COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00284.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 22 Décembre 2010, enregistrée sous le no 10/ 00215
ARRÊT DU 25 Septembre 2012
APPELANT :
Monsieur Okan X......49300 CHOLET
représenté par Maître Céline MARQUET, substituant Maître Jean Pierre BOUGNOUX (SCP), avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
Société HUIT CLOS 35 Square Raymond d'Aron La Vatine 76130 MONT ST AIGNAN
représentée par Maître Bertrand LOUBEYRE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2012 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : prononcé le 25 Septembre 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
La société Huis Clos a pour activité la rénovation de maisons individuelles, et plus particulièrement, la vente de menuiseries sur mesure et d'éléments de chauffage. Elle emploie plus de 1600 salariés répartis dans plus de 158 agences en France.
Suivant contrat de VRP du 23 février 2009 à effet au même jour, à durée indéterminée, elle a embauché M. Okan X...en qualité de représentant commercial " chauffage " avec un statut de VRP exclusif. Aux termes de ce contrat, le salarié devait réaliser un objectif de chiffre d'affaires mensuel HT d'un montant de 15 000 € le premier mois, de 20 000 € le deuxième mois et de 25 000 € les mois suivants. M. Okan X...était rattaché à l'agence de Cholet et devait exercer sa mission sur un secteur géographique défini dans un rayon de 40 kilomètres autour de cette ville.
Début août 2009, M. Patrick A...a remplacé M. Mustapha B...en qualité de directeur de l'agence de Cholet.
Par lettre recommandée du 4 septembre 2009, la société Huis Clos a notifié à M. Okan X...un avertissement en raison de l'insuffisance notable de son chiffre d'affaires du mois d'août 2009, lequel s'élevait à la somme de 4408 €.
Il ne fait pas débat qu'un nouveau découpage des secteurs est intervenu au sein de la société Huis Clos à effet au 1er octobre 2009 et que, le 29 septembre 2009 à 14 heures, se sont présentés à l'agence de Cholet : M. C. C..., le nouveau directeur de région, M. Christophe D..., le directeur des ventes alors en poste, M. Amilcar E..., le nouveau directeur des ventes devant remplacer M. D..., et M. Philippe F..., désigné pour remplacer M. A...en tant que manager de l'agence de Cholet, leur intervention ayant pour finalité d'exposer aux salariés réunis à l'agence les décisions de la direction, notamment, quant au redécoupage des zones géographiques et de leur présenter le nouveau directeur des ventes et le nouveau responsable de l'agence.
Le jour même de cette visite, vers 15 h 40, sont parvenues à l'agence de Cholet, en provenance du service juridique de la société Huis Clos, des télécopies portant convocation de quatre salariés, MM. Kacem G..., Hakan X..., Johnny N... et Barnabé H...à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 7 octobre suivant, avec mise à pied à titre conservatoire immédiate, les intéressés s'étant vus remettre ces convocations en main propre le jour même, puis notifier leur licenciement pour faute grave par courriers des 19, 20 et 21 octobre 2009.
Par lettre recommandée du 20 janvier 2010, M. Okan X...a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 27 janvier suivant, avec mise à pied à titre conservatoire immédiate.
Par lettre recommandée du 3 février 2010, il s'est vu notifier son licenciement pour faute grave tenant à une attitude déloyale, des absences injustifiées et à une insubordination à l'origine d'une importante insuffisance de résultats.
Le 19 février 2010, M. Okan X...a saisi le conseil de prud'hommes pour contester son licenciement et obtenir des rappels de salaire du chef des mois de décembre 2009 et janvier 2010, ainsi qu'au titre de la mise à pied conservatoire, une indemnité compensatrice de préavis, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité de clientèle.
Par jugement du 22 décembre 2010 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a :- dit que " le licenciement pour faute grave de M. Okan X...repose sur une cause réelle et sérieuse " ; et, motif pris de l'existence d'une faute grave l'a débouté de l'ensemble de ses prétentions au titre de la rupture du contrat de travail, de même qu'il a rejeté ses demandes de rappel de salaire au motif que la réalité des retenues invoquées pour les mois de décembre 2009 et janvier 2010 n'était pas démontrée. La société Huis Clos a été déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et M. Okan X...condamné aux dépens.
