COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N
CLM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00346
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 13 Décembre 2010, enregistrée sous le no F 09/ 01173
ARRÊT DU 10 Juillet 2012
APPELANTE :
LA SOCIETE CARREFOUR HYPERMARCHES 1, rue Jean Mermoz ZAE Saint Guénault 91002 EVRY
représentée par Maître Catherine OLIVE, avocat substituant maître Daniel Julien NOEL, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
Monsieur Vincent X... ... 49770 LA MEMBROLLE SUR LONGUENEE
présent (e) assisté (e) de maître SALQUAIN, avocat au barreau d'ANGERS
LE SYNDICAT CFDT DE MAINE ET LOIRE 14, Place Louis Imbach 49100 ANGERS
représenté par Maître Bertrand SALQUAIN, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 03 Mai 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseur Madame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT : du 10 Juillet 2012, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par madame LECAPLAIN MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******
FAITS ET PROCÉDURE :
M. Vincent X..., salarié de la société Carrefour Hypermarchés, prise en son magasin d'Angers Grand Maine, a saisi le conseil de prud'hommes d'Angers afin d'obtenir la condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes à titre : ¤ de rappel de salaire lié à la rémunération des temps de pause outre les congés payés afférents, ¤ en compensation du temps d'habillage et de déshabillage, ¤ en contrepartie de l'entretien des tenues de travail.
Il demandait également, outre une indemnité de procédure, qu'il soit ordonné à la société Carrefour Hypermarchés de procéder, sous astreinte, au sein de son magasin CARREFOUR Grand Maine, à l'installation d'un appareil de pointage à l'entrée de la salle de pause.
Le syndicat CFDT de Maine et Loire est intervenu à l'instance et a sollicité la somme de 30 000 € de dommages et intérêts ainsi qu'une indemnité de procédure.
Par jugement du 13 décembre 2010 (RG no 09/ 1173) auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a :- condamné la société Carrefour Hypermarchés à payer à M. Vincent X... les sommes suivantes : 3 072, 13 € à titre de rappel de salaire, congés payés inclus, 3 € mensuel au titre de l'entretien des tenues de travail, à compter du jugement, 100 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire en application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile, et rappelé que les condamnations prononcées au titre des rémunérations et indemnités mentionnées aux articles R. 1454-14 et R. 1454-15 du code du travail étaient de plein droit exécutoires par provision dans la limite de 9 mois de salaires calculée sur la moyenne des trois derniers mois du salaire ;- débouté le salarié de sa demande relative au temps d'habillage et de déshabillage et de mise en place d'une pointeuse à l'entrée de la salle de pause ;- reçu le syndicat CFDT de Maine et Loire en son intervention volontaire et rappelé qu'il a été statué sur sa demande aux termes du jugement objet de l'affaire 09/ 01106 ;- débouté le syndicat CFDT de Maine et Loire et la société Carrefour Hypermarchés de leurs demandes formées au titre des frais irrépétibles ;- débouté les parties de leurs autres demandes considérées comme non fondées ou insuffisamment fondées " ;- condamné la société Carrefour Hypermarchés aux dépens.
La société Carrefour Hypermarchés est régulièrement appelante de ce jugement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses conclusions déposées au greffe le 26 avril 2012 soutenues oralement à l'audience, et de ses explications orales à l'audience ayant donné lieu à une note en délibéré, autorisée par la cour, enregistrée au greffe le 18 mai 2012, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société Carrefour Hypermarchés demande à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande relative au temps d'habillage et de déshabillage ;
- de l'infirmer en ses dispositions relatives au rappel de salaire alloué en lien avec la rémunération des temps de pause, de déclarer prescrite la demande de rappel de salaire en ce qu'elle porte sur la période antérieure au 22 juin 2004, de débouter le salarié pour le surplus, subsidiairement, de juger que le rappel de salaire auquel il peut prétendre en lien avec la rémunération des temps de pause s'établit à la somme de 2 104, 78 € ;
- d'infirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives à l'entretien des tenues de travail et, subsidiairement, de confirmer le jugement déféré en ce qu'à ce titre, il a alloué à l'intimé la somme mensuelle de 3 € et de fixer le point de départ de cette allocation au 28 mars 2011 ;
- de débouter M. Vincent X... de sa demande, nouvelle en cause d'appel, de rappel de salaire pour le temps passé entre la pointeuse et la salle de pause au motif qu'il ne démontre pas qu'il s'agisse d'un temps de travail effectif et en paiement d'une somme de 2000 € de dommages et intérêts pour paiement différé du rappel de salaire, au motif qu'il ne rapporte pas la preuve du préjudice allégué ;
- de le débouter de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et de condamner chaque intimé à lui payer de ce chef la somme de 800 €, sans préjudice des entiers dépens.
Pour conclure au débouté de la demande de rappel de salaire lié à la rémunération des temps de pause, l'appelante oppose tout d'abord, d'une part, qu'il est impossible de déterminer sur quels fondements juridiques l'intimé fonde ses prétentions, d'autre part, qu'il ne rapporte pas la preuve de la créance qu'il invoque. En réponse au moyen tiré de l'inopposabilité de l'article 2 du titre 18 de l'accord d'entreprise et à la critique tirée de la forfaitisation de la rémunération des temps de pause, la société Carrefour Hypermarchés fait valoir que les temps de pause sont pris en son sein et qu'elle les rémunère conformément aux dispositions conventionnelles. Elle conteste devoir rémunérer à l'intimé 3, 27 heures de temps de pause mensuel supplémentaire et argue de ce qu'il procède à cet égard par pure affirmation. Elle ajoute que les bulletins de salaire qu'elle délivre répondent aux exigences des dispositions conventionnelles en ce qu'ils comportent bien une ligne spécifique intitulée " forfait pause " au niveau de laquelle la durée de la pause est mentionnée en pourcentage, par référence à la rémunération perçue en fonction du temps de travail effectif. Elle estime que les différences qui existent entre les énonciations de ses bulletins de paie et celles figurant sur ceux délivrés par le groupe SUPER U procèdent seulement de l'usage de logiciels de paie distincts.
