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12/03/2013 | FRANCE | N°10/02275

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 12 mars 2013, 10/02275


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N CLM/ FB

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02275.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 29 Juillet 2010, enregistrée sous le no 09/ 00683

ARRÊT DU 12 Mars 2013

APPELANTE :

S. A. S. S P G O (SECURITE PREVENTION GRAND OUEST) 2 avenue de la Vallée 14800 ST ARNOULT

représentée par Maître Bernard LADEVEZE (SCP), avocat au barreau de LISIEUX

INTERVENANTS VOLONTAIRES :

Maître Emmanuel X..., (

Société FHB), ès-qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société SPGO PAYS DE LOIR...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N CLM/ FB

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02275.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 29 Juillet 2010, enregistrée sous le no 09/ 00683

ARRÊT DU 12 Mars 2013

APPELANTE :

S. A. S. S P G O (SECURITE PREVENTION GRAND OUEST) 2 avenue de la Vallée 14800 ST ARNOULT

représentée par Maître Bernard LADEVEZE (SCP), avocat au barreau de LISIEUX

INTERVENANTS VOLONTAIRES :

Maître Emmanuel X..., (Société FHB), ès-qualités d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société SPGO PAYS DE LOIRE ...27930 GUICHANVILLE

Maître Alain Y..., ès-qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société SPGO PAYS DE LOIRE ... 14000 CAEN

représentés par Maître Bernard LADEVEZE (SCP), avocat au barreau de LISIEUX

l'A. G. S., agissant par son association gestionnaire l'UNEDIC-C. G. E. A. de ROUEN Immeuble Normandie 1 98 rue de Bretagne 76108 ROUEN CEDEX 1

représentée par Maître André FOLLEN (SELARL LEXCAP), avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :

Monsieur Frédéric Z.........33320 EYSINES

présent, assisté de Monsieur Alain A..., délégué syndical

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Janvier 2013 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 12 Mars 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 22 mai 2002, la société Sécurité Prévention Grand Ouest Pays de Loire (ci-après : la société SPGO Pays de Loire), qui exerce son activité dans le domaine de la sécurité et emploie habituellement plus de dix salariés, a embauché M. Frédéric Z...en qualité d'agent d'exploitation (agent de sécurité) au niveau 1 échelon 1 coefficient 100, porté à 120 à l'issue de la période d'essai, de la Convention collective nationale des Entreprises de Prévention et de Sécurité et ce, moyennant un salaire brut mensuel qui s'élevait à la somme de 1 469, 47 € dans le dernier état de la relation de travail.
Par courrier recommandé du 7 mars 2009, la société SPGO Pays de Loire a fait observer à M. Frédéric Z...qu'en dépit de l'ordre individuel de service qui lui avait été régulièrement communiqué, il n'était pas à son poste de travail le mardi 3 et le mercredi 4 mars précédents et qu'il ne lui avait toujours pas fait parvenir de justificatif de son absence. Elle lui demandait de régulariser sa situation à cet égard sous peine d'une éventuelle sanction disciplinaire.
Par courrier électronique du 9 mars 2009, le salarié a répondu à son employeur qu'il s'était fait remplacer par un collègue de travail car il avait, en vain, signalé à sa hiérarchie qu'il avait cumulé 57h50 de travail sur 5 jours de sorte que son temps de repos n'avait pas été respecté.
M. Frédéric Z...a été placé en arrêt de maladie du 9 au 22 mars 2009. Par lettre recommandée du 23 mars 2009, la société SPGO Pays de Loire l'a convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 2 avril suivant et elle lui a notifié sa mise à pied à titre conservatoire immédiate.
Par lettre recommandée du 17 avril 2009, elle lui a notifié son licenciement pour faute grave, tenant à son absence injustifiée à son poste de travail les 3 et 4 mars 2009 et au fait qu'il avait organisé son remplacement sans l'accord de la hiérarchie.
Le 12 juin 2009, M. Frédéric Z...a saisi le conseil de prud'hommes pour contester cette mesure et, dans le dernier état de la procédure, obtenir le paiement d'un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire, des indemnités de rupture et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement du 29 juillet 2010 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers, estimant le licenciement de M. Z...dépourvu de cause réelle et sérieuse, a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire prévue par l'article 515 du code de procédure civile, condamné la société SPGO Pays de Loire à lui payer les sommes suivantes :-1 624, 72 € de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,-3 249, 44 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-1 616, 71 € d'indemnité légale de licenciement,-9 748, 32 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- débouté la société SPGO Pays de Loire de sa demande formée au titre des frais irrépétibles ;- lui a donné acte de son paiement de la somme de 688, 88 € à titre de complément de salaire ;- condamné la société SPGO Pays de Loire aux dépens.

