le conseil de prud'hommes du Mans en lui demandant de condamner la société ARO WELDING TECHNOLOGIES à lui verser les sommes suivantes :
*22 337, 34 ¿ nets à titre de complément d'indemnité transactionnelle, avec intérêts légaux à compter du 2 octobre 2008 et capitalisation des dits intérêts au 2 octobre de chaque année suivante,
*5 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi des engagements contractuels,
*2 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 27 janvier 2012, rendu après vaine tentative de conciliation, le conseil de prud'hommes du Mans a débouté M. X... de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à verser à la société ARO WELDING TECHNOLOGIES la somme de 500 ¿ au titre de l'article 700 du code procédure civile, ainsi qu'à payer les dépens.
Pour statuer comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a considéré " qu'il appartient à M. X... d'obtenir l'engagement de Pôle Emploi qu'elle (la contribution Delalande) ne sera jamais réclamée, ce qu'il n'a pas fait ".
M. X... a interjeté appel de ce jugement par lettre postée le 3 février 2012.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 17 octobre 2013, reprises et soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. X... demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de condamner la société ARO WELDING TECHNOLOGIES à lui verser les sommes de :-22 337, 34 ¿ nets à titre de complément d'indemnité transactionnelle et ce, avec intérêts légaux à compter du 2 octobre 2008 et capitalisation des dits intérêts au 2 octobre de chaque année suivante,-7000 ¿, et non plus 5000 ¿, à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi,-2000 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et celle de 2000 ¿ sur le même fondement au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel, outre la condamnation de la société ARO WELDING TECHNOLOGIES aux entiers dépens d'appel.

M. X... rappelle que la contribution supplémentaire dite « contribution Delalande » a été instituée par la loi no 87-518 du 10 juillet 1987 ; que cette contribution était due par toute entreprise au régime d'assurance chômage de l'UNEDIC en cas de licenciement d'un salarié âgé de plus de cinquante ans ; qu'elle a été supprimée au 1er janvier 2008 ; que pour qu'elle soit due, le fait générateur de cette contribution supposait que trois éléments soient cumulativement réunis :- une rupture du contrat de travail,- concernant un salarié âgé de 50 ans et plus,- une admission du salarié licencié à une allocation d'assurance chômage sous réserve des cas d'exonération limitativement énumérés par l'article L 321-13 du code du travail ;

M. X... expose qu'en droit, par application de l'article 1168 du code civil, l'obligation est conditionnelle lorsqu'on la fait dépendre d'un événement futur et incertain, soit en la suspendant jusqu'à ce que l'événement arrive, soit en la résiliant selon que l'événement arrivera ou n'arrivera pas ; qu'aux termes de l'article 1176 du code civil, lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement arrivera dans un temps non fixe, la condition peut toujours être accomplie, et n'est censée défaillie que lorsqu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera pas ; que l'article 1177 du code civil dit encore que lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement n'arrivera pas, dans un temps dont la durée n'est pas déterminée, elle n'est accomplie que lorsqu'il est certain que l'événement n'arrivera pas.
M. X... soutient que s'il a fait l'objet d'un licenciement pour motif personnel, alors qu'il était âgé de 53 ans, la troisième condition nécessaire à une réclamation légitime de Pôle Emploi au titre de la contribution Delalande n'a pas été remplie, puisqu'ayant retrouvé un emploi avant même la fin de son préavis, en contrat de travail à durée indéterminée, il n'a pas été inscrit aux ASSEDIC (Pôle Emploi) et n'a perçu aucune allocation chômage ; qu'il n'existe pas de risque que Pôle Emploi formalise ultérieurement cette demande, la rupture du contrat de travail à prendre en compte pour la soumission à la contribution Delalande étant la dernière précédant l'inscription comme demandeur d'emploi, et que cette rupture ne peut plus désormais être celle intervenue avec la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES, du fait de son embauche en contrat de travail à durée indéterminée le 1er septembre 2006 par la sas SAITEK ; qu'il justifie d'ailleurs être inscrit à Pôle Emploi depuis le 11 février 2011 en raison d'une rupture du contrat de travail intervenue le 23 janvier 2011, sans qu'aucune réclamation n'ait été adressée par cet organisme à la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES au titre de la contribution Delalande.
