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20/11/2012 | FRANCE | N°10/02998

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 20 novembre 2012, 10/02998


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02998.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 18 Novembre 2010, enregistrée sous le no 10/ 00189

ARRÊT DU 20 Novembre 2012

APPELANTE :

l'A. G. S., agissant par son association gestionnaire l'UNEDIC-C. G. E. A. de RENNES 4 cours Raphaël Binet Immeuble Le Magister 35069 RENNES

représentée par Maître MEMIN, substituant Maître Luc LALANNE (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIME

S :

Monsieur Antonio X...... 72380 JOUE L'ABBE

représenté par Maître Laurence PAPIN-ROUJAS, avocat...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02998.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 18 Novembre 2010, enregistrée sous le no 10/ 00189

ARRÊT DU 20 Novembre 2012

APPELANTE :

l'A. G. S., agissant par son association gestionnaire l'UNEDIC-C. G. E. A. de RENNES 4 cours Raphaël Binet Immeuble Le Magister 35069 RENNES

représentée par Maître MEMIN, substituant Maître Luc LALANNE (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIMES :

Monsieur Antonio X...... 72380 JOUE L'ABBE

représenté par Maître Laurence PAPIN-ROUJAS, avocat au barreau du MANS

Maître Pierre Z..., ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL MAISON Y...... 72015 LE MANS

non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Septembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, président chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 20 Novembre 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
EXPOSE DU LITIGE
La sarl Maison Y..., qui exerce une activité de construction de maisons individuelles à Joué l'Abbé, en Sarthe, a embauché Monsieur Antonio X... comme maçon, selon contrat à durée indéterminée du 6 février 2001.
M. X... était l'unique salarié de l'entreprise, gérée par son beau-frère M. Y.... Elle appliquait la convention collective des ouvriers du bâtiment.
M. X... a, le 8 janvier 2010, saisi le conseil de prud'hommes du Mans en référé pour obtenir le paiement de ses salaires des mois de novembre et décembre 2009 et des congés payés y afférents, et par ordonnance de référé du 5 mars 2010, la sarl Maison Y... a été condamnée à lui payer à titre provisionnel la somme de 3873, 36 €.
M. X... a saisi le conseil de prud'hommes du Mans au fond le 24 mars 2010, auquel il a demandé de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur.
Par jugement du 27 avril 2010, le tribunal de commerce du Mans a prononcé la liquidation judiciaire de la sarl Maison Y..., et a désigné M. Z... ès qualités de mandataire liquidateur, lequel a, par courrier du 10 mai 2010, notifié à M. X... son licenciement pour motif économique.
Par jugement du 18 novembre 2010, le conseil de prud'hommes du Mans a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. X..., à la date du 10 mai 2010 et aux torts de l'employeur, fixé la créance de M. X... sur la liquidation judiciaire de la sarl Maison Y... à la somme de 34 848 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, déclaré le jugement opposable au centre de gestion et d'études (CGEA) de Rennes, délégation régionale AGS du Centre Ouest, Unité déconcentrée de l'UNEDIC représentant à la procédure l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (A. G. S.), et condamné M. Z... ès qualités de mandataire liquidateur de la sarl Maison Y... aux dépens.
Le jugement a été notifié à M. Z... ès qualités de mandataire liquidateur de la sarl Maison Y... le 24 novembre 2010, ainsi qu'à M. X... et le 23 novembre 2010, à l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés (A. G. S) par l'intermédiaire de l'UNEDIC-CGEA de Rennes, association gestionnaire de l'A. G. S., qui en a fait appel par lettre postée le 8 décembre 2010.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions enregistrées au greffe le 13 septembre 2011, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par l'UNEDIC-CGEA de Rennes, association gestionnaire de l'AGS, demande à la cour, à titre principal, d'infirmer le jugement entrepris et de débouter M. X... de l'ensemble de ses prétentions.
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où une créance serait fixée au profit de M. X... sur la liquidation judiciaire de la sarl Maison Y..., de juger qu'elle ne la garantira que dans les limites prévues par l'article L. 3253-8 du code du travail et les plafonds fixés par les articles L. 3253-7 et D. 3253-5 du même code.
Elle demande à la cour de condamner M. X... aux entiers dépens.
L'A. G. S. indique s'en rapporter à la sagesse de la cour sur le principe même de la résiliation judiciaire, mais observe que M. X... connaissait les difficultés économiques de son employeur, qui était son beau-frère, et a saisi la juridiction prud'homale peu avant le dépôt de bilan de celui-ci pour obtenir une indemnisation que le licenciement économique ne lui apportait pas.
Elle soutient qu'en tout état de cause, les articles L1235-3 et L1235-11 du code du travail, visés par les premiers juges, ne sont pas applicables à la situation du salarié qui était employé par une entreprise de moins de 11 salariés, et relève à ce titre, des dispositions de l'article L1235-5 du code du travail ; qu'il doit en conséquence justifier du préjudice subi du fait de la rupture du contrat de travail, ce qu'il ne fait pas.
L'A. G. S. indique avoir fait l'avance au profit de M. X... d'une somme de 27 781, 02 € au titre des arriérés de salaires, de congés payés, de préavis et d'indemnités de licenciement.
***
M. X... demande à la cour, par observations orales à l'audience reprenant sans ajout ni retrait ses écritures déposées au greffe le 16 août 2012, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

