COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale ARRÊT N
ARRÊT DU 30 Octobre 2012
AD/ FB
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 00740
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 15 Mars 2012, enregistrée sous le no 11/ 00725
APPELANTE :
Madame Idalina X...... 72000 LE MANS
représentée par Monsieur Michel Y..., délégué syndical muni d'un pouvoir
INTIMEE :
SAS PRODUC'TIMBRES Parc Les Barbaniers 4 allée du Carré 92230 GENNEVILLIERS
représentée par Maître Antoine CLUZEL substituant Maître Marie-Hélène FOURNIER-GOBERT, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Septembre 2012 à 14 heures, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte de plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseur Madame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : du 30 Octobre 2012, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par madame LECAPLAIN MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******
EXPOSE DU LITIGE
Mme Idalina X... a été embauchée le 13 janvier 2003 par la société Gravo Technique en qualité de secrétaire commerciale, pour un mi-temps, et d'assistante de production, pour un autre mi-temps.
Cette société est devenue en avril 2008, par transmission universelle de son patrimoine, un établissement de la société Produc'Timbres, qui a pour activité de distribuer des tampons encreurs auprès d'une clientèle d'utilisateurs professionnels.
La société Produc'Timbres a son siège à Gennevilliers (92) et est immatriculée au registre du commerce de Nanterre.
En 2009 la société Produc ‘ Timbres a procédé à un licenciement économique collectif portant sur 21 postes, parmi lesquels celui de Mme X....
Contestant le bien fondé de son licenciement, Mme X... a saisi le Conseil de prud'hommes du Mans pour voir condamner la société Produc ‘ Timbres au paiement des indemnités suivantes :
-15 000 € à titre de dommages et intérêts pour non application des critères d'ordre des licenciements,
-19 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-1000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Mme X... a demandé la remise du bulletin de salaire rectifié de février 2010, du certificat de travail rectifié, d'une attestation Assedic rectifiée, sous astreinte de l00 € par jour de retard, outre les intérêts de droit à compter de la saisine, et l'exécution provisoire.
Après vaine tentative de conciliation, l'affaire a été fixée devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes du Mans le 26 janvier 2012.
La société Produc'Timbres, avant toute défense au fond, a soulevé l'exception de connexité par application des dispositions de l'article 101 du code de procédure civile, et sollicité le déssaisissement du conseil de prud'hommes du Mans au profit de celui de Nanterre, au motif que sont actuellement pendants devant cette juridiction onze autres dossiers relatifs à la contestation des licenciements pour motif économique intervenus entre décembre 2009 et février 2010.
Par jugement du 15 mars 2012 le conseil de prud'hommes du Mans a :
- Dit que la demande d'exception de connexité est fondée,
- Déclaré se dessaisir de la présente instance et Renvoyé la connaissance de l'affaire au conseil des prud'hommes de Nanterre, section de l'Industrie,
- Dit qu'en l'absence de contredit dans le délai de quinze jours suivant le prononcé du jugement, le dossier sera transmis par les soins du Greffe au conseil de prud'hommes de Nanterre,
- DIT que chaque partie supportera la charge de ses dépens.
La décision a été notifiée à Mme X... et à la société Produc'Timbres, respectivement les 17 et 20 mars 2012. Le 21 mars 2012, Mme Idalina X... a formé un contredit qui a donné lieu à établissement d'un récépissé par le greffe le même jour et qui a été dûment notifié à la société Produc'Timbres.
L'affaire a été fixée à l'audience du 3 septembre 2012.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Mme X... demande à la cour par observations orales à l'audience reprenant son contredit formé le 21 mars 2012 et ses écritures déposées au greffe le 3 septembre 2012, auxquels il convient de se référer pour un plus ample exposé, de dire son contredit recevable et fondé, d'infirmer la décision déférée, d'écarter l'exception de connexité et, statuant au fond, de condamner la société Produc'Timbres à lui payer les sommes de :
-15 000 € à titre de dommages et intérêts pour non application des critères d'ordre des licenciements,
-19 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-1000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Mme X... demande en outre la remise du bulletin de salaire rectifié de février 2010, du certificat de travail rectifié, d'une attestation Assédic rectifiée, ce sous astreinte de l00 € par jour de retard, les intérêts de droit à compter de la saisine, et l'exécution provisoire.
Mme X... conteste la régularité et le bien fondé de son licenciement en ce que son employeur au regard des bulletins de salaires, est la société Gravo Technique, alors que la lettre de licenciement décrit les difficultés économiques de la société Produc'Timbres. Elle soutient que l'inspection du travail de la Sarthe et non celle de Clichy aurait dès lors dû être consultée, puisqu'elle est salariée protégée, et que compte tenu de l'effectif de la société Produc ‘ Timbres un plan de sauvegarde de l'emploi aurait dû avoir lieu ; qu'elle a été licenciée alors qu'elle avait 54 ans.
La société Produc ‘ Timbres demande à la cour par observations orales à l'audience reprenant sans ajout ni retrait ses écritures déposées au greffe le 21 août 2012, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, de confirmer le jugement entrepris, de dire bien fondée l'exception de connexité qu'elle soulève, de dire le conseil de prud'hommes du Mans incompétent pour connaître de l'affaire, et d'ordonner le renvoi de la cause devant le conseil de prud'hommes de Nanterre section industrie.
La société Produc ‘ Timbres soutient que les conditions d'application de l'article 101du code de procédure civile sont réunies puisque le licenciement collectif économique a concerné 21 personnes et que Mme Leguay, l'une des salariés licenciés, a le 5 août 2010 saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre cette saisine ayant été suivie de celle de dix autres salariés également licenciés ; que ces dossiers ont été joints, pour une bonne administration de la justice ; que Mme X... a été la seule à saisir le conseil de prud'hommes du Mans, qui a constaté qu'il y avait identité de cause et d'objet entre toutes ces procédures et qu'il convenait, pour éviter une contrariété de jugements, de réunir l'ensemble des contentieux trouvant leur origine dans une même procédure de licenciement économique collectif.
MOTIFS DE LA DECISION
L'article 82 du code de procédure civile stipule que le contredit doit, à peine d'irrecevabilité, être motivé ;
Le contredit formé le 21 mars 2012 par Mme X... est ainsi libellé :
" Monsieur le Président, dans le motif de la décision, il est précisé « qu'il y a identité de cause et d'objet entre les procédures », ce qui est vrai.
Mais en renvoyant devant le conseil de Prud'hommes de Nanterre, cela pose plusieurs problèmes : 1. Les frais occasionnés à Mme X... et à son conseil. 2. La perte de temps, car l'affaire ne sera peut-être pas plaidée le 2 mai, et cela sera renvoyé à plusieurs semaines, ce qui est le cas à Nanterre, 3. De plus, ce 2 mai, plusieurs dossiers seront à plaider, et ce sera l'avocat des autres demandeurs qui plaidera en tête. De ce fait, le conseil de Mme X..., étant délégué syndical, sera en position défavorable pour plaider ce dossier.
Ce sont pour ces raisons que nous formons ce contredit pour que justice soit faite puisque le conseil de Prud'hommes du Mans, section Industrie, était en droit de garder ce dossier conformément aux textes, et en plus c'était son devoir. "
Ce contredit contient bien une motivation, et doit être déclaré recevable ;
Cette motivation, qui consiste à invoquer les frais et déplacements que causeraient à Mme X... le renvoi du dossier devant le conseil de prud'hommes de Nanterre, est cependant inopérante, puisqu'elle ne répond pas au moyen de connexité soulevé par la société Produc'Timbres, et retenu par le conseil de prud'hommes du Mans ;
L'article 101 du code de procédure civile énonce : " s'il existe entre des affaires portées devant des juridictions distinctes un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l'une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l'état la connaissance de l'affaire à l'autre juridiction. "
Ce lien est incontestable en l'espèce puisque le conseil de prud'hommes de Nanterre a été saisi, entre le 5 août 2010 et le 11 mars 2011, par onze salariés licenciés par la société Produc ‘ Timbres lors du même licenciement économique que celui concernant Mme X... ;
Mme X... elle-même constate la connexité des dossiers pendants devant le conseil de prud'hommes de Nanterre avec le sien, puisqu'elle libelle son contredit ainsi : " dans le motif de la décision, il est précisé « qu'il y a identité de cause et d'objet entre les procédures », ce qui est vrai. "
Il y a également identité de défendeur, s'agissant uniquement de la contestation du bien fondé de leur licenciement économique, survenu en 2010, par des salariés de la société Produc ‘ Timbres ;
Il est en conséquence de l'intérêt d'une bonne administration de la justice ainsi que l'a justement relevé le jugement entrepris, de faire instruire et juger ensemble, les affaires portées devant le conseil de prud'hommes de Nanterre et le dossier concernant Mme X..., porté devant le conseil de prud'hommes du Mans ;
Le jugement du 15 mars 2012 est confirmé en toutes ses dispositions ;
Mme X..., qui succombe sur la question de la connexité, est condamnée au paiement des frais du contredit par application des dispositions de l'article 88 du code de procédure civile et doit être déboutée de la demande qu'elle a formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
VU les articles 80 à 88, 101, 104, du code de procédure civile,
DECLARE recevable le contredit formé par Mme Idalina X... le 21 mars 2012, mais le REJETTE ;
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes du Mans du 15 mars 2012,
DEBOUTE Mme X... de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Mme X... aux frais du contredit,
DIT que le présent arrêt sera transmis par les soins du greffe de la cour au conseil de prud'hommes de Nanterre.