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26/02/2013 | FRANCE | N°11/00654

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 26 février 2013, 11/00654


COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 26 Février 2013
ARRÊT N AD/ FB
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00654.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 11 Février 2011, enregistrée sous le no 09/ 00547

APPELANT :
Monsieur Walter X...... 72300 AUVERS LE HAMON
présent, assisté de Maître Boris MARIE, avocat au barreau du MANS
INTIME :
Monsieur Laurent Y...... 72300 SOLESMES
présent assisté de Maître Virginie CONTE substituant Maître Alain P

IGEAU (SCP MEMIN-PIGEAU), avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispos...

COUR D'APPEL d'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 26 Février 2013
ARRÊT N AD/ FB
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00654.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 11 Février 2011, enregistrée sous le no 09/ 00547

APPELANT :
Monsieur Walter X...... 72300 AUVERS LE HAMON
présent, assisté de Maître Boris MARIE, avocat au barreau du MANS
INTIME :
Monsieur Laurent Y...... 72300 SOLESMES
présent assisté de Maître Virginie CONTE substituant Maître Alain PIGEAU (SCP MEMIN-PIGEAU), avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Novembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président Madame Anne DUFAU, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT : prononcé le 26 Février 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE :
Le 16 septembre 2002 M. Y..., qui dirige une entreprise de menuiserie et pose de placoplâtre, sise à Solesmes (72) qu'il a créée en 1994, a embauché M. X... en contrat à durée indéterminée, comme plâtrier, au coefficient 170 de la convention collective nationale des ouvriers du Bâtiment, appliquée par l'entreprise, pour un temps de travail hebdomadaire de 39 heures.
Le 12 décembre 2008 M. Y... a adressé à M. X... une lettre dans laquelle il lui proposait de réduire son temps de travail à 35 heures, ce que M. X... a refusé.
M. X... a été convoqué le 5 juin 2009 à un entretien préalable à un licenciement économique fixé au 15 juin 2009, et il a accepté la convention de reclassement personnalisé le 23 juin 2009.
Le 25 juin 2009 l'employeur lui a adressé une lettre de licenciement pour motif économique.
M. X... a quitté l'entreprise le 6 juillet 2009, en percevant une indemnité de licenciement de 2279, 35 €.
M. Y... a versé au pôle emploi, au titre de la convention de reclassement personnalisé, la somme de 3472 €.
L'entreprise, qui avait initialement 8 salariés, en a compté à cette date, du fait de l'arrivée d'un terme de contrat à durée déterminée, d'un départ à la retraite et de trois licenciements, trois seulement.
Le 11 septembre 2009 M. X... a saisi le conseil de prud'hommes du Mans devant lequel il a réclamé l'obtention du coefficient 230 à effet au premier août 2004 avec un rappel de rémunération correspondant, soit la somme de 12 806, 13 €, outre les congés payés afférents, la remise des bulletins de salaires modifiés, du certificat de travail indiquant le coefficient 230 et de l'attestation Pole Emploi modifiée, une indemnité de 12 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse aux motifs que d'une part le motif économique n'est ni réel ni sérieux, qu'il n'est pas indiqué qu'il y ait eu une suppression de poste, ce qui équivaut à un motif imprécis et donc à une absence de motif et subsidiairement la même somme pour non respect des critères régissant l'ordre des licenciements. Il a sollicité une somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 11 février 2011, rendu sous la présidence du juge départiteur, le conseil de prud'hommes du Mans a rejeté les demandes de classification et de rappel de salaire, de congés payés y afférents, et de remise de bulletins de salaire, d'attestation Pôle Emploi et de certificat de travail modifiés, a dit que le licenciement économique de Monsieur X... repose sur une cause réelle et sérieuse et rejeté en conséquence la demande de dommages-intérêts, a constaté que le demandeur a abandonné le moyen relatif au non-respect des critères de licenciement, a dit que chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles et a condamné M. X... aux entiers dépens.
Le jugement a été notifié le 12 février 2011 à M. X... et le 14 février 2011à M. Y....
M. X... en a fait régulièrement appel par lettre postée 10 mars 2011.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 29mars 2012, reprises et soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. X... demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau de :
- dire qu'il devra bénéficier du coefficient 230, en conséquence condamner M. Y... à lui payer la somme de 12 806, 13 € correspondant au rappel de salaire, outre 1280, 61 € au titre des congés payés y afférents, et ordonner la remise des bulletins de salaire modifiés, d'un certificat de travail indiquant le coefficient 230, et d'une attestation Pôle Emploi modifiée,
- subsidiairement, faire application du coefficient 210, en conséquence condamner M. Y... à lui payer la somme de 5087, 08 €, outre les congés payés, et ordonner la remise des bulletins de salaire modifiés, d'un certificat de travail indiquant le coefficient 210, et d'une attestation pôle emploi modifiée,
- condamner M. Y... au paiement de la somme de 12 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et subsidiairement à lui payer cette somme au titre du non respect de l'ordre des licenciements,
- condamner M. Y... au paiement d'une somme de 1300 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X... soutient que l'article 12. 41 de la convention collective nationale des ouvriers du bâtiment, si elle n'installe pas un passage automatique, à l'ancienneté, du coefficient 185 au coefficient 210 ou 230, envisage néanmoins une progression de coefficient dès lors que le salarié bénéficie d'un C. A. P. (Certificat d'aptitude professionnelle), diplôme qu'il a obtenu le 17 décembre 1999, et dont il était par conséquent détenteur lors de son embauche le 16 septembre 2002 ; que la qualité de son travail n'a jamais été remise en cause par son employeur, et qu'il travaillait de manière autonome sur les chantiers, à partir d'instructions générales, et non pas comme le prétend M. Y..., sous le contrôle permanent et la responsabilité de M. Z..., plâtrier plaquiste comme lui et ayant une ancienneté identique à la sienne, et non pas supérieure. Il ajoute qu'il est aujourd'hui employé au coefficient 230, ce qui démontre ses compétences.
M. X... rappelle que le rappel de salaire doit être fait par comparaison entre le taux horaire minimum brut de la catégorie conventionnelle applicable, et le salaire mensuel brut payé, et que les primes n'ont pas vocation à s'imputer sur le salaire de base.
Il justifie son rappel de salaire au coefficient 230, du 16 septembre 2002 au licenciement, par l'application des taux horaires successivement fixés par les avenants de la conventions collective nationale des ouvriers du bâtiment, soit par l'avenant salaires département Mayenne, Sarthe, Vendée, du 19 avril 2001 applicable au 1er juin 2001, l'avenant salaires Pays de la Loire du 20 septembre 2005, applicable au 1er octobre 2005, l'avenant salaires Pays de la Loire du 14 septembre 2006, applicable au 1er octobre 2006, l'avenant salaires Pays de la Loire du 16 juillet 2007, applicable au 1er octobre 2007 et l'avenant salaires pays de la Loire du 21 mai 2008, applicable au 1er juillet 2008. Il établit le rappel de salaire au coefficient 210, qu'il sollicite à titre subsidiaire, sur les mêmes bases.
Quant au licenciement, M. X... soutient d'une part que le motif économique invoqué, soit la suppression d'un poste de plâtrier causé par la chute des commandes du client Maisons Aura, entraînant une baisse du chiffre d'affaires, et du résultat, n'est pas établi, les difficultés économiques invoquées n'existant en réalité pas.
M. X... relève que M. Y..., qui travaillait initialement essentiellement dans le secteur de la construction de logements neufs a, du fait de la baisse des commandes émanant de son principal client à ce titre, Maisons Aura, réorienté son activité vers le secteur de la restauration d'ancien, et que cela lui a permis de maintenir son chiffre d'affaires, et même d'améliorer son résultat ; qu'en effet le chiffre d'affaires au 31 décembre 2008 est de 466 359 € pour un résultat avant impôt de 3046 € et le chiffre d'affaires au 31 décembre 2009 de 419 636 €, pour un résultat avant impôt de 17 773 € ; que le bilan au 31 décembre 2009 montre des disponibilités de 31 982 €.
