COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N AL/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02585.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 21 Septembre 2011, enregistrée sous le no 10/ 01299
ARRÊT DU 21 Mai 2013
APPELANT :
Monsieur Damien X... ...49280 LA SEGUINIERE
comparant, assisté de Maître Roland ZERAH, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE :
SAS BFR. S VENANT AUX DROITS DE LA SA LASSOUDRY Parc Technologique 24 rue du bois Chaland-CE 2933 91090 LISSES
représenté par Maître Olivier RUPP, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Mars 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne LEPRIEUR, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, président Madame Anne DUFAU, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 21 Mai 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame ARNAUD PETIT, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******
FAITS ET PROCEDURE
M. X... a été engagé le 3 avril 2001 en qualité d'ingénieur commercial, statut cadre, par la société Lassoudry-aux droits de laquelle, à la suite d'une fusion, est venue la société BFR. S-, selon contrat à durée indéterminée prévoyant une rémunération brute mensuelle de 2 440 € outre un intéressement sur chiffre d'affaires.
Ladite société est spécialisée dans la fourniture à ses clients du secteur agro-alimentaire de matériels industriels de transformation. Est applicable aux relations entre les parties la convention collective du commerce de gros du 23 juin 1970.
Le contrat de travail précisait que l'intéressement sur chiffre d'affaires hors taxes annuel en " bon de commande " serait versé l'année suivante dès réception par la société du règlement de l'intégralité du montant des commandes concernées et que son mode de calcul était précisé en annexe. Il mentionnait en outre : " Le secteur géographique qui vous est attribué est précisé en annexe. (...) Celui-ci pourra être modifié en fonction de l'évolution du marché, des nécessités stratégiques et des programmes de ventes, sans que cela puisse vous donner droit à une quelconque indemnité que ce soit. (...) Vous devez assurer auprès des industriels la promotion, le conseil, et la vente de tout ou partie des matériels commercialisés par notre société. La liste exacte vous sera communiquée en début de chaque année dans le courrier relatif à votre secteur d'activité. Nous nous réservons le droit d'accepter ou de refuser une commande passée lorsque nous estimons qu'un risque est encouru. Ce refus sera notifié par courrier simple et annulera de ce fait le dit bon de commande. " Trois annexes étaient jointes à ce contrat : une annexe I prévoyant le mode de calcul de l'intéressement sur chiffre d'affaires, soit un pourcentage calculé en fonction du montant des bons de commandes, une annexe II listant les départements compris dans le secteur géographique du salarié et une annexe III indiquant la liste des matériels faisant partie de son programme de vente.
Le 30 mai 2008, il était adressé au salarié " une feuille de route " instituant un objectif de chiffre d'affaires, une prime quantitative et qualitative et fixant un mode de calcul de l'intéressement sur les ventes différent de celui jusqu'alors appliqué, un programme de vente comprenant de nouvelles marques et en supprimant d'autres ainsi qu'un secteur géographique incluant de nouveaux départements. Le salarié ne signait pas cette feuille de route qu'il considérait être constitutive d'une modification de son contrat de travail.
En juin, juillet puis août 2008, il se plaignait auprès de son employeur de ne pas avoir perçu la totalité de son intéressement pour l'année 2007.
Par lettre du 19 septembre 2008, la société indiquait son intention d'exiger désormais une application stricte des règles contractuelles : " (...) dans un souci d'équité, il sera procédé à une révision de vos commissions des trois dernières années en tenant compte des éventuels suppléments facturés ou avoirs établis après livraison. Toujours en application de votre contrat de travail, seuls les matériels concernés par celui-ci seront commissionnés, et ce après paiement de la totalité des sommes dues par nos clients. "
Un nouvel avenant au contrat de travail, daté du 15 octobre 2008, était soumis à M. X... ; celui-ci ne le signait pas.
Le salarié saisissait le 27 octobre 2008 le conseil de prud'hommes d'Angers de demandes tendant au paiement de rappels de commissions (la société accusera réception de sa convocation devant le bureau de conciliation le 28 octobre 2008).
Par lettre datée du 28 octobre 2008, la société informait M. X... de ce que, en calculant les commissions sur les seuls matériels faisant partie de la gamme attribuée sur le secteur défini par son contrat de travail, il s'avérait qu'il avait perçu un trop perçu de commissions de 16 971, 43 €, qu'elle lui demandait de rembourser dans un délai de 3 mois. Par diverses lettres postérieures, elle lui indiquait que le matériel Formcook ne faisait pas partie de son programme de vente.
