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09/10/2012 | FRANCE | N°11/00910

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 09 octobre 2012, 11/00910


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00910.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Mars 2011, enregistrée sous le no 08. 563

ARRÊT DU 09 Octobre 2012

APPELANT :
Monsieur Yann X...... 49610 MURS ERIGNE
présent, assisté de Maître Lynda LEVEQUE, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMÉES :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAINE ET LOIRE (C. P. A. M.) 32 rue Louis Gain 49000 ANGERS
représentée

par Monsieur Laurent Y..., muni d'un pouvoir

Société KEOLIS 6 rue du Bois Rinier BP 32 49124 ST BARTHEL...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00910.
Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Mars 2011, enregistrée sous le no 08. 563

ARRÊT DU 09 Octobre 2012

APPELANT :
Monsieur Yann X...... 49610 MURS ERIGNE
présent, assisté de Maître Lynda LEVEQUE, avocat au barreau d'ANGERS

INTIMÉES :
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAINE ET LOIRE (C. P. A. M.) 32 rue Louis Gain 49000 ANGERS
représentée par Monsieur Laurent Y..., muni d'un pouvoir

Société KEOLIS 6 rue du Bois Rinier BP 32 49124 ST BARTHELEMY D'ANJOU
représentée par Maître Christelle HABERT de la SCP PEROL-RAYMOND-KHANNA, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Mai 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT : prononcé le 09 Octobre 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame ARNAUD-PETIT, pour le président empêché, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

