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11/12/2012 | FRANCE | N°11/00490

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 11 décembre 2012, 11/00490


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 11 Décembre 2012

ARRÊT N
BAP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00490
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGERS, décision attaquée en date du 11 Janvier 2011, enregistrée sous le no 08. 446
assurée : Michèle X...

APPELANTE :
Société SELCO Le Val d'Ombrée 49520 COMBREE
représentée par Maître GERBAUD, substituant Maître Hamdi OUAISSI (CASSIUS PARTNERS), avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MAL

ADIE DE MAINE ET LOIRE (C. P. A. M.) 32 rue Louis Gain 49937 ANGERS CEDEX 09
représentée par Monsieur Laurent ...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 11 Décembre 2012

ARRÊT N
BAP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00490
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGERS, décision attaquée en date du 11 Janvier 2011, enregistrée sous le no 08. 446
assurée : Michèle X...

APPELANTE :
Société SELCO Le Val d'Ombrée 49520 COMBREE
représentée par Maître GERBAUD, substituant Maître Hamdi OUAISSI (CASSIUS PARTNERS), avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAINE ET LOIRE (C. P. A. M.) 32 rue Louis Gain 49937 ANGERS CEDEX 09
représentée par Monsieur Laurent Y..., muni d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 Octobre 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, président Madame Anne DUFAU, assesseur Madame Sophie BARBAUD, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT : du 11 Décembre 2012, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame DUFAU, pour le président empêché, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******

FAITS ET PROCÉDURE
Mme X..., salariée de la société d'Électronique de Combrée (la SELCO), a souscrit le 2 avril 2004 auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la CPAM) une déclaration de maladie professionnelle au titre d'une " tendinopathie de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite ", médicalement constatée pour la première fois le 15 mars précédent.
Après avoir eu recours le 28 juin 2004 au délai complémentaire d'instruction, la CPAM a informé la SELCO, par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 août 2004, distribuée le 6 août suivant à sa destinataire, de la clôture de la procédure d'instruction et l'a invitée à venir prendre connaissance du dossier " pendant un délai de dix jours à compter de la date d'établissement de ce courrier ".
Le 16 août 2004, la CPAM a décidé de prendre en charge la maladie de Mme X... au titre de la législation relative aux risques professionnels.
C'est au reçu de ses comptes employeur 2004, 2005 et 2006, que la SELCO a saisi la Commission de recours amiable (la CRA), par courrier recommandé avec accusé de réception du 18 septembre 2008, afin que la décision de prise en charge lui soit déclarée inopposable. Sa requête a été rejetée le 24 septembre 2008, notification lui étant faite le 2 octobre suivant.
La SELCO a porté son recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers, par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 octobre 2008.
Par jugement du 11 janvier 2011 auquel il est renvoyé pour l'exposé des motifs, le tribunal l'a déclarée recevable mais mal fondée, et l'a déboutée de sa demande, confirmant la décision de la CRA et lui déclarant opposable la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée par Mme X... le 2 avril 2004.
Cette décision lui a été notifiée, ainsi qu'à la CPAM de Maine et Loire venant aux droits de la CPAM d'Angers, le 26 janvier 2011.
Elle en a formé régulièrement appel, par courrier recommandé avec accusé de réception posté le 17 février 2011.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions déposées le 25 juillet 2012 reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, la société d'Électronique de Combrée (la SELCO), hormis le fait qu'elle ait été déclarée recevable, sollicite l'infirmation du jugement déféré, et que la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la CPAM) soit condamnée à lui verser la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre qu'elle supporte les entiers dépens.
Au visa des articles R. 441-11 et suivants du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable avant le 1er janvier 2010, elle fait valoir que :- la CPAM ne lui a pas accordé un délai suffisant pour consulter le dossier de Mme X... et faire valoir ses observations,- la CPAM n'a pas respecté son obligation d'information à son égard dans le cadre de l'instruction du dossier de Mme X.... Elle indique, qu'alors que la cour de cassation, suivie par plusieurs cours d'appel, a jugé plusieurs fois qu'un délai entre cinq et six jours était insuffisant pour permettre le respect du principe du contradictoire, jurisprudence confirmée par le législateur qui a instauré un délai de dix jours francs pour consultation du dossier et observations par l'employeur, qu'alors que la CPAM lui avait laissé dix jours dans son courrier pour pouvoir consulter le dossier et faire ses observations, elle n'a finalement bénéficié que de cinq jours utiles à ces fins, précisant que le délai ne commence à courir que le lendemain du jour de la réception du courrier et se termine la veille de la décision et que ne peuvent être non plus pris en compte samedis, dimanches et jours fériés. Elle poursuit sur le fait que les arguments retenus par le tribunal des affaires de sécurité sociale afin de la débouter ne peuvent être retenus en ce que :- que l'employeur ait ou non entrepris des démarches, d'autant que le délai était trop bref pour en entamer, ne saurait, de toute façon, le priver du droit que lui donne la loi de consulter les pièces du dossier réunies par la CPAM, avant que celle-ci ne statue sur le caractère professionnel d'une maladie ou d'un accident, et alors, au surplus, que ni la loi, ni la jurisprudence, ne confèrent à l'employeur le droit de solliciter de la CPAM une copie des pièces du dossier ou la prorogation du délai d'instruction, qu'elle peut en conséquence parfaitement refuser,- faire de la proximité de ses locaux avec ceux de la CPAM un critère, crée une inégalité de traitement entre les entreprises en fonction de leur situation géographique, outre que le délai qui est laissé à l'employeur n'a pas pour seule finalité de lui permettre de se déplacer dans les services de la CPAM ; il doit également servir à la consultation du dossier qui a pu être constitué, à la prise de connaissance des pièces faisant grief, à la sollicitation, le cas échéant, de consultants extérieurs à la société (médecins, avocats), et à l'émission d'observations auprès de la caisse, ce qui s'avère impossible dans un délai bref.
* * * *
Par observations orales à l'audience, la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la CPAM), sollicite la confirmation du jugement déféré.
Elle réplique que le délai de consultation qui est laissé par le code de la sécurité sociale à l'employeur n'est pas destiné à faire valoir les droits de la défense au sens strict, qui ont vocation à s'exercer au cours d'une procédure juridictionnelle. Par ailleurs, ajoute-t'elle, il existe une procédure d'instruction antérieure à la décision de prise en charge qui, du fait de sa durée, permet à l'employeur de se tourner vers des intervenants extérieurs afin de recueillir leur avis. Dans ces conditions, elle conclut que le délai de cinq jours laissé, qui a pu être jugé raisonnable et suffisant, répond aux obligations que lui fait le code de la sécurité sociale, d'autant que la société ne lui a fait état d'aucune difficulté d'organisation particulière, ainsi en lien avec des périodes de congés, et alors qu'elle a son siège à moins de vingt-cinq kilomètres de ses locaux.