M. X... indique qu'il a, face aux refus réitérés de la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES d'exécuter l'accord du 2 juin 2006, et effectuant ainsi des diligences qui incombaient pourtant à cette société, interrogé, par l'intermédiaire de son conseil, Pôle Emploi qui lui a répondu en ces termes : " Lorsque l'intéressé reprend une activité au cours du délai de carence et que, de ce fait, aucune allocation de chômage n'est versée, la contribution n'est pas due. Enfin, après consultation de nos fichiers, je vous confirme que votre client n'a bénéficié d'aucune ouverture de droits aux allocations d'assurance chômage suite à la rupture de son contrat de travail intervenue fin 2006 puisqu'il a déclaré une reprise d'activité dès le 1er septembre 2006 ".

M. X... soutient qu'il ressort de ce courrier que la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES n'a pas et n'aura jamais, à payer la contribution Delalande du fait de la rupture du contrat de travail conclu avec elle, et qu'il fait donc quant à lui la preuve de l'existence de l'obligation dont il lui réclame l'exécution ; que la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES en revanche ne rapporte pas la preuve de l'extinction de son obligation, alors que c'est à celui qui se dit libéré de son obligation de le prouver ;
Il soutient encore qu'au surplus et en application de l'article L244-3 du code de la sécurité sociale, le délai de prescription en matière de cotisations sociales étant de 3 ans plus l'année en cours, et le licenciement ayant été notifié le 30 mai 2006, aucun organisme social ne peut donc plus exiger quelque contribution sociale que ce soit à ladite société de ce chef.
M. X... explicite le calcul aboutissant à la somme de 22 337, 34 ¿ et observe que la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES ne discute pas ce montant.
M. X... ajoute que la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES pouvait très facilement interroger l'ASSEDIC (Pôle Emploi) en sa qualité d'employeur, mais qu'elle n'a effectué aucune diligence et ce faisant a fait preuve de résistance pour ne pas honorer l'engagement pris au titre de l'accord transactionnel ; que l'article 1178 du code civil énonce que " la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement. " ; que cette attitude l'a privé d'une somme substantielle pendant de longues années et l'a contraint à engager une action judiciaire, ce qui lui a causé un préjudice particulier, dont il demande réparation ;
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 29 juillet 2013, reprises et soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter M. X... de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
La sas ARO WELDING TECHNOLOGIES affirme que la lettre du 2 juin 2006 a été rédigée " in extrémis et dans la précipitation ", au moment de la signature de la transaction, à la demande de M. X....
Elle rappelle que les deux hypothèses prévues par ce document comme entraînant un versement de somme à M. X... sont précisément définies, et qu'il s'agit :- du remboursement de la contribution Delalande, dans le cadre de la suppression de celle-ci par la loi,- de la dispense du versement de cette contribution par Pôle Emploi.

Elle relève qu'elle n'a reçu aucun remboursement au titre de la contribution Delalande et que M. X... le reconnaît.
Quant à la dispense de versement de la contribution, s'appuyant sur les dispositions de l'article 1315 du code civil, qui énonce que " celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. ", la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES soutient qu'en conséquence, il appartient à M. X... de prouver que la dispense de paiement de la contribution Delalande est acquise pour elle de manière certaine, et non pas hypothétique, sans quoi ultérieurement, le paiement qu'il lui réclame pourrait s'avérer indu ; que l'appelant inverse la charge de la preuve lorsqu'il affirme qu'il appartient à l'entreprise de prouver qu'elle est libérée de son obligation à son égard alors que, puisqu'il se prétend créancier, il lui incombe de rapporter la preuve de la réalisation de la condition stipulée à l'acte.