En leur dernier état, les demandes soumises par M. X... à la juridiction prud'homale tendaient au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail et au paiement d'indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement abusif, outre des rappels de commissions et intéressement ainsi que les congés payés afférents.
Par jugement du 21 septembre 2011, le conseil de prud'hommes a condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes : * 8 103, 06 € à titre de rappel de commissions pour l'année 2007, outre 810, 31 € de congés payés afférents ; * 1 616, 51 € à titre de rappel de commissions pour l'année 2008 et 161, 65 € de congés payés afférents ; * 6 000 € à titre de restitution de commissions déduites dans le plan d'épargne d'entreprise ; * 1 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Le conseil a par contre jugé que les manquements de la société à ses obligations n'étaient pas suffisamment graves pour justifier la résiliation et a débouté le salarié du surplus de ses prétentions. La société a été condamnée aux dépens.
Le salarié a régulièrement interjeté appel.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Le salarié, dans le dernier état de ses conclusions dites " récapitulatives ", conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué les sommes précitées, son infirmation pour le surplus, le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date de l'arrêt et la condamnation de la société au paiement des sommes suivantes, avec intérêts de droit à compter de l'introduction de la demande et délivrance des bulletins de paie correspondants : * 16 971, 43 € au titre des commissions indûment prélevées et 1 697, 14 € au titre des congés payés afférents ; * 16 705, 61 € au titre des commissions dues pour les ventes de la marque Form-cook et congés payés afférents, soit 1 670, 56 € ; * 100 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; * 16 590 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 659 € de congés payés afférents ; * 21 582 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ; * 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir ne pas avoir perçu en totalité son intéressement. Par ailleurs, à la suite de son refus d'accepter un avenant à son contrat de travail qui constituait une modification de son contrat de travail, la société a, afin de faire pression sur lui, brutalement décidé de demander le remboursement de commissions qui lui avaient été versées en prétextant que ces affaires concernaient des marques ne figurant pas dans son contrat de travail. Or, depuis son entrée dans l'entreprise, il a toujours perçu une rémunération sur toutes les marques, même celles non mentionnées dans son contrat de travail, et a reçu des formations sur des matériels de marques non inscrites à son contrat. Il souligne que la mise à jour de l'annexe relative aux marques n'a jamais été faite.
Ainsi, des commissions pour un montant total de 16 705, 61 €, afférentes à des ventes de matériels Formcook pour 570 000 € à la société Delta Daily Food en avril 2008 et pour 45 880 € à la société Fleury Michon en décembre 2008, ne lui ont pas été versées. D'autre part, il a été indûment prélevé sur sa rémunération la somme de 16 971, 43 € en " remboursement " de commissions versées au titre de la vente de matériels Formcook, en octobre 2007 à la société Fleury Michon pour un montant de 487 000 € et en janvier 2008 à la société Soulié restauration pour un montant de 460 000 €.
Le fait pour l'employeur de ne pas respecter son obligation de verser le salaire constitue un motif de résiliation du contrat de travail ; en outre, l'employeur a eu une attitude discriminatoire à son égard, refusant d'exécuter le contrat de travail de bonne foi, de manière identique pour tous les salariés exerçant les mêmes fonctions. L'action en résiliation produit les effets d'un licenciement nul.
La société demande quant à elle le débouté intégral, sauf en ce qui concerne le chef relatif aux prélèvements faits dans le cadre du plan d'épargne d'entreprise, pour lequel elle sollicite la confirmation. Subsidiairement, elle conclut à la réduction à son minimum légal de l'indemnité, soit 16 420, 40 €, qui serait éventuellement allouée sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, la fixation de l'indemnité compensatrice de préavis à 15 090, 99 € et celle de l'indemnité conventionnelle de licenciement à 19 505, 73 €. Elle sollicite en outre à titre reconventionnel qu'il soit acté qu'elle était bien-fondée à réclamer le remboursement de la somme de 16 971, 43 € au titre du trop perçu de commissions sur l'année 2007 et le premier trimestre 2008 et, en conséquence, que le salarié soit débouté de sa demande de restitution. En tout état de cause, elle conclut à la condamnation de celui-ci au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que, selon la lettre d'engagement, la mission du salarié est limitée géographiquement mais également en ce qui concerne les matériels de son programme de vente. Or, la société a été contrainte de s'ouvrir à un nouveau type de marché par la commercialisation de matériels industriels sur mesure plus complexes et plus chers, dont la commercialisation est soumise à des règles différentes et relève des compétences du directeur commercial. C'est ainsi que la société a dû adapter les contrats de travail de ses commerciaux afin d'intégrer les nouveaux produits dans leur programme de vente, leur fixer des objectifs adaptés et adapter leur rémunération variable, la marge étant plus faible du fait de la complexité des opérations de commercialisation. Les commerciaux de la société ont tous signé la nouvelle feuille de route, sauf M. X..., au motif que l'avenant à son contrat de travail remis le 30 mai 2008 impliquerait une diminution de son salaire. A compter de cette date, le salarié s'est inscrit dans une opposition constante à l'égard de la société et plus particulièrement de son directeur commercial.
