La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2013 | FRANCE | N°11/00421

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 12 mars 2013, 11/00421


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ FB

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00421.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 21 Janvier 2011, enregistrée sous le no 10/ 00246

ARRÊT DU 12 Mars 2013

APPELANT :

Monsieur Laurent X... ...72380 MONTBIZOT

présent assisté de Maître Jean-Carles GRELIER, avocat substituant maître Alain PIGEAU, avocat au barreau du MANS
INTIMEE :
SA BROSSETTE 23 rue Crepet 69007 LYON 07

représentée p

ar Maître Pascale BORGEOT (CAPSTAN AVOCATS), avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR : En application ...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ FB

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00421.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 21 Janvier 2011, enregistrée sous le no 10/ 00246

ARRÊT DU 12 Mars 2013

APPELANT :

Monsieur Laurent X... ...72380 MONTBIZOT

présent assisté de Maître Jean-Carles GRELIER, avocat substituant maître Alain PIGEAU, avocat au barreau du MANS
INTIMEE :
SA BROSSETTE 23 rue Crepet 69007 LYON 07

représentée par Maître Pascale BORGEOT (CAPSTAN AVOCATS), avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Janvier 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT : prononcé le 12 Mars 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE :

M. Laurent X... est entré au service de la sa Brossette, qui appartient au groupe britannique Wolseley, et dont l'activité est la vente de produits pour le chauffage, le sanitaire et les canalisations, selon contrat de travail verbal, le 4 décembre 1989. Par avenant du 1er février 2005 la responsabilité du site du Mans lui a été confiée, et il a été promu cadre, niveau 8, échelon 1, avec une rémunération brute forfaitaire de 2500 €, pour 218 jours de travail par an.

Un avenant du 28 mars 2007 a confirmé ces conditions d'emploi, hors celles concernant la clause de non concurrence, qui ont été précisées, et une clause de mobilité, qui a été ajoutée.
La sa Brossette applique la convention collective du commerce de gros.
La fonction de M. X..., selon sa fiche de poste, était " d'assurer avec l'ensemble du personnel de l'agence et de ses satellites rattachés, et en collaboration avec le Responsable des Ventes Unité, le développement commercial de son périmètre. "
Au début de l'année 2007 la sa Brossette, après avoir comparé le coût d'une assurance contre les impayés, et son taux de sinistralité, a mis en place une nouvelle politique de crédit pour les clients au sein de la division sanitaire, chauffage, canalisation (SCC), consistant à supprimer l'assurance, les encours clients relevant désormais de la compétence des crédit managers, des chefs d'agence et directeurs de clientèle.
Elle a adressé le 14 février 2007 à ses chefs d'agence une note sur la " nouvelle politique crédit client de la division SCC. "
Par lettre recommandée du 2 mars 2009, M. X... a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 12 mars 2009.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 mars 2009, la sa brossette a notifié à M. X... son licenciement pour cause réelle et sérieuse.
M. X... a le 23 juillet 2009 saisi le conseil de prud'hommes du Mans devant lequel il a contesté le bien fondé de son licenciement, et demandé paiement de la contrepartie financière de la clause de non concurrence, au motif que la société Brossette l'avait levée tardivement.
Par jugement du 21 janvier 2011, le conseil de prud'hommes a dit que le licenciement de M. X... repose sur une cause réelle et sérieuse, l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts à ce titre, a condamné la sa Brossette à lui payer la somme de 8080 € au titre de la contrepartie financière de la clause de non concurrence, ainsi que la somme de 700 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens.
La décision a été notifiée le 26 janvier 2011 à chaque partie et M. X... en a fait appel par lettre postée le 10 février 2012.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 4 juin 2012, reprises et soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. X... demande à la cour :
- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la sa Brossette à lui payer la somme de 8080 € au titre de la contrepartie financière de la clause de non concurrence,- de l'infirmer en ses dispositions afférentes au licenciement, et statuant à nouveau, de dire que le licenciement a été dépourvu de cause réelle et sérieuse, et de condamner la sa Brossette à lui payer à titre d'indemnité la somme de 100 000 €,

- de condamner la sa Brossette à lui payer la somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il sollicite en outre que la somme de 8080 € produise des intérêts au taux légal à compter du jour de la saisine du conseil de prud'hommes, et la condamnation de la sa Brossette aux dépens.
M. X... soutient que son licenciement a en réalité été motivé par le ralentissement du marché de la construction, qui a été significatif en 2008, et a conduit la sa Brossette à rechercher la réalisation d'économies ; qu'on lui reproche en effet un dépassement de crédit client pour la Société d'aménagement de terrains d'Ile de France (Satif) de l'ordre de 41 000 €, mais que les dépassements d'encours de ce client ont été globalement de 208 000 € sur les unités 27, 35, 44, et 97 ; que le service crédit manager n'a pas réagi alors que la Satif n'avait pas mis en place la délégation de paiement qui lui avait été demandée, et que ce service ne lui a fait aucune observation lorsqu'il a dépassé l'encours autorisé de 10 000 €, en novembre 2008, puis en janvier 2009, attendant le 17 février 2009 pour passer le dossier de la Satif au contentieux.
M. X... observe qu'il a été le seul chef d'agence sanctionné alors que tous les chefs d'agence sont " tiraillés " entre ces impératifs contradictoires que sont la réalisation des objectifs et l'absence de risques financiers ; que l'agence du 44 a d'ailleurs autorisé un encours de 77 160, 17 € et donc supérieur au sien.
Il relève que la situation a été parfaitement connue de la sa Brossette puisque les premières factures émises à l'égard de la Satif étaient à l'échéance du 31 décembre 2008 et qu'elles sont restées impayées.
Il soutient que la lettre de licenciement s'en tient, pour éviter la prescription en matière disciplinaire, à une analyse tronquée du dossier de la Satif en considérant que sa faute aurait été d'autoriser des approvisionnements en janvier et février 2009, cette vision partielle permettant d'écarter une réalité connue de tous fin novembre 2008.
Sans nier que les faits allégués par l'employeur recouvrent une réalité, M. X... soutient qu'ils ne répondent pas à l'exigence de la cause sérieuse alors que les choix qu'il a fait étaient connus de sa hiérarchie qui n'a fait aucune remarque jusqu'au jour où elle a découvert la globalité des encours de ce client et que la pratique d'une entreprise ne saurait être ignorée lorsqu'il s'agit d'apprécier un licenciement, la vie quotidienne admise par l'employeur devant primer sur des procédures écrites dans des notes de service ; que ce contexte doit être pris en compte pour un salarié ayant 18 ans d'ancienneté dans l'entreprise.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 12 décembre 2012, reprises et soutenues oralement à l'audience devant la cour, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la sa Brossette demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner M. X... à lui payer la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient qu'il est constant en jurisprudence que le non respect de directives concernant les encours clients caractérise une faute grave et à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que la prescription des faits ne peut lui être opposée alors qu'ils ont été réitérés.
Elle rappelle que la décision prise, en février 2007, de ne plus avoir recours à une assurance pour les sinistres, avait pour conséquence d'impacter à 100 % le compte d'exploitation de l'agence et donc de l'entreprise ; que les règles étaient que l'équipe nationale de " crédit managers " fixait après étude de dossier le montant d'encours possible pour chaque client, au-delà duquel la conclusion d'une nouvelle affaire est interdite ; que cette limite est impérative pour les clients " à risques ", figurant sur une liste dressée par les crédit managers, et que pour les autres, les chefs d'agence ont la possibilité, mais à titre exceptionnel, de débloquer le compte en dépassement d'encours ; que l'enjeu était la responsabilisation des chefs d'agence.
Elle reproche à M. X... d'avoir, malgré ces règles, et alors que le " forçage " du crédit client devait rester exceptionnel, accordé de façon réitérée des livraisons au client dont l'encours autorisé était largement dépassé ; que ces autorisations ont été au nombre de huit entre novembre 2008 et février 2009, la " perte sèche " pour l'entreprise étant finalement de plus de 41 000 € (et non 44 000 € comme indiqué dans la lettre de licenciement).
La sa Brossette dément l'affirmation de M. X... selon laquelle il aurait été autorisé par les crédit managers à dépasser l'encours de 10 000 €, et lui oppose qu'il ne peut se dédouaner sur eux en mettant en exergue leur absence de réaction puisque c'est sur lui que reposait la responsabilité du déblocage, le service de crédit manager n'intervenant qu'à postériori, en cas de dépassement jugé abusif, en suspendant ou résiliant le crédit ; qu'il lui appartenait d'autoriser de manière exceptionnelle un dépassement d'encours, mais pas de le systématiser ; qu'il n'existait pas une pratique de dépassement.
La sa Brossette ne dément pas que le client Satif se soit fourni sur plusieurs agences qui ont rencontré le même problème de créances impayées, mais expose qu'elle est organisée en régions et que dans la région Ouest les deux responsables d'agence ayant le plus gravement manqué à l'application de procédures étaient ceux du Mans et de Poitiers ; que le chef d'agence de Poitiers est parti de l'entreprise pour une autre raison.
La sa Brossette réfute avoir opéré un licenciement économique déguisé, et justifie du remplacement de M. X... sur son poste en produisant le registre des entrées et sorties du personnel.