M. X... soutient que les manquements de l'employeur à son égard sont suffisamment graves pour justifier le prononcé de la résiliation judiciaire à la date du licenciement notifié postérieurement à sa saisine de la juridiction prud'homale, et qu'il n'y a eu aucune connivence avec M. Y... ; qu'en effet, la sarl Maison Y... ne lui a plus fourni de travail à compter du 9 avril 2010, date à laquelle M. Y... lui a dit de rester chez lui, que ses salaires de novembre et décembre 2009 ne lui ont été payés que le 25 mai 2010, et que les bulletins de salaire afférents aux mois de novembre 2009 à mars 2010 inclus ne lui ont été remis également qu'à cette date.

M. X... ajoute avoir retrouvé un emploi en contrat à durée déterminée comme maçon le 23 août 2010 auprès de la sarl Pinto, et avoir conclu avec cette entreprise un contrat à durée indéterminée le 24 décembre 2010.
M. Z... ès qualités de mandataire liquidateur de la sarl Maison Y... a été régulièrement convoqué à l'audience de la cour du 3 septembre 2012 mais n'a pas comparu et n'a pas été représenté.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail
En application de l'article 1184 du code civil, prévoyant la résolution judiciaire pour inexécution de ses obligations par le cocontractant, le salarié peut poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquement par ce dernier à ses obligations, dès lors que ces manquements sont d'une gravité suffisante. Lorsque la résiliation judiciaire est prononcée aux torts de l'employeur, elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ouvre droit aux indemnités de rupture et à des dommages et intérêts.
Il ne fait pas débat que la sarl Maison Y... a cessé à compter d'avril 2010 de donner du travail à M. X..., et qu'elle ne lui a plus versé ses salaires, ni remis ses bulletins de paie, dès le mois de novembre 2009.
L'employeur, en portant atteinte à la rémunération du salarié, plusieurs mois de suite, en omettant de lui remettre ses bulletins de salaire, et en ne lui fournissant finalement plus de travail, a manqué à ses obligations contractuelles essentielles, et a eu un comportement fautif qui justifie la résiliation par le juge, à ses torts exclusifs, du contrat de travail.
Aucune concertation frauduleuse entre le salarié et l'employeur n'est établie, ni même alléguée par le C. G. E. A., et il est acquis que M. X... a saisi le conseil de prud'hommes du Mans, en référé, pour obtenir le paiement de ses salaires, dès le 8 janvier 2010.
La prise d'effet de la résiliation judiciaire du contrat de travail est fixée à la date de notification du licenciement, qui a fait cesser le contrat de travail, soit le 10 mai 2010.

La rupture ayant les effets du licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. X..., salarié d'une entreprise dont l'effectif est de moins de onze personnes, peut prétendre par application des dispositions de l'article L1235-5 du code du travail au versement d'une indemnité correspondant au préjudice subi.

Le montant de l'indemnité est apprécié souverainement par le juge, le code du travail ne fixant ni minimum ni maximum.
M. X... avait 37 ans au moment de la rupture du contrat de travail et son ancienneté dans l'entreprise a été de 10 ans et 6 mois ; son dernier salaire brut a été de 2 145, 20 € ; il a retrouvé auprès de la sarl Pinto un emploi similaire, le 23 août 2010 en contrat de travail à durée déterminée, contrat de travail devenu à durée indéterminée le 24 décembre 2010.
La cour trouve en la cause les éléments nécessaires, notamment quant à l'âge du salarié, à son aptitude à retrouver un emploi de même nature, et à son ancienneté dans l'entreprise, pour lui allouer, par voie d'infirmation du jugement, la somme de 25 000 €, qui sera fixée à titre de créance de M. X... au passif de la liquidation judiciaire de la sarl Maison Y....
Le présent arrêt sera déclaré opposable à l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, laquelle ne sera tenue à garantir les sommes allouées à M. X... que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail.
Sur les dépens
Les dispositions du jugement afférentes aux dépens sont confirmées. M. Z..., ès qualités de mandataire liquidateur de la sarl Maison Y... est condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a fixé la créance de M. X... sur la liquidation judiciaire de la sarl Maison Y... pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 34 848 € ;
Le réformant sur ce seul montant ;
Fixe à la somme de 25 000 € la créance de M. X... sur la liquidation judiciaire de la sarl Maison Y... à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS intervenant par l'UNEDIC-C. G. E. A de Rennes, association gestionnaire de l'AGS, et dit qu'elle ne sera tenue à garantir les sommes allouées à M. X... que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail ;

CONDAMNE M. Z... ès qualités de mandataire liquidateur de la sarl Maison Y... aux dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02998
Date de la décision : 20/11/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2012-11-20;10.02998 ?
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