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24/09/2013 | FRANCE | N°11/03023

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 24 septembre 2013, 11/03023


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 24 Septembre 2013

ARRÊT N CLM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 03023.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 18 Novembre 2011, enregistrée sous le no 10/ 00710

APPELANT :
Monsieur Dominique X...... 72700 ROUILLON
représenté par la SCP HAY-LALANNE-GODARD-HERON-BOUTARD-SIMON, avocats au barreau du MANS

INTIMEE :
TFN PROPRETE OUEST venant aux droits de TFN PROPRETE ATLANTIQUE ZIN Rue des Frères Voisi

n 72021 LE MANS CEDEX 2
représentée par madame Elodie A..., muni (e) d'un pouvoir

COMPOSITION D...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 24 Septembre 2013

ARRÊT N CLM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 03023.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 18 Novembre 2011, enregistrée sous le no 10/ 00710

APPELANT :
Monsieur Dominique X...... 72700 ROUILLON
représenté par la SCP HAY-LALANNE-GODARD-HERON-BOUTARD-SIMON, avocats au barreau du MANS

INTIMEE :
TFN PROPRETE OUEST venant aux droits de TFN PROPRETE ATLANTIQUE ZIN Rue des Frères Voisin 72021 LE MANS CEDEX 2
représentée par madame Elodie A..., muni (e) d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Juin 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT : prononcé le 24 Septembre 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE :
Après avoir fait diffuser une annonce relative à la recherche d'un responsable de service comptable implanté au Mans, suivant contrat de travail à durée indéterminée du 27 mai 1994 à effet au 1er juin suivant contenant une clause de mobilité, la société COMATEC, qui avait pour activité la réalisation de toutes prestations de services dans Ie domaine du nettoyage industriel, a embauché M. Dominique X... en qualité de " responsable comptable rattaché à l'adjoint du directeur financier chargé des comptabilités du groupe ".
Par courrier du 31 mai 1994, la société COMATEC a fait connaître à M. X... que, dans le cadre de son contrat de travail, il était affecté au siège des sociétés COMATEC-RENOSOL à Paris mais qu'après entretien et avec son accord, il serait détaché pour exercer des responsabilités identiques au Mans et ce, à effet au 1er juin 1994 pour la durée de l'absence de M. Y....
La convention collective applicable est celle des entreprises de propreté.
Par courrier du 28 mars 1995, la société COMATEC indiquait à M. Dominique X... qu'après divers entretiens et avec son accord, elle lui confirmait qu'à compter du 1er avril 1995, son lieu de travail serait situé au Mans, à l'adresse suivante : " Société COMATEC ZI Nord, rue des Frères Voisin ", sans modification des autres stipulations de son contrat de travail.
Le même contrat de travail s'étant poursuivi à compter du 1er janvier 2002 avec la société RENOSOL Atlantique, le 14 décembre 2001, cette dernière et M. X... ont signé un avenant au contrat de travail aux termes duquel il était stipulé que le salarié continuerait d'exercer ses fonctions au sein de la direction régionale RENOSOL Atlantique située : ZI rue des Frères Voisin-72021 LE MANS et que, compte tenu de ses fonctions, il s'engageait à effectuer " des déplacements professionnels partout où les nécessités de son travail l'exigeront ". A compter du 26 août 2009, le contrat de travail s'est poursuivi avec la société TFN Propreté Atlantique. Dans le dernier état de la relation de travail, M. X... percevait un salaire forfaitaire mensuel de 3 675 ¿ outre un treizième mois et une prime annuelle de résultat.
Par courrier recommandé du 9 juin 2010 faisant suite à des échanges verbaux, cette dernière a fait connaître à M. X... que, dans le cadre de la nouvelle organisation de ses services, notamment du pôle comptabilité, et conformément à la clause de mobilité contenue dans son contrat de travail, elle le mutait au lieu de son siège administratif situé à Vitry sur Seine (94) à compter du 12 juillet 2010.
Par courrier circonstancié du 19 juin 2010, contestant qu'une clause de mobilité puisse lui être valablement opposée, M. X... a confirmé à son employeur qu'il refusait cette mutation.
Le 30 juin 2010, déniant toute modification ou suppression de son poste et maintenant qu'il était bien tenu au respect d'une clause de mobilité figurant dans son contrat de travail, la société TFN Propreté Atlantique a indiqué à M. X... que sa mutation était maintenue et serait effective à compter du 12 juillet 2010.
