COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N
CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02521
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de SAUMUR, décision attaquée en date du 02 Septembre 2010, enregistrée sous le no 09/ 00074
ARRÊT DU 04 Décembre 2012
APPELANT :
Maître L...ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS J...F... TRANSPORTS ......49022 ANGERS CEDEX 02
représenté par Maître Lionel DESCAMPS (ACR), avocat au barreau d'ANGERS
INTIMES :
Monsieur Michel X......49140 CORZE
Monsieur Cédric Y......49330 MARIGNE
Monsieur Alain Z......49150 LE GUEDENIAU
Monsieur Nicolas A......53290 ST DENIS D'ANJOU
Monsieur Jacques B......49140 SEICHES SUR LOIR
Monsieur Philippe C......49430 LEZIGNE
Monsieur Jacky D......49260 LE COUDRAY MACOUARD
présents, assistés de Maître Paul CAO (SCP), avocat au barreau d'ANGERS
Monsieur André E......49125 TIERCE
représenté par Maître Paul CAO (SCP), avocat au barreau d'ANGERS
l'A. G. S., agissant par son association gestionnaire l'UNEDIC-C. G. E. A. de RENNES 4 Cours Raphaël Binet Imm. Le Magister 35069 RENNES CEDEX
représentée par Maître André FOLLEN (LEXCAP AVOCATS), avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 Septembre 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Anne DUFAU, assesseur Madame Elisabeth PIERRU, vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame TIJOU, adjoint administratif faisant fonction de greffier
ARRÊT :
du 04 Décembre 2012, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par madame LECAPLAIN MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******
FAITS ET PROCÉDURE :
En 2002, la société " Transports J... " a racheté la société " Les Transports F... ". Le 31 mars 2007, la société " Transports J... " a été cédée à la société FJ Participations appartenant au groupe N...Transports. Ces opérations ont donné naissance à la société " J... F... Transports " ayant pour activité les transports publics routiers et le stockage de marchandises générales.
Cette entreprise employait plus de dix salariés et elle était régie, dans ses rapports avec le personnel, par la convention collective des Transports Routiers.
La société " J... F... Transports " a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Angers du 11 mars 2009, M. Vincent K...étant désigné administrateur judiciaire et M. L..., mandataire judiciaire.
Par ordonnance du 8 avril 2009, rendue sur requête du 1er avril précédent, le juge commissaire a autorisé l'administrateur à procéder au licenciement pour motif économique de 19 salariés.
M. Jacques B..., M. Nicolas A..., M. Alain Z..., M. Jacky D..., M. Philippe C...et M. Cédric Y..., qui occupaient des emplois de chauffeurs routiers au sein de la société " J... F... Transports ", se sont vus notifier leurs licenciements pour motif économique par lettres recommandées du 8 avril 2009.
L'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de MM. André E...et Michel X..., salariés protégés, par décisions du 29 avril 2009 et M. Vincent K...ès-qualités leur a notifié leur licenciement par lettres recommandées du 4 mai 2009.
Par jugement du 14 octobre suivant, la société " J... F... Transports " a été placée en liquidation judiciaire, M. L... étant désigné liquidateur judiciaire, tandis qu'il était mis fin à la mission de l'administrateur.
Le 22 juin 2009, M. Jacques B..., M. Nicolas A..., M. Alain Z..., M. André E..., M. Jacky D..., M. Philippe C..., M. Cédric Y...et M. Michel X...ont saisi le conseil de prud'hommes de demandes de rappels de salaire pour heures supplémentaires et de dommages et intérêts pour travail dissimulé.
Par jugement du 2 septembre 2010, auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes de Saumur a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire prévue par l'article 515 du code de procédure civile :- ordonné la jonction des 8 instances ;- fixé les créances des 8 salariés à la liquidation judiciaire de la société J...F... Transports aux sommes suivantes :
¤ M. Jacques B...Travail dissimulé : 7500 € Heures supplémentaires et congés payés afférents : 182, 66 € et 18, 26 € ; ¤ M. Nicolas A...Travail dissimulé : 7 500 € Heures supplémentaires et congés payés afférents : 1 199, 51 € et 119, 95 € ; ¤ M. Alain Z...Travail dissimulé : 7500 € Heures supplémentaires et congés payés afférents : 2037 € et 203, 70 € ; ¤ M. André E...Indemnité de requalification du CDD en CDI : 1250 €
Travail dissimulé : 7500 €
Heures supplémentaires et congés payés afférents : 5172, 23 € et 517, 22 € ; ¤ M. Jacky D...Travail dissimulé : 7500 € Heures supplémentaires et congés payés afférents : 844, 20 € et 84, 42 € ; ¤ M. Philippe C...Travail dissimulé : 7500 € Heures supplémentaires et congés payés afférents : 1449, 51 € et 144, 95 € ; ¤ M. Cédric Y...Travail dissimulé : 8915 € Heures supplémentaires et congés payés afférents : 61, 08 € et 6, 10 €
¤ M. Michel X...: Travail dissimulé : 7 761 € Heures supplémentaires et congés payés afférents : 4 020, 42 € et 402 € ;
- dit que Maître K...ès-qualité d'administrateur judiciaire devrait délivrer à l'ensemble des salariés les bulletins de paie afférents à leurs créances salariales dans les quinze jours de la notification du jugement sous peine d'une astreinte de 10 € par jour de retard dont le conseil s'est réservé la liquidation, le cas échéant ;- fixé la créance de chaque salarié à l'encontre de la société J...F... Transports, au titre des frais irrépétibles, à la somme de 500 € ;- déclaré les créances opposables au C. G. E. A de Rennes en sa qualité de gestionnaire de l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés et ce, dans la limite et les plafonds légaux ;- laissé les dépens à la charge de M. L... ès-qualités.