Elle relève que Pôle Emploi n'a jamais statué sur la rupture du contrat de travail de M. X..., et que rien ne permet, en l'état, d'affirmer qu'il n'est pas susceptible de le faire ; que lorsque M. X... l'a sollicité, cet organisme a refusé de prendre le moindre engagement, ne serait-ce que par voie d'attestation, laquelle n'est, déjà, pas créatrice de droit, et permet en conséquence le revirement ; que la décision de dispenser l'entreprise du paiement de la contribution Delalande appartient à Pôle Emploi et que le juge prud'homal n'a pas compétence pour prendre à sa place une décision à caractère administratif et fiscal, en disant que la contribution Delalande n'est pas due ;
La sas ARO WELDING TECHNOLOGIES conteste enfin avoir résisté abusivement et manqué à la bonne foi, alors qu'elle n'a pas plus de prérogatives à l'égard de Pôle Emploi que M. X..., et se serait heurtée selon elle à la même réponse dénuée d'effet ; que M. X... n'indique pas quel moyen de coercition elle aurait pu employer pour obtenir de cet organisme une décision opposable à tous.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la transaction du 2 juin 2006 :
Aux termes de l'article 1168 du code civil une obligation est conditionnelle lorsqu'on la fait dépendre d'un événement futur et incertain, soit en la suspendant jusqu'à ce que l'événement arrive, soit en la résiliant, selon que l'événement arrivera ou n'arrivera pas ;
L'accord du 2 juin 2006, conclu entre les parties, est ainsi libellé :
" En complément de l'indemnité transactionnelle et conformément à nos discussions, je vous confirme notre accord de vous faire bénéficier de 50 % des sommes qui seraient récupérées par ARO dans le cadre de la suppression de la contribution Delalande et du remboursement qui serait effectué par les ASSEDIC au bénéfice de ARO, dans un délai maximum d'un mois. Il en serait de même si ARO était dispensée du versement de cette contribution Delalande. " ;
Cet accord vise une obligation de la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES à l'égard de M. X..., conditionnelle puisque dépendant de la réalisation d'un événement à venir et non certain, et suspendue jusqu'à sa survenance ;
Il mentionne comme événements conditionnant la réalisation de l'obligation soit le remboursement de la contribution Delalande par Pôle Emploi, soit la " dispense " du paiement de la dite contribution ;
La sas ARO WELDING TECHNOLOGIES ne remet pas en cause l'existence, ni le libellé de ce texte, et ne conteste pas la réalité de l'engagement en résultant pour elle à l'égard de M. X..., qui est de devoir verser à l'intéressé la moitié de la somme correspondant au montant de la contribution Delalande résultant de la rupture du contrat de travail conclu le 9 juillet 1992 entre les parties, si elle obtient de Pôle Emploi le remboursement d'un paiement acquitté par elle à ce titre, ou si elle est " dispensée " de paiement, et ce dans le délai maximum d'un mois à compter du remboursement ou de la dispense ;
Il est acquis aux débats que la sas ARO WELDING n'a effectué aucun paiement entre les mains de Pôle Emploi au titre de la contribution Delalande, et que l'organisme social ne lui a rien réclamé ;
La contribution Delalande a été instaurée par la loi du 10 juillet 1987 qui la met à la charge de l'employeur en cas de rupture du contrat de travail d'un salarié âgé de 50 ans et plus ouvrant droit pour celui-ci au versement de l'allocation chômage ;
La loi du 30 décembre 2006 a prévu la suppression de cette contribution supplémentaire, à compter du 1er janvier 2008 ;
La première condition visée par l'accord du 2 juin 2006, soit le remboursement par Pôle Emploi à la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES de sommes versées par l'entreprise au titre de la contribution Delalande, en conséquence de la suppression de celle-ci, ne peut donc se réaliser dans l'avenir, dès lors que son licenciement à été notifié à M. X... le 30 mai 2006, et que la suppression de la contribution Delalande, aux termes de la loi du 30 décembre 2006, ne concerne que les ruptures du contrat de travail intervenues à compter du 1er janvier 2008 ;
Les parties sont d'accord sur ce point ; constatant qu'aucun paiement n'a été effectué par l'entreprise au titre de la contribution Delalande et de la rupture du contrat de travail de M. X..., et que Pôle Emploi n'a adressé aucune demande de règlement à la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES, elles s'opposent en revanche sur la réalisation de la seconde condition, qui est celle d'une " dispense " de l'employeur du versement de la contribution Delalande ;