S'agissant des demandes en paiement de commissions sur la vente de matériels Formcook et de remboursement de commissions indûment versées, elles sont infondées, le salarié n'ayant pas droit à commissionnement sur les produits de la dite marque au titre de son contrat de travail. En effet, celui-ci a été embauché pour la commercialisation d'une gamme précise de matériels sur un segment de marché bien particulier, soit les matériels standards dont le prix de vente est inférieur à 260 000 €. Les produits Formcook appartiennent à une gamme de produits autre que la gamme prévue dans le programme de vente figurant en annexe III du contrat de travail de M. X... où ne figure aucun produit vendu à un prix supérieur à 400 000 €. Les produits de la marque Formcook n'ont donc pas été retirés du programme de vente du salarié puisqu'ils n'en ont jamais fait contractuellement partie. En outre, le salarié n'a pas réalisé la vente du " combi cooker " à la société Fleury Michon en 2007 mais y a simplement participé en collaboration avec son directeur commercial. De même, la vente d'un produit Formcook à la société Delta Daily Food le 15 avril 2008 ne saurait ouvrir un droit à commission, comme ayant été réalisée par M. Z..., directeur commercial, et de surcroît au Canada, soit en dehors du secteur géographique confié au salarié. En tout état de cause, le salarié ne peut demander, d'une part, la confirmation de la décision du conseil de prud'hommes et, d'autre part, la condamnation de la société à lui régler l'intégralité des commissions dues sans prendre en compte les sommes déjà accordées en première instance. S'agissant du plan épargne d'entreprise, si le salarié est revenu sur son engagement moral en présentant une demande opportuniste, la société accepte le jugement.
Sur la résiliation, la société indique avoir parfaitement respecté les termes du contrat de travail de son salarié et l'appliquer à la lettre. Il ne peut donc lui être reproché ni modification dudit contrat, ni discrimination, la société ayant été contrainte de confier la vente des produits Formcook à un autre commercial pour le secteur de M. X... en raison du refus de celui-ci de tout avenant. Une divergence d'interprétation d'un contrat ne peut en aucun cas justifier une résiliation judiciaire à ses torts. Elle observe que le salarié continue à travailler en son sein sans qu'aucun nouvel incident ne soit à déplorer depuis quatre ans. D'ailleurs, de nombreux griefs soulevés en première instance ne sont plus invoqués en appel, ce qui démontre leur caractère fallacieux. En toute hypothèse, les griefs reprochés, si tant est qu'ils soient fondés, ne sont pas suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire. En effet, alors même que M. X... a saisi le conseil de prud'hommes le 18 novembre 2008, l'affaire a été radiée le 2 octobre 2009 et ce n'est que le 2 décembre 2010, soit plus d'un an plus tard, qu'il a réintroduit l'instance. A titre subsidiaire, si, par extraordinaire, la cour devait prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail, le montant des demandes devrait être ramené à une plus juste mesure.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.
MOTIFS DE LA DECISION
-Sur les demandes en paiement et remboursement de commissions
A titre liminaire, on observera qu'il résulte du contrat de travail de M. X... établi en 2001 et non modifié depuis lors, que la société était libre de confier ou de ne pas confier à son salarié la commercialisation des nouvelles marques ou matériels qu'elle distribuait.
Cela étant, l'annexe III, indiquant la liste des matériels faisant partie du programme de vente du salarié, n'a jamais été réactualisée et ce, contrairement aux prévisions dudit contrat qui envisageait une révision annuelle.
La société est mal fondée à prétendre que le salarié a été embauché pour la commercialisation d'une gamme précise de matériels sur un segment de marché bien particulier, soit les matériels standards dont le prix de vente est inférieur à 260 000 €, en l'état, d'une part, de l'absence totale de mentions à cet égard dans son contrat de travail et, d'autre part, des termes de l'annexe I, laquelle prévoit un pourcentage d'intéressement de 0 % sur les bons de commande de 0 à 1 million de francs, puis des pourcentages différents pour les commandes d'un montant supérieur, et en final, un intéressement de 2, 5 % pour les commandes supérieures à 7 millions de francs. Il résulte clairement de cette annexe que l'employeur, a lors de l'engagement, envisagé la possibilité pour son salarié de vendre des matériels d'une valeur très supérieure à 260 000 €.
Il est établi par ailleurs que le salarié, comme ses collègues des autres secteurs, a été invité à commercialiser le " combi cooker " de la gamme Formcook par un mail de son directeur commercial en date du 8 décembre 2005 (pièce no 37 de l'appelant) lequel, lui adressant une présentation Powerpoint dudit matériel et de la documentation, mentionnait : " Ces éléments sont à utiliser sans réserve en clientèle afin d'appuyer notre argumentaire ". De même, un mail du 27 juillet 2006 rappelait à l'intéressé et à ses collègues, parmi d'autres conseils commerciaux, que la gamme Formcook pouvait répondre aux attentes des industriels du secteur de la volaille. Un message du 30 juin 2008, encore, invitait le salarié à fournir une liste des clients de son secteur susceptibles d'être intéressés par la présentation du " combi cooker ". Le salarié s'est par ailleurs rendu dans l'entreprise Formcook en Suède les 4 et 5 décembre 2007, ses frais étant remboursés par l'entreprise.
Il ressort clairement de l'ensemble des pièces produites que le salarié a été invité à commercialiser les produits de la gamme Formcook durant les années 2005 à 2008, et les a commercialisés effectivement, de même d'ailleurs qu'il a commercialisé d'autres matériels de marques non inscrites à son contrat de travail et perçu des commissions sur ces ventes (par exemple les matériels des marques Anritsu, Carnitech et Technopack). Il a également commercialisé des matériels hors de son secteur géographique et perçu des commissions sur ces ventes. Ce n'est que suite à son refus de signer un avenant à son contrat de travail et à sa saisine du conseil de prud'hommes que la société lui a refusé le droit de commercialiser les produits de la marque Formcook.
* Sur la demande en paiement de commissions pour les ventes de la marque Formcook :
Cette demande porte sur la vente de matériels Formcook, d'une part en avril 2008 à la société canadienne Delta Daily Food pour un montant de 570 000 €, et, d'autre part, à la société Fleury-Michon en décembre 2008 pour un montant de 45 880 €.
Les pièces produites (à savoir notamment la lettre d'intention de commande du 4 avril 2008, l'attestation de M. A...du 9 octobre 2009, la facture mentionnant le nom de M. X... comme vendeur, le message de félicitations de M. B...adressé le 7 mai 2008 et le compte rendu de la réunion commerciale des 20 et 21 octobre 2008) établissent clairement que la vente à la société Delta Daily Food a bien été réalisée par M. X.... Il importe peu que la vente ait été réalisée hors du secteur géographique du salarié, en l'état des seules mentions de son contrat de travail, étant observé qu'aucun commercial n'était mandaté à l'export.
Il en est de même pour la vente effectuée auprès de la société Fleury-Michon, l'offre, la facture et le bon de commande mentionnant M. X... comme vendeur, ce qui n'est au demeurant pas contesté par l'employeur.
Dans ces conditions, et pour les raisons évoquées plus avant, le salarié ne s'étant pas, à l'époque des commandes dont il s'agit, vu refuser le droit de commercialiser les produits de la marque litigieuse, alors même que l'annexe de son contrat de travail listant les matériels faisant partie de son programme de vente n'avait pas été réactualisée depuis 7 ans, son droit à commission est établi.
Le montant des commissions réclamées, soit 16 705, 61 €, n'est pas discuté. Il résulte cependant du tableau de calcul réalisé par le salarié (pièce no 148) que c'est la somme de 16 705, 34 € qui est due, à laquelle s'ajoutent les congés payés afférents, soit 1 670, 53 €.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a alloué les sommes de 8 103, 06 € à titre de rappel de commissions pour l'année 2007, outre 810, 31 € de congés payés afférents, ainsi que de 1 616, 51 € au titre des commissions dues pour l'année 2008 outre congés payés afférents. En effet, M. X... n'explicite nullement en quoi ces commissions ne seraient pas incluses dans la somme globale allouée de 16 705, 34 €.