Cette dernière et M. Frédéric Z...ont reçu notification de cette décision respectivement les 26 et 30 août 2010. La société SPGO Pays de Loire en a régulièrement relevé appel général par lettre recommandée postée le 8 septembre suivant.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 octobre 2011. A cette date, pour permettre à M. Frédéric Z...de répondre aux conclusions de la société appelante, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 8 mars 2012, laquelle a été reportée au 7 juin 2012.
Entre temps, par jugement du 2 mars 2012, le tribunal de commerce de Lisieux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société SPGO Pays de Loire et désigné M. Emmanuel X...en qualité d'administrateur judiciaire et M. Alain Y...en qualité de mandataire judiciaire. Le défenseur de M. Frédéric Z...est, quant à lui, décédé.
Pour ces raisons, lors de l'audience du 7 juin 2012, l'affaire a été renvoyée au 8 janvier 2013 étant précisé que, par jugement du 2 mai 2012, le tribunal de commerce de Lisieux a ordonné la poursuite d'activité de la société SPGO Pays de Loire.
M. Alain Y..., pris en qualité de mandataire judiciaire de la société SPGO Pays de Loire a accusé réception le 9 juin 2012 de la convocation adressée par le greffe ; M. Emmanuel X..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire en a accusé réception le 11 juin 2012 de même que l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés.
Par conclusions enregistrées au greffe le 1er octobre 2012, M. Alain Y..., pris en qualité de mandataire judiciaire de la société SPGO Pays de Loire et M. Emmanuel X..., pris en sa qualité d'administrateur judiciaire, ont déclaré intervenir volontairement à l'instance.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 8 janvier 2013, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société SPGO Pays de Loire demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de juger que le licenciement de M. Frédéric Z...repose bien sur une faute grave, de débouter ce dernier de l'ensemble de ses prétentions et de le condamner à lui payer la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
A l'appui de sa demande, l'employeur fait valoir qu'il est constant que M. Frédéric Z...ne s'est pas présenté à son poste de travail les 3 et 4 mars 2009 en dépit de l'ordre individuel de service qui lui avait été régulièrement communiqué le 15 février précédent et qu'il n'a nullement justifié cette absence ni fourni aucune excuse ; que cette attitude caractérise une absence irrégulière et un abandon de poste constitutifs d'une faute grave. L'appelante ajoute que M. Z...ne pouvait pas s'autoriser à organiser seul son remplacement directement avec un collègue s'agissant de son service effectif de semaine mais devait solliciter l'autorisation de la hiérarchie ; que le rapport d'astreinte de week-end n'a nullement vocation à enregistrer des demandes personnelles, notamment, de modification de planning, ni des informations transmises à l'employeur sur ce point ; qu'elle n'a pas accepté " de fait " l'absence de M. Z...et qu'elle ne savait pas comment le joindre ni pendant combien de temps il serait absent ; que le salarié ne justifie ni l'avoir informée de difficultés relatives au nombre d'heures de travail accomplies, ni du dépassement de temps de travail qu'il allègue. Elle rétorque que, contrairement à ce que soutient l'intimé, la lettre de licenciement vise précisément ses absences des 3 et 4 mars 2009 comme motif de son licenciement et elle argue de ce que son attitude est d'autant plus grave que le CDD de M. C..., collègue auquel il a fait appel pour le remplacer, s'achevait le 1er mars 2009.

Aux termes de leurs conclusions d'intervention volontaire enregistrées au greffe le 1er octobre 2012, M. Alain Y..., pris en qualité de mandataire judiciaire de la société SPGO Pays de Loire et M. Emmanuel X..., membre de la SELARL FHB, pris en sa qualité d'administrateur judiciaire indiquent donner entière adjonction aux demandes et conclusions de la société SPGO Pays de Loire et solliciter l'infirmation du jugement entrepris.

Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 20 décembre 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés (AGS) représentée par l'UNEDIC-CGEA de Rouen, association gestionnaire de l'AGS, demande à la cour :
- de lui donner acte de son intervention ;
- d'infirmer le jugement entrepris et de dire que le licenciement de M. Frédéric Z...repose bien sur une faute grave et, subsidiairement, sur une cause réelle et sérieuse ;- dans l'hypothèse où une créance serait fixée au passif du redressement judiciaire de la société SPGO Pays de Loire, de juger qu'elle ne la garantira que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds fixés par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du même code.

Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 14 décembre 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Frédéric Z...demande à la cour de débouter la société SPGO Pays de Loire de son appel et de sa demande formée au titre des frais irrépétibles, de confirmer purement et simplement le jugement déféré, de condamner aux dépens.

Le salarié ne méconnaît pas qu'il était de service les mardi 3 et mercredi 4 mars 2009 mais il estime que son absence ne permet de caractériser ni une faute grave, ni une cause réelle et sérieuse de licenciement en ce qu'il a organisé son remplacement avec un collègue au cours du week-end précédent pendant lequel il était d'astreinte, et a informé son employeur de cet arrangement au moyen d'un message mentionné sur le classeur de liaison dès la fin de son service le 2 mars à 22h15, ce qui correspond, selon lui, à un usage constant au sein de l'entreprise ; que, d'ailleurs, l'employeur n'a pas réagi lors de la relève du 3 mars à 8 heures alors qu'il disposait du temps nécessaire pour lui signifier son refus puisqu'aux termes du planning, le 3 mars, il ne reprenait normalement son service qu'à 20 heures ; qu'il s'ensuit que la société SPGO Pays de Loire a, " de fait ", accepté son absence ; que l'organisation de ce remplacement était justifiée par la circonstance qu'il avait enregistré une amplitude hebdomadaire de travail excessive au cours de la semaine précédente, à savoir : 57 heures sans repos hebdomadaire.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le licenciement :
Attendu que la lettre de licenciement adressée à M. Frédéric Z...le 17 avril 2009, et qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée : " Monsieur, Conformément aux dispositions de l'article L. 1232-3 et suivants, du Code du Travail, et à la suite de l'entretien qui s'est tenu le 02 avril 2009 avec moi même dans le cadre de la procédure de licenciement engagée à votre égard et après réexamen de votre dossier personnel, nous vous informons que nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave aux motifs suivants :

Vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail sur le site HELVETICAST à qui avaient constitué la société GEMMES sur Loir, le mardi 3 mars et le mercredi 4 mars 2009 malgré l'ordre individuel de service qui vous avait été communiqué. Alors que vous étiez en service d'astreinte maîtrise pour l'agence de qui avaient constitué la société Gemmes/ loire (qui consiste à assurer une permanence téléphonique pour pourvoir aux éventuelles postes vacants) le week-end du 1 et 2 mars 2009, vous avez librement organisé votre remplacement pour les services du 3 et 4 mars suivant par deux agents.

A aucun moment vous n'avez sollicité l'accord de votre hiérarchie, cet à dire Monsieur D...ou moi même, ni même le jour ouvré suivant. Nous avons donc constaté votre absence le mardi matin car l'agent C...dont le contrat se terminait le 01 mars 2009 et avec lequel vous aviez organisé votre remplacement, est arrivé en retard pour sa prise de service. En effet monsieur E...qui était en poste la nuit précédente nous a avertie de cette absence de relève. Le 07 mars 2009 nous vous avons adressé un courrier recommandé vous demandant de justifier vos absences. Vous nous avez répondu par messagerie le lundi 9 mars 2009 mais les arguments invoqués ne nous ont pas permis de justifier vos absences irrégulières. Cette attitude est totalement inacceptable et perturbe considérablement la bonne marche du service. Nous vous rappelons les articles 7. 02 et 7. 03 de la Convention Collective des entreprises de prévention et de sécurité et à ce titre nous sommes amenés à considérer qu'il s'agit d'une absence irrégulière. Le règlement intérieur prévoit à l'article 3. 2. b qu'une absence irrégulière constitue une faute professionnelle. Le fait de ne pas avoir assurer votre prestation le mardi 3 mars et le mercredi 4 mars 2009, indépendamment de la situation d'absence irrégulière citée ci-dessus, constitue par ailleurs un abandon de poste, en référence à l'article 4 du règlement intérieur. Face à cette situation, nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave. Celui ci prendra effet à la première présentation de cette notification. " ;

