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24/09/2013 | FRANCE | N°11/02984

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 24 septembre 2013, 11/02984


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 24 Septembre 2013
ARRÊT N CLM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02984.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 07 Mars 2008, enregistrée sous le no 07/ 00579

APPELANT :
Monsieur Régis X...... 72000 LE MANS
comparant, assisté de Maître Virginie CONTE, avocat substituant la SCP MEMIN-PIGEAU, avocats au barreau du MANS

INTIMEE :
SAS RFM ENTREPRISES 28 rue François 1er 75008 PARIS
représentée par MaÃ

®tre Pierre LUBET, avocat au barreau de PARIS-No du dossier PHL/ ELM

COMPOSITION DE LA COUR :
En ap...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 24 Septembre 2013
ARRÊT N CLM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02984.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 07 Mars 2008, enregistrée sous le no 07/ 00579

APPELANT :
Monsieur Régis X...... 72000 LE MANS
comparant, assisté de Maître Virginie CONTE, avocat substituant la SCP MEMIN-PIGEAU, avocats au barreau du MANS

INTIMEE :
SAS RFM ENTREPRISES 28 rue François 1er 75008 PARIS
représentée par Maître Pierre LUBET, avocat au barreau de PARIS-No du dossier PHL/ ELM

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Juin 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT : prononcé le 24 Septembre 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE :
Selon une décision du 31 mars 1998, le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel a autorisé la société RFM West à exploiter un service de radio par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence dénommé RFM West sur les zones du Mans, Sillé-le-Guillaume et Saint-Calais. Relevant de la catégorie C, la société RFM West répondait au critère de station de radio locale affiliée à un réseau national, s'agissant du groupe RFM lui-même dépendant du groupe Lagardère.
La société RFM West a embauché M. Régis X... en qualité de rédacteur, reporter, présentateur, avec le statut de cadre, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à effet au 18 janvier 1999. Dans le cadre de ses fonctions, M. X... intervenait au titre du programme radiophonique local RFM diffusé sur les zones du Mans, de Sillé-le-Guillaume et de Saint Calais, la structure des émissions diffusées n'ayant jamais changé pour être des émissions essentiellement nationales avec des décrochages locaux. Dans le dernier état de la relation de travail, le salarié percevait une rémunération mensuelle brute de 1. 645, 59 ¿ à laquelle s'ajoutaient une prime matinale mensuelle de 76, 22 ¿ et une prime matinale trimestrielle de 228, 66 ¿. La convention collective applicable est la convention collective des journalistes.
Courant 2000, la société RFM West est devenue une filiale de la société RFM Entreprises pour 100 % de son capital social.
Par décision du 4 avril 2006 publiée au Journal Officiel le 14 mai 2006, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a transféré à la société RFM Entreprises l'autorisation d'exploiter un service de radio par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence sur les zones du Mans, Sillé-le-Guillaume et Saint-Calais jusqu'alors exploité par la société RFM West, et ce, en catégorie D (national) au lieu de la catégorie C (local) auparavant consentie. Il ne fait pas débat que la société RFM Entreprises s'est vue ainsi transférer l'autorisation d'exploiter en catégorie D un certain nombre de fréquences jusqu'alors exploitées en catégorie C.
Par lettre recommandée du 15 mai 2006, la société RFM West a fait connaître à M. Régis X... qu'en vertu de cette décision, son contrat de travail était de plein droit transféré à la société RFM Entreprises à compter du 14 mai 2006 sans modification de ses fonctions, de son lieu de travail et de sa rémunération.
Par lettre recommandée du 16 mai 2006, la société RFM Entreprises a convoqué M. Régis X... à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique fixé au 12 juin suivant.
Par courrier séparé du même jour, elle le rendait destinataire d'une fiche descriptive de son cursus et de ses aspirations professionnelles, à renseigner en vue de l'entretien préalable afin d'optimiser la recherche de reclassement annoncée dans le courrier de convocation.
Par courriers des 26 mai, 12 et 21 juin 2006, la société RFM Entreprises a soumis à M. Régis X... 18 postes présentés comme postes de reclassement.