FAITS ET PROCÉDURE
Le 18 janvier 2008, M. Yann X..., conducteur-receveur de bus à la société Keolis Angers, anciennement dénommée Cotra, a effectué une déclaration de maladie professionnelle auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers (la caisse) pour " lombalgie chronique, lombosciatique S1 dte tronquée ", le certificat médical initial, établi le 3 janvier 2008, faisant état d'une date de première constatation médicale au 16 janvier 2006.
Ensuite de cette déclaration reçue par la caisse le 25 janvier 2008, et envoyée en copie à l'employeur le même jour, la société Keolis Angers, par lettre du 5 mars 2008, a fait part à la caisse de " ses plus expresses réserves " sur le caractère professionnel de la pathologie présentée par M. X....
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 18 avril 2008, la caisse a notifié à M. X... et à la société Keolis Angers le recours au délai complémentaire d'instruction prévu à l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans l'attente de la décision de son médecin-conseil.
Celui-ci se prononçant en faveur de l'existence d'une affection désignée au tableau no97 des maladies professionnelles, évoquant une " hernie discale L5- S1 Dte confirmée par IRM ", la caisse a avisé M. X... et la société Keolis Angers, par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 juin 2008, que, la condition relative à la liste limitative des travaux du tableau no97 n'étant pas remplie, elle saisissait le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Pays de la Loire (CRRMP).
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 10 juillet 2008, la caisse a notifié à M. X... son refus de prise en charge de la maladie déclarée au titre de la législation relative aux risques professionnels, dans l'attente de l'avis du CRRMP, la société Keolis Angers en étant informée, par lettre du même jour, copie de la décision de refus étant jointe.
La société Keolis Angers a renvoyé, ce 10 juillet 2008, à la caisse un courrier circonstancié à l'intention du CRRMP, qui a été retransmis à cet organisme par fax, le 15 juillet 2008.
Le CRRMP ayant finalement émis un avis défavorable, le 22 juillet 2008, la caisse a notifié à M. X..., par lettre du 30 juillet 2008, les termes de cet avis.
M. X..., le contestant, a saisi le 8 septembre 2008 la Commission de recours amiable (CRA). La caisse a informé la société Keolis Angers de cette saisine, par courrier recommandé avec accusé de réception du 16 septembre 2008, et celle-ci lui a demandé, le 6 octobre 2008, de porter ses observations tendant à un refus de reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie présentée par son salarié à la connaissance de cet organisme.
La CRA, au cours de sa délibération du 9 octobre 2008, a confirmé le refus de prise en charge, décision qui a été notifiée à M. X... par la caisse, suivant courrier recommandé avec accusé de réception du 21 octobre 2008.
M. X... a alors porté sa contestation, par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 décembre 2008, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers, qui, par jugement du 22 mars 2011 auquel il est renvoyé pour l'exposé des motifs, a :- déclaré son recours recevable mais mal fondé,- l'a débouté, en conséquence, de l'intégralité de ses demandes,- confirmé la décision en date du 9 octobre 2008 de la Commission de recours amiable de la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine-et-Loire venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers.
Cette décision a été notifiée aux parties.
M. X... en a formé régulièrement appel, par courrier recommandé avec accusé de réception posté le 1er avril 2011.
L'audience était fixée au 19 janvier 2012. La société Keolis Angers ayant sollicité un renvoi au regard de conclusions de M. X... du même jour, il lui a été accordé sur l'audience du 24 mai 2012.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions déposées le 19 janvier 2012 reprises oralement et complétées à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, M. Yann X... sollicite l'infirmation du jugement déféré et, y ajoutant, que :- à titre liminaire, il soit dit que la décision de la Caisse primaire d'assurance maladie doit être annulée pour non-respect des délais de traitement du dossier,- plus avant, il soit dit que o la maladie dont il est atteint figure au tableau no97, o cette maladie est en lien avec son activité de chauffeur de bus, o cette activité professionnelle de chauffeur de bus doit, dès lors, être portée au tableau no97, et la maladie qui en résulte doit être prise en charge par la Caisse primaire d'assurance maladie au titre des maladies professionnelles, cette dernière étant, en outre, condamnée au paiement des dépens,- subsidiairement, le caractère professionnel de la maladie soit reconnu du fait du lien avec l'activité professionnelle.
Il fait valoir que :- alors que la déclaration de maladie professionnelle a été faite le 25 janvier 2008, la caisse a dépassé les délais légaux qui lui sont impartis pour statuer, n'ayant rendu sa décision que le 30 juillet suivant,- il ne peut être contesté, de l'ensemble des pièces médicales, qu'il souffre d'une maladie désignée au tableau no97,- il démontre le lien entre cette maladie et son activité professionnelle de chauffeur de bus, le bus simple ou double exposant son conducteur, de manière journalière, au risque, identique en termes de vibrations, au camion monobloc ou semi-remorque, d'autant que le mauvais état des routes empruntées vient encore concourir à l'existence de telles vibrations,- d'ailleurs, depuis la cessation de son activité professionnelle de chauffeur de bus, il apparaît, à l'IRM, une nette régression de sa pathologie,- de fait, le cas échéant, il accepte de subir un nouvel examen par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.
* * * *