Par courrier du 9 juillet 2010, ce dernier a de nouveau protesté de ses droits et maintenu son refus. Il ne fait pas débat qu'il ne s'est pas présenté sur le nouveau lieu de travail qui lui avait été désigné.
Après l'avoir convoqué, par courrier du 19 juillet 2010, à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 29 juillet suivant qui fut reporté au 6 août 2010 en raison de l'arrêt de travail pour maladie prescrit à M. X..., par lettre du 10 août 2010, la société TFN Propreté Atlantique lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse tenant à une violation de ses obligations contractuelles caractérisée par le non-respect de la clause de mobilité contenue dans son contrat de travail du 27 mai 1994 au regard de son refus d'être muté à Vitry sur Seine.
Le 21 décembre 2010, M. Dominique X... a saisi le conseil de prud'hommes pour contester cette mesure. Dans le dernier état de la procédure, il sollicitait un rappel de treizième mois et de prime annuelle de résultat prorata temporis, ainsi qu'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement du 18 novembre 2011 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes du Mans a :- débouté M. X... de sa demande tendant à voir déclarer illicite la clause de mobilité figurant à son contrat de travail et jugé que son licenciement était bien fondé sur une cause réelle et sérieuse, le déboutant en conséquence de sa demande indemnitaire formée de ce chef ;- condamné la société TFN Propreté Ouest venant aux droits de la société TFN Propreté Atlantique à lui payer les sommes suivantes : ¿ 3 163, 56 ¿ bruts au titre du treizième mois prorata temporis, ¿ 4 815 ¿ au titre de la prime annuelle de résultat prorata temporis, ¿ 750 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- débouté le salarié de ses demandes relatives à l'incidence de congés payés sur les sommes allouées au titre du treizième mois et de la prime annuelle de résultat ;- condamné la société TFN Propreté Ouest aux dépens.
M. Dominique X... a régulièrement relevé appel de cette décision par lettre recommandée postée le 12 décembre 2011 en limitant son appel aux dispositions l'ayant débouté de ses demandes tendant à voir déclarer la clause de mobilité illicite et son licenciement injustifié.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 1er février 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Dominique X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré licite la clause de mobilité et son licenciement justifié, et en ce qu'il l'a débouté de sa demande indemnitaire de ce chef et de sa demande au titre des congés payés sur le rappel de prime de résultat ;- statuant, à nouveau, de juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la société TFN Propreté Ouest à lui payer de ce chef une indemnité de 58 000 ¿, sans préjudice d'une indemnité de procédure de 2 000 ¿ ;- d'assortir la somme de 4 815 ¿ des congés payés afférents ;- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions.
A l'appui de sa position, il fait valoir que la clause de mobilité invoquée par l'employeur est illicite pour ne contenir aucune délimitation de zone géographique de mobilité et au motif qu'elle ne répond à aucun intérêt de l'entreprise s'agissant, non d'un poste de salarié productif, mais d'un poste de responsable comptable dont les fonctions s'exercent indépendamment de la répartition géographique des chantiers confiés. Il soutient en outre qu'il résulte des avenants successivement apportés à son contrat de travail que son lieu de travail a été contractualisé à l'établissement du Mans, de sorte que la clause de mobilité initialement prévue a été abandonnée, et que l'employeur n'était pas fondé à rompre le contrat de travail en invoquant la violation d'une disposition contractuelle qui ne trouve plus à s'appliquer. Il estime encore que la proposition de poste qui lui a été faite dans le cadre de la mutation ne procédait pas d'une attitude loyale de la part de l'employeur en ce qu'il s'avère que ce poste avait été pourvu par le recrutement de Mme Z... intervenu le 19 avril 2010. Il estime que, dans le cadre de la restructuration qui a motivé sa mutation, et dès lors qu'il s'agissait de modifier son contrat de travail, l'employeur, qui a fait erreur quant à la nature de la procédure de licenciement à mettre en oeuvre, aurait dû lui laisser un délai de réflexion de trente jours.
S'agissant de la prime de résultat, il argue de ce qu'elle ne relevait pas d'un usage, mais qu'elle constituait un élément de salaire en ce qu'il ressort de l'examen de ses bulletins de salaire qu'il percevait cette prime depuis dix ans au moins, laquelle, dans le dernier état de la relation de travail, s'élevait à la somme annuelle de 5 500 ¿ ; que, s'agissant d'un élément de salaire, il est bien fondé à solliciter l'incidence de congés payés.
Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 22 mai 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, formant appel incident du seul chef de sa condamnation au paiement d'un rappel de prime de résultat, la société TFN Propreté Ouest demande à la cour :
- d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il l'a condamnée à payer à M. Dominique X... la somme de 4 815 ¿ bruts au titre de la prime annuelle de résultat 2010 prorata temporis et de débouter le salarié de ce chef de prétention ;- de confirmer le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;- de débouter M. X... de son appel et de toutes ses prétentions en cause d'appel.
Arguant de ce que le courrier du 28 mars 1995 et l'avenant du 14 décembre 2001 prévoient expressément que les autres clauses du contrat de travail restent inchangées, l'employeur soutient que ces documents contractuels n'ont pas eu pour effet de contractualiser le lieu de travail de M. X... au Mans et de faire perdre son applicabilité à la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail du 27 mai 1994. Il ajoute que cette clause de mobilité est valable en ce que, d'une part, elle définit bien la zone géographique de mobilité à laquelle elle s'applique, à savoir, " l'ensemble de la métropole ", et qu'il s'agit d'une zone délimitée, de sorte que le salarié savait très bien à quoi il s'engageait quand il a signé son contrat de travail, d'autre part, elle répond à l'intérêt de l'entreprise, même pour un poste de responsable comptable, notamment dans les cas où, comme en l'espèce, pour des raisons de logistique et d'efficacité, une réorganisation s'avère nécessaire par regroupement de fonctions au siège social. Il argue également de ce que cette clause a été mise en oeuvre de bonne foi à l'égard du salarié dans la mesure où cette mutation a été préparée et accompagnée, notamment par la proposition d'aménagements d'horaires destinés à faciliter ses déplacements et à préserver sa vie de famille, et où toutes les possibilités existantes pour préserver son emploi lui ont été soumises plusieurs mois avant la mise en oeuvre du transfert du service de comptabilité générale au siège social. Il fait valoir également que le délai de prévenance a bien été respecté puisque, outre les informations données au salarié dès le 12 janvier 2010 au sujet du transfert des services de comptabilité générale au siège social et des pourparlers qui se sont alors engagés entre eux à ce sujet, il a bien respecté un délai de prévenance de plus d'un mois entre la notification de la mutation et la date d'effet de cette mesure.
Il en conclut qu'en présence d'une clause de mobilité valable, la mutation de M. X... constituait une simple modification de ses conditions de travail procédant du pouvoir de direction de l'employeur et qu'il était tenu d'accepter ; que son refus caractérise une violation de l'obligation contractuelle de mobilité qui justifie son licenciement pour cause réelle et sérieuse. Il précise que c'est en raison des nombreux refus verbaux du salarié, à compter du 12 janvier 2010, d'accepter le poste de responsable comptable à Vitry sur Seine, qu'il a dû pourvoir ce poste par le recrutement de Mme Z....