La société Huis Clos et M. Okan X...ont reçu notification de ce jugement respectivement les 7 et 10 janvier 2011. Ce dernier en a régulièrement relevé appel par déclaration formée le 3 février 2011.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 27 janvier 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Okan X...demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris ;- de juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;- en conséquence, de condamner la société Huis Clos à lui payer les sommes suivantes :
¤ 50, 96 € brut de rappel de salaire correspondant à la retenue sur le salaire du mois de janvier 2010 du chef de la journée du 30 décembre 2009 outre les congés payés afférents ; ¤ 764, 40 € brut de rappel de salaire correspondant à la retenue sur le salaire du mois de janvier 2010 du chef de la période du 5 au 20 janvier 2010 outre les congés payés afférents ; ¤ 764, 40 € brut de rappel de salaire au titre de la mise à pied du 20 janvier au 3 février 2010 outre les congés payés afférents ; ¤ 1 086, 50 € d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, ¤ 13 038 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L. 1235-5 du code du travail,
¤ 760, 55 € d'indemnité de clientèle, le tout, avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande. L'appelant sollicite également une indemnité de procédure de 1 500 € et la condamnation de l'intimée aux dépens.
Il soutient que, sous couvert de licenciements pour faute, la société Huis Clos a, en réalité, procédé, comme elle l'avait décidé, au changement de toute l'équipe commerciale de l'agence de Cholet. Il estime que la preuve de la faute grave invoquée n'est nullement rapportée.
Il conteste que la journée du 28 décembre 2009 se soit déroulée de la façon relatée par l'employeur et il dénie avoir été absent de son poste les 28 et 30 décembre, expliquant que, le 28 décembre, il a modifié son emploi du temps et son activité car, le client qu'il devait rencontrer ayant décliné le rendez-vous, il a fait du porte à porte. S'agissant du 30 décembre, il indique s'être rendu sur deux chantiers et avoir fait du phoning à l'agence. Il soutient avoir parfaitement informé son supérieur hiérarchique de ses activité lors de briefings journaliers et conteste que la baisse de son chiffre d'affaires trouve son origine dans un manque de professionnalisme, celle-ci s'expliquant, selon lui, par les effets de la crise économique internationale survenue à l'automne 2008 et qui a fortement ralenti la consommation des ménages.
Aux termes de ses écritures enregistrées au greffe le 4 juin 2012, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société Huis Clos demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, dont il ressort, en dépit du mode de rédaction du dispositif, qu'il a bien considéré que le licenciement de M. Okan X...pour faute grave était fondé ; en tout cas, de juger que ce licenciement est bien fondé sur une faute grave ; de débouter l'appelant de toutes ses prétentions et de le condamner à lui payer la somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
L'employeur expose qu'après le licenciement de ses collègues de travail intervenu en octobre 2009, M. Okan X...a fait preuve d'un comportement désinvolte et irresponsable, ne respectant aucune des consignes qui lui étaient données par sa hiérarchie de sorte que son attitude ne permettait plus, en janvier 2010, d'envisager la poursuite de la relation de travail. Il estime que la preuve des faits invoqués à l'appui du licenciement est parfaitement rapportée et que ces manquements constituent une faute grave.