Elle estime enfin la demande de dommages-intérêts formée par M. X... injustifiée dans son montant, alors que son ancienneté dans l'entreprise a été prise en compte dans l'indemnité de licenciement versée, qui est de plus de 28 000 €, et que M. X... ne justifie d'aucune recherche d'emploi, et ne donne aucun élément sur sa situation professionnelle actuelle.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la clause de non concurrence :

La cour n'est saisie d'aucun moyen de ce chef, la sa Brossette indiquant qu'elle ne remet pas en cause la décision des premiers juges en ce qu'ils l'ont condamnée à payer à M. X... la somme de 8080 € au titre de la contrepartie financière de la clause de non concurrence ; le jugement est en conséquence confirmé sur ce point, la cour y ajoutant que les intérêts seront dus au taux légal sur la somme de 8080 € à compter de la date de réception par la sa Brossette de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes du Mans soit le 29 juillet 2009 ;
Sur le licenciement :
Le juge devant lequel un licenciement est contesté doit, en application de l'article L. 1235-1 du code du travail, apprécier le caractère réel et sérieux des griefs énoncés dans le courrier qui notifie cette mesure et qui fixe les limites du litige, mais aussi rechercher au-delà de ces motifs, si le salarié le requiert, la véritable cause du licenciement prononcé ;
M. X... soutient que la véritable cause de son licenciement a été économique ;
Il ne justifie cependant pas de la suppression de son poste, l'employeur produisant le registre des entrées et sorties du personnel dont il résulte qu'il a bien été remplacé, dans le poste de chef d'agence du Mans, par M. A..., embauché le 26 juillet 2010 après un intérim exercé par le directeur d'unité régionale, le temps de l'aboutissement du processus de recrutement ;
Il ne démontre pas plus que la sa Brossette ait procédé début 2009 à des licenciements économiques ou qu'elle ait rencontré des difficultés économiques rendant cette mesure nécessaire, puisqu'il produit au soutien de cette allégation un document intitulé " perspectives groupe Wolseley-mars 2009 " dont il résulte que la baisse de chiffre d'affaires du groupe entre août 2008 et janvier 2009 a été forte surtout aux Etats-Unis, pays dont la note dit qu'il a subi " un effondrement du marché de la construction " ;
Cette note montre encore que si le groupe a perdu globalement 12 % de chiffre d'affaires, la baisse sur le marché français a été de seulement 6 %, et elle précise que pour la France les mesures envisagées sont, en " cas d'aggravation des tendances des marchés ", " le recours au chômage partiel, à la réduction des salaires ", et " en dernier recours et sur des périmètres précis, la mise en place de plans de sauvegarde de l'emploi " ;
Si les difficultés économiques du groupe Wolseley sont avérées en 2008 et 2009, il ne ressort pas des pièces produites que la sa Brossette ait envisagé des licenciements économiques au premier trimestre 2009 ; La cause économique alléguée par M. X... n'étant pas établie, il appartient à la cour de vérifier le bien fondé du licenciement dans les termes invoqués par l'employeur dans la lettre notifiée au salarié le 19 mars 2009, ainsi libellée :
Monsieur,... Ainsi vous occupiez à ce jour Ie poste de Chef d'Agence au sein de notre établissement du Mans et vous aviez pour mission principale la gestion de ce centre de profit et notamment ses aspects commerciaux et financiers.