Par courrier du 15 juin 2006, conformément aux dispositions de l'article L. 321-7 du code du travail, devenu L. 1233-46, elle a informé la direction départementale du travail de ce que la décision prise par le Conseil supérieur de l'audiovisuel l'amenait à licencier 14 salariés (6 employés et 8 cadres) dont 3 salariés dépendant de l'établissement secondaire du Mans.
Par courrier du même jour, elle a fait connaître à M. X... qu'il était dispensé d'activité à compter du 24 juin 2006.
Par lettre recommandée du 24 juillet 2006, M. Régis X... s'est vu notifier par la société RFM Entreprises son licenciement pour motif économique.
Le 28 décembre 2006, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes pour contester cette mesure dont il sollicitait la nullité, en tout cas qu'elle soit déclarée injustifiée et obtenir le paiement d'une indemnité de 45 000 ¿ pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans préjudice d'une indemnité de procédure.
L'affaire a donné lieu à une ordonnance de radiation du 5 octobre 2007 pour défaut de diligences.
Par jugement du 7 mars 2008 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes du Mans a jugé le licenciement justifié, débouté M. Régis X... de l'ensemble de ses prétentions et la société RFM Entreprises de sa demande fondée sur 700, condamné le salarié aux dépens.
M. Régis X... a régulièrement relevé appel de ce jugement par lettre recommandée postée le 17 mars 2008.
Après avoir été radiée, l'affaire a été réinscrite au rôle le 6 décembre 2011 et les parties ont été convoquées à l'audience du 4 juin 2013.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 6 décembre 2011, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Régis X... demande à la cour :
- d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;- de déclarer son licenciement nul en raison de la nullité de la procédure diligentée par la société RFM Entreprises aux motifs : ¿ tout d'abord, que le transfert de son contrat de travail à la société RFM Entreprises procède d'une fraude à la loi et qu'en indiquant à la direction départementale du travail et de l'emploi de la Sarthe qu'elle n'était dotée d'aucune institution représentative du personnel en raison de son effectif, alors qu'elle admet une évolution de ses effectifs au cours des années 2003 à 2006 et que le licenciement collectif qui l'a concerné est intervenu dans le cadre du groupe Lagardère, l'entretien préalable ayant été conduit par la DRH du pôle FM du groupe, la S. A. S RFM Entreprises a fait en sorte de créer artificiellement un cadre juridique afin d'éviter les contraintes d'une consultation des représentants du personnel donnant lieu à des mesures de reclassement ;
¿ en second lieu, que la notification faite le 15 juin 2006 au directeur départemental du travail et de l'emploi ne répond pas aux exigences des articles L. 1233-46 et L. 1233-49 du code du travail en ce que la société RFM Entreprises ne lui a pas communiqué toutes les informations devant être transmises aux représentants du personnel ;
- à tout le moins, de déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse aux motifs : ¿ tout d'abord que la lettre de licenciement vise comme cause économique des difficultés économiques et non des mutations technologiques, et que les difficultés économiques alléguées ne sont pas démontrées, la lettre de licenciement ne faisant état que d'un futur hypothétique et le groupe Lagardère, au niveau duquel le licenciement collectif en cause est intervenu, affichant des résultats financiers particulièrement satisfaisants ; ¿ en second lieu, que la société RFM Entreprises a violé son obligation de reclassement à son égard ;- en conséquence, de condamner l'intimée à lui payer une indemnité de 50 000 ¿ pour licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- en tout cas, de juger que la société RFM Entreprises n'a pas respecté les critères relatifs à l'ordre des licenciements et de condamner la société RFM Entreprises à lui payer de ce chef la somme de 50 000 ¿ à titre de dommages et intérêts ;- en tout état de cause, de la condamner à lui payer la somme de 3 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 30 mai 2013, soutenues oralement à l'audience devant la cour, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société RFM Entreprises demande à la cour :