A titre subsidiaire, la société Huis Clos oppose que M. Okan X..., qui comptait à peine un an d'ancienneté dans l'entreprise au moment de la rupture, ne justifie d'aucun préjudice en lien avec celle-ci, et elle conteste qu'il puisse prétendre au paiement d'une indemnité de clientèle en ce qu'il est défaillant à rapporter la preuve de la réunion des conditions exigées pour ouvrir droit à une telle indemnité, notamment celle d'un apport ou développement de clientèle, qui plus est, durable, étant observé qu'il ne bénéficiait d'aucune exclusivité géographique.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le licenciement :
Attendu que la lettre de licenciement adressée à M. Okan X...le 3 février 2010, qui fixe les termes du litige, est ainsi libellée : " Monsieur, Suite à l'entretien préalable du 27 janvier 2010 auquel vous avez été convoqué par lettre recommandée, nous vous signifions par la présente votre licenciement. Les motifs de ce licenciement sont les suivants : Pour rappel, vous êtes entré au service de la société le 23 février 2009, en qualité de représentant V. R. P. Nous vous reprochons d'avoir fait preuve d'un manque de professionnalisme et d'insubordination caractérisés dans l'exécution de vos fonctions. En effet, il s'avère que vous ne respectez pas les directives émanent de votre hiérarchie plaçant vos responsables dans l'impossibilité de suivre votre activité commerciale. Ainsi, malgré les multiples requêtes de votre animateur commercial, Monsieur Hamid I..., vous ne remplissez pas vos enquêtes de prospection ni vos bilans d'activité. Par ailleurs vous avez fait preuve d'une déloyauté caractérisée envers votre hiérarchie. Pour exemple, le 28 décembre 2009, vous avez avancé à votre animateur commercial que vous vous rendiez sur le chantier de pose du client Monsieur J.... Or, après contrôle, votre animateur a découvert que vous ne vous y étiez pas rendu. Vous n'avez prévenu ce dernier de votre absence que le lendemain par SMS. Le 30 décembre, à l'occasion du briefing journalier, Monsieur Hamid I...vous a enjoint de lui fournir un justificatif de votre absence que vous avez promis de rapporter dans l'après midi. Or, le soir même, vous n'êtes pas revenu à l'agence ni pour apporter ledit justificatif, ni pour travailler en phoning comme il était prévu. Il découle inévitablement de votre irrespect des consignes de travail, un retard commercial cumulé entre le mois d'octobre 2009 et le mois de décembre 2009. Effectivement, vous n'avez réalisé qu'un chiffre d'affaires de 9785 € alors que vous étiez sensé cumuler, au titre de votre contrat de travail, un résultat de 75000 €. Nous considérons que l'ensemble de ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise. Votre licenciement sera donc effectif dès la première présentation de cette lettre, sans préavis ni indemnité de rupture, et nous tenons à votre disposition votre certificat de travail ainsi que les salaires et indemnités de congés payés qui vous sont dus. Nous vous signalons à cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé. " ;
Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve ;
Attendu qu'il résulte des termes de ce courrier que le licenciement de M. Okan X...a été prononcé pour manque de professionnalisme, insubordination et déloyauté, et que la société Huis Clos l'a fondé sur les faits suivants :
- défaut de remise des comptes-rendus de son activité en dépit des directives de la hiérarchie,- défaut d'établissement des enquêtes de prospection et des bilans d'activité en dépit des requêtes de M. I...,- mensonge au sujet de son activité et de son emploi du temps le 28 décembre 2009, défaut d'exécution du travail prévu (RV J...et phoning du 28 décembre) ;- retard très important de chiffre d'affaires en raison du non respect des consignes ;
Attendu qu'à l'appui de ces griefs, la société Huis Clos verse aux débats les pièces suivantes :
- un courrier électronique ayant pour objet : " résolution 2010 ", adressé le 30 décembre 2009 à 18 h 42 par M. Philippe F..., nouveau directeur de l'agence de Cholet, à M. Cyril C..., nouveau directeur de région ainsi libellé : " Mr C...tout d'abord je vous souhaite tous ce qu il ya de meilleur pour l'année 2010 professionnel et perso ; je viens vers vous ma demande va etre très simple elle concerne okan je penses que comme moi cet élément vous sort de la tête, j'ai beau essayer faire l'effort mr ne respecte en rien les directives données par ou son animateur., pas de rapport, on ne sait pas ce qu'il fait, audieux, avant hier après midi mr a dit qu il était sur une pose client dimitrov j'ai contrôlé personne est passé pas de rapport ce jour. Le lendemain matin texto à hamid désolé je ne me sentais pas bien et pas de nouvelle de toutes la journée. Ce matin au brief hamid lui a demandé un justificatif : si tu veux je peux t'en ramener un. cet après midi il est 18h25 et toujours pas de nouvelle, il est encore pas au phone. Pour mon engagement sur 2010 je souhaite de toute urgence qu'il ne fasse plus parti de mon magasin, il me le pollut, il en va de la réussite de mes autres vendeurs. Mr cumul le mg Mr ygouf je compte sur vous cela a assez duree il faut savoir dire stop. " ;
- un courrier électronique adressé le 4 janvier 2010 à 11 h 03 par M. Cyril C..., à Mme Carine K...et à M. Amilcar E..., nouveau directeur des ventes, ainsi libellé : " Bonjour, suite à notre conversation téléphonique, je vous fais suivre le mail du DA que j'ai reçu pendant mes vacances concernant Okan X.... Nous n'avons plus aucun contrôle sur ce salarié, il ne remplit pas ses enquêtes de prospection, TAP, GMS alors que son responsable lui demande tous les jours. Durant ses journées il ne donne pas de nouvelles, ne fait pas les rapports demandés et ment sur son activité, par exemple sur des soit disant visites de pose. Son CA de décembre relate d'ailleurs son comportement, il a fait 4 ke. Je souhaite licencier ce salarié le plus vite possible car il pourrit le groupe et manque de respect au responsable d'agence. Je souhaite également qu'il soit mis à pied au plus vite. Le DA + pourra lui remettre en main propre le courrier dès que possible. Merci de me tenir au courant au plus vite. " ;
- un courrier électronique adressé le 17 septembre 2010 à Mme Carine K...par M. Philippe F...qui était alors devenu directeur de l'agence de La Roche-sur-Yon, libellé en ces termes : " Je t'écris ce mail pour te dire que je ne veux plus faire de courrier concernant okan, parce que I'anée derniere après mon premier courrier fait quand j'étais responsable à CHOLET, j'ai passé mon 31 décembre à 20 h à m'expliquer avec toutes sa famille frere cousin etc.