Ce dernier a reçu notification de ce jugement le 9 septembre 2010. Il en a régulièrement relevé appel général par courrier recommandé du 8 octobre suivant.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 23 mars 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. L... pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société J...F... Transports demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter les 8 salariés de l'ensemble de leurs prétentions et de les condamner aux dépens.
Aux demandes de rappels de salaire pour heures supplémentaires, il oppose que :- la détermination de la durée du travail des conducteurs du transport routier de marchandises (TRM) passe par la distinction entre temps de travail effectif et temps de service, lequel n'entre pas dans la durée du travail effectif ; que ces deux notions ont été occultées par les salariés dans leurs décomptes, lesquels sont, par conséquent, inexploitables, et par le Conseil de Prud'hommes de SAUMUR dans son raisonnement et sa décision ;
- les décomptes établis par les salariés sont totalement fantaisistes et invraisemblables en ce que, par exemple, des heures supplémentaires sont comptabilisées au titre de jours pendant lesquels ils étaient en congés payés ; ces décomptes sont d'autant moins crédibles qu'à compter de novembre 2007, les chauffeurs ont eu beaucoup moins de travail en raison de la perte du principal client, la société MONDI, à tel point qu'ils n'ont même plus atteint le forfait mensuel de 220 heures pour lequel ils étaient rémunérés ;- l'allégation des salariés, selon laquelle leurs disques chronotachygraphes ne rendraient pas compte de la réalité des heures de travail effectif au motif que l'employeur leur aurait demandé d'arrêter le disque pendant les temps de chargement et de déchargement moyennant la promesse d'une rémunération plus importante est parfaitement fausse et la preuve d'une telle demande n'est pas rapportée. L'appelant estime donc que la demande n'es pas étayée.
Aux demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé, le liquidateur oppose que :- l'employeur n'a pas incité les chauffeurs à masquer des dépassements de temps de travail par manipulation des disques chronotachigraphes et qu'il a, au contraire, insisté auprès des salariés sur le respect, par eux, de la réglementation applicable ;- la preuve de l'élément intentionnel requis pour caractériser le travail dissimulé fait défaut ;- pour le cas où la cour maintiendrait des condamnations pour travail dissimulé, il conviendrait de déduire les indemnités de licenciement des sommes ainsi allouées.
Sur les demandes, nouvelles en cause d'appel, d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse fondées sur le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, M. L... ès-qualités fait valoir que :- elles ne sont pas fondées car : le redressement judiciaire, la liquidation judiciaire et la fermeture définitive de l'entreprise n'ont permis que les reclassements qui sont intervenus et dont il est justifié par les très nombreuses pièces versées aux débats ;- les pièces produites démontrent que l'administrateur désigné par le tribunal de commerce a bien rempli son obligation de reclassement, qu'il a opéré des recherches tant en externe qu'en interne et qu'il a transmis aux salariés toutes les offres qu'il a reçues ;- la demande de M. E..., salarié protégé, est irrecevable car son licenciement a été autorisé par l'inspectrice du travail le 29 avril 2009 et il n'a pas contesté cette décision ; en vertu du principe de séparation des pouvoirs, le juge judiciaire ne peut pas contrôler le respect de l'obligation individuelle de reclassement qui a déjà été vérifiée par l'inspecteur du travail.
L'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés, intervenant par l'UNEDIC-C. G. E. A de Rennes-, association gestionnaire de l'AGS, déclare s'associer aux conclusions d'infirmation et de débouté développées par M. L... ès-qualités.
S'agissant des demandes de rappels de salaire pour heures supplémentaires, elle argue de ce que les salariés n'étayent pas leurs prétentions.
Elle s'oppose à la demande indemnitaire pour travail dissimulé au motif que la preuve de l'élément intentionnel fait défaut. Enfin, elle conclut que l'obligation de reclassement a été remplie par l'administrateur.