En second lieu, elle soutient qu'elle a, à bon droit, inclus le forfait pause, conventionnellement alloué à ses salariés, dans le salaire mensuel de référence au SMIC en ce qu'il a la nature d'un complément de salaire au sens de l'article D. 3231-6 du code du travail, devant entrer, comme tel, dans la composition du SMIC, en ce que, s'il ne rémunère pas du travail effectif, il constitue un accessoire du salaire, fixe, prévisible, général, garanti en toute occurrence au salarié, et versé en contrepartie du travail puisque le fait générateur du paiement du forfait pause est le travail fourni. S'agissant des salariés rémunérés au salaire conventionnel minimum garanti, elle oppose que les partenaires sociaux ont expressément convenu qu'il intégrerait, non seulement la rémunération du temps de travail effectif, mais aussi le forfait pause, et elle ajoute qu'elle a parfaitement respecté les grilles de salaire de référence applicables.
A la demande relative à l'entretien des tenues de travail, l'appelante rétorque que, sauf cas expressément prévus par la loi, aucune disposition, légale ou conventionnelle, ni aucun principe de portée générale n'impose à l'employeur d'assumer le coût de l'entretien des vêtements portés par les salariés dans le cadre de leur activité professionnelle ; que l'entretien d'une tenue de travail fournie par l'employeur n'entraîne pas de charges supplémentaires ou de sujétions spécifiques pour le salarié puisqu'en tout état de cause, il serait contraint d'entretenir ses propres vêtements. Elle indique, subsidiairement que, d'une part il appartient au salarié de justifier des frais réellement exposés, d'autre part, la demande faite ne peut s'entendre qu'eu égard à sa situation particulière.
Pour s'opposer à la demande formée au titre de la contrepartie au temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage, l'appelante fait valoir que le temps d'habillage et de déshabillage ne constitue pas du temps de travail effectif et qu'en application de l'article L. 3121-3 du code du travail, sous réserve que soient remplies les deux conditions posées par ce texte, ce temps donne lieu à une contrepartie sous forme financière ou de repos, déterminée par convention ou accord collectif, à défaut, par le contrat de travail ; que, conformément à ces dispositions légales, l'article 18. 5 de l'accord d'entreprise fixe une telle contrepartie en faveur des salariés astreints au port de la tenue CARREFOUR ; qu'il n'existe par conséquent aucun conflit de normes entre les dispositions légales et celles, exemptes d'ambiguïté, de l'article 18. 5, l'article L. 3121-3 exigeant seulement que la contrepartie ait été négociée par les partenaires sociaux, ce qui est le cas ; que le juge n'a pas le pouvoir d'apprécier la justesse de la contrepartie négociée et de lui substituer sa propre appréciation. Elle rappelle enfin qu'il appartient au salarié, notamment eu égard à sa situation contractuelle particulière, d'indiquer quelles sont, selon lui, les circonstances de droit et de fait susceptibles de faire naître une telle obligation à la charge de l'employeur. ****
Aux termes de leurs écritures déposées au greffe le 3 mai 2012, soutenues oralement à l'audience, et de leurs explications orales à l'audience ayant donné lieu à une note en délibéré, autorisée par la cour, enregistrée au greffe le 15 mai 2012, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, formant appel incident, M. Vincent X... et le syndicat CFDT de Maine et Loire demandent à la cour :
- de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives au rappel de salaire lié à la rémunération des temps de pause alloué à M. Vincent X... sauf, pour actualiser sa créance de ce chef compte tenu du temps écoulé, à condamner la société Carrefour Hypermarchés à lui payer la somme de 6 137, 96 € incluant celle allouée par les premiers juges et la somme demandée au titre de l'actualisation ;
- d'ordonner à la société Carrefour Hypermarchés de lui délivrer des bulletins de salaire mensuels faisant apparaître d'une part, le salaire hors temps de pause, d'autre part, la rémunération des temps de pause en plus du salaire de référence " et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard ;- de dire que, pour l'avenir, la société Carrefour Hypermarchés devra rémunérer les temps de pause en sus du salaire de référence ;- de " réserver audience au salarié en cas de difficultés sur l'apurement des comptes " ;
- d'infirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives au temps d'habillage et de déshabillage, et de condamner la société Carrefour Hypermarchés à payer de ce chef au salarié, à compter du 7 janvier 2007, une somme égale à 109, 67 heures de travail annuel au taux contractuel le concernant ;
- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a consacré le principe d'un droit à indemnité au titre de l'entretien des tenues de travail, mais l'infirmant quant au montant alloué, de condamner la société Carrefour Hypermarchés à payer de ce chef à M. Vincent X... la somme globale de 5264 € correspondant à une indemnité mensuelle de 56 € pour la période écoulée du 1er septembre 2004 au 30 juin 2012 ;
- de condamner la société Carrefour Hypermarchés à payer au salarié, " sur les cinq dernières années ", à titre de rappel de salaire pour le temps passé à parcourir la distance séparant la pointeuse de la salle de pause, une rémunération journalière correspondant à 5 minutes de travail au motif que, dans la pratique, ce temps litigieux constitue un temps de travail effectif ;
- en application des dispositions de l'article 1382 du code civil, de condamner la société Carrefour Hypermarchés à payer au salarié la somme de 2 000 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du fait que l'employeur a payé le rappel de salaire arbitré par les premiers juges en l'intégrant à son salaire du mois de mai 2011 ;
- de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions de principe à l'égard du syndicat CFDT de Maine et Loire mais, l'infirmant sur le quantum, de condamner la société Carrefour Hypermarchés à lui payer la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts ;
- de condamner la société Carrefour Hypermarchés à payer, au titre des frais irrépétibles d'appel, à M. Vincent X... la somme de 500 €, et au syndicat CFDT de Maine et Loire celle de 5000 € ;- de la condamner aux entiers dépens.