Dans un contexte économique difficile où la prudence est de mise en ce qui concerne la gestion des comptes et crédits clients, vous avez autorisé un dépassement d'en cours concernant notre client SATIF, outre passant ainsi le seuil autorisé pour ce client par notre service crédit.
Ainsi, au cours du mois de Janvier 2009, la société SATIF est venue prendre commande de tubes acier, mais celle-ci s'est vu refuser la commande de ces produits au motif du dépassement d'encours maximal autorisé de 10 000 euros.
L'un de vos collaborateurs, au motif de la prise de commande intéressante sur le plan financier que cela pouvait représenter, est venu vous solliciter pour débloquer le compte de ce client, et engager la fourniture des produits Tubes Aciers pour celui-ci.
Vous avez alors délibérément autorisé le déblocage de ce compte pour un montant total de 44 000 euros afin de livrer cette marchandise et cela malgré le plafond d'encours fixé à 10 000 euros et de ce fait, vous n'avez pas respecté les procédures internes de la société.
Votre prise de position s'est traduit par une perte financière sèche pour la Société Brossette et notamment du point de vente du Mans, dont vous êtes le responsable, à hauteur de 44 000 euros, du fait de la non-solvabilité de ce client.
C'est pourquoi, au regard de la gravité de vos actes délibérés, des conséquences financières que ceux-ci entraînent pour la société et du non-respect des procédures internes, nous sommes amenés à vous notifier par la présente, votre licenciement pour cause réelle et sérieuse au motif du non respect des procédures internes ayant engagé des pertes financières Importantes pour notre Agence du Mans et de ce fait pour l'entreprise Brossette. La date de première présentation de cette lettre marquera le point de départ de votre préavis de trois mois que nous vous dispensons d'effectuer... "

Il ressort de cet énoncé, et il ne fait pas débat entre les parties, que son licenciement a été notifié à M. X... pour faute simple ;
En cas de licenciement disciplinaire, la faute du salarié ne peut résulter que d'un fait avéré, acte positif ou abstention, mais alors dans ce dernier cas de nature volontaire, qui lui est imputable, et qui constitue de sa part une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail.

M. X..., sans invoquer expressément un moyen tenant à la prescription des faits reprochés, soutient que l'employeur a dans sa lettre de licenciement mentionné uniquement les faits survenus en janvier et février 2009, pour éviter à la fois d'évoquer des faits plus anciens et donc prescrits, et pour ne pas faire apparaître que la situation de la Satif " était à cette époque connue de tous " ;

Aux termes de l'article L1332-4 du code du travail " aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai l'exercice de poursuites pénales. "
Les seuls faits de dépassement d'encours client visés dans la lettre de licenciement sont ceux de janvier et février 2009, et ils ne sont pas prescrits puisqu'antérieurs de moins de deux mois à l'engagement de la procédure de licenciement, laquelle a eu lieu le 2 mars 2009, avec l'envoi de la convocation à l'entretien préalable au licenciement ;
Ils constituent la poursuite des autorisations de dépassement d'encours réalisées dès la fin novembre 2008 par M. X... à l'égard du client Satif, agissements qui ne seraient pas non plus prescrits si l'employeur les avaient retenus comme griefs, dès lors que le comportement du salarié s'est poursuivi de manière continue de la fin novembre 2008 à février 2009 ;
M. X... ne conteste pas la matérialité du grief, ni avoir agi de manière délibérée ;
La note à l'en-tête Wolseley/ france, adressée le 14 février 2007 aux chefs d'agence, indique en effet que : " les chefs d'agence et/ ou directeurs de clientèle auront la possibilité de débloquer les comptes en dépassement d'encours via un mot de passe individuel et confidentiel. Conséquence : c'est une responsabilisation du chef d'agence et/ ou Dc à qui il appartiendra d'utiliser cette prérogative de façon restreinte et exceptionnelle " ;
Il est donc acquis aux débats que l'augmentation de l'encours Satif, à compter de janvier 2009, dans le compte clients de l'agence du Mans, a été le fait de M. X..., qui était le seul à pouvoir prendre cette décision ;
M. X... soutient que son comportement n'est pas constitutif d'une faute car il a été conforme à une pratique généralisée dans l'entreprise, laquelle n'a pas donné lieu à sanction pour d'autres chefs d'agence, qui ont pourtant également procédé à un dépassement de l'encours de la Satif, pour des montants similaires à celui qui lui est reproché ; S'il est acquis, et non contesté par la sa Brossette que le client Satif s'est fourni en matériaux auprès de plusieurs de ses agences, dans le cadre d'un marché de construction d'un établissement pénitentiaire sur la commune de Coulaines, alors qu'il était sous-traitant d'un important groupe de BTP, et que l'impayé global est en effet la résultante d'encours dépassés par plusieurs agences, il n'en demeure pas moins que l'employeur est libre de choisir la sanction qui lui paraît adaptée au comportement du salarié et qu'il peut, dans l'exercice de son pouvoir d'individualisation des mesures disciplinaires, sanctionner différemment des salariés ayant participé à une même faute, ou ne pas sanctionner l'un d'eux ;