Aux termes de leurs dernières conclusions enregistrées au greffe le 11 juillet 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, formant appel incident, M. Jacques B..., M. Nicolas A..., M. Alain Z..., M. André E..., M. Jacky D..., M. Philippe C..., M. Cédric Y...et M. Michel X...demandent à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;- y ajoutant, de fixer au profit de chacun de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y..., à l'encontre de la liquidation judiciaire de la société J...F... Transports, une créance d'un montant net de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse pour manquement de l'employeur à l'obligation de reclassement, et une indemnité de procédure de 1 000 € ;
- en ce qui concerne MM. E...et X..., salariés protégés, licenciés le 4 mai 2009 sur autorisation de l'inspectrice du travail du 29 avril 2009, de constater que la question de la légalité des décisions administratives de licenciement du 29 avril 2009, dont dépend l'appréciation du bien fondé de leurs demandes indemnitaires relatives au caractère injustifié des licenciements les concernant, présente un caractère sérieux ;- en conséquence, de les inviter à faire trancher la question de la légalité de la décision par le tribunal administratif de Nantes et de surseoir à statuer sur leurs demandes tendant à voir juger leurs licenciements dépourvus de caractère réel et sérieux jusqu'à ce qu'intervienne la décision de la juridiction administrative ;- d'employer les dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
A l'appui de leurs demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires, les 8 salariés indiquent que ces prétentions sont motivées par le fait que l'employeur leur avait imposé, lorsqu'ils étaient en opération de chargement ou déchargement des véhicules, d'arrêter le cours des contrôlographes, ce afin que ce temps ne soit pas rémunéré et n'influe pas sur les temps de conduite et de repos. Ils estiment que la preuve de la réalité de cette consigne est suffisamment rapportée par les nombreux témoignages d'autres salariés qu'ils versent aux débats ; que les éléments qu'ils produisent quant aux heures supplémentaires accomplies sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, ce qu'il ne fait pas.
S'agissant des demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé et de l'intention requise en la matière, ils soutiennent que la fraude résulte suffisamment de ce que la lecture des disques chrono tachygraphes révèle qu'ils pouvaient accomplir des journées de travail exemptes d'opérations de chargement et de déchargement ; que cette intention de dissimulation est encore mise en évidence par les témoignages produits.
Au soutien de leurs demandes de demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse fondées sur le manquement de l'employeur à l'obligation de reclassement, ils font valoir que la société " J... F... Transports " appartenait à un groupe, qu'aucune offre de reclassement écrite et individualisée ne leur a été adressée, qu'il n'est justifié d'aucune recherche personnelle et individualisée, que le délai extrêmement court qui sépare l'envoi des courriers circulaires de recherche de reclassement et la notification des licenciements ne permet pas de considérer que les recherches de reclassement aient été réalisées de bonne foi ; que l'absence d'une recherche de reclassement sérieuse, individualisée et menée de bonne foi fait autant défaut s'agissant des deux salariés protégés. Les intimés indiquent avoir tous, après leur licenciement, soit retrouvé du travail, soit pris leur retraite.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur les demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires :
Attendu que, s'il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, en cas de litige relatif à l'existence et au nombre d'heures de travail accomplies il appartient toutefois au salarié d'étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu que, comme ils le faisaient en première instance, en cause d'appel les salariés intimés fondent leurs demandes de rappels de salaires pour heures supplémentaires sur le fait que l'employeur aurait omis de leur payer certaines heures supplémentaires au cours desquelles ils procédaient aux opérations de chargement ou de déchargement de la marchandise transportée ; qu'à l'appui de leurs prétentions, ils soutiennent, comme ils le faisaient devant les premiers juges, qu'au cours d'une réunion qui s'est déroulée le 31 mars 2007, soit au moment du rachat de la société " Transports J... " par la société FJ Participations dépendant du groupe N...Transports, M. N... aurait demandé à l'ensemble des chauffeurs présents de mettre les contrôlographes au repos au cours des opérations de chargement et de déchargement et ce, moyennant la promesse d'une rémunération plus élevée ;
Attendu qu'en première instance, les salariés, à l'exception des MM. C...et E..., ont formé des demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre de périodes antérieures au 1er avril 2007, certains faisant courir leurs prétentions depuis le début de l'année 2004 ; attendu que, estimant que la preuve de la demande de neutralisation et celle de la neutralisation des temps de chargement et de déchargement étaient suffisamment rapportées, et que les demandes de rappels de salaire pour heures supplémentaires étaient étayées, le conseil y a fait droit dans le principe, mais il ne les a accueillies qu'à compter du 1er avril 2007, soit à compter du lendemain de la réunion au cours de laquelle les salariés indiquent avoir été confrontés à la demande de neutralisation formée par l'employeur ; que les premiers juges ont donc notablement réduit les demandes qui leur étaient soumises, allouant ainsi, à titre de rappel de salaire congés payés inclus, à M. B...200, 92 € au lieu des 11 782, 38 € sollicités, à M. A...1 319, 46 € au lieu des 14 506, 15 € sollicités, à M. Z...2 240, 90 € au lieu des 8 456, 14 € sollicités, à M. D...928, 62 € au lieu des 2 087, 18 € sollicités, à M. Y...67, 18 € au lieu des 2 165 € sollicités, à M. X...4 422, 42 € au lieu des 5 846, 84 € sollicités, seuls MM. E...et C...ayant vu leurs prétentions intégralement accueillies ;
