COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N
CLM/MM
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/01464.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 19 Mai 2011, enregistrée sous le no 10/00121
ARRÊT DU 05 Février 2013
APPELANTE :
SARL X...
Z.I du Fresne
53170 MESLAY DU MAINE
en présence de Monsieur X..., gérant de la société
représentée par Maître Thierry PAVET, avocat au barreau du MANS
INTIME :
Monsieur Christophe Y...
...
53270 CHAMMES
assisté de Maître Hervé CHAUVEAU, avocat au barreau de LAVAL
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Novembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président
Madame Anne DUFAU, conseiller
Madame Anne LEPRIEUR, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT :
prononcé le 05 Février 2013, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCÉDURE :
La société X... a pour activité la commercialisation de menuiseries PVC et ALU, vérandas, portails, clôtures, portes de garages et stores intérieurs et extérieurs. Elle emploie habituellement environ 30 salariés dont 5 commerciaux et elle applique la convention collective du bâtiment.
Elle a employé M. Christophe Y... en qualité de technico-commercial suivant contrat de travail à durée déterminée pour une durée de six mois du 7 février au 7 août 2005. La relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu 8 août 2005. M. Y... a quitté l'entreprise au mois de mai 2006.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 1er mars 2007, la société X... a de nouveau embauché M. Y... en qualité de technico-commercial au coefficient 435 de la catégorie ETAM, pour représenter "toutes menuiseries PVC ALU, vérandas, portes d'entrée, portails et clôtures PVC ALU, stores intérieurs et extérieurs, automatismes, fermetures, doubles vitrages" auprès de la cIientèle dépendant du secteur géographique "partant de Meslay du Maine en direction Mayenne d'une part, puis en direction de St Brice - Sillé le Guillaume d'autre part. (Voir annexe l)".
Il était convenu que le salarié devrait réaliser un chiffre d'affaires trimestriel hors taxes au moins égal à 90 000 € au cours du 1er trimestre, à 110 000 € au cours du 2ème trimestre, à 130 000 € au cours du 3ème trimestre, ce montant étant à définir pour le 4ème trimestre et au-delà, et ces minima s'entendant fourniture et pose comprises.
La rémunération de M. Z... était constituée par un fixe brut mensuel de 1 280,09 € et une partie variable consistant en une commission sur le chiffre d'affaires. Ce contrat de travail était assorti d'une clause de non-concurrence d'une durée d'un an couvrant un secteur géographique de 70 kilomètres autour du siège social de la société X....
Ce contrat de travail a donné lieu à un avenant du 2 janvier 2008 qui a fixé à 140 000 € HT le chiffre d'affaires trimestriel minimum et a modifié les taux de commission, à un avenant du 25 juillet 2008 et à un dernier avenant du 20 mai 2009 qui a fixé le chiffre d'affaires minimum trimestriel à réaliser à compter du 1er juillet 2009 à la somme de 143 500 €.
Par courrier recommandé du 23 juillet 2009, la société X... a fait grief à son salarié de l'insuffisance de ses résultats, de leur caractère irrégulier, de son manque de professionnalisme et de sérieux à l'égard des clients, et de l'insuffisance de ses compte-rendus en dépit des demandes qu'il lui avait adressées à cet égard. M. Y... y a répondu par lettre du 29 septembre 2009 en indiquant qu'il n'était pas disposé à démissionner.
Par lettre du 2 octobre 2009 faisant références à "divers entretiens", la société X... l'a invité à se présenter le 7 octobre suivant en vue d'un entretien au cours duquel seraient évoquées les modalités d'une rupture conventionnelle.
Par lettre du 8 octobre 2009, elle l'a convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 19 octobre suivant et, par courrier recommandé du 22 octobre 2009, elle lui a notifié son licenciement invoquant ses "très mauvais" chiffres d'affaires réalisés en août et septembre 2009, son manque de sérieux dans les relations avec les clients et le suivi de la clientèle, une désinvolture totale et un manque de rigueur dans l'exécution de son travail, y compris à l'adresse de ses collègues, notamment de ceux de l'atelier, un défaut de motivation. Elle l'a dispensé de l'exécution de son préavis.
Le 21 avril 2010, M. Christophe Y... a saisi le conseil de prud'hommes pour contester son licenciement. Dans le dernier état de la procédure de première instance, il sollicitait, outre des rappels sur les indemnités de rupture et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des rappels de rémunération et la contrepartie financière à la clause de non-concurrence.