- à titre principal, de débouter M. Régis X... de ses demandes pour licenciement nul ou, en tout cas injustifié aux motifs que : ¿ le transfert des contrats de travail des salariés de la société RFM WEST vers la société RFM Entreprises, dont celui de M. X..., est exclusif de toute fraude à la loi ; ¿ la procédure de licenciement collectif pour motif économique a été régulièrement conduite au niveau de l'entreprise et, son effectif n'ayant jamais atteint l'effectif requis pour la mise en oeuvre de la réunion et de la consultation des représentants du personnel, elle n'avait pas y procéder ; en tout état de cause, un défaut d'information et de consultation des représentants du personnel constitue une irrégularité de la procédure mais n'est pas susceptible de rendre le licenciement nul ; ¿ elle a transmis à la DDTE toutes les informations requises par la loi ; ¿ aux termes de la lettre de licenciement, la rupture a été motivée non seulement par les difficultés économiques structurelles de la société RFM WEST, mais aussi par la nécessité de réorganiser l'ensemble des radios du pôle FM en vue d'assurer la sauvegarde de la compétitivité de ce secteur d'activité menacé par la concurrence accrue, ces causes économiques étant parfaitement justifiées par les pièces versées aux débats desquelles il ressort que la suppression du poste de M. Régis X..., consécutive à la réorganisation du pôle FM, s'imposait au regard de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'activité radio du groupe ; ¿ elle a respecté son obligation de reclassement à l'égard du salarié, lequel n'a jamais répondu aux multiples offres qui lui ont été adressées ;
- de débouter M. Régis X... de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect des critères d'ordre des licenciements dans la mesure où, les 14 salariés que comptait l'entreprise étant concernés par la procédure de licenciement, elle n'avait pas à mettre en place un ordre des licenciements ; qu'en outre, l'appelant ne justifie d'aucun préjudice qui serait résulté pour lui du non-respect des critères d'ordre des licenciements qu'il allègue ;
- à titre subsidiaire, de limiter à l'équivalent de six mois de rémunération le montant de l'indemnité susceptible d'être allouée à M. X..., celui-ci ne justifiant pas d'un préjudice plus ample ;
- en tout état de cause, de le condamner à lui payer la somme de 3 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de la procédure.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande en nullité du licenciement :
Attendu qu'en application des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail devenu l'article L. 1224-1 du même code, la décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel du 4 avril 2006, publiée au Journal Officiel le 14 mai suivant, de transférer à la société RFM Entreprises l'autorisation d'exploiter, en catégorie D, la fréquence radio jusqu'alors exploitée par la société RFM WEST en catégorie C, de sorte que, pour cette exploitation, la société RFM Entreprises a succédé à sa filiale, a emporté de plein droit transfert des contrats de travail des quatre salariés de cette dernière à la société RFM Entreprises ; qu'aucune fraude à la loi n'est caractérisée ni démontrée par M. X... s'agissant des conditions dans lesquelles s'est réalisé le transfert de son contrat de travail le 15 mai 2006 ;
Attendu que la procédure de licenciement pour motif économique est conduite au niveau de l'entreprise, en l'occurrence, au niveau de la société RFM Entreprises ;
Attendu que le licenciement économique collectif qui a concerné M. X... a touché 14 salariés de la société RFM Entreprises anciennement salariés de filiales de cette dernière, dont 3 salariés de la société RFM WEST sur les 4 salariés que comptait cette structure ;
Attendu que la société RFM Entreprises, société holding, justifie de ce qu'elle ne comptait aucun salarié au début de l'année 2006 et que son effectif a atteint quinze salariés à compter du 14 mai 2006 ; Attendu, son effectif n'ayant jamais atteint l'effectif requis pour la mise en place d'une représentation du personnel, à savoir, 11 salariés sur une période de 12 mois consécutifs ou non sur les trois dernières années, qu'en vertu des articles L. 321-4-1 et L. 321-7 du code du travail alors applicables, il lui incombait de notifier directement le projet de licenciement au directeur départemental du travail en portant à sa connaissance les indications prévues par ce dernier, à savoir, nom et adresse de l'entreprise, nature de l'activité de l'entreprise ou de l'établissement, l'effectif, le nombre de licenciements envisagés et les modifications éventuellement intervenues dans les informations déjà communiquées, et en lui adressant les documents prévus par l'article R. 321-4 du code du travail ; Attendu que la société RFM Entreprises a régulièrement procédé à cette notification par lettre recommandée du 15 juin 2006 en fournissant les éléments et renseignements requis ;
Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. Régis X... de sa demande en nullité de son licenciement ;