Le remboursement d'une somme par Pôle Emploi à la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES caractérisait une condition de nature positive ;
Dès lors que la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES reste soumise à l'application de la loi du 10 juillet 1987 du fait de la date de rupture du contrat de travail de M. X..., la " dispense " mentionnée par l'accord du 2 juin 2006 ne peut consister qu'en une absence de réclamation de paiement par Pôle Emploi, et cette condition a donc une nature négative ;
Aux termes de l'article 1177 du code civil, lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement n'arrivera pas dans un temps fixe, ou, comme c'est le cas en l'espèce, dans un temps non déterminé, elle n'est accomplie " que lorsqu'il est certain que l'événement n'arrivera pas " ;
La sas ARO WELDING TECHNOLOGIES ne soutient pas être libérée de son obligation de paiement à l'égard de M. X..., telle qu'elle résulte de l'accord du 2 juin 2006, et elle n'a par conséquent pas à justifier de cette libération ;
Elle s'oppose cependant à l'exécution de l'obligation, réclamée par M. X..., en arguant de ce que la condition stipulée à l'acte n'est pas réalisée, aucune " dispense " d'un versement de sommes au titre de la contribution Delalande n'étant acquise pour elle, et l'absence de réclamation de Pôle Emploi à ce titre n'étant pas définitive ; qu'il n'est donc pas certain que l'événement n'arrivera pas, alors que seule cette certitude peut caractériser la réalisation de la condition sous laquelle l'obligation a été contractée ;
L'article 1315 du code civil énonce que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ;
Il appartient par conséquent à M. X... de rapporter la preuve que la condition sous laquelle la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES a contracté une obligation à son égard est réalisée ;
M. X... fait valoir que la rupture du contrat de travail conclu le 9 juillet 1992 avec la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES est intervenue le 30 mai 2006 et qu'il exécutait encore son préavis dont le terme était au 30 novembre 2006, lorsqu'il a été embauché, le 1er septembre 2006, en contrat de travail à durée indéterminée par la sas SAITEK ;
Il affirme qu'à l'expiration du préavis afférent à la rupture du contrat de travail conclu avec la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES il n'a pas été admis à l'allocation de sommes au titre de l'assurance chômage, et il en justifie en produisant le courrier que lui a adressé, sur la demande de son conseil, Pôle Emploi le 16 février 2012, et dans lequel cet organisme indique : " Après consultation de nos fichiers, je vous confirme que votre client n'a bénéficié d'aucune ouverture de droits aux allocations d'assurance chômage suite à la rupture de son contrat de travail intervenue fin 2006 puisqu'il a déclaré une reprise d'activité dès le 1er septembre 2006. "

L'article L 321-13 du code du travail, applicable avant le 1er janvier 2008 et par conséquent applicable au litige, énonce que " Toute rupture du contrat de travail d'un salarié d'un âge déterminé par décret ouvrant droit au versement de l'allocation d'assurance prévue à l'article L351-3 entraîne l'obligation pour l'employeur de verser aux organismes visés à l'article L351-21 une cotisation dont le montant est fixé par décret dans la limite de douze mois de salaire brut calculé sur la moyenne mensuelle des salaires versés au cours des douze derniers mois travaillés. "
Il résulte de l'application combinée de ce texte et des dispositions de l'article D 321-8 du code du travail, également applicable au litige, qu'outre les conditions tenant à la rupture du contrat de travail et à l'âge du salarié concerné, la " cotisation " visée par la loi est due par l'employeur si, en outre et de manière cumulée avec les deux précédentes, se trouve réalisée pour le salarié la condition d'ouverture d'un droit au versement de l'allocation d'assurance chômage ;
A défaut de la réalisation de ces trois conditions cumulées, la cotisation supplémentaire dite " contribution Delalande ", n'est pas due ;
