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02/04/2013 | FRANCE | N°11/02801

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 02 avril 2013, 11/02801


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 02 Avril 2013

ARRÊT N CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02801.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 19 Octobre 2011, enregistrée sous le no 21 604
assuré : Laurent X...
APPELANTE :
SAS RANDSTAD 276 Avenue du Président Wilson 93211 SAINT-DENIS LA PLAINE CEDEX
représentée par Maître Thierry PAVET (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIMÉE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE (C. P. A

. M.) 178 Avenue Bollée 72033 LE MANS CEDEX 9
représentée par Madame Céline A..., munie d'un pouvoi...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 02 Avril 2013

ARRÊT N CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02801.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 19 Octobre 2011, enregistrée sous le no 21 604
assuré : Laurent X...
APPELANTE :
SAS RANDSTAD 276 Avenue du Président Wilson 93211 SAINT-DENIS LA PLAINE CEDEX
représentée par Maître Thierry PAVET (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIMÉE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE (C. P. A. M.) 178 Avenue Bollée 72033 LE MANS CEDEX 9
représentée par Madame Céline A..., munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Janvier 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 02 Avril 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE :
Le 14 mai 2007, la société Vediorbis, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Randstad, a souscrit une déclaration d'accident du travail, sans réserve, concernant M. Laurent X... ouvrier non qualifié mis à la disposition de l'entreprise Façonnage du Perche.
Il ressort de cette déclaration que, le 10 mai 2007 à 3 heures, alors qu'il se trouvait à son poste de travail, ce dernier, qui avait pris son service la veille à 21 h pour le terminer à 5 h, s'est blessé au genou en se retournant pour poser une pièce.
Le certificat médical initial établi par le Dr Alexandre Y..., chirurgien orthopédique, le 10 mai 2007 décrit une " rupture partielle tendon quadricipital genou gauche. " et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 8 juin 2007.
Le 16 mai 2007, la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe a pris cet accident en charge au titre de la législation professionnelle au seul vu de la déclaration d'accident du travail et du certificat médical initial.
Les arrêts de travail ont été prolongés sans interruption jusqu'au 4 octobre 2009 et les soins ont été poursuivis jusqu'au 30 janvier 2010, date à laquelle la guérison des lésions subies par M. X... a été fixée par le médecin conseil.
Estimant la durée de ces arrêts de travail injustifiée au regard du mécanisme accidentel et de la lésion initiale, le 28 septembre 2009, la société Randstad a saisi la commission de recours amiable de la CPAM de la Sarthe pour contester le lien de causalité entre l'accident du travail subi par M. X... le 10 mai 2007 et les arrêts de travail successivement prescrits à ce dernier et afin que leur prise en charge lui soit déclarée inopposable.
Par décision du 5 novembre 2009 notifiée par lettre du 9 novembre suivant, la commission de recours amiable a considéré que tous les arrêts de travail et soins prescrits à l'assuré du 10 mai 2007 au 30 janvier 2010 étaient bien en rapport avec l'accident en cause et devaient être pris en charge au titre de la législation professionnelle, et elle a rejeté la demande d'inopposabilité de l'employeur.
Statuant sur le recours formé par ce dernier contre cette décision, par jugement du 19 octobre 2011, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans :- a reçu la société Randstad en son recours ;- l'a dit mal fondé et a confirmé la décision de rejet prise par la commission de recours amiable le 9 novembre 2009 ;- a dit n'y a avoir lieu à expertise médicale judiciaire ;- a dit que les arrêts de travail et les soins prescrits à M. Laurent X... du 10 mai 2007 au 9 décembre 2009 doivent être déclarés opposables à la société Randstad.
Cette dernière a régulièrement relevé appel général de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 10 janvier 2013, reprises et complétées oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société Randstadt demande à la cour :- d'infirmer le jugement entrepris ;- d'ordonner une expertise médicale judiciaire sur pièces en donnant à l'expert mission de : ". se faire remettre l'entier dossier médical de Monsieur Laurent X... par la caisse primaire de la Sarthe ;. retracer les lésions de Monsieur Laurent X..., et dire si l'ensemble des lésions de Monsieur Laurent X... est en relation directe et unique avec son accident du travail du 10/ 05/ 2007 ;. dire si l'évolution des lésions de Monsieur Laurent X... est due à un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte, à un nouveau fait accidentel, ou à un état séquellaire ;. déterminer quels sont les arrêts de travail et lésions directement et uniquement imputables à l'accident du 10/ 05/ 2007 dont a été victime Monsieur Laurent X... ;. fixer la date de consolidation des lésions dont a souffert Monsieur Laurent X... suite à son accident du travail du 10/ 05/ 2007 ;. dit que l'expert convoquera les parties à une réunion contradictoire, afin de recueillir leurs éventuelles observations sur les documents médicaux. ".