Sur la demande tendant à voir déclarer le licenciement dépourvu et cause réelle et sérieuse :
Attendu que la lettre de licenciement adressée à M. Régis X... le 24 juillet 2006, et qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée : " Monsieur, Nous faisons suite par la présente à l'entretien préalable auquel vous avez été convoqué le 12 juin 2006 en présence de Florence Y..., Directrice des Ressources Humaines du Pôle FM du groupe Lagardère Active Broadcast et auquel vous vous êtes présenté accompagné de Madame Dominique Z..., représentante syndicale. Au cours de cet entretien. Nous vous avons exposé les raisons pour lesquelles nous étions contraints d'envisager votre licenciement pour motif économique. En effet, comme vous le savez, le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, réuni en Assemblée Plénière le 4 avril 2006, a autorisé notre société à exploiter en catégorie D un certain nombre de fréquences dont RFM sur les zones du Mans, de SiIlé-le-Guillaume et de Saint-Calais. Cette réorganisation, qui permet une réduction importante des coûts d'exploitation de nos fréquences, est indispensable pour sauvegarder la compétitivité des radios du Pôle FM (stations Europe 2 et RFM). Notre média est confronté à une concurrence accrue tant au niveau national que local. La multiplication des médias télés et Internet d'une part, le développement et la professionnalisation des radios de catégorie B, d'autre part, ont pour effet, une diminution importante de notre principale source de revenus, à savoir les ressources publicitaires et ce, malgré le maintien, au sein de nos structures, des fortes charges inhérentes à nos obligations spécifiques en terme de production de programmes locaux. Par ailleurs, l'ouverture en janvier 2007 du secteur de la grande distribution aux chaînes hertziennes ne manquera pas d'entraîner un transfert des ressources publicitaires au bénéfice de celles-ci et ce, au détriment, notamment, des radios. Il était donc crucial, afin d'assurer une exploitation équilibrée des radios du Pôle FM (stations Europe 2 et RFM) de réduire les coûts fixes de fonctionnement des fréquences locales par le biais d'un certain nombre de passages en catégorie D. Le passage en catégorie D de votre structure a été motivé à la fois par des résultats d'exploitation structurellement déficitaires sur le cumul des quatre dernières années et également par l'absence de perspective de redressement. En effet, sur l'entité qui vous employait, le déficit cumulé des résultats d'exploitation sur les quatre dernières années s'élève à 495 856 euros (et plus précisément, 129 544 ¿ pour l'exercice 2005, 106 393 ¿ pour l'exercice 2004 et 104 113 ¿ pour l'exercice 2003). De plus, nous n'avons aucune perspective de redressement de cette situation avérée critique financièrement. Le département de la Sarthe a souffert sur les années 2002 et 2003 du ralentissement de l'économie nationale et internationale de façon plus sensible que le reste de la région des Pays de Loire. La reprise de la croissance constatée en 2004 n'a eu que peu d'effet dans ce département. Ainsi, les effectifs des différents secteurs économiques après avoir reculé sur les deux années précédentes se sont stabilisés alors qu'au niveau régional ils étaient en hausse de 0. 1 %. Au-delà de ces indicateurs généraux, le secteur publicitaire sur la zone du Mans est très en retrait par rapport au reste de la région et notamment par rapport au Pôle Nantes-Angers-St Nazaire. Dans ces conditions, nous sommes contraints de mettre un terme à la diffusion de la fréquence RFM Le Mans, Sillé-le-Guillaume et Saint-Calais et, par voie de conséquence, de supprimer votre poste de rédacteur-reporter-présentateur local exclusivement rattaché au programme radiophonique local de RFM sur les zones du Mans, de Sillé-Ie-Guillaume et de Saint-Calais au sein de notre établissement secondaire sis 28 rue des Grandes Courbes au Mans (72000).... " ;
Attendu que la lettre se poursuit par les dispositions relatives aux propositions de reclassement faites au salarié et restées sans réponse, à la proposition d'adhérer à la convention de reclassement personnalisé, au préavis de deux mois, à la priorité de réembauche, à la levée de la clause de non-concurrence et à la remise des documents de fin de contrat ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué pour un ou plusieurs motifs, non inhérents à la personne du salarié, qui repose sur une cause économique (notamment, des difficultés économiques ou des mutations technologiques, mais aussi, la réorganisation de l'entreprise, la cessation non fautive d'activité de l'entreprise), laquelle cause économique doit avoir une incidence sur l'emploi du salarié concerné (suppression ou transformation) ou sur son contrat de travail, c'est à dire, emporter une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail ;
Et attendu qu'en application de l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés à son égard, et que son reclassement, sur un emploi de même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès de l'intéressé, sur un emploi de catégorie inférieure, ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel elle appartient ;