Cette histoire a faillit finir mal. bagare Je suis là pour faire mon travail et pas là pour me battre, ou trouver des gens mal intentionnees a mon domicile. Donc conclusion Je n'ai pas envie de raviver une histoire oublier sur cholet qui pourrait se reveiller un jour de promenade avec mes enfants. J'espere que tu comprenda. " ;
- des tableaux excel récapitulant les chiffres d'affaires réalisés par M. Okan X...entre août et décembre 2009 ainsi que le taux d'annulation des commandes ;
Attendu qu'aux termes de son contrat de travail, M. Okan X...était tenu d'adresser à la société chaque semaine des rapports périodiques d'activité, de tenir à jour le fichier des clients et prospects et d'informer quotidiennement son supérieur hiérarchique par téléphone ou par fax de son activité ;
Attendu que les courriers électroniques de MM. F...et C...ne sont pas de nature, à eux seuls, à faire la preuve des manquements allégués contre le salarié relativement à l'insuffisance ou à l'absence de ses rapports d'activité dans la mesure où ils émanent de ses supérieurs hiérarchiques directs, représentant l'employeur, M. C...étant l'auteur de la lettre de licenciement, et où, au surplus, ces courriers expriment en termes non voilés le désir de leurs auteurs d'aboutir sans délai au licenciement de M. Okan X...; Or attendu que ces courriers électroniques ne sont corroborés par aucun élément extérieur susceptible d'asseoir tant la réalité de l'absence de comptes-rendus d'activité, que celle des requêtes et rappels qui auraient été adressés à M. Okan X...afin qu'il remplisse ses enquêtes de prospection et renseigne ses bilans d'activité ; que l'employeur ne produit aucune pièce pour justifier des " multiples requêtes " dont il est fait état dans la lettre de licenciement et n'établit pas l'existence du moindre rappel à l'ordre à cet égard ;
Attendu que l'appelant verse quant à lui aux débats une attestation de M. Hamid I..., qui était donc son animateur commercial au moment des faits invoqués, lequel indique qu'il n'a jamais eu à s'occuper de M. Okan X...tout au long de son parcours au sein de la société Huis Clos et ajoute : " Tous les dire du courrier de licenciement ne relève pas de la réalité. " ; Que la matérialité du grief d'insubordination tenant au défaut d'établissement des enquêtes de prospection et bilans d'activité n'est donc pas établie ;
Attendu, de même, que les affirmations de M. F..., directeur d'agence, sont insuffisantes, à elles seules, à faire la preuve d'une faute de l'appelant s'agissant de la tenue de son rendez-vous avec M. J...; que M. Okan X...soutient avoir dû le reporter au lendemain à la demande du client et avoir fait du porte à porte à la place ; que la société Huis Clos ne justifie d'aucune réclamation de la part de M. J...au sujet du suivi de son chantier par M. X...ou du respect des rendez-vous fixés ; qu'en outre, aux termes du contrat de travail, le salarié avait la possibilité de tenir son employeur informé de son activité par téléphone uniquement, que la fonction de VRP implique une latitude certaine d'organisation pour le salarié et que les contre-temps dans les rendez-vous avec les clients sont inhérents à ce métier ; que l'absence injustifiée reprochée à M. Okan X...du chef de la journée du 28 décembre 2009 apparaît d'autant moins établie qu'il ressort de l'examen de ses bulletins de salaire qu'aucune retenue n'a été effectuée du chef de cette journée ; que l'appelant oppose dès lors à bon escient qu'il n'apparaît pas crédible qu'il ait pu s'engager à fournir un justificatif d'absence et à l'apporter le 30 décembre alors qu'il indique avoir travaillé le 28, que l'employeur ne rapporte pas la preuve contraire et lui a bien versé son salaire pour cette journée ;
Attendu, s'agissant de la journée du 30 décembre 2009, que l'employeur ne produit pas d'élément extérieur au courriel de M. F...pour corroborer les affirmations de ce dernier selon lesquels M. X...ne serait pas revenu à l'agence en fin d'après-midi pour faire du démarchage par téléphone ; que pour justifier de ce qu'il a bien travaillé ce jour là, ce dernier verse aux débats les témoignages de Mme Jessica L...et de M. Frédéric M..., clients, qui attestent de ce qu'il est venu à leur domicile, comme convenu, le 30 décembre 2009, ce déplacement étant, s'agissant de Mme L..., justifié par la pose des menuiseries commandées ;