Par la voix de son conseil, la société appelante confirme qu'elle ne conteste pas la matérialité de l'accident du travail dont M. X... a été victime le 10 mai 2007.
Après avoir rappelé, d'une part, l'intérêt à agir de l'employeur en ce que la prise en charge d'un accident ou d'une maladie au titre de la législation professionnelle influe sur le taux de cotisations AT/ MP imposé à l'entreprise, d'autre part, l'indépendance des rapports caisse/ assuré et caisse/ employeur, et invoqué le droit à un procès équitable tel qu'édicté par l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la société appelante fait valoir qu'en l'espèce, la confrontation de la nature des lésions initiales avec la durée totale manifestement excessive des arrêts de travail dont a bénéficié M. X... justifie la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise médicale afin de vérifier qu'il existe bien un lien de causalité entre ces arrêts de travail et l'accident, et de déterminer avec exactitude les seuls arrêts de travail à prendre en charge au titre de la législation professionnelle. Elle argue de ce que cette question constitue bien une difficulté d'ordre médicale et du fait qu'il lui est impossible d'avoir accès au dossier médical du salarié. Elle estime que le bien fondé de sa demande d'expertise ressort de l'avis circonstancié émis à sa demande par le Dr Dominique Z... dont il ressort que la symptomatologie d'une lésion du ligament croisé antérieur ne peut âs être confondue avec une lésion partielle du tendon du quadriceps, qu'il est peu probable que le mécanisme accidentel décrit puisse entraîner une rupture du ligament croisé antérieur et une lésion méniscale, et que les interventions chirurgicales (ligamentoplastie et ménisectomie) dont a bénéficié le salarié n'ont pas pour objet de réparer une lésion partielle du tendon du quadriceps correspondant à la lésion initiale notée chez M. X....
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 15 janvier 2013, reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, et de ses demandes orales à l'audience, la Caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe demande à la cour :
- de débouter la société Randstad de son appel et de l'ensemble de ses prétentions et de confirmer le jugement entrepris ;- de lui déclarer opposable la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'ensemble des soins et arrêts de travail consécutifs à l'accident du travail dont M. X... a été victime le 10 mai 2007, c'est à dire, la prise en charge des soins et arrêts de travail prescrits de la date de l'accident au 30 janvier 2010.
Pour s'opposer à la demande d'expertise, l'intimée fait valoir que les lésions initiales ont été constatées le jour même de l'accident par le Dr Y..., médecin spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatique, que les arrêts de travail et soins pris en charge ont été prescrits de façon ininterrompue dans les suites de l'accident et qu'ils émanent en majeure partie de ce spécialiste, que l'avis du médecin conseil a été sollicité régulièrement sur ces arrêts de travail et qu'il a vu M. X... à plusieurs reprises, que l'avis in abstracto du Dr Z... n'est pas suffisant pour justifier la demande d'expertise.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu que les premiers juges ont, à juste titre, déclaré recevable le recours diligenté par la société Randstad par lettre recommandée postée le 4 janvier 2010, contre la décision de la CRA du 5 novembre 2009 notifiée par lettre du 9 novembre suivant, en ce qu'il l'a été dans les formes et le délai de deux mois requis par l'article R 142-18 du code de la sécurité sociale ;
****
Attendu qu'en vertu des dispositions combinées des articles L 411-1 et L 431-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail s'étend, sauf preuve contraire, aux arrêts de travail et soins subséquents pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur de renverser cette présomption en apportant la preuve que les prestations en nature ou en espèces servies à la victime sont sans rapport avec l'accident initial, notamment parce qu'elles seraient les conséquences d'une maladie préexistante évoluant pour son propre compte ;
Attendu que cette présomption peut être combattue par le recours à une mesure d'expertise, laquelle ne peut être ordonnée que si l'employeur qui la sollicite apporte au soutien de sa demande des éléments médicaux de nature à étayer et à accréditer l'existence d'une cause totalement étrangère à l'accident initial et qui serait à l'origine exclusive des prescriptions litigieuses ;
Attendu qu'il ressort de la déclaration d'accident du travail que, le 10 mai 2007, en se retournant pour poser une pièce, M. Laurent X... a subi un traumatisme au niveau du genou gauche à l'origine de déchirures tendineuses ;