** Sur la demande en remboursement de commissions indûment prélevées :
Il ne fait pas débat qu'il a été prélevé sur la rémunération du salarié la somme de 16 971, 43 € en remboursement de deux commissions considérées par la société comme indûment payées au titre d'une vente de matériels Formcook de 487 000 € en octobre 2007 à la société Fleury Michon et de 460 000 € en janvier 2008 à la société Soulié restauration. Ces commissions ont été payées respectivement en janvier 2008 et en avril 2008.
Sur le point d'abord de savoir si le salarié a droit à commission au titre de la vente faite à la société Fleury Michon, la société ne produit aucune pièce et, notamment, pas le bon de commande, de nature à justifier ses allégations selon lesquelles cette vente ne serait pas imputable à l'activité du salarié, alors même qu'en payant une commission, elle avait reconnu le droit de celui-ci.
Il n'est pas contesté que la vente à la société Soulié restauration a été réalisée par le salarié, ce qui est au demeurant établi par les pièces produites, soit notamment la facture mentionnant M. X... comme vendeur.
Dans ces conditions, et pour les raisons évoquées plus avant, le salarié ne s'étant pas, à l'époque des commandes dont il s'agit, vu refuser le droit de commercialiser les produits de la marque litigieuse, alors même que l'annexe de son contrat de travail listant les matériels faisant partie de son programme de vente n'avait pas été réactualisée depuis 7 ans, son droit à commission est établi. L'employeur, qui ne pouvait rétroactivement priver son salarié d'un droit à commission sur des ventes déjà réalisées, sera condamné à rembourser les sommes indûment prélevées sur sa rémunération, soit 16 971, 43 € et 1 697, 14 € de congés payés afférents.
Le jugement sera également infirmé de ce chef.
*** Sur la demande de restitution de commissions déduites dans le cadre du plan d'épargne d'entreprise :
Le salarié ne critiquant pas le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à sa demande et la société ne soumettant de ce chef à la cour aucune prétention, ni aucun moyen, le jugement entrepris ne peut qu'être confirmé sur ce point.
- Sur la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail :
La société est mal fondée à prétendre que les produits de la gamme supérieure tels les produits Formcook ne pouvaient être soumis au même régime de commissionnement que les produits de la gamme inférieure, alors même que les différents avenants soumis à l'accord du salarié, de même d'ailleurs que l'avenant accepté par son collègue M. C..., ne prévoyaient qu'un mode de commissionnement unique pour toutes les gammes et toutes les marques.
Il résulte du courrier en date du 14 novembre 2008 de M. D..., ingénieur commercial pour le secteur Nord-Centre, que les commissions de celui-ci ont toujours été calculées sur tous les matériels vendus par son intermédiaire sur son secteur géographique, même si certains produits correspondaient à des marques non inscrites sur son contrat de travail (mis à part pour la commercialisation du matériel Avure, non en cause dans le présent litige). M. D...indiquait ne pas s'être vu demander à la date précitée le remboursement de commissions perçues sur les ventes des marques non inscrites sur son contrat. Un autre technico-commercial, M. C..., écrivait dans un courrier du 12 janvier 2009 : " Je n'ai jamais eu de problèmes, à ce jour, de commissions concernant les marques non inscrites à mon contrat initial telles que Anritsu, Formcook, Technopack et d'autres. J'ai toujours reçu les commissions des ventes effectuées (tel que le 1er tunnel Formcook vendu de septembre 2005) et la société ne m'a jamais faite aucune demande, ou allusion, de remboursement de commissions touchées sur les ventes des marques non inscrites. " La société n'allègue ni ne justifie avoir demandé postérieurement aux intéressés, ou à un autre des ingénieurs commerciaux de la société, un tel remboursement. Il s'avère que MM. D...et C...ont signé le 16 décembre 2008, chacun, un avenant à leur contrat de travail.
Il résulte de ces éléments que, suite à son refus d'accepter un avenant à son contrat de travail, M. X... s'est vu appliquer un traitement différent de ses collègues, en ce qu'il lui a été demandé le remboursement de commissions déjà versées, alors même qu'un tel remboursement n'a pas été demandé aux autres ingénieurs commerciaux exerçant les mêmes fonctions dans d'autres secteurs géographiques.
En procédant ainsi, d'une part, et en ne réglant pas à l'intéressé les commissions qui lui étaient dues, d'autre part, sous un prétexte fallacieux et pour des montants importants au regard de la rémunération de base (soit au total 43 044 €, en ce inclus les sommes indûment prélevées au titre du plan d'épargne entreprise, soit environ 8 mois du salaire moyen perçu dans le courant de l'année 2008), la société a manqué gravement à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail et à ses obligations contractuelles, ce qui justifie la résiliation du contrat de travail à ses torts. La résiliation prend effet au jour où le juge la prononce et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
A cet égard, il convient de noter que le salarié indiquant dans ses conclusions n'être plus salarié protégé et ne plus bénéficier d'une protection au titre de son ancien mandat, sa demande tendant à ce que soit prononcée la nullité du licenciement-figurant dans le corps de ses conclusions mais pas dans le dispositif-ne saurait être accueillie.
- Sur les conséquences financières de la résiliation aux torts de l'employeur :
Selon les fiches de calcul de la société, conformes aux bulletins de paie de l'année 2012 produits par ses soins, le salaire moyen des douze derniers mois, plus élevé que le salaire moyen des trois derniers mois, s'établit à 5 030, 33 €. La somme de 6 000 € au titre du plan d'épargne entreprise, correspondant aux versements des années 2005, 2006 et 2007, ne saurait, contrairement aux assertions de M. X..., être prise en compte dans le calcul du salaire moyen pour l'année 2012.
L'indemnité compensatrice de préavis est de 3 mois pour les cadres selon les dispositions de l'article 35 de la convention collective applicable, soit la somme de 15 090, 99 €, outre 1 509 € de congés payés afférents.
S'agissant de l'indemnité de licenciement, l'article 4 de l'annexe Cadres de la convention collective prévoit : Conformément à l'article 37 des dispositions communes, une indemnité de licenciement est accordée au cadre licencié dans les conditions suivantes : (...) b) Cadre ayant plus de 5 ans de présence dans l'entreprise au moment du licenciement :-3/ 10 de mois par année de présence dans la tranche de 0 à 9 ans inclus ;-4/ 10 de mois par année de présence dans la tranche de 10 à 19 ans inclus ;-5/ 10 de mois par année de présence dans la tranche à partir de 20 ans, Le calcul est effectué sur la base du 12e de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ou, selon la formule la plus avantageuse pour l'intéressé, le tiers des 3 derniers mois, étant entendu que, dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel qui aurait été versée au salarié pendant cette période ne serait prise en compte que pro rata temporis. L'indemnité ne pourra dépasser un maximum de 12 mois. Au jour du prononcé de la résiliation, l'ancienneté du salarié s'établit à 12 ans. L'indemnité conventionnelle de licenciement s'élève donc à 19 618, 25 €.
En ce qui concerne le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, due par application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, il s'avère que les salaires des 6 derniers mois s'établissent à la somme de 16 420, 40 €. Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, une somme de 30 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Selon l'article 1235-4 du code du travail, " dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé ". Il n'y a pas lieu en l'espèce d'ordonner un tel remboursement, la résiliation étant fixée à la date du présent arrêt alors que le salarié est toujours au service de l'entreprise.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement en ses dispositions relatives à la restitution de commissions déduites dans le cadre du plan d'épargne entreprise, aux frais irrépétibles et aux dépens ;
Infirme pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce la résiliation du contrat de travail liant les parties à la date du présent arrêt ;
Dit que la résiliation produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société BFR. S à payer à M. X... les sommes suivantes * 16 705, 34 € à titre de commissions, outre 1 670, 53 € au titre des congés payés afférents ; *16 971, 43 € en remboursement de commissions indûment prélevées et 1 697, 14 € de congés payés afférents ; * 15 090, 99 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 509 € de congés payés afférents ; *19 618, 25 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ; * 30 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; * 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Ordonne à la société BFR. S de délivrer un bulletin de paie afférent ;
Rappelle que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la demande, soit de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et à défaut de demande initiale, à la date à laquelle ces sommes ont été réclamées, et sur les sommes à caractère indemnitaire à compter du présent arrêt ;
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ;
Condamne la société BFR. S aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLBrigitte ARNAUD PETIT