Par jugement du 19 mai 2011 auquel le présent renvoie pour plus ample exposé, le conseil de prud'hommes de Laval a :
- déclaré le licenciement de M. Christophe Y... dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
- condamné la société X... à lui payer les sommes suivantes :
¤ 878,62 € de rappel de salaire pour heures supplémentaires,
¤ 2 440,65 € de complément d'indemnité compensatrice de préavis,
¤ 20 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- débouté M. Christophe Y... de ses demandes de rappel de rémunération du chef de la prime challenge 2007, de rappel d'indemnité de licenciement et de contrepartie financière à la clause de non concurrence ;
- condamné la société X... à lui remettre, dans le mois de la notification du jugement sous peine d'une astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 30ème jour suivant, un certificat de travail et une attestation destinés à Pôle Emploi conformes à ses dispositions ;
- rappelé que l'exécution provisoire était de droit sur les sommes à caractère salarial dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois que le conseil a fixée à 3 212 € et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire pour le surplus ;
- condamné la société X... à payer aux organismes concernés trois mois d'indemnités de chômage ;
- condamné la société X... à payer à M. Christophe Y... la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
La société X... a régulièrement relevé appel de ce jugement en ce qu'il a déclaré le licenciement de M. Christophe Y... dépourvu de cause réelle et sérieuse et en toutes ses dispositions portant condamnation pécuniaire contre elle.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 8 octobre 2012, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, soutenues et complétées oralement à l'audience, la société X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le licenciement de M. Christophe Y... dépourvu de cause réelle et sérieuse et s'agissant des condamnations pécuniaires qu'il a prononcées contre elle ;
- de débouter le salarié de toutes ses prétentions et de le condamner à lui payer la somme de 2 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
A l'appui de sa position, la société appelante fait valoir que la baisse importante de chiffre d'affaires reprochée au salarié par rapport à ses résultats antérieurs et l'insuffisance de ses résultats par rapport à ses collègues de travail sont parfaitement établis, les bons résultats réalisés par deux de ses collègues contrecarrant son argumentation tirée d'une conjoncture difficile et confirmant sa démotivation totale et son désinvestissement.
Elle ajoute que le désinvestissement professionnel et la désinvolture manifestés par l'intimé au cours de l'année 2009 ressortent encore du mécontentement manifesté à son égard par un certain nombre de clients et des insuffisances émaillant les documents de travail qu'il a établis.
Elle estime que ces faits justifient le licenciement alors surtout qu'ils s'inscrivent dans la suite du courrier de mise en garde du 23 juillet 2009.
Pour s'opposer à la demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires, elle fait valoir que M. Y... a "nécessairement récupéré" le temps de travail qu'il a pu passer sur des salons et autres manifestations, et qu'il n'étaye pas sa demande.
Elle ajoute que la prétention formée au titre du challenge 2007 n'est pas justifiée et elle conclut avoir satisfait à ses obligations relatives à la clause de non-concurrence en le relevant expressément de cette clause.
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 2 novembre 2012, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, soutenues et complétées oralement à l'audience, formant appel incident, M. Christophe Y... demande à la cour:
- de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au titre de la prime "challenge 2007", de rappel sur l'indemnité de licenciement et de la contrepartie financière à la clause de non concurrence ;
- de condamner la société X... à lui payer les sommes suivantes :
¤ 1 000 € brut de rappel sur la prime "challenge 2007",
¤ 322,39 € de rappel sur l'indemnité de licenciement,
¤ 5.781,60 € au titre de la contrepartie financière à la clause de non concurrence.
Il sollicite en outre la somme de 2 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Rappelant que l'insuffisance de résultats ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement, il oppose que la lettre de licenciement n'énonce aucun fait précis, aucun grief matériellement vérifiable à son encontre, et que l'absence d'indication d'un motif précis équivaut à une absence de motif qui rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il fait valoir que l'insuffisance de résultats qui lui est reprochée n'est étayée par aucune donnée chiffrée concrète et il la conteste arguant de ce que tous les commerciaux ont vu leur chiffre d'affaires diminuer en raison de la conjoncture difficile. Il ajoute que l'employeur ne peut pas valablement le comparer à "François", commercial ayant bénéficié d'un nouveau secteur de prospection très étendu comportant l'ensemble du Maine et Loire.
Il soutient que le grief tiré de ses prétendus désinvolture et manque de rigueur est tout aussi imprécis et ne repose sur aucun fait objectif et caractérisé ; il conteste les attitudes ainsi invoquées arguant de ce que son taux de "transformations" de 61 % en 2008 démontre qu'il avait un bon contact avec les clients.