A l'appui de sa demande de rappel de salaire lié à la rémunération des temps de pause, M. Vincent X... soutient, tout d'abord, qu'il est fondé à obtenir la rémunération de l'intégralité de ses temps de pause effectifs au même taux que celui auquel est rémunéré le temps de travail effectif. Il soutient que ses plannings de travail sont toujours établis en considération des accords de 1982 prévoyant une pause d'une demi-heure par tranche de 7 heures travaillées, soit une pause de 3 minutes par heure travaillée ; qu'à la faveur du passage aux 35 heures, depuis 2001, l'employeur applique le forfait pause de 5 % prévu par la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, soit une rémunération correspondant à 7, 58 heures de travail, alors que, dans ses établissements, le temps de pause mensuel par salarié à plein temps ressort à 10, 85 heures représentant 7, 14 % du temps de travail effectif ; qu'ainsi, l'employeur se dispense de payer chaque mois, par salarié à temps plein, 3, 27 heures représentant 2, 14 % du temps de travail effectif ; que, ce faisant, la société Carrefour Hypermarchés impose à ses salariés des conditions moins favorables que celles prévues par la convention collective nationale qui limite le temps de pause à 5 % du temps de travail ; que, dans la mesure où elle s'exonère de l'obligation de payer ce temps de 3, 27 heures pourtant réellement passé dans l'entreprise, elle a intérêt à ne pas appliquer l'accord national qui limite le temps de pause à 5 % du temps de travail effectif et impose de mentionner, sur les bulletins de salaire, la durée des pauses, ce qui lui permet de mieux gérer l'amplitude horaire des salariés.
Il estime donc que les dispositions de l'article 2 du titre 18 de l'accord d'entreprise, et par voie de conséquence, la méthode de calcul adoptée par l'employeur, sont illégales et lui sont inopposables en ce qu'elles posent des conditions de rémunération moins favorables que la convention collective nationale, et qu'elles sont prises en violation des dispositions claires de l'article 5-4 de cette convention. Il soutient que, si l'employeur entend imposer des pauses plus longues, il lui incombe d'en assumer la charge financière totale et, en tout état de cause, d'en indiquer la durée sur les bulletins de salaire. Il fait grief à la société Carrefour Hypermarchés de violer, depuis 2001, les dispositions de la convention collective nationale lui imposant d'inscrire, sur le bulletin de salaire, et sur une ligne distincte, la rémunération afférente au temps de pause, mais aussi, la durée du temps de pause. Il estime que la société appelante devrait procéder comme le groupe U qui, appliquant la même convention collective, fait bien apparaître sur les bulletins de salaire de ses salariés la durée du temps de pause et sa rémunération au même taux horaire que le travail effectif.
En second lieu, il fait valoir que la société Carrefour Hypermarchés a, à tort, intégré dans le salaire de référence le forfait pause de 5 %, prévu par la convention collective pour rémunérer ses temps de pause alors qu'il ne s'agit pas d'un temps de travail effectif, de sorte que le paiement du forfait pause doit nécessairement venir en supplément du salaire de référence ; que, dès lors, elle a failli à son obligation de lui verser une rémunération au moins égale au salaire minimum de croissance ou au salaire minimum conventionnel et, par voie de conséquence, le montant dû au titre du forfait pause.
Au soutien de ses prétentions relatives à la contrepartie du temps d'habillage et de déshabillage, le salarié rappelle qu'il porte une tenue obligatoire et il fait valoir :- selon un calcul qu'il détaille dans ses écritures, qu'il passe 2x14 minutes par jour à s'habiller puis à se déshabiller, soit, en considération de 235 jours de travail par an, un total de 109, 67 heures ;- que la contrepartie fixée à une journée de 7 heures par l'accord d'entreprise n'est donc pas une contrepartie adéquate et que l'accord, moins favorable que la loi, doit dès lors être réputé non écrit, et écarté ; qu'il est bien fondé à solliciter, à titre de contrepartie, le paiement des heures passées réellement à l'habillage et au déshabillage sur la base du calcul précédemment rappelé.
S'agissant de ses demandes relatives à l'entretien des tenues de travail, il fait valoir que, dès lors qu'elle lui impose le port d'une tenue de travail, la société Carrefour Hypermarchés doit supporter le coût des frais d'entretien qui en résultent pour lui, ceux-ci étant exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur.