M. X... ajoute que la suppression de son poste n'est pas établie, M. Y... ne communiquant le registre du personnel que jusqu'au 31 décembre 2008, alors que le licenciement a eu lieu le 25 juin 2009, et qu'aucune vérification de cette suppression n'est par conséquent possible.
Enfin et subsidiairement M. X... relève que l'employeur ne s'explique pas sur les critères d'ordre des licenciements qu'il aurait appliqués, alors que deux autres ouvriers, M. Z... et M. A..., étaient employés dans sa catégorie professionnelle.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 6 avril 2012, reprises et soutenues oralement à l'audience devant la cour, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Y... demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter M. X... de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient quant à la classification de M. X... que la convention collective laisse une alternative à l'employeur, 9 mois après le classement du salarié au coefficient 185, qui est soit de le reconnaître dans sa position, soit de le classer à un niveau supérieur, en fonction de ses aptitudes et capacités professionnelles ; qu'il n'y a là aucun automatisme mais que l'évolution professionnelle entre les coefficients 185, 210 et 230 s'apprécie par le contenu des travaux confiés, outre une autonomie et une évolution des connaissances professionnelles ; que M. X... s'est vu confier, du jour de son embauche au jour de son licenciement, un travail identique, soit la pose de placoplâtre dans les pavillons commercialisés par les Maisons Aura, les autres chantiers de rénovation ou de maisons individuelles n'ayant représenté qu'une activité marginale ; qu'en outre et au surplus un rappel de rémunération, sur une base conventionnelle, ne saurait être effectué sans tenir compte de l'intégralité des éléments de rémunération versés par l'employeur sur la période concernée, et que les primes perçues par M. X... doivent donc être réintégrées dans le comparatif réalisé ; qu'ainsi sur la base du coefficient 210, le rappel de rémunérations, congés payés compris, s'élèverait à 5087, 08 €, comme en convient d'ailleurs M. X....
M. Y... soutient d'autre part que le motif économique est précisément explicité dans la lettre de licenciement, et qu'il en démontre le caractère réel et sérieux ; qu'en effet en 2008 le carnet de commandes de Maisons Aura, qui assurait 70 % de son chiffre d'affaires, s'est drastiquement réduit, et qu'en juin 2009 il n'y avait plus aucun pavillon à équiper pour ce client, ce qui rendait le licenciement de M. X... " inévitable " ; que le poste a bien été supprimé et que si M. B..., également licencié pour motif économique a bien été réembauché en contrat à durée indéterminée le 20 septembre 2010, c'est dans le cadre de la priorité de réembauche et parce qu'un apprenti avait souhaité rejoindre au terme de son apprentissage un autre employeur ; qu'en ce qui concerne l'ordre des licenciements, il a respecté le critère d'ancienneté, seuls les postes des 3 plâtriers plaquistes " les plus anciens et les plus compétents " ayant été maintenus ;

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le coefficient applicable :
Le salarié est en droit de demander en justice une nouvelle classification si son salaire ne correspond pas à l'indice normalement prévu dans la convention collective au regard de l'activité réellement exercée.
Il lui appartient de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.
Le juge détermine les tâches réellement exercées, et les rapporte aux grilles indiciaires.
M. X... relève qu'il détenait au moment de son embauche, en 2002, un C. A. P. (Certificat d'aptitude professionnelle), " plâtrerie, plâtres et préfabriqués ", diplôme obtenu le 17 décembre 1999 ;
La convention collective des ouvriers du bâtiment énonce dans son préambule " la volonté des organisations professionnelles signataires de valoriser les métiers du bâtiment et d'améliorer l'image de marque de la profession afin notamment d'attirer et de conserver les jeunes qualifiés.. ce qui suppose une prise en compte accrue par la profession et par les entreprises des impératifs de formation, initiale et continue... "
Elle précise cet objectif, notamment à l'article 12. 41, qui énonce : " Les ouvriers titulaires d'un C. A. P.... seront classés au niveau II, coefficient 185. A l'issue d'une période maximale de 9 mois après leur classement, les intéressés seront reconnus dans leur position ou classés à un niveau supérieur en fonction de leurs aptitudes et capacités professionnelles. Ce délai est réduit à 6 mois pour les ouvriers ayant une expérience antérieure d'entreprise, acquise notamment par l'apprentissage ou par la formation en alternance. "
Si la convention collective pose en principe la prise en compte de la formation reçue par le salarié, il ne ressort pas de l'article L12. 41 qu'un classement à l'indice supérieur soit acquis de droit, et de manière automatique, après 9 mois d'emploi, au salarié détenteur d'un C. A. P : le texte prévoit que le classement supérieur des salariés diplômés doit se faire " en fonction de leurs aptitudes et capacités professionnelles " et il en résulte bien une alternative pour l'employeur, qui opère le classement supérieur au vu de l'évolution professionnelle accomplie par le salarié ;
La classification 230, revendiquée à titre principal par M. X..., correspond dans la convention collective des ouvriers du bâtiment au niveau III : compagnons professionnels, position 2, ainsi décrit :
" les ouvriers de niveau III. 2 exécutent les travaux délicats de leur métier, à partir d'instructions et sous contrôle de bonne fin, Dans ce cadre, ils disposent d'une certaine autonomie et sont à même de prendre des initiatives se rapportant à la réalisation des travaux qui leur sont confiés.
Ils possèdent et mettent en oeuvre de très bonnes connaissances professionnelles acquises par formation professionnelle, initiale et/ ou une expérience équivalente. Ils peuvent être appelés à transmettre leur expérience et, éventuellement, à assurer le tutorat des apprentis et des nouveaux embauchés. "
M. X... expose qu'il était autonome dans la réalisation de ses travaux, car M. Z..., employé à la même période que lui, sur un poste similaire au sien de plâtrier plaquiste, avait la même ancienneté que lui dans l'entreprise, ce qui est en effet acquis aux débats ;
Il apparaît cependant d'une part que M. Z... était plus âgé de cinq années, et que le coefficient 230 lui est affecté sur le registre des entrées et sorties du personnel, coefficient qui était aussi dans l'entreprise celui de deux autres plâtriers ;
Si M. X... ne fait donc pas la preuve de son autonomie dans la réalisation des travaux confiés, il ne démontre pas plus que ceux-ci aient présenté 9 mois après son embauche ou à un autre moment de l'exécution du contrat de travail un niveau augmenté de difficulté correspondant à une évolution de ses connaissances professionnelles, puisqu'il ne verse aucune pièce aux débats, et ne présente donc pas au soutien de sa revendication un quelconque document descriptif de la nature de ses travaux, et de leur éventuelle évolution, alors que M. Y... lui oppose qu'il s'est constamment agi de la pose de placoplâtre dans des pavillons neufs ;
Le fait qu'il ait été, par la suite, embauché en contrat à durée déterminée au coefficient 230, au surplus pour un contrat à durée déterminée de 8 jours, est inopérant à établir la réalité des tâches qui lui ont été confiées dans le cadre de l'exécution du contrat de travail conclu avec M. Y... ;
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande au titre du coefficient de classification 230 ;
Le coefficient 210 correspond quant à lui à l'emploi suivant :
" Les ouvriers de niveau III/ 1 exécutent les travaux de leur métier, à partir de directives et sous contrôle de bonne fin. Ils sont responsables de la bonne réalisation de ces travaux qui peuvent impliquer la lecture de plans, et la tenue de documents d'exécution qui s'y rapportent. Dans l'exécution de ces tâches ils peuvent :- être assistés d'autres ouvriers, en principe de qualification moindre, qui les aident dans l'accomplissement de leurs tâches et dont ils guident le travail,- être amenés ponctuellement, sur instructions du chef d'entreprise, à assumer des fonctions de représentation simple ayant trait à l'exécution de leur travail quotidien, et à transmettre leur expérience, notamment à des apprentis ou à des nouveaux embauchés. Ils possèdent et mettent en oeuvre de bonnes connaissances professionnelles acquises par formation professionnelle, initiale ou continue, ou une expérience équivalente ".
M. X... n'apporte là encore aucune pièce au soutien de cette demande subsidiaire de classification conventionnelle, qu'il n'a pas revendiquée en première instance, et ne démontre par conséquent pas qu'il ait eu la responsabilité de travaux à réaliser sur plans, qu'il ait tenu des documents d'exécution s'y rapportant, ou encore qu'il ait été assisté dans sa tâche par d'autres ouvriers de qualification moindre ;
Cette absence de production de toute pièce afférente aux travaux accomplis, qu'il s'agisse du coefficient 230 ou du coefficient 210, montre que M. X..., quoiqu'il s'en défende, a interprété la convention collective comme installant un passage automatique à la classification supérieure, une fois l'ancienneté visée par le texte acquise, ce qui constitue, comme les premiers juges l'ont à juste titre relevé, une interprétation erronée de celle-ci ;
M. X... est débouté de sa demande de rappel de salaire par application du coefficient 210 à la place du coefficient 185 ;
Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes de remise de bulletins de paie, de certificat de travail et d'attestation Pôle Emploi modifiés ;
Sur la rupture du contrat de travail :
L'adhésion par le salarié à la convention de reclassement personnalisé, si elle entraîne la rupture du contrat de travail, réputée intervenue d'un commun accord, ne prive pas ce dernier de la possibilité d'en contester le motif économique ;

L'article L. 1233-3 du code du travail indique que " constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques " ;
Il résulte des dispositions combinées des articles L. 1233-3 et L. 1233-16 du même code que la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués ;
Dans la lettre adressée à M. X..., M. Y... a mentionné pour motif économique de licenciement :
" Monsieur,
A la suite de notre entretien du 15 juin 2009, je vous informe que Je suis contraint de vous licencier pour le motif économique suivant : suppression d'un poste de « Plâtrier ». Dans le contexte économique actuel, l'entreprise doit faire face à une importante diminution de son activité. Sur l'exercice précédent, elle a enregistré une forte diminution de son résultat et depuis le début de l'année 2009, son chiffre d'affaires est en baisse. Cette réduction est principalement due à la chute d'activité de notre principal client « les maisons Aura » qui générait plus de 50 % de notre chiffre d'affaires. D'importants apports en trésorerie ont été effectués depuis le début de l'année. Ceux-ci devaient permettre à l'entreprise de surmonter ces conditions difficiles, pouvant nous permettre de décrocher de nouveaux chantiers et de voir un redémarrage de l'activité. Malheureusement, la situation ne s'est pas améliorée. Je suis contraint de réorganiser notre fonctionnement et les révisions d'activité sur le trimestre à venir ainsi que la situation actuelle de notre trésorerie me contraignent à procéder à votre licenciement. Il n'existe malheureusement aucun poste au sein de l'entreprise sur lequel je pourrais vous reclasser ".
M. Y... invoque donc pour motif du licenciement de M. X... des difficultés économiques causées par la baisse de son chiffre d'affaires, elle-même due à la baisse de commandes du client Maisons Aura ;
La perte d'un marché ne constitue pas en elle-même une cause de licenciement, les difficultés économiques s'appréciant au niveau de l'entreprise ;
Au soutien de l'affirmation de ses difficultés économiques, M. Y... produit ses bilans 2008 et 2009, arrêtés au 31 décembre, une situation comptable au 31 septembre 2009, et des attestations de son expert comptable établissant la ventilation de son chiffre d'affaires au 31 août 2009 ;
Il en ressort que si au 31 décembre 2008 le chiffre d'affaires issu des marchés passés avec le client Maisons Aura représentait 69, 40 % du chiffre d'affaires total de l'entreprise, cette proportion était passée à 31, 2 % seulement au 31 août 2009 ;
Il apparaît aussi qu'au 31 décembre 2008 le chiffre d'affaires " constructions neuves " représentait 85 % du total, la restauration 14 % (1 % de divers) mais qu'au 31 août 2009 le chiffre d'affaires " neuf " était passé à 55 %, et le chiffre d'affaires " restauration " à 45 % ;