Que le certificat médical initial d'accident du travail établi le jour même par le Dr Alexandre Y..., médecin spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie, mentionne une " rupture partielle Tendon quadricipital genou gauche. " ; qu'il ne fait pas débat que M. X... a été en arrêt de travail de façon ininterrompue du 10 mai 2007 au 4 octobre 2009 et qu'ensuite lui ont été prescrits des soins jusqu'au 31 janvier 2010, le médecin conseil ayant fixé la date de consolidation de l'état de l'assuré au 30 janvier 2010, décision qui a été notifiée à ce dernier le 12 avril 2010 ;
Attendu que la société Randstad ne conteste ni le caractère professionnel de l'accident initial, ni que la décision de prise en charge de cet accident lui soit opposable ;
Attendu, comme le relève le Dr Dominique Z... aux termes de l'avis qu'il a émis le 23 mai 2012 à la demande de l'employeur, qu'il résulte des certificats médicaux d'arrêts de travail versés aux débats par la caisse qu'ensuite de l'accident survenu le 10 mai 2007, M. X... a subi, d'une part, en septembre 2007, une ménisectomie du genou gauche, compliquée d'algodystrophie, que le Dr Z... qualifie lui-même d'" important geste chirurgical de stabilisation du genou ", d'autre part, une ligamentoplastie du genou gauche, compliquée d'algodystrophie, intervention qui apparaît mentionnée sur les certificats médicaux sous le sigle " DIDT " dont le Dr Z... indique qu'il s'agit d'une technique de reconstitution du ligament croisé antérieur utilisant le tendon du muscle Droit Interne et du muscle Demi Tendineux ;
Attendu que tous les arrêts de travail prescrits à l'assuré de façon ininterrompue du 10 mai 2007 au 4 octobre 2009 l'ont été par le Dr Y..., chirurgien orthopédiste, qu'il en est de même du certificat du 1er octobre 2009 qui a prescrit des soins jusqu'au 31 janvier 2010 ; que les arrêts de prolongation produits jusqu'à la consolidation mentionnent tous le lien avec l'accident du travail du 10 mai 2007 et que les constatations médicales y figurant sont relatives au genou gauche, siège des lésions initiales, et aux suites des interventions chirurgicales " ménisectomie " et " DIDT genou gauche " ou " ligamentoplastie " subies par l'assuré après l'accident ainsi qu'aux complications à type d'algodystrophie dont il a souffert ; que les fiches de liaison établies par le médecin conseil du 19 juin 2007 au 16 septembre 2009 révèlent que celui-ci a constamment indiqué que les arrêts de travail successivement prescrits étaient justifiés et il a confirmé le 8 octobre 2009, d'une part, que tous les arrêts de travail avaient un lien direct et exclusif avec l'accident du travail du 10 mai 2007, d'autre part, que M. X... ne présentait aucun état antérieur préexistant susceptible de remettre en cause l'imputabilité de ces arrêts à cet accident et aux lésions initiales ;
Attendu que ces éléments concordants et la présomption d'imputabilité ne sont pas utilement combattus par l'avis du Dr Z... en date du 23 mai 2012, seul élément produit par l'employeur, lequel n'allègue chez M. Laurent X... aucun état antérieur évoluant pour son propre compte qui serait susceptible d'expliquer le recours nécessaire à une ménisectomie et à une ligamentoplastie et les arrêts de travail subséquents à l'accident, et n'établit pas de façon certaine et circonstanciée que ces interventions soient sans rapport avec l'accident initial et les lésions qui en ont résulté dans la mesure où il énonce seulement de façon dubitative, en page 3 de son avis, qu'" il est fort peu probable que le mécanisme accidentel décrit puisse entraîner une rupture du ligament croisé antérieur et une lésion méniscale " ce qui ne permet pas d'exclure de telles conséquences, de sorte que sa conclusion selon laquelle " cette indication chirurgicale ne peut avoir été posée pour réparer les lésions figurant sur le certificat médical initial " est inopérante pour ébranler la présomption d'imputabilité ; qu'en outre, le Dr Z... ne remet pas en cause la durée des arrêts de travail successifs puisqu'il indique que les complications à type d'algodystrophie peuvent justifier la longueur de l'arrêt de travail postérieur à l'intervention ;
Attendu qu'il suit de là que la société Randstad ne produit pas d'éléments de nature à établir, ni même à laisser supposer de façon sérieuse, l'absence de lien entre la lésion initiale subie par M. X... et les arrêts de travail et soins subséquents, ou l'existence d'un état antérieur évoluant pour son propre compte et qui serait à l'origine exclusive de ces prescriptions ; que, la présomption d'imputabilité n'étant pas utilement remise en cause par l'employeur, le jugement entrepris doit être confirmé en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise ;

PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Fixe le droit d'appel prévu par l'article R. 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelante qui succombe au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale et condamne la société Randstad au paiement de ce droit ainsi fixé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/02801
Date de la décision : 02/04/2013
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-04-02;11.02801 ?
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