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Le 1er juin 2012, le salarié intimé et le syndicat CFDT Maine et Loire ont fait parvenir à la cour une note en délibéré dite No2 datée du 30 mai 2012.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1) Sur les notes en délibéré des intimés
Attendu que la cour a autorisé les intimés à lui adresser une note en délibéré destinée à ce qu'ils explicitent, d'une part, leur nouveau moyen développé oralement à l'audience tiré du non paiement de l'intégralité des temps de pause et de l'inopposabilité de l'article 2 du titre 18 de l'accord d'entreprise CARREFOUR, d'autre part, leurs prétentions chiffrées ; que la cour a autorisé la société Carrefour Hypermarchés à répondre à cette note en délibéré ; qu'ainsi, les intimés ont fait parvenir une note en délibéré datée du 11 mai 2012, enregistrée au greffe le 15 mai suivant, tandis que l'employeur a répondu par note enregistrée au greffe le 18 mai 2012 ;
Attendu qu'aux termes de leur première note en délibéré, outre les explications sollicitées, les intimés demandent à la cour de " solliciter de la Société CARREFOUR, pour chacun des salariés, dans la limite de 5 années pleines antérieures au dépôt de la requête, à produire sous astreinte, de 50 Euros par salarié et par jour de retard, des bulletins de salaire faisant apparaître :- le temps de travail effectif-la durée et le paiement des temps de pause pour chaque salarié. " ;
Attendu que, contrairement à ce qu'ils indiquent dans leur note en délibéré, cette demande de production, telle que libellée, n'a pas été formée à l'audience, la demande alors formulée étant celle, énoncée en page 26 de leurs conclusions enregistrées au greffe le 3 mai 2012, non reprise au dispositif, ainsi libellée : " ordonner à la société Carrefour Hypermarchés sous astreinte de 50 € par salarié et par jour de retard de délivrer aux salariés des bulletins de salaire mensuels faisant apparaître :- le salaire de chaque salarié hors temps de pause-la rémunération des temps de pause en sus du salaire de référence de chaque salarié " ; Attendu, outre qu'aucune note en délibéré n'a été autorisée au sujet de la délivrance des bulletins de salaire, qu'aucune demande n'est recevable après la clôture des débats à l'audience, étant souligné que, convoquées depuis le mois d'octobre 2011, les parties ont amplement disposé du temps nécessaire pour soumettre en temps utile leurs prétentions à la cour ; que la demande de production, telle que libellée aux termes de la note en délibéré no 1 sera donc déclarée irrecevable ;
Attendu, s'agissant de la note en délibéré no 2 des intimés, en date du 30 mai 2012, enregistrée au greffe le 1er juin 2012, qu'elle sera rejetée des débats en ce qu'elle n'a pas été autorisée ;
2) Sur la demande de rappel de salaire lié à la rémunération des temps de pause :
Sur le moyen tiré du non-paiement de l'ensemble des temps de pause effectifs :
Attendu que les intimés affirment, à la faveur du calcul suivant : " 0, 5 heure de pause x 5 jours x 4, 34 semaines = 10, 85 heures ", qu'au sein de l'entreprise CARREFOUR, un salarié à temps plein comptabilise au moins 10, 85 heures de pause par mois, soit 3, 27 heures de plus que les 7, 58 heures rémunérées via le forfait pause de 5 % ; qu'ils estiment que l'employeur doit leur payer ce temps de 3, 27 heures effectivement passé dans l'entreprise, comme du temps de travail effectif ; Qu'à titre d'exemple, ils indiquent qu'un salarié à temps plein qui perçoit un salaire de base mensuel de 1316, 50 € et un forfait pause d'un montant de 65, 83 € équivalent à 5 % du temps de travail effectif, soit à 7, 55 heures rémunérées, devrait en réalité percevoir, au titre de la rémunération de ses temps de pause, la somme suivante : " 10, 85 heures x 8, 71 € = 105, 35 € ", soit une créance mensuelle de 39, 52 € au titre de la rémunération des temps de pause
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Attendu que la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, étendue par arrêté du 26 juillet 2002, dont l'application à l'espèce n'est pas contestée, mais au contraire expressément revendiquée par les salariés, dispose en son article 5. 4 intitulé " Pauses " : " On entend par " pause " un temps de repos-payé ou non-compris dans le temps de présence journalier dans l'entreprise pendant lequel l'exécution du travail est suspendue. La " coupure " interrompt la journée de travail de façon collective (fermeture de l'établissement) ou individuelle (temps imparti par roulement, pour le déjeuner par exemple). Les pauses et coupures sont fixées au niveau de chaque entreprise ou établissement en fonction de l'organisation du travail qui y est en vigueur. Une pause payée est attribuée à raison de 5 % du temps de travail effectif. Les conditions de prise des pauses sont fixées au niveau de chaque entreprise ou établissement. A défaut d'entente sur ce point, tout travail consécutif d'au moins 4 heures doit être coupé par une pause payée prise avant la réalisation de la 5e heure. Il est, en outre, rappelé qu'en application de l'article L. 220-2 du code du travail aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre 6 heures sans que le salarié bénéficie d'une pause d'une durée minimale de 20 minutes.... La durée des pauses et le paiement correspondant doivent figurer sur une ligne distincte du bulletin de paie. " ;
Attendu que l'article 5. 5 de la convention collective nationale précitée énonce quant à lui : " La durée du travail s'entend du travail effectif tel que défini à l'article L 212-4 du code du travail. Elle ne comprend donc pas l'ensemble des pauses (ou coupures), qu'elles soient ou non rémunérées, notamment celles fixées à l'article 5. 4 ci-dessus. " ;