Attendu qu'en cause d'appel, les salariés intimés ne remettent pas en cause ce chef de décision puisqu'ils sollicitent la confirmation pure et simple du jugement entrepris ; que la cour n'est donc saisie de demandes de rappels de salaire pour heures supplémentaires qu'à compter du 1er avril 2007 ;
Attendu qu'au soutien de leur allégation selon laquelle l'employeur leur aurait demandé, le 31 mars 2007, de mettre au repos les contrôlographes pendant les temps de chargement et de déchargement, les salariés intimés produisent tout d'abord des attestations qu'ils ont établies eux-mêmes, seuls MM. D...et Y...n'ayant pas attesté ; que ces attestations que les salariés s'établissent à eux-mêmes n'ont aucune valeur probante quant à la réalité de la consigne invoquée, étant souligné qu'aucun d'eux n'indique l'avoir effectivement observée ; Qu'ils produisent également les témoignages de MM. Lionel J..., Jean-Yves O...et Noël S..., anciens salariés de la société " J... F... Transports " en qualité de chauffeurs routiers, lesquels relatent, en des termes tout à fait stéréotypés, que lors d'une réunion qui s'est déroulée le 31 mars 2007, M. N..., le nouveau dirigeant de la société, leur a " fait comprendre " de ne pas dépasser les 220 heures de travail mensuel pour lesquels ils étaient rémunérés et les a invités à couper le contrôlographe lors des temps de chargement et de déchargement chez les clients ; Mais attendu que la teneur de ces témoignages est radicalement contredite par les attestations de M. Frédéric P..., conducteur-tuteur qui assurait des missions de formation en faveur des chauffeurs des sociétés du groupe N..., et de M. Anthony Q..., exploitant au sein de la société N...Transports, lesquels ont assisté à la réunion en cause et indiquent que M. N... a, au contraire, rappelé à tous les chauffeurs le caractère impératif du respect de la réglementation relative au transport routier en matière de temps de travail et du respect du temps de travail mensuel de 220 heures ;
Et attendu que la réalité d'une politique volontariste au sein des sociétés du groupe N..., et notamment au sein de la société " J... F... Transports ", quant au respect de la réglementation relative au transport routier, s'agissant, notamment, des temps de conduite, de repos etc..., ressort du témoignage de M. Richard R..., ancien directeur des ressources humaines au sein de la société N...Transports, des opérations de formation relative à la réglementation régulièrement menées au profit des salariés, ainsi que des rappels et sanctions qui ont pu leur être adressés courant 2007 et 2008 pour leur rappeler la nécessité et l'importance du respect de la réglementation en matière de temps de travail ;
Attendu, enfin, que l'allégation des salariés est contredite par la lecture des nombreux relevés de lecture automatique des disques chrono tachygraphes annexés à leurs bulletins de salaire, comptabilisant, outre les temps de repos et les heures de nuit, les temps de conduite, de travail et de mise à disposition ;
Attendu que ces relevés, ainsi que les bulletins de salaire, sont versés aux débats pour la période allant du 1er janvier 2004 à la fin du mois de février 2009 ; qu'il en ressort que, pour chacun des salariés, des temps dits de " travail " correspondant aux temps de chargement et de déchargement litigieux ont bien été enregistrés et comptabilisés, chaque semaine, avant comme après le 31 mars 2007, étant observé que les temps de " travail " ainsi comptabilisés apparaissent globalement plutôt plus longs à compter du 1er avril 2007 ; que la circonstance qu'aucun temps de " travail " ait pu n'être enregistré du chef de rares journées de certains mois au cours desquelles du temps de conduite a bien été enregistré ne suffit pas à faire la preuve de la consigne invoquée et de sa mise en oeuvre ; qu'en effet, d'une part, ces journées sont très rares au regard des nombreux relevés produits, d'autre part, certaines opérations de chargement et de déchargement pouvaient être opérées par le personnel des entreprises clientes, enfin, rien ne permet d'exclure que certaines rares journées ou demi-journées en cause aient comporté uniquement du temps de conduite ;
Que, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, la preuve de la consigne invoquée et de sa mise en oeuvre par les intimés n'est donc pas rapportée ;
Attendu qu'il ressort des bulletins de salaire produits que tous les salariés étaient rémunérés sur la base de 220 heures de travail mensuel et que les heures accomplies au-delà de 152 heures étaient, chaque mois, payées en heures supplémentaires majorées à 25 % et à 50 % ;
Attendu que, pour étayer leurs demandes, les intimés produisent les éléments suivants :- M. B...verse aux débats des tableaux dressés du 1er janvier 2004 à la fin février 2009 aux termes desquels il mentionne, semaine par semaine, le nombre d'heures de travail comptabilisées par l'employeur (étant observé que ce nombre correspond à la somme des heures de conduite, des heures de travail et des heures de mise à disposition reportées sur les relevés de lecture automatique de ses disques chrono tachygraphes), le nombre global d'heures alléguées comme non comptabilisées et dont le paiement est réclamé, la somme des heures comptabilisées et des heures non comptabilisées, et la ventilation des heures supplémentaires invoquées selon qu'elles doivent être majorées à 25 % ou à 50 % ; attendu que ces tableaux, qui ne font que mentionner globalement le nombre total d'heures supplémentaires invoqué comme accompli et non payé au cours de certaines semaines ne constituent pas des éléments suffisamment