Attendu que la lettre se poursuit par les dispositions relatives au préavis, à la remise du certificat de travail, du solde de tout compte et à la restitution des matériels mis à la disposition du salarié par l'entreprise ;

Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve ;
Attendu qu'il ressort sans équivoque des termes de la lettre de licenciement que le manquement imputé à M. Frédéric Z...tient, d'une part, dans le fait qu'en dépit de l'ordre individuel de service qui lui avait été remis et sans justificatif, il n'a pas assuré son service les 3 et 4 mars 2009, d'autre part, dans l'organisation de son remplacement sur ces deux jours sans avoir sollicité l'accord de sa hiérarchie ;
Attendu qu'il résulte des débats et des pièces produites que M. Frédéric Z...a été d'astreinte de fin de semaine du vendredi soir 27 février au lundi 2 mars 2009 à 8 heures ; qu'il n'est pas discuté que cette astreinte consiste pour le salarié, à partir de son domicile, à pallier toute difficulté dans l'organisation du service en faisant appel en cas de besoin à un agent de remplacement mentionné sur une liste préétablie ; Que, contrairement à ce qu'indique la société SPGO Pays de Loire, le salarié n'a pas été seulement d'astreinte au cours de cette fin de semaine en ce qu'il ressort des fiches d'horaires annexées à ses bulletins de paie des mois de février et mars 2009, mais aussi de son ordre individuel de service pour le mois de mars, qu'il était également de service de rondes sur le secteur d'Angers, le samedi 28 février de 8 h à 20 h et le dimanche 1er mars 2009 de 8 h à 20 h ; que le fait qu'il s'agissait bien de travail effectif ressort suffisamment de la mention " H. N ", soit " heures normales ", portée sur les fiches annexées aux bulletins de paie et de la mention " H. DIM ", soit " heures de dimanches " portée pour la journée du 1er mars ;

Attendu que, selon l'ordre individuel de service qui lui avait été diffusé le 19 février 2009, M. Z...était encore affecté à un service de " rondes secteur " le lundi 2 mars de 22 h 50 à 8 h le lendemain, service qu'il a respecté, et il devait travailler sur le site de l'entreprise " Helveticast " le mardi 3 mars de 20 h à 8 h le lendemain et, le mercredi 4 mars de 20 h à 8 h le lendemain ;
Attendu que le salarié énonce lui-même aux termes de ses écritures reprises oralement à l'audience que, " désirant se faire remplacer les 3 et 4 mars 2009 ", il a téléphoné le dimanche 1er mars à M. Jonathan F...qui travaillait sur le site de l'entreprise Helveticast afin d'obtenir les noms des salariés affectés à la surveillance de ce site ; que, parmi eux, figurait M. Patriciu C...auquel il a téléphoné et qui a accepté d'assurer ce remplacement ; que l'intimé affirme avoir mentionné le remplacement ainsi organisé sur " le classeur des plannings " encore appelé " cahier de poste " qui lui avait été remis pour son astreinte et qu'il aurait lui-même restitué à l'agence de Sainte Gemmes sur Loire le 2 mars vers 22 h 15 ;
Attendu que la matérialité de l'absence reprochée à M. Z...les 3 et 4 mars est donc parfaitement établie et reconnue, ce dernier, qui était en congé le 5 mars, indiquant avoir repris son travail, comme prévu aux termes de son planning, le 6 mars 2009 à 17 heures ; que l'intimé ne méconnaît pas non plus s'être abstenu de se présenter à son travail les 3 et 4 mars sans avoir sollicité au préalable, ni obtenu, l'autorisation de son employeur, étant rappelé que l'organisation du planning de travail relève de l'exercice du pouvoir de direction de ce dernier ;
Attendu, outre qu'aucun élément objectif ne vient accréditer l'affirmation du salarié selon laquelle il aurait mentionné son absence des 3 et 4 mars et son remplacement tel qu'il l'avait organisé sur le cahier de poste, qu'il résulte de l'attestation de M. Alain G..., assistant d'exploitation, que ce document n'a nullement vocation à enregistrer les demandes ou les messages personnels des salariés à l'intention de la direction s'agissant, notamment, de leur planning mais est destiné à consigner les événements survenus au cours de l'astreinte ou du service de poste ;
Et attendu qu'il ressort du libellé même de l'ordre individuel de service établi le 19 février 2009 que le salarié ne pouvait pas organiser lui-même son remplacement puisque ce document énonce : " En cas d'impossibilité d'assurer une ou plusieurs des vacations programmées ci-dessous, il est impératif de nous en informer au plus tôt ce qui n'exclut pas l'obligation de justifier par la suite du motif de votre absence conformément au règlement intérieur. " ;
Et attendu que M. Frédéric Z...ne justifie pas qu'il aurait été d'usage constant au sein de l'entreprise que les salariés puissent organiser librement leur remplacement en se contentant de mentionner ce remplacement sur le cahier de poste ou de liaison ; que le témoignage de M. Ghislain E...est sans rapport avec une telle allégation puisque celui-ci se contente d'expliquer que l'agent qui est d'astreinte-maîtrise au cours d'un week-end a la charge d'assurer de façon impromptue pour cette fin de semaine, les remplacements, qu'il qualifie bien d'" exceptionnels ", des agents en poste en cas de difficulté, le témoin précisant que l'agent qui organise un tel remplacement au cours d'un week-end n'a pas
l'obligation de prévenir le chef de secteur ; mais attendu que, si cette mission très spécifique de l'agent d'astreinte de fin de semaine n'est pas discutée par l'employeur, elle ne correspond pas du tout à l'hypothèse d'organisation de son propre remplacement en cours de semaine auquel a procédé l'intimé pour les journées des 3 et 4 mars 2009 ;
Attendu qu'aux termes de l'attestation qu'il a établie, M. Franck Z..., frère de l'intimé, commence par relater la même mission de l'agent d'astreinte de fin de semaine ; et attendu que la suite de son témoignage ne permet pas non plus de faire la preuve de l'usage constant allégué par M. Frédéric Z...en ce que le témoin indique seulement qu'il " pouvait arriver " que la société SPGO Pays de Loire " retape le planning en fonction des feuilles mit à disposition expliquant les modifications de jours de travail ", l'employeur demandant seulement que " les heures en fin de mois soit identiques qu'au début de la programmation " ; que ce libellé au demeurant peu clair, se rapportant à certaines circonstances non explicitées, ne constitue pas la relation d'un usage précis et bien établi dans l'entreprise tel que revendiqué par l'intimé ; que, pour le surplus, M. Franck Z...fait état du non-respect par la société SPGO Pays de Loire des jours de repos, des délais entre les plages de travail, de la modulation du temps de travail et du paiement des heures supplémentaires, et du fait que des salariés pouvaient être rappelés alors qu'ils étaient en repos, tous éléments sans rapport avec l'usage invoqué ; que le salarié s'avère donc défaillant à rapporter la preuve de l'usage constant qu'il allègue ;
Attendu, d'ailleurs que, loin d'avoir, aux termes de la réponse qu'il a adressée à son employeur le 9 mars 2009, invoqué un tel usage constant, il a indiqué : " Pour réponse à votre courrier, je justifies mon " remplacement ", car rien dans le règlement stipule que je ne peut pas demander à un collègue de me remplacer " ;
Attendu, s'agissant de la durée maximale de travail, que l'article 7. 09 de la convention collective prévoit que " La semaine de travail ne pourra excéder 4 fois 12 heures, soit 48 heures. Un jour de repos sera ménagé après toute période de 48 heures de service. " ; attendu qu'il résulte des fiches horaires annexées aux bulletins de salaire de M. Frédéric Z...qu'aux mois de février 2009 et début mars 2009 :- il a travaillé 23h50 du mercredi 4 au vendredi 6 février,- il a été en congés payés au cours de la semaine du lundi 9 au vendredi 13 février,- il a travaillé 38 heures au cours de la semaine du lundi 16 au vendredi 20 février,- il n'a pas travaillé pendant les fins de semaine hormis les 28 février et 1er mars,- il a travaillé 7 heures le lundi 23 et le mardi 24 février, soit 14 heures pendant ces deux jours, et 3 heures le jeudi 26 février tandis qu'il a été en repos les mercredi 25 et jeudi 27 février et qu'il a travaillé 12 heures le samedi 28 févier et 12 heures le dimanche 1er mars, d'où une durée totale de travail de 41 heures pour la semaine du 23 février au 1er mars 2009 ;

Que, s'il est exact que le planning, tel qu'établi par l'employeur du samedi 28 février au mercredi 4 mars impliquait l'accomplissement par le salarié de 57, 5 heures de travail au cours de la dite période et ne respectait donc pas la règle imposant l'aménagement d'un jour de repos après toute période de 48 heures de service, cette circonstance n'était pas de nature à autoriser M. Frédéric Z...à contrecarrer le pouvoir de direction de l'employeur et à se faire, en quelque
sorte, justice à lui-même en organisant son propre remplacement sans solliciter l'autorisation de sa hiérarchie alors que, disposant de son planning depuis le 19 février et expressément invité à l'avertir de toute difficulté, il avait eu tout loisir de former, en temps utile, des réclamations relativement au non-respect de cette règle, ce qu'il ne justifie pas avoir fait ; qu'en outre, M. Z...ne peut pas utilement invoquer le dépassement de l'amplitude hebdomadaire de travail pour expliquer son absence et son remplacement du mardi 3 mars puisque, selon le planning établi par l'employeur, à la fin de cette journée, il n'aurait enregistré que 45, 5 heures de service depuis le samedi précédent et n'atteignait donc pas les 48 heures fixées par la convention collective ; qu'enfin, cette organisation de son propre remplacement in extremis et sans obtenir l'autorisation de l'employeur est d'autant moins acceptable que, d'une part, le salarié ne justifie, ni n'allègue d'ailleurs, de violations antérieures de cette règle des 48 heures, et que, d'autre part, son planning du mois de février 2009 l'avait soumis à un rythme parfaitement respectueux des durées de travail applicables ;
Attendu que l'attitude de M. Frédéric Z...apparaît encore fautive en ce qu'il n'appartient pas au salarié de choisir son remplaçant, ce choix relevant du seul pouvoir de direction de l'employeur ; que ceci est d'autant plus vrai s'agissant d'une activité de sécurité dans le cadre de laquelle l'employeur est tenu envers son client d'une obligation de résultat quant à la mise en place du protocole convenu, de sorte qu'il doit pouvoir maîtriser l'organisation de cette prestation ;
Attendu qu'au regard de ces éléments et circonstances, l'absence injustifiée de M. Frédéric Z...à son poste de travail les 3 et 4 mars 2009 et le fait pour lui d'avoir organisé son propre remplacement à sa guise sans solliciter ni obtenir l'autorisation de son employeur caractérise une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise ;
Que, le licenciement étant justifié et la faute grave privative des indemnités de rupture, par voie d'infirmation du jugement déféré, M. Frédéric Z...doit être débouté de l'ensemble de ses demandes en paiement afférentes au licenciement ;
Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu que, par voie d'infirmation du jugement déféré, M. Frédéric Z...sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel et conservera la charge de l'intégralité des frais irrépétibles qu'il a pu exposer tant en première instance qu'en cause d'appel ; Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société SPGO Pays de Loire, le jugement étant confirmé de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Donne acte à M. Alain Y..., pris en qualité de mandataire judiciaire de la société SPGO Pays de Loire et à M. Emmanuel X..., membre de la SELARL FHB, pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de cette société de leur intervention volontaire ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société SPGO Pays de Loire de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que le licenciement de M. Frédéric Z...est fondé sur une faute grave ;
En conséquence, le déboute de l'ensemble de ses demandes en paiement afférentes au licenciement ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles tant en première instance qu'en cause d'appel ;
Déclare le présent arrêt opposable à l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés ;
Condamne M. Frédéric Z...aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02275
Date de la décision : 12/03/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-03-12;10.02275 ?
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