Attendu qu'aux termes de la lettre de licenciement, la société Huis Clos reproche à M. Okan X...un retard commercial cumulé entre octobre et décembre 2009 en l'imputant à une attitude d'insubordination, tenant au non-respect des consignes de sa hiérarchie ; Attendu que les tableaux excel qu'elle produit au sujet des résultats réalisés par son salalrié entre le mois d'août et le mois de janvier 2010 constituent des pièces qu'elle s'est fabriquée à elle-même et qui ne sont corroborées par aucun document comptable ; Attendu que l'appelant verse aux débats des fiches de report des ventes réalisées par lui-même et ses collègues de l'agence de Cholet de juin 2007 au 18 septembre 2009 ; qu'il apparaît que les données fournies par l'employeur en termes de chiffre d'affaires pour le mois d'août 2009 sont identiques à celles fournies par M. Okan X..., à savoir un d'affaires de 8 388 € ; que l'intimée note un chiffre d'affaires nul pour le mois de septembre 2009 alors qu'il résulte des pièces produites par l'appelant qu'il a passé des commandes pour un montant de 7 582 €, étant observé qu'il ressort de son bulletin de salaire qu'il a été en congés annuels du 4 au 15 septembre 2010, puis en arrêt de travail pour accident du travail du 29 septembre au 26 octobre 20010 ; que ces circonstances permettent d'expliquer le chiffre d'affaires du mois de septembre qui n'a été que partiellement travaillé et le chiffre d'affaires nul du mois d'octobre 2010 ; qu'aucun élément objectif ne vient accréditer la thèse de la société Huis Clos selon laquelle la chute du chiffre d'affaires enregistrée en novembre et décembre 2009 (respectivement 8 127 € et 5829 € de commandes selon ses tableaux) trouverait son origine dans une attitude fautive, et plus précisément d'insubordination du salarié ;
Attendu qu'il appert de ces éléments que la société Huis Clos est défaillante à rapporter la preuve, qui lui incombe, de la réalité des manquements invoqués à l'appui du licenciement de M. Okan X...; que, par voie d'infirmation du jugement déféré, non seulement, la faute grave doit être écartée, mais la rupture doit être déclarée dépourvue de cause réelle et sérieuse ;
Attendu, la faute grave étant écartée et le licenciement jugé sans cause réelle et sérieuse, que l'appelant a droit, d'une part, au rappel de salaire du chef de la mise à pied conservatoire, d'autre part, à une indemnité compensatrice de préavis correspondant aux salaires et avantages bruts qu'il aurait perçus s'il avait
travaillé pendant cette période laquelle s'établit à un mois compte tenu de son ancienneté inférieure à un an au moment du licenciement, outre les congés payés afférents ; qu'au vu des bulletins de salaire produits, M. Okan X...est bien fondé à réclamer, à titre de rappel de salaire du chef de la période de mise à pied conservatoire, la somme de 764, 40 € outre 76, 44 € de congés payés afférents et, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 1 086, 50 €, outre 108, 65 € de congés payés afférents, ces sommes ne donnant lieu à aucune discussion ; que, par voie d'infirmation du jugement entrepris, la société Huis Clos sera condamnée à les lui payer avec intérêts au taux légal à compter du 23 février 2010, date du courrier par lequel elle a manifesté auprès du conseil de prud'hommes sa connaissance de la date de l'audience de conciliation, étant observé que l'accusé de réception de la lettre de convocation ne mentionne aucune date de remise de ce document par la Poste ;