Attendu que l'accord collectif d'entreprise CARREFOUR du 31 mars 1999 prévoit quant à lui en son article 2, intitulé " Pauses " du titre 18 " Organisation du travail " : " La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles. Les interruptions du temps de travail telles que les pauses, les coupures, les temps de restauration,... sont pointées. Pendant celles-ci, le salarié n'est pas à la disposition de l'employeur et peut donc vaquer librement à ses occupations personnelles. Tout travail d'une durée continue au moins égale à 4 heures donnera droit à une pause d'un quart l'heure. Lorsque le travail sera effectué d'une façon continue pendant six heures, une pause de vingt minutes sera accordée. Lorsque le travail sera effectué d'une façon continue pendant sept heures ou plus, une pause d'une demi-heure sera accordée. Les salariés effectuant un horaire quotidien de travail continu inférieur à 4 heures bénéficieront, s'ils le souhaitent, d'une pause d'une durée de 9 minutes. A l'exception de ce dernier alinéa, la pause doit se situer dans la plage médiane de la période de travail. Les temps de pause s'inscrivant dans le temps de présence, au delà du temps de travail effectif, sont rémunérés forfaitairement sur la base de 5 % de la rémunération des heures travaillées. " ;
Attendu qu'il résulte du rapprochement de ces textes que les dispositions de l'accord d'entreprise CARREFOUR sont la stricte reprise de celles de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, sauf pour l'accord d'entreprise à déterminer, conformément aux dispositions de l'alinéa 5 de l'article 5. 4 de l'accord national, les conditions de prise des pauses ;
Attendu qu'il ressort tant de l'accord national, que de l'accord d'entreprise que les temps de pause ne sont pas du temps de travail effectif en ce que, durant ces périodes, les salariés ne sont pas à la disposition de l'employeur et peuvent vaquer librement à leurs occupations personnelles ; qu'il résulte des débats que tel est bien, en fait, la situation des salariés de la société Carrefour Hypermarchés au cours de leurs temps de pause ;
Attendu que l'article 5. 4 de la convention collective nationale, qui ne traite pas de la durée des pauses, ne détermine pas une durée de temps de pause devant être attribuée aux salariés et ne limite pas la durée de la pause mensuelle à 5 % du temps de travail effectif, mais prévoit au bénéfice des salariés, indépendamment donc des temps de pause pouvant être effectivement en vigueur dans l'entreprise ou des temps de pause effectivement pris, l'attribution d'une pause payée à raison de 5 % du temps de travail effectif ;
Attendu que l'article 2 du titre 18 de l'accord d'entreprise est la stricte application de la règle ainsi définie au niveau de la convention collective nationale ; que les intimés sont donc mal fondés à soutenir que ce texte contiendrait des dispositions moins favorables que celles de l'accord national ou de la loi ;
Attendu que cette dernière n'impose pas à l'employeur de payer le temps de présence dans l'entreprise dès lors qu'il ne s'agit pas d'un temps de travail effectif, mais d'un temps au cours duquel le salarié n'est pas à la disposition de l'employeur et peut vaquer librement à ses occupations personnelles ; Qu'à supposer établie la réalité des temps de pause invoqués par les intimés, en vertu des dispositions légales et des dispositions conventionnelles applicables, le salarié n'est pas fondé à solliciter, au titre des temps de pause, dont il est acquis aux débats qu'il ne s'agit pas de temps de travail effectif, une rémunération excédant le montant du forfait pause qui lui est conventionnellement attribué aux termes des négociations collectives ;
Or attendu qu'il résulte tant des débats que de l'examen des bulletins de salaire produits, lesquels comportent une ligne intitulée " forfait pause " distincte de celle afférente au " salaire mensuel de base ", que la société Carrefour Hypermarchés règle bien chaque mois à ses salariés, au titre du forfait pause, une somme égale à 5 % du salaire mensuel de base énoncé en première ligne du bulletin de salaire ;
Que la demande d'inopposabilité de l'article 2 du titre 18 de l'accord d'entreprise doit donc être rejetée, et que la demande de rappel de salaire est mal fondée sur ce premier moyen, l'éventuelle renégociation de la durée des pauses et de la rémunération de l'intégralité des temps de pause au sein de l'entreprise relevant d'un autre débat ;
Sur le moyen tiré du non-respect du SMIC ou du salaire minimum conventionnel :
Attendu que les intimés font grief à la société Carrefour Hypermarchés d'intégrer la rémunération des temps de pause dans le salaire de référence ce qui induirait une rémunération inférieure au minimum tant conventionnel que légal
Attendu qu'il résulte des dispositions de la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire que les partenaires sociaux ont expressément inclus dans les éléments de rémunération devant être pris en compte au titre du minimum conventionnel le forfait pause de 5 % prévu à l'article 5. 4 ; qu'il s'ensuit que les intimés sont mal fondés à critiquer l'intégration de ce forfait dans le salaire conventionnel de référence et à soutenir qu'il en serait résulté une atteinte à ce minimum conventionnel ;
Que, dès lors, la seule atteinte dont ils peuvent se prévaloir, le cas échéant, est celle qui affecterait le salaire minimum de croissance ;
Attendu qu'aux termes de l'article L. 3231-2 du code du travail, " Le salaire minimum de croissance assure aux salariés dont les rémunérations sont les plus faibles : 1o La garantie de leur pouvoir d'achat ; 2o Une participation au développement économique de la nation. " ;
Attendu qu'en application des articles L. 3232-1 et L. 3232-3 du même code, le salaire minimum de croissance doit être égal, pour les salariés dont l'horaire de travail est au moins égal à la durée légale hebdomadaire, au produit du montant du salaire minimum de croissance tel que fixé en application des articles L. 3231-2 à L. 3231-12, par le nombre d'heures correspondant à la durée légale hebdomadaire pour le mois considéré ;
Attendu qu'en vertu de l'article L. 3221-3 du code du travail, la rémunération versée au salarié est constituée par le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous les autres avantages et accessoires qui lui sont payés par l'employeur, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, en raison de l'emploi qu'il occupe ;