Par conclusions déposées le 13 janvier 2012 reprises oralement et complétées à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, la société Keolis Angers sollicite la confirmation du jugement déféré et que :- au principal, o il soit constaté qu'aucune des conditions relatives à la désignation de la maladie et à la liste limitative des travaux du tableau no97 des maladies professionnelles n'est remplie, o il soit dit, également, que le dossier n'aurait pas dû être soumis au Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, o il soit constaté que M. Yann X... ne rapporte pas la preuve d'une exposition aux risques visés au tableau no97, o en conséquence, M. Yann X... soit débouté de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie,- subsidiairement, si par impossible la cour faisait droit à la demande de M. Yann X..., o il soit constaté que la Caisse primaire d'assurance maladie n'a pas respecté les dispositions des articles R. 441-10, R. 441-14 ainsi que D. 461-1 à D. 461-38 du code de la sécurité sociale, ni le principe du contradictoire et des droits de la défense, o en conséquence, toutes décisions à intervenir, y compris l'arrêt de la cour, qui reconnaîtraient le caractère professionnel de la maladie de M. Yann X... lui soient déclarées inopposables, avec toutes les conséquences de droit qui en découlent.
Elle précise que :- il appartient à M. X... d'établir que o sa pathologie correspond à celle désignée au tableau considéré ; or, les éléments que comporte le certificat médical initial ne concordent pas avec ceux prévus au tableau et, la simple mention, portée apparemment par le médecin-conseil, " MP requalifiée : hernie discale L5- S1 droite confirmée par l'IRM ", n'est pas de nature, faute d'éléments complémentaires, à permettre de s'assurer qu'il s'agit effectivement d'une pathologie du dit tableau ; était applicable, dès lors, le 4ème alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, et les conditions cumulatives qu'il pose n'étant pas remplies, la CPAM ne pouvait saisir le CRRMP, o subsidiairement, ~ la conduite d'un bus n'est pas prévue dans la liste des travaux définis par le tableau no97, et il n'y a pas lieu à assimilation avec celle d'un camion monobloc, ~ de même, le CRRMP a rendu un avis très clair relativement à l'absence d'exposition au risque de M. X... dans le cadre de son activité professionnelle au sein de l'entreprise, comme le confirme la description des postes qu'il y a occupés, et M. X... n'apporte aucun élément concret ou objectif de nature à ce qu'il soit rendu un avis contraire,- la décision rendue par la CPAM, le 30 juillet 2008, lui est inopposable, en ce que la caisse a omis, préalablement, de lui communiquer l'avis du CRRMP, comme de l'informer de la clôture de la procédure d'instruction et de sa possibilité de venir consulter les pièces du dossier, ce qu'elle était dans l'obligation de faire, même pour une décision de refus de prise en charge,- aussi, elle n'a pas eu connaissance de l'avis motivé du médecin du travail qui doit pourtant figurer, en application de l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, au dossier constitué par la CPAM pour le CRRMP,- encore, la CPAM a manqué au respect du principe du contradictoire, étant dans l'obligation, à l'issue du délai complémentaire d'instruction, de l'informer de la clôture de la procédure d'instruction et de la possibilité de venir consulter les pièces du dossier,- enfin, l'arrêt de la cour lui sera également inopposable, au regard de l'irrégularité de la procédure suivie par la CPAM.
* * * *
Par conclusions déposées le 17 janvier 2012 reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, la Caisse primaire d'assurance maladie de Maine-et-Loire, venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, sollicite que :- au principal, le jugement attaqué soit confirmé en toutes ses dispositions,- subsidiairement, si la cour estime sérieuse la contestation élevée par la société Keolis Angers sur la conformité de la maladie au tableau no97, soit ordonnée une expertise médicale judiciaire, confiée à un médecin expert, avec pour mission de dire si la maladie déclarée correspond à celle visée par le tableau précité,- encore plus subsidiairement, dans l'hypothèse où l'origine professionnelle de la maladie serait reconnue, celle-ci soit déclarée opposable à la société Keolis Angers,- en tout état de cause, M. Yann X... soit condamné à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle réplique que :- le raisonnement tenu par M. X..., consistant à assimiler le bus au camion monobloc ou au tracteur routier, n'est pas recevable, en ce que la liste des travaux figurant au tableau no97 est limitative,- l'avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, saisi notamment lorsqu'une ou plusieurs conditions du tableau considéré ne sont pas remplies, s'impose à elle ; M. X..., en dehors de " la littérature médicale au sujet des TMS ", n'apporte aucun élément concret propre à sa situation qui n'ait été connu des membres du comité et qui serait de nature à remettre en cause l'avis défavorable donné,- son médecin-conseil, dont elle est tenue également de suivre l'avis, et dont le rôle ne se limite pas à un simple contrôle formel des éléments contenus au certificat médical initial, a conclu que la maladie présentée par M. X... était bien au nombre de celles désignées dans le tableau no97 ; le fait que cet avis ne soit pas motivé n'est pas de nature à le rendre inopposable à l'employeur ; au surplus, la société Keolis Angers n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause, " efficacement ", cet avis,- sur l'exception d'inopposabilité opposée par la société Keolis Angers à l'encontre o de la décision de refus de prise en charge en date du 30 juillet 2008, elle est irrecevable et mal fondée ~ irrecevable, pour défaut d'intérêt à agir, s'agissant d'un refus que l'entreprise estime elle-même fondé, de même que dépourvue d'objet, en ce que la décision de la Commission de recours amiable s'est substituée à cette décision initiale, ~ mal fondée, en ce que lorsque l'instruction aboutit à une décision de refus par la Commission de recours amiable, après appel en la cause de l'employeur, il en résulte que l'absence de la lettre de clôture d'instruction n'a pas porté, in fine, préjudice aux droits de l'employeur, o de la décision de la Commission de recours amiable en date du 21 octobre 2008, elle est irrecevable et mal fondée ~ irrecevable, pour défaut d'intérêt à agir, s'agissant d'un refus que l'entreprise estime elle-même fondé, ~ mal fondée, en ce que les dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ne s'appliquent pas devant la Commission de recours amiable, o de l'arrêt à intervenir, elle est mal fondée, en ce qu'une éventuelle décision reconnaissant le caractère professionnel de la maladie serait rendue à la suite d'un débat contradictoire auquel l'employeur est partie, et ce quand bien même la procédure administrative aurait été irrégulière du fait du non-respect du contradictoire.

MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité du recours de M. Yann X... à saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers ne fait pas débat, ayant soumis préalablement le litige à l'arbitrage de la Commission de recours amiable, conformément à l'article R. 142-18 du code de la sécurité sociale.

Sur la demande d'annulation de la décision de refus de prise en charge en date du 30 juillet 2008
L'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à l'espèce, dispose : " La caisse dispose d'un délai de.... trois mois à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration de maladie professionnelle pour statuer sur le caractère professionnel... de la maladie ". Cette disposition s'entend, sous réserve de l'article R. 441-14 du même code, selon lequel, dans sa version en vigueur au moment des faits ; " Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime... et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. À l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder... trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel... de la maladie est reconnu. En cas de saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 461-1, le délai imparti à ce comité pour donner son avis s'impute sur les délais prévus par l'alinéa qui précède. La décision motivée de la caisse est notifiée à la victime... sous pli recommandé avec demande d'avis de réception. En cas de refus, le double de la notification est envoyé pour information à l'employeur. Si le caractère professionnel... de la maladie... n'est pas reconnu par la caisse, celle-ci indique à la victime... dans la notification les voies de recours et les délais de recevabilité de sa contestation.... ".
M. Yann X... admet que, même si sa déclaration de maladie professionnelle est datée du 18 janvier 2008, le délai prévu à l'article R. 441-10 ne commence à courir qu'à compter du jour de la réception par la Caisse primaire d'assurance maladie (la caisse) de cette déclaration, ici le 25 janvier suivant, comme en témoigne le cachet d'enregistrement porté sur la dite déclaration.
Aussi, il est acquis aux débats que la caisse a fait usage du délai d'instruction complémentaire de l'article R. 441-14, M. X... ayant accusé réception du courrier recommandé l'en avisant, le 22 avril 2008, selon l'avis signé figurant au dossier de la caisse.
Ensuite, la caisse, informant toujours M. X..., celui-ci ayant signé le 27 juin 2008 l'avis de réception de la lettre à son intention (cf dossier de la caisse), a saisi, le 25 juin 2008, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Pays de la Loire (CRRMP) pour avis.
Cet avis n'ayant pu lui parvenir avant l'expiration du nouveau délai de trois mois dans lequel elle devait statuer, la caisse a notifié à M. X..., par lettre recommandée en date du 10 juillet 2008, qui lui a été distribuée le lendemain (cf avis signé au dossier de la caisse), un refus de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la pathologie déclarée, lui indiquant, dans le même pli, que ce refus était lié à la non-réception de l'avis du CRRMP,- " Toutefois, lorsque cet avis aura été rendu, je ne manquerai pas de vous informer de sa teneur. Dans l'hypothèse où un avis favorable serait donné, je reviendrais sur cette décision en vous adressant une notification de prise en charge "-. Suivait l'énoncé des voies de recours et des modalités afin de les exercer.
Dès lors, M. X... a bien eu connaissance, dans les délais légaux impartis à la caisse, de sa décision explicite de rejet de prise en charge de la maladie dont il était atteint, même si ce rejet pouvait s'avérer provisoire.
La caisse n'a, pour le reste, fait qu'appliquer les dispositions du dernier alinéa de l'article D. 461-30 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable à l'espèce, en ce que : " L'avis motivé du comité est rendu à la caisse primaire, qui notifie immédiatement à la victime... la décision de reconnaissance ou de rejet de l'origine professionnelle de la maladie qui en résulte. Cette notification est envoyée à l'employeur. Lorsqu'elle fait grief, cette notification est effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ". Elle a, ainsi, notifié à M. X..., par courrier du 30 juillet 2008, les termes de l'avis défavorable du CRRMP relativement à la prise en charge de la maladie dont il était affecté au titre de la législation professionnelle, lui précisant encore les voies de recours et leur délai d'exercice.
M. X... ne peut donc faire valoir une quelconque demande d'annulation de cette décision du 30 juillet 2008 (sanction qui, au surplus, n'est pas possible puisque non prévue par les textes), au motif qu'elle n'aurait pas été rendue dans le délai de six mois dont disposait la caisse ; on l'a dit, la décision de refus a été portée à sa connaissance dans les délais requis, et aucune disposition légale n'interdit à la caisse, après avoir rendu sa décision, de la maintenir ou de revenir sur celle-ci, l'ayant fait ici vingt jours plus tard, d'autant qu'elle y était tenue, dans les termes qui ont été rapportés.
M. X... sera, par voie de conséquence, débouté de cette demande d'annulation de la décision de la caisse du 30 juillet 2008.
Sur le caractère professionnel de la maladie déclarée
L'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale dispose : "... Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée de l'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être reconnue également d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé. Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles... ".
La société Keolis Angers conteste, en premier lieu, que la maladie dont souffre M. Yann X... soit une de celles désignées par le tableau no97 des maladies professionnelles, se rapportant en cela au certificat médical initial, en date du 3 janvier 2008, qui évoque une " lombalgie chronique, lombosciatique S1 dte tronquée ".
Le tableau no97, dont la date de création remonte à un décret du 15 février 1999, sous le titre " Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par des vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier ", regroupe, au titre de la désignation des maladies en relevant, la : " Sciatique par hernie discale L4- L5 ou L5- S1 avec atteinte radiculaire de topographie concordante " et la : " Radiculalgie crurale par hernie discale L2- L3 ou L3- L4 ou L4- L5 avec atteinte radiculaire de topographie concordante ".
Ainsi que l'indique justement la caisse primaire d'assurance maladie (la caisse), aujourd'hui de Maine-et-Loire, si le certificat médical initial ne fait en effet état que d'une " lombosciatique S1 dte tronquée ", ce diagnostic a été " affiné ", l'on dira complété, par le médecin-conseil dont elle avait sollicité l'avis, qui a conclu que la maladie dont d'agit était bien une maladie professionnelle relevant du tableau no97, portant en mention, " hernie discale L5 SI Dte confirmée par IRM ". L'avis du médecin-conseil de la caisse, pour qu'il soit opposable à l'employeur, n'a pas besoin d'être motivé.
Dès lors, la société Keolis Angers ne versant aux débats aucun élément médical de nature à remettre en cause cet avis, il n'y a pas lieu de l'accueillir en sa contestation.
L'article L. 461-1 précité précise que, pour que la maladie désignée au tableau soit présumée d'origine professionnelle, encore faut-il que cette maladie ait été contractée dans les conditions du tableau considéré, à savoir pour le tableau no97 :- dans le délai de prise en charge de " 6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 5 ans) ",- dans l'accomplissement des travaux ci-après, " exposant habituellement aux vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier o par l'utilisation ou la conduite des engins et véhicule tout terrain : chargeuse, pelleteuse, chargeuse-pelleteuse, niveleuse, rouleau vibrant, camion tombereau, décapeuse, chariot élévateur, chargeuse sur pneus ou chenilleuse, bouteur, tracteur agricole ou forestier, o par l'utilisation ou la conduite des engins et matériels industriels : chariot automoteur à conducteur porté, portique, pont roulant, grue de chantier, crible, concasseur, broyeur, o par la conduite de tracteur routier et de camion monobloc ".
Si les conditions tenant au délai de prise en charge ne sont pas en débat devant la cour, en revanche, M. X... demande à voir dire que, par assimilation, sa profession de conducteur-receveur de bus l'exposait " habituellement aux vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier ", tout comme pour " la conduite de tracteur routier et de camion monobloc ", position déniée par la société Keolis Angers comme par la caisse.
Une telle demande ne peut, en effet, prospérer, la conduite d'un bus affecté au transport en commun de personnes sur le réseau urbain de l'agglomération angevine, telle que l'effectuait M. X..., n'étant pas constitutive d'une conduite de tracteur routier et de camion monobloc au sens du tableau no97. Et, il n'est pas de la compétence du juge judiciaire de procéder par voie d'assimilation, alors d'une part, qu'il est bien précisé par le dit tableau que la liste des travaux qu'il comporte, susceptibles de provoquer ces maladies, est " limitative " et, alors d'autre part, que ce tableau, au même titre que les autres tableaux des maladies professionnelles, résulte d'un décret, donc d'un acte réglementaire.