précis auxquels l'employeur peut répondre ;- M. A...produit des feuillets sur lesquels il a mentionné, pour chaque année du 1er janvier 2004 à fin février 2009, mois par mois, le nombre global d'heures supplémentaires non payées qu'il estime avoir accomplies au cours de chaque mois, en ventilant le nombre d'heures à majorer à 25 % et le nombre d'heures à majorer à 50 % ; que ces éléments ne constituent pas non plus des éléments suffisamment précis auxquels l'employeur peut répondre ;- M. Z...verse aux débats deux feuillets mentionnant, année par année du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2008 et, pour chaque année, mois par mois, le nombre global d'heures de travail qu'il estime avoir accomplies au cours de chaque mois considéré et, par différence avec les 220 heures payées chaque mois comportant des heures supplémentaires payées tant à 125 % qu'à 150 %, le nombre d'heures supplémentaires dont il réclame le paiement ;
- M. D...procède de la même façon en produisant un feuillet qui récapitule ainsi globalement mois par mois le nombre d'heures supplémentaires qu'il estime avoir accomplies du 1er janvier 2006 au 10 mars 2009 sans qu'elles lui aient été rémunérées ; que ces documents qui mentionnent seulement un nombre mensuel global allégué d'heures supplémentaires non payées, accomplies au cours des mois en cause ne constituent pas des éléments suffisamment précis auxquels l'employeur peut répondre ;
- M. E...mentionne, au pied de chacun de ses bulletins de salaire, le nombre d'heures de travail qu'il estime avoir accomplies au cours du mois considéré et le nombre d'heures supplémentaires qu'il s'estime fondé à réclamer en ventilant celles devant être majorées à 25 % et celles devant l'être à 50 % ; que, là encore, la simple indication d'un nombre mensuel global d'heures supplémentaires invoquées comme non payées ne constitue pas un élément suffisant auquel l'employeur peut répondre ; que certaines revendications apparaissent d'ailleurs fantaisistes ; qu'il en est ainsi, par exemple, du mois de janvier 2008 pour lequel le bulletin de salaire de M. E...mentionne un salaire de base pour 152 heures, 34 heures supplémentaires payées à 125 % et 34 heures supplémentaires payées à 150 % (soit, au total 220 heures payées) tandis que le salarié mentionne au pied de son bulletin de salaire : 213h15 de travail accompli tout en revendiquant le paiement de 32 heures supplémentaires à 125 % et de 41h15 heures supplémentaires à 150 % ;
- M. C...se contente de verser aux débats ses bulletins de salaire et les relevés de lecture automatique des disques chrono tachygraphes qui y sont attachés afférents à la période courue du 26 juin 2007 au 28 février 2009 ; que ses bulletins de salaire révèlent que des heures supplémentaires lui ont été payées chaque mois ; que l'intimé ne produit aucun élément à l'appui de sa demande, laquelle correspond, en cause d'appel, à la somme de 1 449, 51 € que le conseil de prud'hommes lui a allouée outre les congés payés afférents ; qu'il ne produit aucun élément relatif au nombre d'heures supplémentaires dont il revendique le paiement, aux périodes auxquelles elles auraient été accomplies etc... ; qu'il apparaît en conséquence totalement défaillant à étayer sa demande devant la cour ;
- M. Y...verse aux débats des feuillets couvrant la période du 1er avril 2006 au 31 décembre 2008 sur lesquels il a mentionné, semaine par semaine, le nombre global d'heures supplémentaires non payées qu'il estime avoir accomplies en ventilant les heures supplémentaires majorées de 25 % et celles majorées de 50 % ; que ces feuillets qui ne font que mentionner globalement le nombre total d'heures supplémentaires invoquées comme accomplies et non payées au cours des semaines concernées ainsi que, par voie de conséquence, le nombre global d'heures supplémentaires non payé du mois ne constituent pas des éléments suffisamment précis auxquels l'employeur peut répondre ; qu'en outre, là encore, ces relevés n'apparaissent pas sérieux ; qu'ainsi au titre du mois d'octobre 2008, le salarié invoque une créance de 67 heures supplémentaires dont 17h15 accomplies du 20 au 25 octobre et 12h30 accomplies du 27 au 31 octobre alors qu'il résulte du relevé non contesté de lecture automatique des disques chrono tachygraphes qu'il était en arrêt de maladie pendant toute cette période ;
- M. X...produit quant à lui une feuille sur laquelle il a mentionné, pour chacun des mois de septembre à novembre 2006, de janvier, février, juin, juillet, septembre à décembre 2007, juin à octobre 2008 et décembre 2008, le nombre global d'heures supplémentaires accomplies au cours du mois considéré et non réglées, ainsi que le montant de rappel de salaire correspondant ; que ce feuillet qui ne fait que mentionner globalement le nombre total d'heures supplémentaires invoquées comme accomplies et non payées au cours des mois concernés ne constitue pas un élément suffisamment précis auquel l'employeur peut répondre ;
Qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'aucun des salariés intimés n'étaye sa demande en paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires ; que, par voie d'infirmation du jugement déféré, tous les intimés seront donc déboutés de ce chef de prétention, le jugement étant également infirmé en ce qu'il a ordonné la délivrance aux salariés, sous astreinte, de bulletins de salaire rectificatifs, ce chef de prétention étant rejeté puisque devenu sans objet ;
Sur les demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé :
Attendu que l'article L. 8223-1 du code du travail, relatif aux droits des salariés en cas de recours par l'employeur au travail dissimulé, dispose qu'" en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire " ;
Mais attendu que, conformément aux dispositions des articles 8221-3 et 8221-5 du code du travail, la dissimulation d'emploi salarié prévue par le texte susvisé n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ;