Dans le courrier que Pôle Emploi a adressé le 16 février 2012 au conseil de M. X..., cet organisme, après avoir exposé qu'il ne peut délivrer une " attestation " afférente à la situation de la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES au regard de la soumission à la contribution Delalande, car il " s'oblige à une stricte neutralité dans ce type de litige ", indique apporter en revanche aux débats des précisions sur, d'une part, " les textes applicables aux faits de l'espèce " et d'autre part, sur " la situation de M. X... " ;
Pôle Emploi rappelle dans son écrit les dispositions de l'article L321-13 du code du travail, et celles de la directive Unedic no24-02 du 24 mai 2002, mentionnant que " La contribution est due dès l'instant où il y a versement d'au moins une allocation d'assurance chômage. Lorsque l'intéressé reprend une activité (....) au cours du délai de carence et que de ce fait aucune allocation de chômage n'est versée, la contribution n'est pas due. " ;

Pôle Emploi ajoute qu'il a consulté ses fichiers, et constaté que " M. X... n'a bénéficié d'aucune ouverture de droits aux allocations d'assurance chômage suite à la rupture de son contrat de travail intervenue fin 2006 " ;

La rupture du contrat de travail à prendre en considération est la dernière précédant l'inscription comme demandeur d'emploi ;
Il ressort du libellé du courrier délivré par Pôle Emploi à M. X..., qui est sans équivoque ni ambiguïté, que cet organisme a examiné les conditions de la rupture du contrat de travail conclu entre M. X... et la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES au regard des dispositions de la loi du 10 juillet 1987, puisqu'il indique avoir constaté que M. X... n'a bénéficié d'aucune ouverture de droits aux allocations d'assurance chômage à la suite de cette rupture, du fait de la déclaration d'une reprise d'activité au 1er septembre 2006 ;
En énonçant ce constat, il en analyse aussi les effets, puisqu'il renvoie aux dispositions du code du travail et de la directive Unedic, afférentes à la soumission à la contribution Delalande, et rappelle ainsi que " si aucune allocation de chômage n'est versée ", ce qui est le cas de M. X..., " la contribution n'est pas due " ;
Il se déduit donc nécessairement de ce libellé que Pôle Emploi ne peut pas réclamer dans l'avenir à la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES paiement de la contribution Delalande, puisqu'il est désormais certain qu'il a examiné la situation litigieuse, et qu'il a observé que les conditions légales de soumission au versement de la cotisation supplémentaire ne sont pas réunies ;
Dès lors que cet examen a été fait par l'organisme social, il n'existe plus aucune incertitude sur la réalisation de la condition stipulée à l'acte du 2 juin 2006 et il est en conséquence certain que, selon les termes de l'article 1177 du code civil, " l'événement n'arrivera pas ", c'est-à-dire qu'il est définitivement acquis que Pôle Emploi ne réclamera pas à la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES versement de la cotisation Delalande ;
La sas ARO WELDING TECHNOLOGIES ajoute aux dispositions de l'accord pris le 2 juin 2006 avec M. X... lorsqu'elle soutient que la " dispense " de paiement énoncée dans cet acte doit prendre la forme d'une attestation de Pôle Emploi ou plus encore d'une décision de l'organisme social " à caractère administratif, créatrice de droit ", alors que la soumission ou non de la société au versement de la cotisation supplémentaire au titre de la rupture du contrat de travail de M. X... résulte du seul examen des faits au regard des critères légaux, tels que Pôle Emploi les rappelle ; cet examen est de nature objective et non susceptible du " revirement " invoqué par l'employeur ;
Il appartient d'autre part bien à la cour de vérifier, ayant déterminé que la charge de la preuve incombe à M. X..., que la condition de réalisation de l'obligation souscrite par la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES à son égard est intervenue ;
M. X... ayant rapporté la preuve de la réalisation de la condition sous laquelle a été contractée à son égard par la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES l'obligation visée à l'accord du 2 juin 2006, il est fondé, sans que la cour ait à examiner son second moyen, à réclamer l'exécution de la dite obligation ;