Attendu que le VRP statutaire ne peut prétendre au paiement d'une indemnité de clientèle en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur, non fondée sur une faute grave, que s'il démontre avoir apporté, créé ou développé une clientèle durable dont il perd le bénéfice pour l'avenir ; Attendu, M. Okan X...étant totalement défaillant à justifier de l'apport, de la création ou du développement d'une telle clientèle, que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de prétention ; Attendu que le rejet de la demande d'indemnité de clientèle emporte pour les juges du fond obligation de statuer sur le droit à l'indemnité légale de licenciement qui constitue le minimum auquel le salarié peut prétendre lorsqu'il présente l'ancienneté requise, et dont le montant est inclus dans la demande d'indemnité de clientèle plus élevée et non cumulable ; Attendu que, comptant moins d'un an d'ancienneté dans l'entreprise au moment de son licenciement, l'appelant ne peut pas prétendre au paiement d'une indemnité légale de licenciement, étant observé qu'il n'élève d'ailleurs pas de prétention de ce chef à titre subsidiaire ;
Attendu, M. Okan X...comptant, au moment de la notification de son licenciement, moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, que trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail selon lesquelles le salarié peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi ; Attendu que l'intimé était âgé de 25 ans au moment de son licenciement et comptait 11 mois et une semaine d'ancienneté dans l'entreprise ; qu'en considération de sa situation particulière, de sa formation et de sa capacité à retrouver un emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 4 000 € la somme propre à réparer son préjudice que la société Huis Clos sera condamnée à lui payer avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Sur les demandes de rappels de salaire :
Attendu que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il ressort du bulletin de salaire établi par la société Huis Clos au titre du mois de janvier 2010, qu'elle a bien opéré une retenue sur le salaire de M. Okan X...pour la journée du 30 décembre 2009 ; or attendu qu'elle ne fournit aucune explication au sujet de cette retenue et ne justifie pas que l'appelant aurait été effectivement absent ; que, par les témoignages qu'il verse aux débats, ce dernier démontre au contraire qu'il a bien travaillé au cours de cette journée puisqu'il a, notamment, visité deux clients ; qu'il apparaît donc fondé à solliciter de ce chef la somme, non discutée, de 50, 96 € à titre de rappel de salaire outre 5, 09 € de congés payés afférents que, par voie d'infirmation du jugement déféré, la société Huis Clos sera condamnée à lui payer avec intérêts au taux légal à compter du 23 février 2010 ;
Attendu, par contre, comme l'ont exactement retenu les premiers juges, qu'il ressort du rapprochement des bulletins de salaire établis pour le mois de janvier 2010 et pour la période du 1er au 5 février 2010 que M. Okan X...n'a, en dépit de la mention : " Abs. non remu. VRP " portée au titre de la période du 5 au 19 janvier 2010, subi aucune retenue effective, seule ayant été retenu le salaire de la période de mise à pied conservatoire ; que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de rappel de salaire pour la période du 5 au 19 janvier 2010 ;
Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu, la société Huis Clos succombant en cause d'appel, qu'elle sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à M. Okan X...la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement entrepris étant confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. Okan X...de ses demandes de rappel de salaire pour la période du 5 au 19 janvier 2010 et d'indemnité de clientèle, et en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles ;
L'infirme en toutes ses autres dispositions, statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que le licenciement de M. Okan X...est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société Huis Clos à lui payer les sommes suivantes : ¤ 50, 96 € de rappel de salaire pour la journée du 30 décembre 2009, outre 5, 09 € de congés payés afférents, ¤ 764, 40 € de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire du 20 janvier au 3 février 2010 outre 76, 44 € de congés payés afférents, ¤ 1 086, 50 € d'indemnité compensatrice de préavis outre 108, 65 € de congés payés afférents, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 23 février 2010 ;
¤ 4 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ; ¤ 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société Huis Clos de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL