COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 30 Octobre 2012
ARRÊT N AL/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 01274.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 20 Avril 2011, enregistrée sous le no 09/ 00651
APPELANTE :
Madame Lysiane X...... 72370 LE BREIL SUR MERIZE
représentée par Monsieur Michel Y..., délégué syndical, muni d'un pouvoir
INTIMÉE :
Société ELRES anciennement dénommée AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTÉ 61-69, rue de Bercy 75589 PARIS
représentée par Maître Julie PLEUVRET, substituant Maître Guillaume ROLAND (SCP), avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Septembre 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne LEPRIEUR, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Anne DUFAU, conseiller Madame Anne LEPRIEUR, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 30 Octobre 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCEDURE
Mme X... a été embauchée par la clinique Sainte Croix pour travailler au sein de son unité de restauration. Son contrat de travail a été repris par la suite par la société Sodexo, puis a fait l'objet d'un transfert au sein de la société Avenance enseignement et santé à compter du 15 février 2008.
La salariée, contestant les conditions de ce transfert, a saisi la juridiction prud'homale le 12 novembre 2009 de demandes en paiement : * de rappels de salaires au titre de jours de réduction du temps de travail et congés payés afférents : 623, 78 € et 62, 38 € ; * de congés payés : 346, 50 € pour l'année 2007 ainsi que pour la période de janvier à mai 2008, et 341, 37 € pour la période de juin 2008 à mai 2009 ; * de dommages-intérêts pour non-application des dispositions de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivité relatives à la prime d'ancienneté : 1 000 €. Elle a sollicité enfin la condamnation de la société à la remise sous astreinte de bulletins de salaire ainsi que l'allocation de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société a conclu au débouté des demandes et à la condamnation de la demanderesse au paiement de la somme de 50 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 20 avril 2011 du conseil de prud'hommes du Mans et qualifié comme rendu en dernier ressort, la salariée a été déboutée de l'intégralité de ses demandes.
Mme X... a interjeté appel le 13 mai 2011.
Devant la Cour, elle renouvelle ses demandes initiales, sauf à porter à 1 000 € la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
La société Avenance enseignement et santé, désormais dénommée Elres, demande à titre principal que la Cour déclare l'appel irrecevable comme formé contre un jugement exactement rendu en dernier ressort. En effet, le conseil de prud'hommes n'a été saisi d'aucune demande de rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté mais uniquement d'une demande de dommages-intérêts. En outre, subsidiairement, à supposer même qu'une demande de rappel de salaire ait été présentée, le fait que cette demande ne soit pas chiffrée ne suffit pas à lui conférer un caractère indéterminé dès lors que le montant de la demande est aisément déterminable ; or, la demande relative à la prime d'ancienneté n'a pas été chiffrée alors qu'elle pouvait l'être et aucune demande pour l'avenir n'a été présentée ni plaidée. Par ailleurs, la demande de délivrance de bulletins de paie sous astreinte, étant la conséquence d'une demande en paiement chiffrée, ne constitue pas plus une demande indéterminée.
A titre subsidiaire, la société conclut au débouté au fond des prétentions et à la condamnation de la demanderesse au paiement de la somme de 50 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La salariée soutient quant à elle qu'une des demandes formées au titre de la prime d'ancienneté étant indéterminée, comme non limitée dans le temps, il en résulte que son appel est recevable.
MOTIFS
Aux termes des dispositions de l'article R. 1462-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes statue en dernier ressort : 1o) lorsque la valeur totale des prétentions d'aucune des parties ne dépasse le taux de la demande fixé par décret, soit 4 000 € ; 2o) lorsque la demande tend à la remise, même sous astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer, à moins que le jugement ne soit en premier ressort en raison du montant des autres demandes.
Selon l'article 40 du code de procédure civile, le jugement qui statue sur une demande indéterminée est, sauf disposition contraire, susceptible d'appel.
Mme X... a présenté devant le conseil de prud'hommes des demandes chiffrées dont le total (2 374, 03 €) n'excède pas le taux du ressort du conseil de prud'hommes. S'agissant de la prime d'ancienneté, les conclusions développées par l'intéressée devant le conseil de prud'hommes étaient ainsi libellées : (...) " Actuellement, nous ne changeons pas nos demandes concernant la prime d'ancienneté, car celle-ci sera en augmentation tout au long de la procédure. De ce fait, le Conseil de Prud'hommes ordonnera des dommages-intérêts pour la non-application de la CC article 3. 1. Attendu qu'il est demandé à Avenance la régularisation totale de la prime d'ancienneté à partir de février 2008. Nous demandons à titre conservatoire d'établir le calcul salarié par salarié de la prime d'ancienneté et son dû. " Le dispositif desdites conclusions était ainsi rédigé : (...) " DI pour non application de la CC-art. 3. 1 : prime d'ancienneté à partir de février 2008 et accord d'entreprise : 1 000 € ".
Il ressort des énonciations du jugement qu'oralement, à l'audience du conseil de prud'hommes, la salariée a sollicité, outre le paiement de dommages-intérêts, " un rappel de salaire non chiffré au titre de la prime d'ancienneté ".
Ainsi, si une demande non chiffrée a été formulée au titre de la prime d'ancienneté, il s'agissait, non d'une demande indéterminée tendant à obtenir pour l'avenir un certain mode de calcul de la prime d'ancienneté, mais d'une demande de rappel de salaire, nécessairement cantonnée dans le temps. La demande était donc déterminable. Sur son montant, il convient d'observer que la salariée se prévalait de ce que l'écart mensuel entre ce qu'elle avait perçu au titre de la prime d'ancienneté et ce qui lui était dû était de 25, 47 €, soit un total de 534, 87 € évalué au jour de la demande en justice.
Par ailleurs, si la salariée a indiqué, dans le corps des conclusions présentées en première instance, que sa rémunération avait baissé de 1 € par mois depuis le transfert, elle n'a pas articulé de demande chiffrée à ce titre. En tout état de cause, la somme éventuellement réclamée à ce titre peut être déterminée comme s'élevant à 21 € au jour de la demande en justice.
Il s'avère en conséquence que la valeur totale des prétentions de la salariée, même en prenant en compte ces demandes non chiffrées, ne dépassait pas le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes.
Enfin, s'agissant de la demande de délivrance de bulletins de paie, même sous astreinte, celle-ci constitue la conséquence nécessaire de demandes en paiement et est donc sans incidence sur l'ouverture des voies de recours.
Il en résulte que le jugement a été exactement qualifié comme rendu en dernier ressort et que l'appel est irrecevable.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Déclare l'appel irrecevable ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme X... aux dépens d'appel.