Attendu que cette preuve fait défaut en l'espèce à l'encontre de l'employeur dès lors que celle de la consigne invoquée de couper le contrôlographe pendant les temps de chargement et de déchargement, ainsi que celle de sa mise en oeuvre par les intimés ne sont pas rapportées et que les salariés intimés n'étayent pas leurs demandes en paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires ;
Que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a alloué à chacun d'eux la somme de 7 500 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé, les intimés étant déboutés de ce chef de prétention ;
Sur l'indemnité de requalification du CDD en CDI allouée à M. E...:
Attendu que les premiers juges ont alloué à M. André E...une indemnité de requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée d'un montant de 1 250 € ; attendu que, sur ce chef de décision, l'appelant ne sollicite pas l'infirmation du jugement déféré, n'élève aucune critique et ne saisit la cour d'aucun moyen ; que le jugement entrepris sera donc confirmé à cet égard ;
Sur les licenciements de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...:
Attendu que les licenciements pour motif économique de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...se sont inscrits dans le cadre d'un licenciement collectif concernant 19 salariés dont un cadre occupant l'emploi de responsable d'exploitation, 17 ouvriers occupant des emplois de conducteurs et une employée occupant un emploi de secrétaire ; que ces licenciements ont été dûment autorisés par ordonnance rendue par le juge commissaire le 8 avril 2009 ;
Attendu que chacun de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...s'est vu notifier son licenciement pour motif économique par courrier recommandé de M. Vincent K..., administrateur judiciaire à la procédure collective de la société " J... F... Transports " du 8 avril 2009, lequel énonce les difficultés économiques de l'entreprise ainsi que la suppression du poste du salarié concerné, et mentionne l'information faite à l'inspection du travail, l'exécution des formalités légales et réglementaires, l'autorisation du juge commissaire donnée par ordonnance du 8 avril 2009, la durée du préavis, l'offre d'adhésion à une convention de reclassement personnalisé, le délai pour y répondre et la date d'expiration de ce délai, l'information au titre du droit individuel à la formation, et la priorité de réembauche ;
Attendu que les salariés font grief l'employeur d'avoir failli à son obligation de reclassement à leur égard ;
Attendu que, même s'il est justifié par une cause économique avérée, le licenciement d'un salarié ne peut être légitimement prononcé que si l'employeur a préalablement satisfait à son obligation générale de reclassement ; que Ie périmètre de cette obligation s'étend, non seulement à l'entreprise mais aussi à toutes les sociétés du groupe auquel elle appartient, même situées à l'étranger dont l'activité, l'organisation et le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, sous réserve, s'agissant des sociétés situées à l'étranger que la législation locale ne s'oppose pas à l'engagement de salariés étrangers ;
Attendu qu'il incombe à l'employeur de justifier, par des éléments objectifs, des recherches entreprises, éventuellement étendues aux sociétés du groupe, et de l'impossibilité de reclassement à laquelle il s'est heurté ; Que l'employeur est tenu à l'égard de chaque salarié dont le licenciement est envisagé d'une obligation individuelle de reclassement qui lui impose de rechercher, pour chacun, en considération de sa situation particulière, avant la notification du licenciement toutes les possibilités de reclassement envisageables au sein de l'entreprise ou du périmètre de reclassement, et qu'il lui appartient de justifier par des éléments objectifs des recherches qu'il a effectuées en ce sens et de l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de procéder au reclassement du salarié dans un emploi équivalent, de même catégorie, voire de catégorie inférieure ;
Attendu que cette obligation de recherche effective et personnalisée des possibilités de reclassement s'impose à l'administrateur judiciaire en cas de licenciement économique prononcé dans le cadre d'une procédure collective ;
que M. Vincent K...ès-qualités était donc tenu de rechercher si le reclassement de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...était possible et, le cas échéant, de Ieur faire des offres précises et personnalisées ;
Attendu qu'il ne fait pas débat qu'il n'existait aucun poste disponible au sein de la société " J... F... Transports ", les postes des intimés étant supprimés en raison des difficultés économiques rencontrées par cette dernière du fait, notamment, de la perte du principal client, et ces suppressions s'inscrivant dans le cadre d'une tentative de sauvetage de l'entreprise, notamment, par réduction de la masse salariale ;
Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats par M. L... ès-qualités que les recherches de reclassement effectuées par M. K...ès-qualités ont consisté, tout d'abord, à envoyer, le 3 avril 2009, des lettres circulaires aux sociétés faisant partie du groupe SOBOTRAM dont la société " J... F... Transports " est une filiale ; qu'en outre, l'administrateur a procédé à des recherches de reclassement externe en adressant, le même jour, le même courrier circulaire à des entreprises de transports du Maine et Loire et des départements limitrophes afin de les interroger sur l'existence d'éventuelles possibilités de reclassement en leur sein ;