Attendu que, pour satisfaire aux exigences de ces textes et à celle de motivation de la lettre de licenciement, cette dernière doit énoncer, non seulement, l'une des causes économiques admises pour justifier le licenciement pour motif économique, mais aussi l'incidence de cette cause économique sur l'emploi ou sur le contrat de travail du salarié ;
Attendu, la réorganisation de l'entreprise constituant un motif économique de licenciement, qu'il suffit que la lettre de rupture fasse état de cette réorganisation et de son incidence sur le contrat de travail ; que l'employeur peut ensuite invoquer que cette réorganisation était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou à celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, ou qu'elle était liée à des difficultés économiques ou à une mutation technologique, et il appartient au juge de le vérifier, étant précisé que, si l'entreprise appartient à un groupe, les difficultés économiques ou la menace sur la compétitivité s'apprécient au niveau du secteur d'activité, tandis qu'en l'absence de groupe, elles s'apprécient au niveau de l'entreprise ;
Attendu qu'aux termes du courrier du 24 juillet 2006, le licenciement de M. Régis X... est motivé par la suppression de son emploi, suppression dont la réalité n'est pas discutée, consécutive à la réorganisation de l'ensemble des radios du Pôle FM du groupe Lagardère, à savoir, les stations Europe 2 et RFM, réorganisation dont il est précisé qu'elle était rendue nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité constitué par les radios du Pôle FM, compétitivité menacée par la concurrence accrue tant au niveau national qu'au niveau local, cette concurrence emportant corrélativement une diminution des ressources publicitaires permettant le financement de l'activité ; qu'aux termes de la lettre de licenciement, la société RFM Entreprises souligne donc l'impérieuse nécessité d'assurer une exploitation équilibrée des radios du Pôle FM, l'accès à cet équilibre passant par la réduction des coûts fixes de fonctionnement des fréquences locales par le biais d'un certain nombre de passages de catégorie C en catégorie D ;
Attendu que, dans le cadre du présent litige, la société RFM Entreprises maintient que la cause économique du licenciement de M. X... résidait bien dans la nécessité de réorganiser les radios du Pôle FM rendue nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de ce secteur d'activité ;
Attendu que la réorganisation de l'entreprise, motivée par la nécessité de sauvegarder sa compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, ne peut constituer une cause économique de licenciement que si l'employeur démontre l'existence d'une menace sur cette compétitivité et l'impossibilité d'y pallier dans le cadre de l'organisation existante ; Que, par contre, la réorganisation de l'entreprise conduite dans le seul souci d'améliorer son fonctionnement ou de privilégier son niveau de rentabilité au détriment de la stabilité de l'emploi ne constitue pas une cause économique de licenciement ;
Attendu qu'à l'appui de la menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité constitué par les radios du Pôle FM en raison de la concurrence accrue et des baisses corrélatives de rentrées publicitaires, la société RFM Entreprises se contente de verser aux débats des publications très générales émanant du Conseil supérieur de l'audiovisuel, du Ministère de la Culture et de journaux économiques traitant de la prépondérance de l'outil audiovisuel sur les médias plus traditionnels tels la presse écrite et la radio en matière d'information de proximité, de la multiplication des médias télévisuels tant nationaux que locaux, du développement de la télévision numérique ayant vu émerger de nouvelles chaînes gratuites, de la multiplication des médias digitaux tels que l'Internet et la téléphonie mobile, de la multiplication des stations de radio ; Mais attendu qu'à côté de ces considérations très générales, la société RFM Entreprises ne fournit aucun élément concret ni aucune donnée concrète de nature à faire apparaître de façon objective que sa compétitivité, dans son secteur d'activité, ou que la compétitivité des structures exploitant les radios Europe 2 et RFM ait été effectivement menacée et, à supposer cette menace avérée, que l'organisation existant en son sein et au sein de ces structures ait été impuissante à y pallier, étant observé que l'intimée non seulement ne justifie pas, mais n'invoque pas même qu'au moment du licenciement de M. X... elle-même ou les structures exploitant les radios du Pôle FM auraient été confrontées à des difficultés économiques ;