Les conditions de création de l'encours Satif par l'agence du 44 ne sont pas exposées par M. X... alors qu'il est constant qu'en ce qui le concerne, les credit managers du service crédit (gerrec) de l'entreprise avaient fixé pour son agence l'encours autorisé pour ce client à 10 000 € et qu'il a au moyen de son code individuel permis un dépassement de cet encours, et donc de nouvelles facturations de matériaux dès novembre 2008, mais surtout que, les premières factures étant à échéance du 31 décembre 2008, celles-ci étaient restées impayées lorsqu'il a décidé en janvier puis février 2009, de permettre successivement quatre nouvelles livraisons de produits ;
Or, il ressort à la fois de la note du 14 février 2007, et du " manuel crédit client " versé aux débats par l'employeur, et qui porte sur la page de garde que " Le respect de cette procédure est sous la responsabilité du Directeur d'Agence ", que les crédit managers fixaient le plafond initial, et qu'il revenait ensuite au directeur d'agence de leur faire connaître " toute dérogation aux règles de gestion du crédit client " ;
Ces deux documents soulignent le principe de responsabilisation des chefs d'agence et la nécessité de communiquer les " évènements marquants relatifs aux clients " aux crédit managers qui interviennent, comme l'expose la sa Brossette, à postériori pour augmenter, ou non, le plafond d'encours autorisé ;
Tout en affirmant que la situation de la Satif était connue de tous au sein de la sa Brossette, M. X... ne verse cependant aux débats qu'un courrier d'information signé par lui et adressé au Gerrec, daté du 6 mars 2009 ; à cette date, un mécanisme d'alerte informatique, explicité dans le manuel crédit client, avait en tout état de cause produit ses effets, puisque tout client dont le compte présentait une facture due depuis plus de 60 jours, et supérieure à 100 €, voyait le compte automatiquement bloqué dans le système appelé ENYX ;
Les pièces que M. X... produit concernant des dépassements d'encours client pour diverses entreprises, autorisés par les agences des départements 72, 35 et 56, ne sont pas démonstratives de l'existence de la " pratique habituelle de dépassements " alléguée, puisqu'elles représentent au plus (pour le 56) trois dépassements, sinon deux, et que ces documents, qu'il est aléatoire d'interpréter alors qu'ils ne sont pas commentés, portent en tout cas pour les clients nommés, à chaque fois, les mentions suivantes : indicateur de crédit : vert ; relance : 0 ;
Si l'encours initial est en effet dépassé, on trouve aussi mention sur ces pièces d'une annotation " potentiel client ", lequel est d'un montant toujours supérieur à l'encours autorisé ;
Il apparaît enfin que la direction de Wolseley France a dès le 18 février 2009, et avant même la transmission du dossier de son client Satif au contentieux, adressé à l'ensemble de ses chefs d'agence sur le territoire français un mel leur faisant part de l'incident subi, et de ce que l'autorisation de dépassement était désormais limitée à " 20 % au delà de l'encours avec un plafond de 20 K € "
Cette réactivité contredit l'allégation de M. X... de l'existence d'une pratique de dépassement des encours clients connue et tolérée par l'employeur ;
Il est par conséquent établi que M. X..., qui est un salarié expérimenté à l'importante ancienneté, et qui a été destinataire de notes et manuels d'information détaillés et précis sur les rôles de chacun dans la mise en place
d'une nouvelle politique de crédit clients, laquelle était appliquée dans ces conditions depuis l'année 2007, et qui reposait sur une responsabilisation des chefs d'agence, a commis une faute caractérisant une cause réelle et sérieuse de licenciement en persistant dans des dépassements d'encours, en janvier et février 2009, pour un client qui avait laissé des factures impayées en décembre 2008, et ce sans avoir communiqué cet incident au service susceptible de fixer un nouveau plafond d'encours autorisé ;
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur les dépens et frais irrépétibles :

Le jugement est confirmé en ses dispositions afférentes aux frais irrépétibles et aux dépens ; il ne paraît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles d'appel ; M. X... qui perd son recours en cause d'appel est condamné à en payer les dépens ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes du Mans du 21 janvier 2011 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit que les intérêts seront dus au taux légal sur la somme de 8080 € à compter de la date de réception par la sa Brossette de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes du Mans soit le 29 juillet 2009,
Laisse à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles d'appel,
Condamne M. X... aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00421
Date de la décision : 12/03/2013
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-03-12;11.00421 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award