Cette situation intermédiaire au 31 août 2009 est donnée comme existante au moment de la rupture du contrat de travail, et il en résulte que M. Y... avait, dès cette période, obtenu des marchés de restauration d'ancien, en remplacement du marché constructions neuves ;
Cette évolution s'est trouvée confirmée au 31 décembre 2009, la baisse globale de chiffre d'affaires étant au moment de la rupture de 9 %, et de 10 % au 31 décembre 2009 ;
Les bilans produits montrent encore que M. Y... a pu apporter 12 073 € dans l'entreprise entre le 31 décembre 2008 et le 30 septembre 2009, que celle-ci n'a effectué aucun emprunt supplémentaire par rapport à l'emprunt Caisse d'Epargne de 19 000 € déjà en cours et qu'elle n'a pas cessé de rembourser, et qu'au 31 décembre 2008 M. Y... disposait de disponibilités immobilisées pour un montant de 75 670 € lesquelles étaient encore au 31 décembre 2009 de 31 982 € ;
Si la trésorerie de M. Y... a donc effectivement baissé entre décembre 2008 et le licenciement, elle n'a jamais été inexistante et M. Y... n'établit aucunement que le montant à disposition en juin 2009, montant qui était encore de 31 982 € à la fin de l'exercice 2009, ait constitué une difficulté de fonctionnement pour son entreprise ;
Quant au résultat de l'entreprise, il n'a jamais été négatif, et s'il a diminué de 93 % entre décembre 2007, et décembre 2008, il apparaît qu'il à commencé à re-augmenter à partir du 31 décembre 2008, puisqu'il a été à cette date de 2477 € puis, au 31 décembre 2009, de 17 637 € ;
Il ressort de ces éléments que les difficultés économiques de M. Y... n'étaient à la date de la rupture, le 23 juin 2009, ni sérieuses ni durables et que l'entreprise avait amorcé son redressement, à la fin du premier semestre 2009, en ayant obtenu des marchés de restauration d'ancien ;
La convention de reclassement personnalisé étant sans cause, la rupture du contrat de travail a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et le jugement est infirmé sur ce point, sans qu'il y ait lieu dès lors à l'examen des autres moyens de l'appelant, ni à celui de sa demande subsidiaire sur l'ordre des licenciements ;
L'entreprise employant moins de 11 salariés, M. X... a droit, aux termes de l'article L1235-5 du code du travail, du fait de la rupture, à une indemnité correspondant au préjudice subi ;
Son salaire mensuel brut est en juin 2009 de 1667, 46 €, et son ancienneté dans l'entreprise, de 6 ans et 10 mois ; il avait 28 ans au moment de la rupture du contrat de travail ; Il a perçu de Pôle Emploi la somme de 5477, 85 € entre le 27 août 2009 et le 2 décembre 2009, et a retrouvé des emplois intérimaires, de courte durée, comme plaquiste, à compter du 24 septembre 2009 ;
La cour trouve dans la cause les éléments nécessaires pour fixer l'indemnité due à M. X... du fait de la rupture du contrat de travail, à la somme de 12 000 € ;

Sur les dépens et frais irrépétibles :
Les dispositions du jugement sont infirmées ; il paraît inéquitable de laisser à M. X... la charge des frais irrépétibles de première instance et d'appel ; M. Y... est condamné à lui payer à ce titre la somme de 1300 €, et est débouté de sa propre demande ; M. Y... est condamné aux dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes du Mans du 11 février 2011, en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a dit que le licenciement de M. X... repose sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts, et en ses dispositions afférentes aux frais irrépétibles et aux dépens,
L'infirme sur ces seuls points et, statuant à nouveau,
Dit que la rupture du contrat de travail de M. X... a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Condamne M. Y... à verser à M. X... la somme de 12 000 € à titre d'indemnité pour rupture du contrat de travail sans cause réelle et sérieuse,
Y ajoutant,
Condamne M. Y... à payer à M. X... la somme de 1300 € pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, et le déboute de sa propre demande à ce titre,
Condamne M. Y... à supporter les dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00654
Date de la décision : 26/02/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-02-26;11.00654 ?
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