Elle fait remarquer enfin qu'il ne peut lui être reproché le manque de réactivité de l'employeur, particulièrement patent en ce qu'il n'a contesté la décision de prise en charge que quatre ans plus tard.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Il sera constaté que la société d'Électronique de Combrée (la SELCO) a renoncé à son appel, en ce qu'elle a été déclarée recevable à agir par les premiers juges. Dès lors, en l'absence d'appel incident de la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine et Loire, la cour n'est saisie d'aucun moyen, et il convient de confirmer purement et simplement la disposition dont s'agit.
* * * *
L'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à l'espèce, dispose : " Hors les cas de reconnaissance implicite, et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droits et de l'employeur, préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief. En cas de réserves de la part de l'employeur ou si elle I'estime nécessaire, la caisse, hors le cas d'enquête prévue à l'article L. 442-1, envoie, avant décision, à l'employeur et à la victime, un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès. La victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle dont un double est envoyé par la caisse à l'employeur ".
Il résulte de l'alinéa 1er de cet article que la CPAM, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier, et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision.
Il est demandé là, à la CPAM, d'assurer le respect du principe du contradictoire, même si l'on est, à ce stade, dans le cadre d'une procédure administrative et non juridictionnelle ; à défaut, la sanction est l'inopposabilité de la décision prise à l'employeur.
S'agissant d'assurer le respect de ce principe, le délai qui doit être laissé par la CPAM à l'employeur pour consulter le dossier, et d'ailleurs déposer ses éventuelles observations, le temps des observations ne s'ajoutant pas cependant au temps de consultation mais en faisant partie, doit être un délai suffisant, dont l'appréciation est laissée au pouvoir souverain des juges du fond.
Dans ces conditions, les jours à retenir au titre de ce délai ne peuvent consister qu'en des jours dits utiles pour l'employeur, ce qui exclut les moments où la CPAM est fermée, à savoir les fins de semaine et les jours fériés, de même que le jour indiqué par elle comme étant celui de la prise de décision. Elle peut, en effet, se prononcer dès l'ouverture de ses bureaux.
En revanche, des dernières évolutions jurisprudentielles (C. Cass. 5 avril 2012), le délai imparti à l'employeur pour formuler ses observations sur la reconnaissance du caractère professionnel d'un accident du travail ou d'une maladie, court à compter du jour où il a eu la possibilité de prendre connaissance du dossier. En conséquence, le jour de la réception par l'employeur du courrier l'en avisant doit figurer au nombre des jours dits utiles.
Il est acquis aux débats que la société d'Électronique de Combrée (la SELCO) a accusé réception le 6 août 2004 de la lettre de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la CPAM) l'informant de la clôture de la procédure d'instruction et l'invitant à venir prendre connaissance du dossier, aucune date n'étant toutefois mentionnée quant au jour exact où elle rendrait sa décision quant à la prise en charge ou non au titre de la législation relevant des risques professionnels de la maladie déclarée par Mme X... le 2 avril 2004 et médicalement constatée le 15 mars précédent. Était en effet uniquement indiqué : " Préalablement à la prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie professionnelle vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier pendant un délai de dix jours à compter de la date d'établissement de ce courrier "
Le tableau établi par la SELCO fait apparaître que le 6 août était un vendredi. Dès lors, l'employeur a disposé du vendredi 6 août, du lundi 9 août, du mardi 10 août, du mercredi 11 août, du jeudi 12 août et du vendredi 13 août pour se déplacer à la CPAM et faire connaître ses observations, à savoir six jours utiles.
Cependant, la CPAM avait elle-même estimé à dix jours le délai devant être réservé à l'employeur pour consulter le dossier et prendre ses éventuelles observations.
Dans ces conditions, et alors que le délai se trouvait déjà, de fait, amputé de deux jours utiles, soit le mercredi 4 août, date d'établissement du courrier et point de départ du délai, et le jeudi 5 août, avant qu'il ne parvienne à la SELCO, la CPAM, en se prononçant le lundi 16 août, a encore réduit le délai annoncé, qui n'était que de huit jours réellement et non de dix, puisque, coupé par un week-end, et le 14 août, date d'expiration du délai, étant un samedi alors que, dans les deux cas, ses locaux sont fermés au public.
À défaut donc d'avoir permis à l'employeur de disposer effectivement du délai de dix jours qu'elle lui avait accordé comme étant nécessaire à l'exercice de son droit de consultation, cette attitude caractérise un manquement par la CPAM au respect du principe du contradictoire, qui doit se traduire, infirmant la décision des premiers juges de ce chef, par l'inopposabilité à la SELCO de la décision du 16 août 2004 de prise au charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la maladie présentée par Mme X....
Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la SELCO la charge de ses frais irrépétibles.
Étant en matière de sécurité sociale, il n'y a pas lieu à dépens.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société d'Électronique de Combrée recevable,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit inopposable à la société d'Électronique de Combrée la décision du 16 août 2004 par laquelle la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers a pris en charge la maladie présentée par Mme X... au titre de la législation relative aux risques professionnels,
Déboute la société d'Électronique de Combrée de sa demande du chef de l'article 700 du code de procédure civile,
Rappelle que la procédure est gratuite et sans frais.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00490
Date de la décision : 11/12/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2012-12-11;11.00490 ?
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