Attendu que, le 3 avril 2009, l'administrateur judiciaire a adressé des courriers à la SAS SOBOTRAM Transports et Logistique, à la SAS Saône et Loire Express, à la SAS Transports Berthelard, à la SAS Soboroute, à la SAS groupe SOBOTRAM, à la société N...Maintenance, à la SAS FJ Participation et à la SAS Transports N... ; attendu que ces sociétés qui font partie du groupe SOBOTRAM et dont l'activité est, pour la majeure partie d'entre elles, également le transport, entraient dans le périmètre de reclassement interne pour avoir des activités, une organisation ou un lieu de travail ou d'exploitation permettant la permutation de tout ou partie du personnel licencié de la société " J...-F... Transports " ;
Attendu qu'aux termes de ces courriers dûment envoyés avant les licenciements litigieux, M. K...ès-qualités informait les sociétés destinataires du placement de la société " J... F... Transports " en redressement judiciaire, de son activité de transport routier, du fait qu'il allait être amené à procéder au licenciement de 17 chauffeurs titulaires des permis ABCD-EC, d'une secrétaire et d'un responsable d'exploitation et il joignait un coupon réponse pour le cas où des postes seraient disponibles en leur sein ;
Mais attendu que, dans ce cadre du périmètre interne de reclassement, M. K...ès-qualités devait procéder à des recherches de reclassement sérieuses et personnalisées ce qui lui imposait de rechercher, pour chacun des intimés, un reclassement en considération de sa situation particulière ;
Or attendu que les huit courriers ainsi adressés par M. K...ès-qualités dans le cadre des recherches de reclassement interne sont tous rigoureusement identiques et constituent une lettre circulaire, collective et impersonnelle dépourvue de la moindre précision quant à la situation individuelle (âge, ancienneté, expérience, qualification, caractéristiques de l'emploi occupé...) des salariés dont le reclassement était recherché, notamment des intimés ;
Attendu que de tels courriers circulaires qui procèdent, de la part de l'administrateur, de recherches globales, collectives et impersonnelles de reclassement ne répondent pas à l'obligation qui pesait sur lui de rechercher par tous moyens, de façon sérieuse et personnalisée, le reclassement individuel de chacun de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...; que, pour ce premier motif, ces derniers sont bien fondés à soutenir que l'employeur a failli à son obligation de reclassement à leur égard ; qu'en outre, l'appelant ne justifie pas de l'absence de postes disponibles au sein des sociétés N... Maintenance et Transports N... et, par voie de conséquence, de l'impossibilité de reclassement au sein de ces entreprises ;
Attendu, l'employeur ayant failli à son obligation de reclassement interne, que les licenciements de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...doivent être déclarés dépourvus de cause réelle et sérieuse ;
Attendu que M. Jacques B...a été embauché suivant contrat de travail à durée indéterminée du 3 mars 2002 ; qu'il était âgé de 58 ans au moment de son licenciement ;
Attendu que M. Nicolas A...ne produit pas son contrat de travail ; qu'il était âgé de 42 ans au moment de son licenciement et qu'il ressort du dernier bulletin de salaire produit du mois de février 2009 qu'il présentait alors une ancienneté de 7 ans et un mois dans l'entreprise ;
Attendu que M. Alain Z...a été engagé suivant contrat de travail à durée indéterminée du 2 avril 2001 et il était âgé de 48 ans au moment de son licenciement ;
Attendu que M. Jacky D...a été embauché suivant contrat de travail à durée indéterminée du 22 novembre 2005 et il était âgé de 49 ans au moment de son licenciement ;
Attendu que M. Cédric Y...ne produit pas son contrat de travail ; qu'il ressort des bulletins de salaire qu'il comptait 9 ans et 5 mois d'ancienneté au moment de son licenciement et était alors âgé de 30 ans ;
Attendu que, justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, MM. B..., A..., Z..., D...et Y...peuvent prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de leur licenciement sur le fondement de l'article 1235-3 du code du travail, l'indemnité à la charge de l'employeur ne pouvant pas être inférieure aux salaires des six derniers mois ;
Attendu que M. Philippe C...ne produit pas son contrat de travail mais il ressort des bulletins de salaire produits qu'il a été embauché le 26 juin 2007 et qu'au moment de son licenciement, il présentait une ancienneté de 1 an et 11 mois et était âgé de 34 ans ; que, compte tenu de son ancienneté inférieure à deux ans, trouvent donc à s'appliquer à son égard les dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail desquelles il résulte qu'il peut prétendre à une indemnité réparant le préjudice subi ;
Attendu que, sans produire aucune pièce afférente à leurs situations respectives postérieurement à leur licenciement, les intimés indiquent avoir tous, soit retrouvé un emploi, soit pris leur retraite ;
Attendu qu'en considération des circonstances de la rupture et de la situation particulière de chacun des salariés, notamment, du montant de sa rémunération tel qu'il ressort des bulletins de salaire produits, de son âge au moment de la rupture, de son ancienneté, du fait que les intéressés ont, soit retrouvé un emploi, soit pris leur retraite et des conséquences du licenciement à l'égard de chacun, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer la créance indemnitaire de chacun des salariés sur la liquidation judiciaire de la société " J... F... Transports " à la somme suivante :- M. B...: 18 500 €- M. A...: 15 500 €- M. Z...: 17 000 €- M. D...: 15 000 €- M. C...: 8 000 €- M. Y...: 15 500 €
Attendu, aucun de ces six salariés ne justifiant ni n'indiquant avoir perçu des indemnités de chômage de la part de Pôle emploi, qu'il n'y a donc pas lieu à application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail ;
Sur les licenciements de MM. E...et X..., salariés protégés :
Attendu que les licenciements de MM. André E...et Michel X..., salariés protégés, ont été autorisés par arrêtés de l'inspectrice du travail du 29 avril 2009 et que ces deux salariés ont été licenciés par lettres du 4 mai 2009 comportant, outre les énonciations contenues dans les courriers adressés à leurs six autres collègues, la mention de la décision d'autorisation de l'inspectrice du travail ;
