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05/02/2013 | FRANCE | N°11/02035

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 05 février 2013, 11/02035


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 05 Février 2013

ARRÊT N
AL/ MM
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02035
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de SAUMUR, décision attaquée en date du 14 Juin 2011, enregistrée sous le no F 10/ 00137

APPELANT :
Maître Bernard X..., liquidateur Judiciaire de la Société JPV IMPRESSION ... 49000 ANGERS
représenté par Maître Gilles PEDRON, avocat au bar

reau d'ANGERS

INTIMEES :
Madame Brigitte Y...... 49630 CORNE présente, assistée de Maître FUHRER, ...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 05 Février 2013

ARRÊT N
AL/ MM
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 02035
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de SAUMUR, décision attaquée en date du 14 Juin 2011, enregistrée sous le no F 10/ 00137

APPELANT :
Maître Bernard X..., liquidateur Judiciaire de la Société JPV IMPRESSION ... 49000 ANGERS
représenté par Maître Gilles PEDRON, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEES :
Madame Brigitte Y...... 49630 CORNE présente, assistée de Maître FUHRER, avocat au barreau d'ANGERS
AGS CGEA DE RENNES Immeuble Le Magister 4 cours Raphaël Binet 35069 RENNES CEDEX
représenté par Maître LAURENT, avocat au barreau d'ANGERS (SELARL AVOCONSEIL)

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 30 Octobre 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Anne DUFAU, assesseur Madame Anne LEPRIEUR, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT :
du 05 Février 2013, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******* FAITS ET PROCEDURE
La société JPV impression a racheté en 2001 le fonds de commerce de l'imprimerie Meignan au sein de laquelle Mme Y... était employée en qualité de conductrice offset. La société, soumise à la convention collective nationale des imprimeries de labeur et industrie graphique, employait 7 collaborateurs, dont six sur le site de production de l'entreprise situé à Beaufort-en-Vallée.
Le gérant de la société, M. C..., a été victime en avril 2003 d'un grave accident de santé à la suite duquel il s'est trouvé absent de l'entreprise pendant plusieurs semaines. Durant cette période, Mme Y... a assumé différentes tâches anciennement dévolues au gérant.
Dans le courant de l'année 2006, il a été envisagé par Mme Y... de reprendre l'entreprise que M. C... envisageait de céder. La proposition de rachat qu'elle a faite en 2007 a été déclinée, compte tenu de son montant jugé insuffisant.
A compter du 27 septembre 2007, Mme Y... s'est trouvée en arrêt de travail pour maladie de façon ininterrompue.
Par jugement du 14 octobre 2008, il a été ordonné l'ouverture d'une procédure de sauvegarde de la société.
Le 4 novembre 2008, le médecin du travail a déclaré la salariée " inapte à tous les postes de travail de l'entreprise, le maintien de la salariée au poste de travail entraînant un danger immédiat pour la santé de la salariée, selon l'article du code du travail R 4624-31. Inaptitude en une seule visite. "
Le 7 novembre 2008, Mme Y... saisissait le conseil de prud'hommes de Saumur d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ainsi que de fixation de sa créance à titre de rappels de salaires, indemnités de rupture et dommages-intérêts.
Mme Y... a sollicité à titre principal que soit reconnu le bien-fondé de sa demande de rappel de salaires afférente à la classification de directrice de production, groupe I B, d'où la fixation de sa créance aux sommes suivantes : * 82 238, 71 € à titre de rappel de salaires sur classification pour la période de novembre 2003 à septembre 2007, outre 8 223, 87 € au titre des congés payés afférents ; * 24 205, 17 € au titre du maintien du salaire pour la période d'octobre 2007 au jour de la saisine ; * 788, 82 € à titre de rappel de prime annuelle, outre 78, 88 € au titre des congés payés afférents ; * 366, 72 € au titre d'heures supplémentaires, outre 36, 67 € au titre des congés payés afférents ; * 53 495, 23 € à titre de rappel sur indemnité conventionnelle de licenciement ; * 12 192, 11 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 219, 21 € au titre des congés payés afférents.
A titre subsidiaire, elle a demandé que soit reconnu le bien-fondé de sa demande de rappel de salaires afférente à la classification de chef d'atelier, groupe II, d'où la fixation de sa créance aux sommes suivantes : * 52 927, 91 € à titre de rappel de salaires sur classification pour la période de novembre 2003 à septembre 2007, outre 5 292, 79 € au titre des congés payés afférents ; * 15 764, 17 € au titre du maintien du salaire pour la période d'octobre 2007 au jour de la saisine ; * 788, 82 € à titre de rappel de prime annuelle, outre 78, 88 € au titre des congés payés afférents ; * 293, 29 € au titre d'heures supplémentaires, outre 29, 33 € au titre des congés payés afférents ; * 42 807, 36 € à titre de rappel sur indemnité conventionnelle de licenciement ; * 8 255, 28 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 825, 52 € au titre des congés payés afférents.
En tout état de cause, elle a demandé que soit prononcée la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société compte tenu du non-respect de ses obligations légales et conventionnelles, la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et que sa créance soit fixée aux sommes de 5 000 € de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles, 10 000 € de dommages-intérêts pour harcèlement moral et 82 531, 24 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Elle a enfin sollicité l'allocation de la somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code du procédure civile, la capitalisation des intérêts par application de l'article 1154 du code civil ainsi que la délivrance de documents sociaux et d'un bulletin de salaire rectifiés sous astreinte.
Le 27 novembre 2008, la salariée était licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le 16 décembre 2008, la société faisait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire.
Par jugement du 14 juin 2011, le conseil de prud'hommes de Saumur a décidé que les manquements de l'employeur à ses obligations durant l'exécution du contrat de travail n'étaient pas d'une gravité suffisante pour justifier sa résiliation mais qu'à défaut de respect de l'obligation " d'adaptation de la qualification à la fonction ", le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse. Il a par ailleurs considéré que la salariée aurait du bénéficier de la classification de directeur de production. En conséquence, il a fixé la créance de l'intéressée aux sommes de : * 73 368, 18 € à titre de rappels de salaires pour la période de novembre 2003 à septembre 2007 outre 7 336, 81 € au titre des congés payés afférents ; * 24 205, 17 € à titre de rappels de salaires pour la période d'octobre 2007 jusqu'au jour de la saisine du conseil ; * 788, 82 € à titre de rappel de prime annuelle outre 78, 88 € au titre des congés payés afférents ; * 32 420, 76 € au titre de rappel sur l'indemnité conventionnelle de licenciement ; * 10 316, 40 € au titre de l'indemnité de préavis outre 1 031, 64 € au titre des congés payés afférents ; * 22 500 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; * 1 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Mme Y... a été déboutée de ses autres demandes.
M. X..., en qualité de mandataire judiciaire de la liquidation de la société JPV Impression, a régulièrement interjeté appel.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. X..., en qualité de mandataire judiciaire de la liquidation de la société JPV Impression, demande que la salariée soit déboutée de toutes ses prétentions et condamnée à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la classification, il soutient que la salariée se prévaut d'un accord conventionnel abrogé et qu'en tout état de cause, ne disposant d'aucune formation théorique, elle n'a jamais exercé les responsabilités d'un directeur de production et n'est pas fondée à revendiquer un statut de cadre ni même d'agent de maîtrise, étant souligné qu'il ne lui a été délégué ni pouvoir disciplinaire, ni pouvoir concernant l'hygiène et la sécurité dans l'entreprise.
Sur les heures supplémentaires, il fait valoir que des heures supplémentaires, qui auraient été effectuées durant l'absence du responsable de l'entreprise, ont été réglées à la salariée en mai 2003 et que celle-ci n'a pas prétendu postérieurement avoir dépassé le volume hebdomadaire de 39 heures sur la base duquel elle était rémunérée.
Sur le rappel de prime annuelle 2008, il observe que l'intéressée n'ayant travaillé aucun jour au cours du premier semestre 2008, sans que cette période d'absence puisse être assimilée à des congés payés, la prime a été, conformément aux dispositions de la convention collective, réduite à proportion.
Sur la rupture du contrat de travail, il soutient qu'aucun manquement fautif de l'employeur n'étant caractérisé, la demande de résiliation judiciaire n'est pas fondée. En revanche, la cause de licenciement est réelle et sérieuse, quand bien même la société n'a pas été en mesure de proposer une offre de reclassement, étant rappelé que la liquidation judiciaire de la société a été prononcée une quinzaine de jours après le licenciement.
Mme Y... renouvelle ses demandes initiales, sauf à porter à 4 500 € la somme réclamée au titre des frais irrépétibles.
Elle fait valoir avoir occupé, jusqu'à la reprise de la société par M. C..., des fonctions de conductrice offset, relevant de la classification conventionnelle groupe V, échelon B. Cependant, à compter du mois de mars 2003, suite à l'hospitalisation de M. C..., elle a pris en charge la complète gestion de l'entreprise, cette situation perdurant après le retour du gérant jusqu'au mois de février 2007, ce qui justifie ses diverses prétentions fondées sur la classification de directeur de production correspondant aux fonctions réellement exercées. A titre subsidiaire, elle a, a minima occupé des fonctions de chef d'atelier, lesquelles ne sont pas conditionnées par l'existence d'une délégation de pouvoirs en matière de discipline, d'hygiène et de sécurité.
Il lui reste par ailleurs dû le paiement de 16 heures supplémentaires.
En outre, ouvrent droit au paiement de la prime annuelle les périodes d'absence conventionnellement assimilées à du travail effectif pour le calcul des congés payés, soit, au terme de l'article 511 de la convention collective, les jours d'absence pour maladie constatés par certificat médical.
S'agissant de la rupture, la demande de résiliation judiciaire, qui doit être examinée au préalable, est fondée au regard du refus obstiné de revalorisation salariale, d'une modification unilatérale des fonctions à compter de février 2007 et des actes de harcèlement moral. A titre subsidiaire, en tout état de cause, le licenciement prononcé est dénué de cause réelle et sérieuse, la société ayant manqué à son obligation de reclassement et sa légèreté blâmable ayant conduit à l'inaptitude de la salariée.
L'AGS, intervenant par l'UNEDIC-C. G. E. A de Rennes, conclut au débouté pur et simple de l'intégralité des demandes formées par la salariée et à la condamnation de celle-ci à lui verser la somme de 2 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle rappelle qu'en tout état de cause sa garantie ne pourra être acquise que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-6, L. 3253-8, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.
Elle soutient que, si la salariée a pu être amenée à exercer des fonctions différentes, cela ne signifiait pas pour autant qu'elle assumait les responsabilités du poste correspondant à la classification la plus haute des emplois de la convention collective, ce qu'elle n'avait d'ailleurs jamais revendiqué antérieurement.
En outre, elle a perçu, en rémunération des tâches réellement exercées, de nombreuses primes exceptionnelles, ce qui démontre l'accord intervenu entre les parties.
La salariée étant soumise à un horaire collectif, elle n'a pas effectué, à la demande de son employeur, d'heure supplémentaires qui ne lui auraient pas été réglées.
L'absence de manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations est avéré, de même que l'impossibilité pour celui-ci de pourvoir au reclassement de sa salariée pour inaptitude.
En tout état de cause, le préjudice subi par la salariée du fait d'un licenciement éventuellement jugé comme dénué de cause réelle et sérieuse est inexistant, puisque le contrat de celle-ci aurait nécessairement pris fin dans les semaines suivantes du fait de la liquidation judiciaire de la société.
Enfin, il n'est justifié d'aucun fait de nature à présumer de l'existence d'un harcèlement moral.