Pour s'opposer à la demande en paiement de la prime de résultat, il fait valoir qu'une telle prime a un caractère aléatoire comme dépendant des résultats obtenus par le salarié et que M. X... ne justifie pas que ses résultats de l'années 2010 lui ouvraient droit au paiement de ladite prime.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu qu'il convient d'observer à titre liminaire que ni l'appel principal, ni l'appel incident ne portent sur les dispositions du jugement relatives au rappel de treizième mois et au rejet de la demande d'incidence de congés payés de ce chef ; que la cour n'est donc pas saisie de ces points ;
Sur la demande en paiement de la prime de résultat 2010 :
Attendu que le contrat de travail du 27 mai 1994 prévoyait que la rémunération de M. X... serait constituée d'un salaire mensuel brut d'un montant de 13 846, 15 francs sur treize mois, d'une participation en fonction des résultats de l'entreprise et d'un intéressement en fonction des résultats de l'entreprise ;
Attendu qu'il ressort des bulletins de salaire de M. X... afférents à la période du 1er mars 2001 au 31 janvier 2010 inclus qu'il a perçu chaque année une prime de résultat ; qu'en mars 2001, cette prime lui a été versée par la société COMATEC-RENOSOL pour un montant de 35 000 francs, puis la société RENOSOL Atlantique lui a versé cette prime chaque année de 2002 à 2007 inclus, les deux premières années pour un montant de 5 488 ¿ et les années suivantes pour un montant de 5 500 ¿ qui n'a pas varié ; qu'en 2008 et 2009, les bulletins de salaire mentionnent comme employeur la société VEOLIA Propreté Nettoyage et Multiservices Atlantique, laquelle a versé à l'appelant au mois de janvier de chacune de ces années une prime de résultat de 5 500 ¿ ; et attendu qu'en janvier 2010, la société TFN Propreté Atlantique lui a également versé une prime de résultat d'un montant de 5 500 ¿ ;
Que le salarié justifie ainsi de ce que, depuis dix ans au moins avant la rupture de son contrat de travail, tous ses employeurs successifs lui ont payé une prime de résultat annuelle dont le montant n'a pas varié ; qu'il résulte des termes du contrat de travail corroborés par les bulletins de salaire qu'il s'agit d'un élément de rémunération d'origine contractuelle qui n'apparaît pas soumis à une quelconque condition de calcul et non d'une prime à caractère aléatoire ; que le jugement déféré doit en conséquence être confirmé, d'une part, en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à M. X... la somme de 4 815 ¿ au titre de la prime de résultat à laquelle il a droit en considération du temps qu'il a passé au sein de l'entreprise en 2010, compte tenu du préavis de trois mois applicable, d'autre part, en ce qu'il a rejeté la demande d'incidence de congés payés dans la mesure où cette prime n'est pas affectée par la prise du congé annuel ;
Sur le licenciement :
Attendu que la lettre de licenciement adressée à M. Dominique X... le 10 août 2010, et qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée : " Monsieur,... Dès le 12 janvier 2010, vous avez été informé par Messieurs Pascal C... et Frédéric B... du regroupement à Vitry sur Seine de l'ensemble des services comptables régionaux. Nous vous avons alors exposé que votre poste de Responsable Comptable devait donc être géographiquement situé à Vitry sur Seine. Le poste que nous vous proposions à Vitry sur Seine était un poste identique à celui que vous occupiez au Mans, à savoir le poste de Responsable Comptable TFNP ATLANTIQUE et Appros et Techniques, avec un rattachement hiérarchique à Monsieur Frédéric B.... Les missions dévouées au poste de Responsable Comptable sont notamment la comptabilité générale des filiales, l'établissement des Etats financiers des filiales, la Fiscalité, les relations avec les organes de contrôle extérieur : Commissaire aux comptes, contrôleur fiscaux..., être garant de la bonne application des règles comptables et fiscales ainsi que des procédures du Groupe, l'encadrement des équipes comptables. Il n'y avait donc aucune modification de votre poste, puisque vous assuriez déjà ces missions au Mans. Des entretiens ont eu lieu avec Messieurs Pascal C... et Frédéric B... en date des 12 janvier, 9 février, 29 mars et 12 avril 2010. Ces entretiens avaient pour objectifs de vous informer de l'évolution géographique du service comptabilité et donc de connaître votre position quant à cette mutation. Lors de l'entretien en date du 12 janvier 2010, vous avez immédiatement répondu par la négative, puis vous avez demandé un temps de réflexion. Lors de l'entretien en date du 9 février 2010, vous avez refusé la proposition, et ce malgré les aménagements que nous vous avions proposé, à savoir être présent à Vitry sur Seine du lundi après-midi au vendredi matin. Le 29 mars 2010, nous avons réitéré notre proposition et vous nous avez demandé à nouveau un délai de réflexion. Enfin, le 12 avril 2010, vous nous avez informé de votre refus définitif. Aussi, et en raison de votre refus, nous avons effectivement été dans l'obligation de recruter un Adjoint au Directeur Comptable. Cependant, nous vous avons alors proposé un poste équivalent au vôtre, à savoir la responsabilité de la comptabilité de l'Ile de France de TFNP, poste que vous avez également refusé. Lors de notre entretien, nous vous avons confirmé que cette proposition avait bien été effective et que vous l'aviez refusée dans la mesure où ce poste était déjà pourvu. Il convient de préciser que votre homologue partant à la retraite en octobre 2010 et que le chiffre d'affaire de la région Ile de France étant important, vous auriez exercé vos fonctions de manière pleine et entière ; le poste proposé étant également un poste de Responsable comptable. Aussi, par lettre en date du 9 juin 2010, nous vous avons muté au Siège Administratif à Vitry sur Seine, cette mutation étant effective à compter du 12 juillet 2010. Force est de constater que vous ne vous êtes jamais présenté à Vitry sur Seine : vous nous avez adressé un arrêt de travail en date du 3 juillet 2010, arrêt qui prenait fin le 13 juillet 2010 et vous auriez donc du vous présenter le 15 juillet 2010. Cependant, le 15 juillet 2010 et les jours qui ont suivi vous avez continué à vous présenter au Mans. Vous avez de nouveau été en arrêt de travail du 21 juillet au 31 juillet 2010 et êtes de nouveau revenu sur votre poste de travail au Mans à l'issue de cet arrêt. Par ce comportement, vous avez donc réitéré votre refus d'être muté sur Vitry sur Seine. Or, cette mutation respectait parfaitement les dispositions de votre contrat de travail et notamment votre clause de mobilité qui figure dans votre contrat de travail initial, contrat en date du 27 mai 1994 et qui n'a jamais été modifiée. Contrairement à ce que vous continuez de prétendre notamment dans votre courrier du 9 juillet dernier, nous vous rappelons que cette mutation ne constitue qu'un simple changement de vos conditions de travail et qu'elle relève à ce titre du pouvoir de direction de l'employeur. En effet, il ne s'agissait en aucun cas d'un changement de poste puisque nous vous avons proposé un poste de Responsable Comptable ; ce que vous continuez également à nier. Votre refus de mutation contrevient à vos obligations contractuelles. Aussi, compte tenu de vos agissements, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.... " ;
Attendu que la lettre se poursuit par les dispositions relatives au préavis de trois mois que le salarié a été dispensé d'exécuter, au droit individuel à la formation, à la levée de la clause de non-concurrence, à la remise des documents de fin de contrat et des matériels mis à la disposition du salarié et à l'offre de maintien de la couverture prévoyance et frais de santé ;
Attendu que, pour juger le licenciement litigieux fondé sur une cause réelle et sérieuse, les premiers juges ont estimé que la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail du salarié définissait une zone géographique d'application précise et expressément limitée, à savoir, " la métropole ", correspondant au champ géographique d'exercice de l'activité de la société, que cette clause de mobilité n'avait pas été abandonnée, que la mutation de M. X... avait été opérée de façon loyale, dans le respect de sa vie familiale et sans changement de ses fonctions et de sa rémunération et qu'il était étonnant qu'il ait refusé sa mutation à Vitry sur Seine alors qu'il avait finalement procédé à des recherches d'emploi sur un secteur géographique bien plus éloigné du Mans ;
Attendu que, pour être valable, une clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géographique d'application et ne peut pas conférer à l'employeur la possibilité d'en étendre unilatéralement la portée ;
Attendu que la clause de mobilité insérée dans le contrat de travail conclu le 27 mai 1994 est ainsi libellée : " Clause de mobilité : Compte-tenu de l'activité de l'entreprise, cette dernière peut-être amenée à traiter des chantiers sur l'ensemble de la métropole. La signature du présent contrat de travail entraîne l'acceptation de la part de l'intéressée d'une éventuelle mutation. " ; Attendu qu'ainsi libellée, cette clause ne répond pas à l'exigence de précision à laquelle a droit le salarié en ce que, d'une part, la seconde phrase, qui seule contient l'énonciation de l'obligation de mobilité, est exempte de la moindre indication de la zone géographique dans le cadre de laquelle la mutation de M. X... était susceptible de s'opérer, d'autre part, s'agissant d'un responsable comptable, la référence à " la métropole ", contenue dans la première phrase, ne permet pas d'apporter la précision requise en ce qu'elle désigne seulement le champ géographique d'exécution des chantiers, lesquels sont nécessairement situés en dehors des locaux de l'entreprise, alors que l'exercice des fonctions de responsable comptable est parfaitement indépendant de la situation et de la répartition géographique des chantiers confiés à l'employeur ; que ce dernier ne peut donc pas prétendre avoir informé précisément M. X... au sujet de la zone géographique d'application de la clause de mobilité le concernant en faisant référence à la zone géographique d'exécution des fonctions relevant de la logistique, c'est à dire des fonctions relevant de la mise en oeuvre de l'activité de nettoyage ; Que, par voie d'infirmation du jugement déféré, la clause de mobilité invoquée par l'employeur sera en conséquence déclarée illicite ;
Attendu, en outre, que M. Dominique X... soutient à juste titre que son lieu de travail a été contractualisé au Mans par l'avenant du 14 décembre 2001 en ce qu'il énonce, après la lettre du 28 mars 1995 qui fixait son lieu de travail à cet endroit, non seulement qu'il " continuera à exercer ses fonctions au sein de la direction régionale " située au Mans, mais aussi qu'il s'engage à effectuer des déplacements professionnels partout où les nécessités de son travail l'exigeront ; qu'en effet, il ressort de façon claire et précise de cet avenant que les parties ont bien entendu contractualiser le lieu de travail de M. X... à la direction régionale du Mans en assortissant la fixation de ce lieu de travail d'une clause de mobilité expressément limitée à des missions ou déplacements temporaires et rendus nécessaires par le strict exercice de ses fonctions de responsable comptable ; que ces nouvelles dispositions contractuelles fixant le lieu de travail et limitant l'obligation de mobilité de M. X... à des déplacements professionnels temporaires exigés par ses fonctions de comptable ont nécessairement emporté abandon de la clause de mobilité initiale à laquelle s'est substituée la clause de mobilité prévoyant des déplacements temporaires ; et attendu que, si elle renvoie à d'autres clauses du contrat de travail, la stipulation de l'avenant du 14 décembre 2001 selon laquelle " Les autres clauses du contrat de travail de Monsieur X... restent inchangées et demeurent valables " ne peut pas renvoyer à la clause de mobilité contenue dans le contrat du 27 mai 1994 ;
Attendu, cette clause de mobilité étant illicite ou, à tout le moins ayant été abandonnée par fixation du lieu de travail de M. X... au Mans et stipulation d'une obligation de mobilité limitée à des déplacements temporaires, que l'employeur n'est pas fondé à soutenir que le salarié aurait failli à ses obligations contractuelles en refusant sa mutation à Vitry sur Seine et en ne se présentant pas sur ce lieu de travail ; qu'en l'absence d'autre motif énoncé dans la lettre de licenciement, la rupture prononcée le 10 août 2010 doit, par voie d'infirmation du jugement entrepris, être déclarée dépourvue de cause réelle et sérieuse ;
Attendu, M. Dominique X..., justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, qu'il peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, selon lequel l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, lesquels se sont élevés en l'espèce à la somme de 22 050 ¿ ;
Attendu qu'au moment de la rupture, le salarié était âgé de 50 ans, avait trois enfants à charge et comptait plus de 16 ans d'ancienneté ; qu'il justifie de très nombreuses recherches d'emploi et avoir perçu l'allocation d'aide au retour à l'emploi du 31 décembre 2010 à fin février 2001 pour un montant mensuel de l'ordre de 2 200 ¿, puis avoir retrouvé une activité salariée sur laquelle il ne fournit pas de précisions ; attendu qu'en considération de ces éléments et de la situation particulière de l'appelant, la cour dispose des éléments nécessaires pour lui allouer la somme de 58 000 ¿ en réparation du préjudice subi ;
Attendu qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement par la société TFN Propreté Ouest au Pôle Emploi des Pays de la Loire des indemnités de chômage versées à M. Dominique X... du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de deux mois d'indemnités de chômage ;
Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu, M. X... prospérant en son appel, que la société TFN Propreté Ouest sera condamnée aux dépens d'appel et à lui payer, en cause d'appel, une indemnité de procédure de 2 000 ¿, le jugement entrepris étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré licite la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail du 27 mai 1994 et débouté M. Dominique X... de ses demandes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Le confirme en toutes ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau et ajoutant au jugement déféré, Déclare illicite la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail du 27 mai 1994 ;
Dit que le licenciement de M. Dominique X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne la société TFN Propreté Ouest à lui payer de ce chef une indemnité de 58 000 ¿ ;
La condamne à lui payer la somme de 2 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Ordonne le remboursement par la société TFN Propreté Ouest au Pôle Emploi des Pays de la Loire des indemnités de chômage versées à M. Dominique X... du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de deux mois d'indemnités de chômage ;
Condamne la société TFN Propreté Ouest aux dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/03023
Date de la décision : 24/09/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-09-24;11.03023 ?
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