Attendu que l'article D. 3231-6 précise que le salaire horaire à prendre en considération pour déterminer si le salarié a été rempli de ses droits au moins au titre du salaire minimum de croissance est celui qui correspond à une heure de travail effectif compte tenu des avantages en nature et des majorations diverses ayant le caractère d'un complément de salaire, les sommes versées à titre de remboursement de frais, les majorations pour heures supplémentaires prévues par la loi et la prime de transport étant expressément exclues de l'assiette de calcul ;
Attendu que la durée du travail effectif est définie par l'article L. 3121-1 du code du travail comme le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; Attendu, comme la cour l'a précédemment relevé, que l'article 5. 4 de la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, applicable en l'espèce, instaure au profit des salariés l'attribution d'une pause payée à raison de 5 % du temps de travail effectif ; que l'article 5. 4 définit expressément la pause comme " un temps de repos-payé ou non-compris dans le temps de présence journalier dans l'entreprise pendant lequel l'exécution du travail est suspendue. " ;
Que l'article 5. 5 énonce quant à lui que la durée du travail s'entend du travail effectif tel que défini à l'article L. 212-4 du code du travail (devenu L. 3121-1) et précise expressément qu'elle ne comprend " donc " pas l'ensemble des pauses (ou coupures), qu'elles soient ou non rémunérées ;
Et attendu qu'il n'est contesté ni par l'appelante, ni par les intimés que, dans les faits, durant les temps de pause, les salariés de la société Carrefour Hypermarchés vaquent librement à leurs occupations personnelles sans être à la disposition de l'employeur et sans avoir à se conformer à ses directives ;
Attendu qu'en considération de ces données de droit et de fait, dès lors qu'il est constant que, pendant les pauses, les salariés ne sont pas à la disposition de la société Carrefour Hypermarchés de sorte que celles-ci ne constituent pas du temps de travail effectif, les sommes les rémunérant, qui ne sont pas la contrepartie du travail, sont exclues du salaire devant être comparé au SMIC ; que c'est donc à tort, comme l'ont retenu les premiers juges, que la société Carrefour Hypermarchés a intégré le forfait pause de 5 % aux éléments de salaire devant servir de base à la comparaison au SMIC ;
Attendu que les intimés demandent à la cour de " dire que, pour l'avenir, la société Carrefour Hypermarchés devra rémunérer les temps de pause en sus du salaire de référence " ; attendu qu'il n'appartient pas à la cour, qui a tranché les questions qui lui sont soumises au sujet de l'intégration du forfait pause dans le salaire de référence, de dicter à l'employeur son comportement pour l'avenir
Sur les rappels de salaire :
Attendu qu'il résulte des énonciations du jugement déféré qu'en première instance, la somme réclamée à titre de rappel de salaire et son mode de détermination n'ont pas donné lieu à débat, de sorte que le salarié a été rempli de ses prétentions ;
Attendu que la société appelante la discute en cause d'appel ; que le salarié indique que sa créance, telle que soumise aux premiers juges, est justifiée par les tableaux initialement produits et qu'il verse à nouveau aux débats en cause d'appel ; qu'il précise que l'actualisation qu'il sollicite a été déterminée " en multipliant le nombre de mois écoulés entre la dernière actualisation opérée devant le Conseil de prud'hommes et juin 2012, Ia moyenne mensuelle des sommes dues au titre de la rémunération des temps de pause. " (page 25 des écritures) ;
Attendu que le rappel de rémunération auquel peut prétendre chaque salarié qui n'a pas été rempli de ses droits pour avoir perçu une rémunération inférieure au SMIC correspond, mois par mois au titre de la période considérée, à la différence entre le salaire minimum de croissance qui devait lui être versé en considération de ses heures de travail effectif et le salaire mensuel de base hors forfait pause qui lui a été versé, outre les incidences nécessairement induites, notamment sur les congés payés afférents et le montant du forfait pause puisque celui-ci est proportionnel à la rémunération du temps de travail effectif ; Qu'il convient de préciser que les bulletins de salaire délivrés par la société Carrefour Hypermarchés comportent les mentions suivantes :- sur la première ligne : " salaire mensuel de base " suivi du nombre d'heures de travail effectif et du montant correspondant,- sur la deuxième ligne : " forfait pause ", le montant du salaire de base, " 5 % ", et le montant induit du forfait pause ;
Attendu, le conseil de prud'hommes ayant été saisi le 22 juillet 2009, qu'en application de la prescription quinquennale instituée par l'article L. 3245-1 du code du travail pour agir en paiement ou en répétition du salaire, la demande de M. Vincent X... doit être déclarée irrecevable comme prescrite en ce qu'elle porte sur des salaires antérieurs au 22 juillet 2004 ;
Attendu, pour le surplus, qu'il ressort des tableaux produits, établis à partir des bulletins de salaire non utilement contestés, et rapprochés des taux horaires du SMIC successivement applicables au cours de la période considérée, que M. Vincent X... n'est pas fondé à prétendre à une créance de rappel de rémunération excédant la somme de 2 104, 78 € que la société Carrefour Hypermarchés reconnaît lui devoir et ce, pour la période du 4 mars 2005, date de son embauche et du début de son décompte, au 31 décembre 2008, date d'arrêt de son décompte ;
Et attendu que, faute pour M. Vincent X... d'étayer sa demande de rappel de salaire formée au titre de la période écoulée entre le 1er janvier 2009 et le 30 juin 2012, puisqu'aucune pièce n'est produite, ce chef de prétention ne peut qu'être rejeté ;
Que, par voie d'infirmation du jugement déféré, M. Vincent X... sera donc déclaré irrecevable en sa demande de rappel de salaire pour la période antérieure au 22 juillet 2004 et la société Carrefour Hypermarchés condamnée à lui payer la somme de 2 104, 78 € à titre de rappel de salaire pour la période du 4 mars 2005 au 31 décembre 2008 ;