Par voie de conséquence, en présence de l'une des maladies désignée au tableau no97, mais dont au moins l'une des conditions prévues par ce tableau, ici les travaux susceptibles de la provoquer, n'était pas remplie, la caisse se devait ainsi qu'elle l'a fait, conformément au dernier alinéa de l'article L. 461-1, de saisir le CRRMP, afin que celui-ci donne son " avis motivé " quant à savoir si la maladie en question était " directement causée par le travail de la victime ".
L'avis du CRRMP des Pays de la Loire est intervenu le 22 juin 2008 ; il est libellé en ces termes : "... absence de rapport de causalité établi entre la maladie soumise à instruction et les expositions incriminées Compte tenu :. De la pathologie présentée par l'intéressé, hernie discale L5- S1 du côté droit,. De sa profession, conducteur de bus sur lignes régulières urbaines,. De l'étude de son poste de travail sur la base des éléments apportés au CRRMP qui montrent l'absence de situations pathogènes, et après avoir entendu le représentant de l'ingénieur-conseil, chef du service de prévention de la CRAM, Le Comité ne peut établir de relation directe entre la pathologie présentée par l'intéressé et son activité professionnelle. AVIS DEFAVORABLE à la reconnaissance de la MP 97 AAM 511 du côté droit ". Par voie de conséquence, devant cet avis qui s'impose à elle, en application de l'article L. 461-1, la caisse a indiqué qu'elle ne pouvait que maintenir le rejet de la prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la maladie déclarée par M. X....
Néanmoins, il résulte de l'article L. 461-1, ainsi que de l'article R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale qui dispose pour son compte,- " Lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1, le tribunal recueille préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L. 461-1. Le tribunal désigne alors le comité d'une des régions les plus proches "-, que, dès lors que le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie, si les travaux effectués par le salarié ne figurent pas dans la liste limitative du tableau de maladie professionnelle considéré, et que la caisse a suivi l'avis d'un CRRMP, les juges du fond doivent, avant de statuer, recueillir l'avis d'un autre comité régional. Il est en tout cas inopérant, afin de s'opposer à cette nouvelle saisine, du côté de la société Keolis Angers de dire que l'avis du CRMMP, figurant au dossier, est sans ambiguïté, et du côté de la caisse de se référer au fait que M. X... n'aurait pas d'autres éléments à apporter plus pertinents que ceux déjà examinés par le premier CRRMP.
Dans ces conditions, au visa des articles L. 461-1, troisième alinéa, et R. 142-24-2 susvisés, il convient de saisir le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles du Centre, qui devra donner son avis motivé sur la maladie déclarée par M. X... en ce qu'il est établi ou pas qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Déboute M. Yann X... de sa demande d'annulation de la décision en date du 30 juillet 2008 de la Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il déclaré M. Yann X... recevable en son recours mais l'a dit mal fondé au visa de l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale,
Y ajoutant, avant dire droit,
Ordonne la saisine du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles du Centre, 25 Boulevard Jean Jaurès, Immeuble Magellan, BP 612, 45016 Orléans Cedex 1,
Dit que ce comité :- prendra connaissance des éléments de l'affaire, sollicitera et recueillera des parties toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,- indiquera, de manière motivée, si compte tenu des éléments de l'espèce, il est établi que la maladie déclarée par M. Yann X... le 18 janvier 2008, a été directement causée par son travail habituel,
Dit que ce comité déposera son rapport écrit au greffe de la cour d'appel d'Angers dans un délai de trois mois à compter de sa saisine.
Dit que le greffe transmettra, par lettre recommandée avec accusé de réception, aux parties à la cause, copie dudit rapport.
Renvoie l'affaire pour nouvelle évocation à l'audience du jeudi 21 mars 2013 à 14 heures.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00910
Date de la décision : 09/10/2012
Sens de l'arrêt : Réouverture des débats
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2012-10-09;11.00910 ?
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