Qu'en effet, aux termes de la lettre de licenciement et dans le cadre de la présente instance, l'intimée se contente de rappeler les résultats structurellement déficitaires de la société RFM WEST en 2003, 2004 et 2005 ; mais attendu que, si la société RFM WEST a effectivement, au cours de ces années, enregistré un résultat d'exploitation négatif pour des montants qui ont varié d'un peu plus de 104 000 ¿ à près de 129 600 ¿, et si le résultat net, bénéficiaire pour 159 956 ¿ à la fin de l'exercice 2003 et pour 2 387 ¿ à la fin de l'exercice 2004, a été déficitaire de 13 467 ¿ en 2005, ces données, de même que celles relatives au manque de dynamisme économique au niveau du département de la Sarthe au cours de la même période et à l'absence de redressement prévisible de l'économie sur le plan local, ne permettent que de justifier le choix fait de transférer en catégorie D l'exploitation des fréquences sur les zones du Mans, de Sillé-le-Guillaume et de Saint-Calais auparavant exploitées en catégorie C ; que, pour autant, le caractère déficitaire de l'exploitation de ces fréquences en catégorie C par la société RFM WEST et les difficultés économiques en résultant pour cette dernière ne sont pas de nature à justifier le licenciement pour motif économique de M. X... prononcé par la société RFM Entreprises, société mère, qui ne justifie pas qu'elle ait connu elle-même de quelconques difficultés économiques au moment du licenciement de l'appelant et n'allègue même pas de telles difficultés, pas plus qu'il n'est justifié de difficultés économiques affectant le secteur d'activité constitué par les radios du Pôle FM à une époque contemporaine au licenciement de M. X... ;
Attendu que la réorganisation ayant présidé à la suppression de l'emploi du salarié ne peut pas, en conséquence, être considérée comme justifiée par la cause économique invoquée dans la lettre de licenciement à savoir la nécessité de préserver la compétitivité des radios du Pôle FM du groupe Lagardère ; que, par voie d'infirmation du jugement déféré et sans qu'il y ait lieu à examen du moyen tiré du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, le licenciement de M. Régis X... sera donc déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Qu'il n'y a pas lieu non plus à examen de la demande fondée sur le non-respect des critères relatifs à l'ordre des licenciements dans la mesure où elle est formée à titre subsidiaire et où le salarié ne peut, en tout état de cause, pas cumuler les indemnités pour perte injustifiée de son emploi et pour inobservation de l'ordre des licenciements ;
Attendu, M. Régis X..., qui ne sollicite pas sa réintégration, justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, qu'il peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, selon lequel l'indemnité à la charge de l'employeur ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois, lesquels se sont élevés en l'espèce à la somme de 11 088, 44 ¿ ; Attendu qu'au moment de la rupture de son contrat de travail, le salarié était âgé de 40 ans et comptait un peu plus de sept ans et demi d'ancienneté ; qu'il justifie avoir perçu des allocations de chômage jusqu'au 23 octobre 2011, date à compter de laquelle lui a été allouée l'allocation spécifique de solidarité pour une durée de six mois ; qu'il a suivi, courant 2007, une formation d'infographiste et de metteur en page qui n'a pas débouché sur un emploi ; qu'en mars 2007, il a présenté un syndrome dépressif qui a justifié une hospitalisation ; qu'il a été placé en invalidité deuxième catégorie à compter du 1er avril 2011 avec allocation, à titre temporaire, d'une pension d'invalidité d'un montant annuel de 9 771, 13 ¿ à compter de cette date ; qu'enfin, par décision du 24 août 2012, il a été reconnu travailleur handicapé à compter du 1er décembre 2011 pour une durée de deux ans avec attribution de l'allocation aux adultes handicapés ; Attendu qu'en considération de ces éléments, de la situation particulière de M. Régis X..., notamment de son âge et de son ancienneté au moment du licenciement, et de sa capacité à retrouver un emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 22 000 ¿ le montant de l'indemnité propre à réparer le préjudice résultant pour lui de la perte injustifiée de son emploi ;
Attendu qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement par la société RFM Entreprises au Pôle Emploi des Pays de la Loire des indemnités de chômage versées à M. Régis X... du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu, M. Régis X... prospérant en son recours que, par voie d'infirmation du jugement entrepris, la société RFM Entreprises sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel et à lui payer la somme de 2 500 ¿ au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, le jugement déféré étant confirmé en ce qu'il a débouté l'employeur de ce chef de prétention ;

PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté M. Régis X... de sa demande en nullité de son licenciement et la société RFM Entreprises de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
Déclare le licenciement de M. Régis X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamne la société RFM Entreprises à lui payer la somme de 22 000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement injustifié ainsi qu'une indemnité de 2 500 ¿ au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Ordonne le remboursement par la société RFM Entreprises au Pôle Emploi des Pays de la Loire des indemnités de chômage versées à M. Régis X... du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
Déboute la société RFM Entreprises de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
La condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/02984
Date de la décision : 24/09/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-09-24;11.02984 ?
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