Attendu que le présent arrêt, infirmatif sur ces points, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées par l'appelante en exécution du jugement déféré, et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, de la présente décision ;
Sur la demande de délivrance de bulletins de salaire :
Attendu que l'intimé demande à la cour d'" ordonner à la société Carrefour Hypermarchés de lui délivrer des bulletins de salaire mensuel faisant apparaître d'une part, le salaire hors temps de pause, d'autre part, la rémunération des temps de pause en plus du salaire de référence " et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard ;
Attendu qu'il résulte des bulletins de salaire versés aux débats que les bulletins de paie délivrés par la société Carrefour Hypermarchés à ses salariés, notamment à l'intimé, comportent bien une ligne distinguant le montant alloué au titre du forfait pause des autres éléments de la rémunération, notamment du salaire de base ; que la critique tirée du fait que les bulletins de salaire ne feraient pas apparaître le salaire de chacun hors temps de pause n'apparaît donc pas fondée ;
Attendu qu'en conséquence des développements qui précèdent, les salariés rémunérés au SMIC sont par contre bien fondés à solliciter de la société Carrefour Hypermarchés qu'elle leur délivre des bulletins de salaire faisant apparaître la rémunération des temps de pause en dehors du salaire de référence ; qu'il sera donc ordonné à la société Carrefour Hypermarchés de délivrer au salarié intimé, au titre des périodes au cours desquelles il a pu être rémunéré au SMIC, comprises entre le 4 mars 2005, date de son embauche, et le 30 juin 2012 des bulletins de salaire faisant apparaître la rémunération des temps de pause en dehors du salaire de référence et ce, sous astreinte, selon les modalités qui seront définies au dispositif du présent arrêt ;
3) Sur l'entretien des tenues de travail :
Attendu qu'il ne fait pas débat que M. Vincent X... est astreint à porter les vêtements fournis par son employeur dans le cadre de l'exécution de la prestation de travail ;
Attendu qu'indépendamment des dispositions de l'article L. 231-11 du code du travail, nouvellement codifié à l'article L. 4122-2, selon lesquelles les mesures relatives à la sécurité, l'hygiène et la santé au travail ne doivent en aucun cas entraîner des charges financières pour les salariés, il résulte des dispositions combinées des articles 1135 du code civil et L. 121-1 du code du travail, ce dernier nouvellement codifié sous les articles L. 1221-1 et L. 1221-3, que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de son employeur doivent être supportés par ce dernier ;
Qu'en outre, s'agissant de frais professionnels, leur paiement peut être réclamé dans la limite de la prescription quinquennale de l'article L. 3245-1 du code du travail en ce qu'il s'agit de sommes en lien avec l'exécution de la prestation de travail ;
Attendu que le caractère obligatoire du port d'une tenue de travail, inhérent à l'emploi des salariés, a pour conséquence que les frais de nettoyage des vêtements portés par les intéressés à l'occasion de leur emploi doivent être pris en charge par l'employeur, peu important que le port de cette tenue professionnelle soit imposé pour des raisons de santé, de sécurité, ou pour de toutes autres considérations purement commerciales ;
Que la société Carrefour Hypermarchés sera, en conséquence, condamnée à s'acquitter des frais de nettoyage des tenues de travail que les salariés ont dû jusqu'à présent assumer ;
Attendu qu'elle argue de ce qu'elle prend en charge les frais de nettoyage des tenues de travail de certains de ses salariés, affectés à divers rayons spécifiques ; qu'elle en justifie par la production de deux " contrat (s) cadre de prestations de service pour la location-entretien de vêtements professionnels et linge " conclus avec un prestataire extérieur, la société Elis, le premier du 21 décembre 2005 concernant les rayons boucherie, charcuterie, poissonnerie, boulangerie, pâtisserie, légumes et fruits, le second du 17 novembre 2008 concernant les rayons fromage, point chaud, charcuterie, rôtisserie, poissonnerie, boulangerie, pâtisserie, cafétéria ;
Attendu que les salariés rétorquent, sans être contredits, que ce n'est pas la totalité de la tenue de travail qui est l'objet d'un entretien de la part de l'employeur, mais uniquement certaines pièces spécifiques aux rayons concernés
Attendu qu'en considération de ces données, des éléments et explications fournis, la société Carrefour Hypermarchés sera condamnée à indemniser l'ensemble des salariés de leurs frais d'entretien des tenues de travail, sauf à opérer, quant au montant alloué, une distinction entre ceux qui bénéficient de prestations de pressing via l'entreprise, et ceux qui n'en bénéficient pas ;
Attendu que, s'il appartient dans le principe à la société Carrefour Hypermarchés, vu la nature des frais dont s'agit, de décider des modalités de leur prise en charge, en revanche elle ne peut pas fixer unilatéralement les conditions de prise en charge en deçà de leur coût réel ; Attendu qu'à l'appui de sa demande chiffrée à la somme mensuelle de 56 €, l'intimé produit, en tout et pour tout, des tarifs de pressing et de laverie automatique obtenus sur internet ;
Attendu qu'à défaut pour lui de justifier d'un quelconque recours effectif au pressing, il convient de retenir une indemnisation sur la base du lavage en machine ; que, compte tenu, du nombre de pièce s que comporte le kit " tenues de travail " fourni par la société Carrefour Hypermarchés, jusqu'à quatorze pour les caissières, de la nature des vêtements dont les salariés assument l'entretien (tee-shirts, pantalons, jupes, gilet de type polaire et doudoune...), du fait qu'un salarié doit se présenter en tenue de travail impeccable, ce qui impose, pour les pièces de base, un lavage bi-hebdomadaire et au minimum hebdomadaire, compte tenu encore de la lessive nécessaire, de la consommation d'énergie, de l'usure des machines utilisées, du temps requis, mais aussi des périodes d'absence des salariés, la cour trouve dans la cause les éléments nécessaires pour allouer à M. Vincent X..., lequel ne bénéficie pas d'une prestation de pressing, la somme mensuelle de 15 € au titre de l'entretien de ses tenues de travail ;