A l'appui de sa demande formée au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence, il fait valoir que, dès lors qu'il le dispensait de l'exécution de son préavis, l'employeur devait le libérer de l'obligation de non concurrence au moment du licenciement, c'est à dire dans la lettre de licenciement.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le licenciement :
Attendu que la lettre de licenciement adressée le 22 octobre 2009 à M. Christophe Y..., et qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée :
«Monsieur,
....
Nous vous rappelons que vous êtes entré au service de la société à compter du 1er mars 2007 en qualité de technico-commercial dans le but de commercialiser les produits fabriqués par votre employeur.
Les dispositions de votre contrat de travail fixent un chiffre d'affaires trimestriel HT au moins égal à des minima contractualisés.
Notre attention a été attirée depuis le début de l'année 2009 sur un relâchement très important par rapport à la qualité et à la quantité de votre travail dont les tableaux de chiffres d'affaires trimestriel sont le reflet.
Nous vous avons adressé par correspondance du 23 juillet dernier, une mise en garde à cet égard, vous demandant un ressaisissement dans votre comportement.
Or, malgré celle-ci, nous avons appris, postérieurement à cette correspondance, que votre comportement perdurait puisque, indépendamment des très mauvais chiffres réalisés aux mois d'août et de septembre 2009 par rapport à l'ensemble de vos collègues y compris un jeune collègue récemment embauché, nous constatons, ce qui est d'ailleurs à mettre en relation avec le problème précédent, que vous n'assurez aucun suivi sérieux dans la relation avec votre clientèle puisque nous sommes en possession d'un certain nombre de plaintes de clients qui nous révèlent que vous n'avez pas pris en compte leur souhait et que, de surcroît, vous avez été à la limite de la courtoisie avec eux.
Nous observons par ailleurs qu'à l'occasion de contacts clients ou de foires expositions telles que celles de Mayenne et d'Evron, des contacts clientèle n'ont pas été exploités par vous, ce qui dénote, au regard de la mise en garde qui vous a été adressée au mois de juillet 2009, une désinvolture totale et un défaut de rigueur dans le cadre de votre travail.
En outre, les documents que vous établissez à l'occasion de prises de commandes sont particulièrement peu lisibles et peu rigoureux que ce soit à l'égard de notre clientèle ou même envers vos collègues de travail notamment à l'atelier.
Nous constatons donc que vous n'entendez manifestement pas continuer à exercer votre travail avec la rigueur nécessaire et que vous ne voulez pas consacrer à celui-ci suffisamment d'énergie pour justifier le maintien de votre contrat de travail.
Dans ces conditions, nous sommes contraints de mettre un terme à celui-ci.
La présentation de la présente fera courir votre préavis que nous vous dispensons d'exécuter.» ;
Attendu que la lettre se poursuit par les dispositions relatives à la restitution du matériel de travail mis à la disposition du salarié ;
Attendu que cette lettre répond à l'exigence de motivation en ce qu'il en ressort que l'employeur fonde le licenciement sur une insuffisance professionnelle tenant à une insuffisance de résultats liée à l'insuffisance de travail produit en quantité et à la mauvaise qualité du travail accompli, mais aussi à une attitude désinvolte dans le suivi des clients et les prestations qui leur sont fournies, et à un manque de rigueur dans les documents de travail établis ; qu'indépendamment de leur bien fondé, cette lettre énonce des griefs matériellement vérifiables ;
Attendu que l'insuffisance de résultats ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement et elle ne peut fonder une telle mesure que si elle résulte d'une insuffisance professionnelle ou d'une faute imputable au salarié ;
Attendu que la société X... ne produit strictement aucun élément à l'appui du grief tiré des insuffisances, du manque de lisibilité et de rigueur qui affecteraient les documents établis par M. Y... à l'occasion des prises de commandes et des inconvénients qui auraient pu en résulter pour les clients ou ses collègues de l'atelier ; que ce grief n'est donc ni réel, ni sérieux ;
Attendu qu'à l'appui du grief tiré du fait que l'intimé aurait omis de recontacter des clients rencontrés à l'occasion de diverses manifestations et d'exploiter ces contacts, la société appelante produit un document manuscrit (sa pièce no 9) intitulé : "Christophe état des visites et RDV au 24/09/2009" qui se contente de mentionner le nombre de clients "non contactés" en face d'événements tels que des portes ouvertes ("Portes ouvertes de mars 2009) ou des foires (foires de Laval, de Mayenne et d'Evron) et en face des mois d'avril à août, le total s'établissant à 36 clients non contactés ; mais attendu que ce document totalement imprécis, dépourvu du moindre nom, que la société X... s'est établi à elle-même et qui n'est étayé par aucun élément objectif ne saurait à lui seul faire preuve de la réalité du grief allégué ;