Le calcul qu'il a effectué par application des dispositions de l'article D 321-8 du code du travail n'est pas contesté par la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES, ni dans ses modalités, ni dans son résultat ;
Par voie d'infirmation du jugement, la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES est condamnée à payer à M. X... la somme de 22 337, 34 ¿ nets, qui correspond à 50 % du montant de la contribution Delalande, tel qu'il est visé à l'accord du 2 juin 2006 ;
Sur la résistance abusive et le manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi :
L'accord du 2 juin 2006 ne mettait à la charge de la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES aucune obligation de diligence de nature à dissiper l'incertitude sur la réalisation de la condition visée, et M. X... ne démontre pas, ni même n'allègue qu'elle en ait, dans les termes de l'article 1178 du code civil, empêché l'accomplissement en faisant obstacle à la réalisation de l'événement ;
Peu importe par conséquent qu'elle ait su, ainsi qu'en témoigne le courrier qu'elle a adressé le 2 octobre 2008 au conseil de M. X..., que celui-ci n'avait pas perçu d'allocations d'assurance chômage du fait de la rupture, survenue le 30 mai 2006, du contrat de travail conclu le 9 juillet 1992 ;
Ne prétendant pas être libérée de son obligation à l'égard de M. X..., elle n'avait pas de motif à solliciter de Pôle Emploi qu'il lui précise sa position à son égard quant aux effets de la rupture du contrat de travail de M. X... et à sa soumission, en tant qu'employeur, au paiement de la contribution Delalande ;
M. X..., qui réclame l'exécution de l'obligation et doit par conséquent la prouver, a quant à lui pu obtenir de Pôle Emploi les éléments d'informations utiles au soutien de sa réclamation puisque, ainsi que l'a cour l'a relevé, la certitude sur la réalisation de la condition dépendait non de la " décision " de Pôle Emploi, mais de l'examen par cet organisme des faits, soit des conditions de la rupture du contrat de travail et des déclarations faites par le salarié et l'employeur à ce titre, au regard des critères énoncés par la loi du 10 juillet 1987 ;
Aucune mauvaise foi de la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES dans la réalisation de l'événement visé à l'accord du 2 juin 2006 n'est caractérisée, et M. X... est, par voie de confirmation du jugement, débouté de sa demande de dommages et intérêts ;
Sur les intérêts :
Les intérêts sont dus au taux légal à compter du 25 mai 2011, date de réception par la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes du Mans, M. X... ne justifiant pas de la délivrance antérieure d'une sommation de payer ;

Les conditions visée à l'article 1154 du code civil étant réunies, la capitalisation des intérêts est ordonnée, à compter du 24 juin 2011, date d'enregistrement au greffe du conseil de prud'hommes des conclusions de M. X..., formant la demande ;

Sur les dépens et frais irrépétibles :
Les dispositions du jugement afférentes aux frais irrépétibles et aux dépens sont infirmées ;
La sas ARO WELDING TECHNOLOGIES, qui perd principalement le procès en cause d'appel, est condamnée à payer à M. X..., en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, la somme de 3000 ¿ et doit être déboutée de ses propres demandes à ce titre ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes du Mans du 27 janvier 2012 en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et manquements à l'obligation d'exécution de bonne foi des engagements contractuels,
L'infirme pour le surplus et, statuant à nouveau, ainsi qu'y ajoutant,
Condamne la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES à payer à M. X... au titre de l'accord conclu le 2 juin 2006 la somme de 22 337, 34 ¿ nets,
Dit que les intérêts sont dus au taux légal à compter du 25 mai 2011,
Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière dans les conditions de l'article 1154 du code civil, à compter du 24 juin 2011,
Condamne la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES à payer à M. X... la somme de 3000 ¿ pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, et la déboute de ses propres demandes à ce titre,
Condamne la sas ARO WELDING TECHNOLOGIES à payer les dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00259
Date de la décision : 17/12/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-12-17;12.00259 ?
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