MOTIFS DE LA DECISION
-Sur les demandes relatives à la classification :
Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.
La salariée a été d'abord engagée par l'imprimerie Meignan selon contrat de stage de formation conclu le 22 juillet 1986, puis selon contrats d'adaptation à un emploi en date des 31 octobre 1986 et 16 janvier 1987. Ce dernier contrat-qui ne sera suivi d'aucun autre, en l'état des éléments fournis-mentionnait un emploi de " typographe-conducteur et annexes " et était conclu pour la période du 8 juillet 1986 au 31 juillet 1987. En dernier lieu, ses bulletins de paie mentionnaient que Mme Y... était classée dans le groupe V, échelon B.
La salariée demande que lui soit reconnue le bénéfice de la classification de directeur de production, ou à défaut, celle de chef d'atelier.
Les dispositions conventionnelles applicables sont celles de l'avenant du 17 septembre 2001 relatif à la classification des emplois et qualifications de l'ensemble du personnel salarié, lesquelles ont modifié et complété les dispositions résultant de l'accord portant sur la classification des emplois et des qualifications de l'ensemble du personnel salarié de l'imprimerie de labeur et des industries graphiques en date du 19 janvier 1993.
Il résulte de ce texte que l'emploi de directeur de production correspond, pour la " famille technique ", au plus haut niveau de la classification, soit le groupe I, échelon B, ce qui équivaut à un emploi de directeur d'usine ou de directeur financier pour la " famille administration et gestion " et à un emploi de directeur commercial pour la " famille commerciale ". Un directeur de production, selon les dispositions conventionnelles, " assure la direction de l'ensemble des services de production dont les activités sont connexes ou complémentaires et, à ce titre, est responsable de la production en termes de quantité, qualité, délai mais également en terme de coût de production. Il optimise les moyens techniques et humains, propose les investissements dans le cadre d'objectifs budgétaires à la définition desquels il a participé et des choix stratégiques arrêtés par la direction. "
L'emploi de chef d'atelier, de groupe II, correspond, pour la " famille technique ", à un poste de chef comptable ou de chef du personnel pour la " famille administration et gestion " et à un emploi de responsable de planning ordonnancement pour la " famille commerciale ". Un chef d'atelier, selon les dispositions conventionnelles, " rassemble et analyse toutes les informations nécessaires à la bonne marche de son atelier. Organise, gère et met en oeuvre les moyens techniques et le potentiel humain dont il a la charge. Contrôle le bon déroulement de la production de son atelier en termes de qualité, quantité et délai. "
Les salariés des groupes I et II bénéficient du statut cadre. Les groupes IV à VI relèvent de statuts d'ouvriers ou d'employés.
Au soutien de sa demande, Mme Y... produit de nombreuses attestations émanant d'anciens collègues de travail, ainsi que de clients et fournisseurs de la société, desquelles il résulte que durant l'absence du gérant de l'entreprise pour raisons de santé, soit durant le mois d'avril 2003, elle a assumé la direction de l'atelier de production de Beaufort-en-Vallée, lequel comptait six salariés. Il s'avère également qu'elle a par la suite, continué à accueillir la clientèle, établir les devis, élaborer les plannings des travail de l'atelier, organiser les travaux, gérer certaines commandes et ce, jusqu'au mois de février 2007.
Il résulte par ailleurs des pièces produites qu'avait été attribuée à la salariée, au titre de l'exercice 2003/ 2004, une prime de 2 333, 33 € " en fonction de la performance en terme de résultat de l'entreprise " et qu'elle s'est vue octroyer une rémunération variable le 10 octobre 2005 avec effet rétroactif au 1er juillet 2005.
Au regard de ces éléments, il est manifeste que la salariée a exercé des fonctions, tout à la fois techniques et commerciales, différentes de celles pour lesquelles elle était rémunérée. Elle ne peut néanmoins pas légitimement prétendre à l'une ou l'autre des classifications revendiquées, lesquelles sont inappropriées au regard des tâches réellement exercées et de la structure réduite de l'entreprise.
La salariée sera déboutée de ces prétentions de ce chef, et donc des demandes en rappel de salaires, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles relatives à la classification et au salaire. Le jugement déféré sera ainsi infirmé en ce qui concerne les trois premiers chefs et confirmé en ce qui concerne le dernier.
- Sur la demande en paiement d'heures supplémentaires :
En l'espèce, il n'est pas discuté que la salariée était soumise à un horaire collectif et qu'elle a été rémunérée pour les heures supplémentaires accomplies durant l'absence du gérant.
Pour étayer ses dires quant à l'accomplissement d'heures supplémentaires durant les années 2005 et 2006, elle produit exclusivement des calendriers sur lesquels sont apposées des mentions manuscrites. Ces mentions, non explicitées par ailleurs par un décompte ou quelque autre observation, sont inintelligibles en l'état.
La demande relative aux heures supplémentaires, insuffisamment étayée, doit par conséquent être rejetée. Le jugement est confirmé sur ce point.

- Sur la demande en rappel de prime annuelle 2008 :
L'annexe IV bis de la convention collective dispose : 1. Il est institué dans chaque entreprise une prime annuelle conventionnelle correspondant à 1 mois de rémunération et calculée sur la base du salaire de l'intéressé au moment de la liquidation de la prime. Cette prime comprend un douzième des éléments constants de la rémunération (notamment les compléments de réduction du temps de travail, les majorations pour heures de nuit, les primes régulières et constantes qui sont la contrepartie directe de l'activité du salarié et les commissions commerciales), à l'exclusion notamment des heures supplémentaires, de ladite prime annuelle, des primes à caractère aléatoire, comme par exemple celles ayant un caractère général d'intéressement aux résultats de l'entreprise... 2. Cette prime annuelle sera payée au plus tard le 31 décembre, une avance correspondant à 50 % de son montant estimé sera réglée au plus tard le 30 juin. 3. Sont assimilées aux périodes de travail effectif les périodes d'absence, au cours de l'année civile, reconnues par la convention collective pour les congés payés. Les absences non prévues au paragraphe précédent entraîneront une réduction proportionnelle de la prime ou de l'avance correspondante, à raison des jours d'absence constatés de la période sur une base de 312 jours par an. 4. Elle sera due aux membres inscrits sur les listes du personnel et ayant au moins un mois de présence dans l'entreprise au moment du départ : en cas de démission, rupture à l'amiable, et tout autre mode de rupture imputable au salarié ; ou de licenciement sauf faute lourde, délai de préavis inclus. La prime sera payée au prorata du nombre de mois entiers de présence effectués sur la base du salaire de l'intéressé au moment du départ.
Pour obtenir le paiement de la fraction de la prime non réglée en juin 2008, la salariée se prévaut des dispositions de l'article 511 de la convention collective. Mais cet article 511 relatif aux congés, n'est applicable qu'aux cadres et agents de maîtrise, statut dont elle ne relève pas. Lui est applicable l'article 320 de la convention collective, ainsi libellé : " (...) 3. Dans la limite d'un total de 3 mois au cours d'une période de référence, les arrêts de travail motivés par une maladie ou un accident non professionnels sont considérés comme temps de travail effectif, pour l'appréciation des droits au congé de l'intéressé. " Il résulte des dispositions combinées de ces textes que la prime annuelle reste due en cas d'absence pour maladie médicalement constatée, du moins dans la limite de trois mois au cours d'une période de référence calculée sur l'année.
En l'espèce, la salariée a été absente pour maladie sans discontinuer durant l'année 2008 et jusqu'à son licenciement. Elle est donc considérée, pour le calcul de la prime, comme ayant accompli trois mois de travail effectif et a droit à la moitié de la prime semestrielle qu'elle réclame, soit 394, 41 €.
Par ailleurs, cette prime doit être exclue de l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés, puisqu'elle a le caractère d'un salaire dont le montant n'est pas affecté par le départ du salarié en congé.
Le jugement sera réformé de ce chef.

- Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail :
Lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d'autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée. C'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.
Les prétentions de la salariée étant rejetées quant au rappel dû au titre de la classification, aucune faute n'est établie à ce titre.
Il n'est fourni par ailleurs aucun élément probant quant aux conditions dans lesquelles la salariée aurait assumé des fonctions exclusivement techniques à compter de février 2007. Il n'est nullement établi que cet état de fait résulte d'une décision unilatérale de l'employeur et non d'un commun accord des parties.
Enfin, il n'est pas établi l'existence de faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement, soit l'existence d'agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail.
En effet, la salariée produit à cet égard exclusivement : * le compte-rendu d'examen du médecin du travail du 15 novembre 2007 faisant état d'un état dépressif réactionnel, d'une part, et de ses dires selon lesquels elle serait en butte aux " reproches permanents de son patron ", d'autre part ; * le certificat médical établi le 26 février 2008 par un médecin du service de pathologie professionnelle du centre hospitalier universitaire d'Angers, lequel fait état de ce que la salariée souffre d'un état dépressif qu'elle indique être en lien avec l'évolution de sa situation de travail ces dernières années et particulièrement depuis un an, ce qui amène ce praticien à conclure à l'impossibilité de reprise du travail dans de telles circonstances et à la nécessité de retenir l'inaptitude définitive de la salariée à tout poste.
Il est probable que la salariée a ressenti durement le refus de son offre de rachat de la société et l'échec de son projet de reprise de celle-ci.
En tout état de cause, elle ne produit aucun élément au soutien de ses allégations selon lesquelles elle aurait été isolée au sein de l'entreprise, son employeur ne lui adressant plus la parole, ne l'ayant pas conviée à un repas organisé avec tout le personnel et lui ayant demandé de restituer les clés de l'entreprise, et ne se serait plus vue confier de tâches à compter du mois de février 2007, et ce alors même qu'elle a fourni de nombreuses attestations de ses ex-collègues.
En conséquence, en l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée.
En conséquence, les demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail et d'indemnisation du harcèlement moral seront rejetées, le jugement étant confirmé de ces chefs.
Sur l'obligation de reclassement, il est justifié que l'employeur, qui a interrogé le médecin du travail sur d'éventuelles propositions " d'aménagement ou transformation de poste ou d'emploi du temps ", n'était pas en mesure, compte tenu de la petite taille de l'entreprise et de la structure des emplois dont aucun n'était disponible (et qui seront d'ailleurs tous supprimés quelques semaines après dans le cadre de la liquidation judiciaire) de proposer un quelconque reclassement, même par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail.
Le licenciement étant fondé sur une cause réelle et sérieuse, le jugement sera infirmé à cet égard.
Sauf disposition contractuelle ou conventionnelle contraire-non justifiée ni même alléguée en l'espèce, il n'est pas dû d'indemnité compensatrice de préavis au salarié qui est dans l'impossibilité d'exécuter le préavis en raison de son état de santé.
Le présent arrêt sera déclaré opposable à l'AGS intervenant par l'UNEDIC-C. G. E. A de Rennes, laquelle ne sera tenue à garantir les sommes allouées à Mme Y... que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail.

PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement et contradictoirement :
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme Y... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, de ses demandes relatives aux heures supplémentaires ainsi qu'aux dommages-intérêts pour violation des dispositions conventionnelles et harcèlement moral ;
Infirme le jugement pour le surplus ;
Fixe la créance de Mme Y... dans la liquidation judiciaire de la société JPV Impression à la somme de 394, 41 € au titre de la prime annuelle 2008 ;
Déboute la salariée de toutes ses autres demandes ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS intervenant par l'UNEDIC-C. G. E. A de Rennes et dit qu'elle ne sera tenue à garantir les sommes allouées à Mme Y... que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail ;
Condamne Mme Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel ;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/02035
Date de la décision : 05/02/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 18 février 2015, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 18 février 2015, 13-22.358, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2013-02-05;11.02035 ?
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