Attendu qu'à l'appui du grief tiré du fait que M. Y... n'assurait "aucun suivi sérieux" de sa clientèle et que son comportement professionnel aurait généré des plaintes de la part des clients, l'employeur verse tout d'abord aux débats un courrier de Mme A... du 10 juillet 2009 et un courrier de M. et Mme B... du 5 octobre 2009 ; que la première reproche à M. Y... de l'avoir sciemment trompée en lui affirmant que des stores ne pouvaient pas être fixés sur une poutre et de lui avoir conseillé une pose sur les menuiseries qui se serait avérée un échec sur le plan esthétique en raison de l'utilisation d'équerres blanches fixées avec des vis noires ; qu'elle déplore également de n'avoir obtenu de sa part aucune réponse à ses réclamations ; attendu que l'intimé conteste avoir laissé sans suite la réclamation de cette cliente et, soulignant que ce problème esthétique était exclusivement imputable aux poseurs, il soutient avoir fait remonter l'information au niveau des services de production et de pose, seuls responsables de la difficulté et à même d'y remédier ;
Attendu que les époux B... indiquent qu'à l'occasion de "Portes ouvertes", M. Y... n'aurait pas tenu compte de leurs demandes et qu'après avoir argumenté un bon moment au sujet d'un produit qu'ils ont refusé, il a été "à la limite de la courtoisie" en leur faisant comprendre qu'ils lui avaient fait perdre son temps alors que d'autres clients potentiels attendaient ;
Attendu qu'à l'appui de ce grief, la société X... produit également un devis établi par M. Y... à l'intention de M. Michel C... en avril 2009, une facture établie à l'intention du garage Leroy et une fiche établie le 17 octobre 2009 au salon de l'Habitat au nom de M. Albert D... ; mais attendu que ces pièces ne comportent aucune mention et ne sont accompagnées d'aucun élément de nature à laisser penser que les travaux y afférents aient donné lieu à de quelconques réclamations, M. Y... démontrant, au contraire, que M. C... a passé une nouvelle commande auprès de lui en juillet 2009, ni que ces clients auraient rencontré des difficultés relationnelles avec l'intimé ; qu'il n'est pas établi que M. Y... n'aurait pas recontacté M. D..., ni d'ailleurs qu'il soit le commercial auteur de la fiche concernant ce client ;
Attendu que les courriers émanant des époux B... et de Mme A... ne permettent d'asseoir des manquements objectivement établis contre M. Y... et, en tout état de cause, ils ne suffisent pas, à eux seuls, à caractériser de la part de ce dernier un manque de sérieux et de rigueur dans le suivi des clients et un comportement professionnel global générant des plaintes de la part de ces derniers ;
Attendu, s'agissant des résultats de M. Y..., que la société X... verse aux débats des tableaux relatifs aux chiffres d'affaires réalisés en 2008 et en 2009 par ce dernier et par ses collègues, étant observé qu'en raison de la rotation des commerciaux, il n'est possible d'établir une comparaison qu'avec "Philippe", "Gilles" (lui aussi licencié très peu de temps après M. Y...) et "François", lequel, manifestement nouvellement recruté, n'enregistre de chiffre d'affaires qu'à compter de mars 2008 ; attendu que, si le chiffre d'affaires réalisé par l'intimé au cours du premier trimestre 2009 a enregistré une chute de 27 % par rapport à celui de la même époque en 2008, son chiffre d'affaires du deuxième trimestre s'est nettement redressé pour n'enregistrer qu'une baisse de 4,38 % par rapport à celui de l'année précédente ; que son collègue "Philippe" avec lequel l'employeur établit des comparaisons a enregistré des résultats inverses, c'est à dire une faible chute de son chiffre d'affaires au premier trimestre 2009 (- 3,83 % par rapport au 1er T 2008) mais une chute beaucoup plus importante de 26,20 % au deuxième trimestre 2009 par rapport à celui de 2008, sans que l'employeur n'en tire aucune conséquence particulière ;
Que, si "François" a enregistré des chiffres d'affaires en progression en 2009 par rapport à 2008, M. Y... indique sans être contredit, et carte géographique à l'appui, que ce commercial bénéficiait d'un nouveau secteur de prospection très étendu comme couvrant le sud du département de la Mayenne et tout le Maine et Loire, tandis que lui-même avait un secteur beaucoup plus étroit géographiquement et très essentiellement rural ; qu'aucune comparaison objective sérieuse ne peut donc être faite entre un secteur géographiquement étendu et économiquement beaucoup plus dynamique, et un secteur beaucoup plus limité géographiquement et à potentiel économique plus restreint ;
Attendu qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, s'il est exact que les chiffres d'affaires réalisés par M. Y... en août et septembre 2009 ont été en nette diminution par rapport aux mêmes mois de 2008, la baisse de son chiffre d'affaires global du troisième trimestre 2009 s'établissant à - 36,80 % alors que celui réalisé par tous ses collègues a augmenté au cours de ce trimestre, il n'en reste pas moins qu'aucun élément objectif ne permet de rattacher cette baisse et insuffisance de résultats à une attitude fautive ou à une insuffisance professionnelle ;
Qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il déclaré le licenciement de M. Christophe Y... dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ses dispositions relatives à l'application de l'article 1235-4 du code du travail ;
Sur les conséquences financières du licenciement :
Attendu que la durée, non discutée, du préavis s'établit à deux mois ; que le salarié a perçu de ce chef la somme de 3 983,35 € en considération d'une rémunération brute mensuelle de 1 991,68 € ; attendu qu'au regard des rémunérations réellement perçues, M. Y... revendique une rémunération mensuelle de 3 212 € qui n'est pas utilement discutée, que le conseil a retenue et qui doit, au regard des pièces produites, être consacrée ; que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a alloué à M. Christophe Y... un rappel d'indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 2 440,65 € ;
Attendu que, sur la même base de rémunération et en considération d'une ancienneté de 2 ans et 10 mois, M. Y... revendique un rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement d'un montant de 322,39 € ; mais attendu que, pour le calcul de cette indemnité, l'ancienneté doit s'apprécier du 1er mars 2007, date de l'embauche, au 22 octobre 2009 et non au 22 décembre 2009, le second terme étant la date d'envoi de la lettre de licenciement et non celle de l'expiration du préavis ;
Que l'indemnité conventionnelle de licenciement à laquelle peut prétendre le salarié s'élève donc à la somme de : (3 212 € x 2 x 2,5/10) + 3 212 € x 8/12 x 2,5/10) = 1 606 € + 535,33 € = 2 141,33 €, dont à déduire la somme de 1 952,78 € qui lui a été versée, soit un solde dû de 188,55 € que la société X... sera condamnée à lui payer ;
Attendu, M. Y... justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, que trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail selon lesquelles il a droit, en réparation du préjudice résultant pour lui du caractère injustifié de son licenciement, à une indemnité qui ne peut pas être inférieure aux salaires des six derniers mois ;
Attendu qu'il était âgé de 40 ans au moment de son licenciement, et comptait deux ans et huit mois d'ancienneté ; qu'il a connu un an de chômage avant d'être embauché par la société GIMEL, entreprise ayant pour activité l'électronique ; qu'au regard de sa situation particulière, notamment, de ces éléments, les premiers juges ont fait une exacte appréciation de son préjudice en lui allouant la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera également confirmé de ce chef ;
Sur la contrepartie financière à clause de non-concurrence :
Attendu que le contrat de travail de M. Christophe Y... comporte en son article 13 une clause de non-concurrence d'une durée d'un an, couvrant un rayon géographique de 70 kilomètres autour du siège social de la société X... et prévoyant qu'à titre de contrepartie, le salarié percevrait, "après la cessation effective de son contrat" et pendant toute la durée de l'interdiction, une indemnité forfaitaire égale à 15 % de la moyenne mensuelle du salaire brut perçu au cours des trois derniers mois de présence au sein de l'entreprise ;
Attendu que cette clause prévoit que la société X... pourra libérer le salarié de l'interdiction de concurrence, soit à tout moment au cours de l'exécution du contrat, soit à l'occasion de sa cessation, "sous réserve dans ce dernier cas de notifier sa décision par lettre recommandée au plus tard le jour de la cessation effective des fonctions." ;
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en paiement de la contrepartie à la clause de non-concurrence, les premiers juges ont retenu que, conformément aux dispositions du contrat de travail, la société X... a levé cette clause le 21 décembre 2009, soit le dernier jour du préavis ;
Mais attendu que, si l'appelante verse aux débats un courrier daté du 21 décembre 2009 aux termes duquel elle déclare libérer M. Christophe Y... de l'obligation de non concurrence, il n'est tout d'abord justifié ni de l'envoi de ce courrier à ce dernier, ni, a fortiori, de sa réception, laquelle est contestée ;
Qu'en tout état de cause, dès lors que le salarié a été dispensé d'exécuter son préavis, le jour de la cessation effective des fonctions se situait au 22 octobre 2009, date de l'envoi de la lettre de licenciement et que c'est à cette date que la société X... aurait dû, en application des dispositions du contrat de travail, le libérer de l'obligation de non-concurrence ;
Que, faute pour elle de l'avoir, la contrepartie financière à la clause de non-concurrence est due dans son intégralité et, par voie d'infirmation du jugement déféré, elle sera condamnée à payer de ce chef à M. Christophe Y... la somme de 5 781,60 € ;
Sur la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires :
Attendu que, s'il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies il appartient toutefois au salarié d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu qu'à l'appui de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, M. Y... verse aux débats des décomptes précis des horaires de travail et des heures supplémentaires qu'il a accomplies au cours des deux semaines des Portes ouvertes de l'entreprise en mars, puis en septembre 2009, de la semaine de la Foire exposition de Laval, de la Foire exposition de Mayenne, de la Foire Festival d'Evron et du salon de l'Habitat de Laval ainsi que des décomptes des horaires et heures supplémentaires accomplies au cours de chaque semaine qui a précédé et suivi ces événements ; qu'il produit également des fiches horaires établies jour par jour à l'occasion de ces événements mentionnant l'heure d'arrivée et l'heure de fin ainsi que les différents événements ou rendez-vous ayant émaillé la journée ; qu'il verse également les tableaux de permanence dressé par l'employeur pour répartir les interventions des commerciaux sur ces événements ; qu'il en ressort bien qu'à ces occasions, il a travaillé des samedis et des dimanches, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté ;
Attendu que, par ces éléments suffisamment précis auxquels la société X... peut répondre, M. Christophe Y... étaye sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;
Attendu que l'employeur, qui ne produit aucun élément pour justifier des horaires effectivement réalisés par son salarié, se contente de répondre qu'il a "nécessairement récupéré son temps de travail" ; mais attendu que ces récupérations ne ressortent de rien, étant observé que, si les bulletins de salaire de M. Y... mentionnent chaque mois le paiement d'heures supplémentaires pour un nombre d'heures toujours identique, il n'apparaît pas que ces paiements couvrent les heures litigieuses, ce que l'employeur, qui évoque seulement des récupérations, ne soutient d'ailleurs pas ;
Attendu que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce que, en considération du taux horaire applicable à M. Y..., il lui a alloué la somme de 878,62 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;
Sur la prime "Challenge 2007" :
Attendu que c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté M. Christophe Y... de ce chef de prétention, celui-ci ne justifiant ni de l'engagement de l'employeur de payer cette "prime Challenge" 2007, ni du montant allégué de 1 000 €, ni du fait que cette prime aurait été payée à certains des collègues de l'intimé au seul bon vouloir de l'employeur ;
Sur la remise des documents :
Attendu qu'il convient de condamner la société X... à remettre à M. Christophe Y... un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle emploi conformes aux dispositions du présent arrêt et ce, dans le mois de sa notification, sous peine, passé ce délai, d'une astreinte de 30 € par jour de retard qui courra pendant trois mois ;
Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu, la société X... étant amplement perdante en son recours, qu'elle sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à M. Christophe Y..., en cause d'appel, une indemnité de procédure de 1 500 € tandis qu'elle conservera la charge des frais non compris dans les dépens qu'elle a pu exposer ;
Attendu que le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté M. Christophe Y... de sa demande de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement et de sa demande de contrepartie financière à la clause de non-concurrence;
Statuant à nouveau de ces chefs,
Condamne la société X... à payer à M. Christophe Y... la somme de 188,55 € à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, et celle de 5 781,60 € à titre de contrepartie financière à la clause de non-concurrence ;
Ajoutant au jugement déféré,
Condamne la société X... à remettre à M. Christophe Y... un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle emploi conformes aux dispositions du présent arrêt et ce, dans le mois de sa notification, sous peine, passé ce délai, d'une astreinte de 30 € par jour de retard qui courra pendant trois mois ;
Condamne la société X... à payer à M. Christophe Y... la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et la déboute elle-même de ce chef de prétention ;
La condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALL Catherine LECAPLAIN-MOREL