Attendu qu'aux termes de ses décisions, s'agissant de l'obligation de reclassement, cette dernière a retenu que l'employeur avait satisfait à cette obligation en procédant à une recherche de reclassement interne auprès des sociétés du groupe SOBOTRAM, dont la société J...F... Transports est une filiale, et qui n'a pas abouti, ainsi qu'à une recherche de reclassement externe auprès d'entreprises de transports du Maine et Loire et des départements limitrophes dont certaines ont proposé des postes de chauffeur ;
Attendu que, lorsque le licenciement économique d'un salarié protégé a été autorisé par l'inspecteur du travail à qui il appartient de vérifier le respect de l'obligation individuelle de reclassement pour apprécier le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement, le juge judiciaire ne peut sans violer le principe de la séparation des pouvoirs contrôler le respect de cette obligation, ce contrôle relevant de la seule compétence du juge administratif ;
Attendu qu'au regard des recherches de reclassement dont il est justifié en l'espèce par l'employeur telles qu'elles ont été précédemment analysées, la question de la légalité des décisions prises par l'inspectrice du travail le 29 avril 2009 pour autoriser les licenciements de MM. E...et X..., et dont dépend l'appréciation du bien-fondé des demandes indemnitaires formées par ces derniers pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, présente un caractère sérieux ; que la fin de non-recevoir opposée par M. L...
ès-qualités doit donc être rejetée et qu'il convient d'inviter les parties à faire trancher la question de la légalité des décisions du 29 avril 2009 autorisant les licenciements de MM. E...et X...par la juridiction administrative compétente en lui posant une question préjudicielle ; qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur leurs demandes indemnitaires dans l'attente de la décision à intervenir de la juridiction administrative ;
Sur la garantie de l'AGS :
Attendu que le présent arrêt sera déclaré opposable à l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, laquelle ne sera tenue à garantir les sommes allouées à MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Attendu, M. L... ès-qualités, d'une part, chacun de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y..., d'autre part, succombant partiellement en cause d'appel, qu'il convient, par voie d'infirmation du jugement déféré, de dire que chaque partie conservera ses dépens de première instance et d'appel, de débouter les salariés de leurs demandes formées au titre de leurs frais irrépétibles de première instance et de condamner M. Frnklin Bach, ès-qualités, à payer à chacun d'eux une indemnité de procédure de 500 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
Attendu qu'il convient de réserver les dépens et frais irrépétibles de première instance et d'appel dans les rapports entre M. L... ès-qualités, d'une part, MM. E...et X..., d'autre part ;
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire ;
Infirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives à la somme allouée à M. André E...pour requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ;
Statuant à nouveau,
Déboute MM. B..., A..., Z..., E..., D..., C..., Y...et X...de leurs demandes de rappels de salaires pour heures supplémentaires et de leurs demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;
Dit n'y avoir lieu à ordonner la délivrance, à leur profit et sous astreinte, de bulletins de paie rectificatifs ;
Les déboute de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance ;
Ajoutant au jugement entrepris,
Déclare les licenciements de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...dépourvus de cause réelle et sérieuse ;
Fixe aux sommes suivantes la créance de dommages et intérêts de chacun d'eux pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur la liquidation judiciaire de la société J...F... Transports :
- M. B...: 18. 500 € (dix-huit mille cinq cents euros)- M. A...: 15. 500 € (quinze mille cinq cents euros)- M. Z...: 17. 000 € (dix-sept mille euros)- M. D...: 15. 000 € (quinze mille euros)- M. C...: 8. 000 € (huit mille euros)- M. Y...: 15. 500 € (quinze mille cinq cents euros) ;
Déclare le présent arrêt opposable à l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par l'UNEDIC-C. G. E. A de Rennes, association chargée de la gestion de l'AGS, et dit qu'elle ne sera tenue à garantir les sommes allouées à MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail ;
Rejette la fin de non-recevoir opposée par M. L... ès-qualités aux demandes de MM. E...et X...en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Avant dire droit sur ces demandes, invite les parties à faire trancher la question de la légalité des décisions rendues le 29 avril 2009 par l'inspectrice du travail, autorisant les licenciements de MM. E...et X..., par la juridiction administrative compétente en lui posant une question préjudicielle ;
Sursoit à statuer sur les demandes indemnitaires de ces deux salariés dans l'attente de la décision à intervenir de la juridiction administrative et dit que la cour sera saisie à nouveau par la partie la plus diligente ;
Condamne M. L... ès-qualités à payer à chacun de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y...une indemnité de procédure de 500 € (cinq cents euros) en cause d'appel ;
Dit que chacun de M. L... ès-qualités, d'une part, de MM. B..., A..., Z..., D..., C...et Y..., d'autre part, conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel ;
Réserve l'ensemble des dépens et des frais irrépétibles dans les rapports entre M. L... ès-qualités, d'une part, MM. E...et X..., d'autre part ;
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL