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01/10/2013 | FRANCE | N°11/02778

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 01 octobre 2013, 11/02778


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 01 Octobre 2013

ARRÊT N clm/ GL
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02778.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 19 Octobre 2011, enregistrée sous le no 21 660

APPELANTE :
SARL ARGEDIS Parc des Erables-Bât 4 66 Route de Sartrouville 78232 LE PECQ CEDEX

représentée par Maître QUESTE substituant la SCP ENVERGURE AVOCATS (Me GEORGET), avocats au barreau de TOURS

INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURAN

CE MALADIE DE LA SARTHE 178 Avenue Bollée 72033 LE MANS CEDEX 9

représentée par Madame Cécile X..., munie...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 01 Octobre 2013

ARRÊT N clm/ GL
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02778.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 19 Octobre 2011, enregistrée sous le no 21 660

APPELANTE :
SARL ARGEDIS Parc des Erables-Bât 4 66 Route de Sartrouville 78232 LE PECQ CEDEX

représentée par Maître QUESTE substituant la SCP ENVERGURE AVOCATS (Me GEORGET), avocats au barreau de TOURS

INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE 178 Avenue Bollée 72033 LE MANS CEDEX 9

représentée par Madame Cécile X..., munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Juin 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame PINEL, greffier

ARRÊT : prononcé le 01 Octobre 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE :
Le 23 novembre 2009, Mme Nathalie Y..., salariée de la société ARGEDIS depuis le 6 mars 2002 en qualité d'agent d'entretien, a souscrit une déclaration de maladie professionnelle afférente à une épitrochléite et compression du nerf cubital. Cette déclaration était assortie d'un certificat médical initial établi le 3 novembre 2009 par le Dr Patrice Désignolle, mentionnant ces affections.
Après enquête, par courrier du 12 mai 2010, la Caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe (ci-après : la CPAM de la Sarthe) a notifié à la société ARGEDIS sa décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle et, plus précisément du tableau no 57 des maladies professionnelles, de l'épitrochléite droite.
Le 9 juillet 2010, contestant que la condition relative à l'exposition au risque soit remplie, la société ARGEDIS a saisi la commission de recours amiable de la CPAM de la Sarthe d'un recours afin que la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par sa salariée lui soit déclarée inopposable.
Le 12 avril 2011, elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'un recours à l'encontre de la décision de la CRA du 17 février 2011, notifiée par lettre du 21 février suivant, emportant rejet de sa demande.
Par jugement du 19 octobre 2011 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, rejetant le moyen tiré du défaut de preuve de l'exposition au risque, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans a :
- rejeté le recours formé par la société ARGEDIS ;- confirmé la décision de la commission de recours amiable de la CPAM de la Sarthe du " 21 février 2011 " qui a confirmé la prise en charge de la maladie déclarée le 23 novembre 2009 par Mme Nathalie Y... et déclaré cette prise en charge opposable à la société ARGEDIS.
Cette dernière a régulièrement relevé appel de ce jugement par lettre recommandée postée le 9 novembre 2011.
Les parties ont été convoquées par le greffe à l'audience du 22 novembre 2012 date à laquelle, en raison de la tardiveté des écritures de l'appelante, l'affaire a été renvoyée contradictoirement à l'audience du 18 juin 2013.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 16 novembre 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société ARGEDIS demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris ;- À titre principal, de juger que la maladie déclarée le 23 novembre 2009 par Mme Nathalie Y... ne réunit pas les conditions permettant sa prise en charge au titre de la législation professionnelle ;

- À titre subsidiaire, de lui déclarer inopposable cette décision de prise en charge.

Si l'employeur déclare ne pas contester que soient remplies en l'espèce les conditions relatives à la nature de la maladie diagnostiquée chez Mme Y... et prise en charge, à savoir une épitrochléite droite telle que mentionnée au tableau no 57 B des maladies professionnelles, et au délai de prise en charge, il soutient que la condition relative à l'exposition au risque n'est pas remplie, les travaux qu'accomplissait la salariée ne correspondant pas à ceux visés au tableau concerné en ce que, notamment :- contrairement à ce qu'a déclaré la salariée, les mouvements répétés d'adduction de la main et de flexion du poignet ne s'effectuaient pas durant plus d'une heure de travail continu ou plus de deux heures en discontinu et leur fréquence était inférieure à 2 fois par minute ;- la salariée n'était pas amenée à effectuer des mouvements répétés de pronation de la main, mais seulement des mouvements de pronosupination lors de travaux d'essorage ;- Mme Y... accomplissait des travaux variés et la multiplicité des tâches réalisées est incompatible avec la notion de " répétition des travaux ".
Il estime que, dès lors que lui et la salariée étaient en désaccord quant à la nature des mouvements accomplis ou de leur fréquence, et que les déclarations de la salariée étaient contradictoires, l'enquêteur aurait dû procéder à des vérifications sur place. Il fait grief à la caisse de n'avoir pris en considération que les déclarations de la salariée pour fonder sa décision. Il en conclut que, dès lors que l'une des conditions du tableau fait défaut, la présomption d'imputabilité ne peut pas jouer et que, faute pour Mme Y... de rapporter la preuve de l'exposition au risque, elle ne pouvait pas bénéficier d'une décision de prise en charge, en tout cas, cette décision doit lui être déclarée inopposable.
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 14 juin 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la Caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe demande à la cour de débouter la société ARGEDIS de son appel et de toutes ses prétentions, et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Elle oppose qu'il ressort des seules informations fournies par l'employeur au cours de l'enquête que Mme Y... était bien exposée au risque défini par le tableau no 57 B des maladies professionnelles en ce qu'elle accomplissait bien, de façon répétée, les mouvements visés par ce tableau, lequel n'exige aucune cadence. Elle fait observer que la variété des tâches n'implique pas nécessairement une variété des gestes réalisés.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu qu'en application des dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles bénéficie de la présomption d'origine professionnelle instituée par ce texte dès lors qu'elle a été contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau et que ces conditions sont remplies ; que, dans les rapports employeur/ caisse, c'est à cette dernière qu'il incombe de rapporter la preuve de la réunion de ces conditions ;
Attendu, comme l'ont exactement rappelé les premiers juges, les rapports assuré/ caisse et les rapports employeur/ caisse étant indépendants, que la société ARGEDIS ne peut pas remettre en cause la décision même du 12 mai 2010 par laquelle la CPAM de la Sarthe a reconnu le caractère professionnel de la maladie déclarée par Mme Nathalie Y... le 23 novembre 2009, cette décision étant définitivement acquise à la salariée ; que l'employeur peut seulement demander que cette décision lui soit déclarée inopposable ;
Attendu que la société ARGEDIS ne conteste pas que la maladie diagnostiquée chez Mme Y... corresponde bien à une épitrochléite du coude, droit en l'occurrence, maladie désignée au tableau no 57 B des maladies professionnelles, ni que le délai de prise en charge prévu par ce tableau ait été respecté ; Attendu, s'agissant de la condition relative à l'exposition au risque, que ce tableau détermine comme suit la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie : " Travaux comportant habituellement des mouvements répétés d'adduction ou de flexion et pronation de la main et du poignet ou des mouvements de supination et pronosupination " ;
Attendu qu'il ressort des débats et de l'enquête réalisée par la CPAM de la Sarthe que Mme Nathalie Y..., qui est droitière, occupe un emploi d'agent d'entretien dans un relai d'autoroute et ce, à temps plein, 40 heures par semaine et 8 heures par jour avec deux pauses de 10 minutes ;
Attendu que ses tâches, telles qu'elles résultent des déclarations de l'employeur, sont les suivantes : entretien régulier des bureaux, de la boutique, des réserves, nettoyage des vitres, des tapis de sol et des linéaires, entretien régulier du patio (mange-debout, tables et chaises), entretien régulier des toilettes, des lavabos et des douches, des sols des toilettes, nettoyage et remplissage des différents distributeurs, vidange et nettoyage des poubelles et des cendriers, réception des livraisons (une fois par semaine) et tenue de la caisse en cas d'affluence et de remplacement à assurer ; que l'employeur mentionne au titre des appareils utilisés une autolaveuse et un aspirateur ;
Attendu, comme l'a exactement souligné le tribunal, que la société ARGEDIS ne conteste pas que ces travaux aient impliqué pour Mme Y... la réalisation des mouvements définis au tableau 57 B relatif à l'épitrochléite du coude mais, invoquant le caractère varié des travaux accomplis, elle discute la fréquence des mouvements d'adduction de la main et de flexion du poignet, de même qu'elle conteste que les mouvements de pronation aient été répétés ;
Attendu, comme l'a exactement retenu le tribunal, que le fait que les travaux réalisés puissent être variés n'exclut pas qu'ils induisent la réalisation de mouvements répétés, étant souligné que, contrairement à ce que retient l'employeur, ce n'est pas de la répétition des travaux qu'il est question au tableau no 57 B mais de la répétition des mouvements induits par les travaux accomplis ;
Attendu que l'adduction est un mouvement qui rapproche la main du plan sagittal du corps, que la flexion du poignet rapproche la main de la face interne ou de la face externe de l'avant-bras, que la pronation est un mouvement de rotation vers l'intérieur qui ramène le pouce vers le plan sagital médian du corps tandis que la supination est un mouvement de rotation vers l'extérieur qui éloigne le pouce du plan sagital médian du corps ;
Attendu, s'agissant de travaux d'entretien réalisés 8 heures par jour sur une superficie aussi importante que celle représentée par un relai d'autoroute qui comporte de multiples surfaces à nettoyer, que les travaux de lavage et d'essuyage de toutes les surfaces telles que bureaux, meubles, tables, lavabos, surfaces autour et au-dessus des lavabos, linéaires de tous ordres, surfaces de carreaux de céramiques dans la ou les douches, surfaces vitrées de tous types (vitres, portes des meubles réfrigérants, façades des distributeurs de boissons etc...) impliquent pour Mme Y... la réalisation de mouvements répétés d'adduction et de flexion et pronation de la main et du poignet droits mais aussi de prono-supination en ce qu'ils entraînent le maniement d'une éponge ou d'un chiffon de gauche à droite et de droite à gauche avec le poignet fléchi surtout lorsque la surface nettoyée est verticale par rapport à l'opérateur ; que, nonobstant le fait que le tableau en cause ne pose aucune condition de cadence, compte tenu du temps de travail journalier de Mme Y... et de l'importance de la superficie et du nombre de surfaces à nettoyer, la société ARGEDIS ne peut pas sérieusement soutenir que la salariée n'effectue pas des mouvements d'adduction ou de flexion et pronation de la main et du poignet droits plus de deux heures par jour en discontinu et plus de 10 fois par minute, étant souligné que l'une des qualités requises par l'employeur et mentionnée dans la fiche de description du poste est la rapidité, qualité qui ne serait certainement pas considérée comme satisfaite si la salariée procédait au lavage et à l'essuyage des tables, linéaires, vitres etc... en réalisant moins de 10 mouvements par minute ;
Attendu que, dans ces conditions de temps de travail consacré au nettoyage et d'importance des superficies à traiter, le maniement des seaux, l'essorage des éponges et des serpillières, le maniement des vaporisateurs contenant les produits d'entretien et celui de l'autolaveuse et de l'aspirateur impliquent la réalisation de mouvements répétés de pronation de la main droite ;
Que, même en ne retenant que les éléments fournis par l'employeur, il en résulte donc bien que la salariée a été exposée au risque défini par le tableau no 57 B en ce que, s'agissant d'une droitière, son emploi d'agent d'entretien à temps plein dans un relai d'autoroute exploité par la société ARGEDIS l'amenait à accomplir des travaux comportant habituellement des mouvements répétés d'adduction ou de flexion et pronation de la main et du poignet ou des mouvements de supination et pronosupination ;
Que, toutes les conditions fixées par le tableau no 57 B étant réunies, la présomption d'imputabilité édictée par l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale trouve à s'appliquer à la maladie déclarée par Mme Nathalie Y... le 23 novembre 2009 et, l'employeur s'avérant défaillant à la détruire, il est mal fondé à demander que la décision de reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie lui soit déclarée inopposable ;
Que le jugement déféré doit en conséquence être confirmé en toutes ses dispositions ;
Attendu, l'appelante perdant son recours, qu'elle sera condamnée au paiement du droit prévu par l'article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, lequel droit ne peut excéder le dixième du montant mensuel prévu à l'article L. 241-3 du même code ;

PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne la société ARGEDIS au paiement du droit prévu par l'article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale liquidé à la somme de 308, 60 ¿.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/02778
Date de la décision : 01/10/2013
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-10-01;11.02778 ?
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