Que, par voie d'infirmation du jugement entrepris, la société Carrefour Hypermarchés sera donc condamnée à lui payer de ce chef la somme de 1 320 € pour la période du 4 mars 2005, date de son embauche, au 30 juin 2012 ;
4) Sur les demandes relatives au temps d'habillage et de déshabillage :
Attendu qu'aux termes de l'article L. 3121-3 du code du travail, " Le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties. Ces contreparties sont accordées soit sous forme de repos, soit sous forme financière, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, par des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail. Ces contreparties sont déterminées par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par le contrat de travail, sans préjudice des clauses des conventions collectives de branche, d'entreprise ou d'établissement, des usages ou des stipulations du contrat de travail assimilant ces temps d'habillage et de déshabillage à du temps de travail effectif. " ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que, sous réserve des deux conditions qu'il pose, la loi renvoie les partenaires sociaux à déterminer, par voie conventionnelle ou contractuelle, la contrepartie due aux salariés pour compenser le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage et à en fixer la mesure ;
Qu'en l'espèce, l'article 5 intitulé " Habillage/ déshabillage " du titre 18 de l'accord d'entreprise CARREFOUR du 31 mars 1999 prévoit : " La loi Aubry II du 19 janvier 2000 stipule : Lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions législatives ou réglementaires, par des clauses conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties... En conséquence les employés de magasin et de service après vente bénéficient au titre de chaque période de décompte annuel d'un forfait d'un jour ouvré sur la période de décompte annuel suivante. Ce jour peut être pris ou payé, au choix du salarié.... Il est rappelé que le temps nécessaire aux opérations d'habillage et déshabillage n'est pas considéré comme du temps de travail effectif. Dans le cas contraire, cette disposition ne s'applique pas...... " ;
Attendu qu'il résulte de ces dispositions, dépourvues d'ambiguïté que, nonobstant l'incertitude, révélée par les débats, de l'obligation faite ou non aux salariés de s'habiller et de se déshabiller sur le lieu de travail, la société Carrefour Hypermarchés et les représentants des salariés ont convenu de compenser le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage par l'octroi d'un jour ouvré pris ou payé ; Attendu, l'accord ainsi conclu étant la stricte application des dispositions légales, voire plus favorable à celles-ci quant à l'ouverture du droit à l'attribution d'une contrepartie, que les intimés sont mal fondés en leur demande tendant à leur voir déclarer inopposable l'article 5 du titre 18 de l'accord d'entreprise CARREFOUR ; attendu que la mesure de la contrepartie convenue après négociations, fixée en l'occurrence forfaitairement à un jour ouvré fait la loi entre l'employeur et les salariés, et le juge n'a le pouvoir ni d'en apprécier la justesse, ni de l'écarter pour lui substituer sa propre appréciation de la contrepartie du temps nécessaire visé à l'article L. 3121-3 du code du travail ;
Que le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté M. Vincent X... de sa demande formée au titre de la contrepartie du temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage ;
5) Sur la rémunération du temps passé entre la pointeuse et la salle de pause :
Attendu que, concédant que le juge ne peut pas imposer à l'employeur de placer la pointeuse à un endroit précis, le salarié abandonne ce chef de prétention en cause d'appel et sollicite désormais la rémunération du temps qui lui est nécessaire pour rejoindre la salle de pause depuis la pointeuse, étant précisé qu'il est acquis aux débats que, lorsqu'il prend sa pause, il a l'obligation de pointer et, ne rejoint qu'ensuite la salle dite de pause ;
Attendu que les débats ont permis de confirmer les propos de la société Carrefour Hypermarchés selon lesquels les salariés disposent de pointeuses à différents emplacements par rapport à leurs rayons ; que, nonobstant cet élément de fait, l'employeur reconnaît que tous les salariés doivent accomplir, de la pointeuse jusqu'à la salle de pause, un trajet de durée variable qui les contraint à passer par la zone commerciale ;
Attendu que, conformément à la convention collective applicable, de même qu'à l'accord d'entreprise Carrefour, et même s'ils sont rémunérés de manière conventionnelle, les temps de pause ne sont pas du temps de travail effectif, en ce que les salariés peuvent vaquer librement à leurs occupations personnelles, sans être à la disposition de l'employeur et tenus de se conformer à ses directives ; Qu'à l'appui de sa demande tendant à voir rémunérer le temps qu'il passe de la pointeuse à la salle de pause, le salarié soutient qu'il s'agit bien d'un temps de travail effectif et, par voie de conséquence, à rémunérer comme tel, en ce que, vêtu de sa tenue de travail et évoluant dans le magasin, il serait confronté aux demandes des clients, auxquelles ils ne pourraient se dérober compte tenu de ses obligations contractuelles ;
Mais attendu qu'il procède à cet égard par voie d'affirmation sans verser aux débats une quelconque pièce de nature à corroborer ses allégations et à établir qu'il serait effectivement, au cours de ce temps litigieux, en action de travail, à la disposition de l'employeur et tenu de se conformer à ses directives ; que la circonstance qu'il soit astreint au port d'une tenue de travail ne permet pas, à elle seule, de considérer qu'un temps de déplacement au sein de l'entreprise, et même dans la zone commerciale, constitue un temps de travail effectif ;
Que, dans ces conditions, il y a lieu de débouter M. Vincent X... de sa demande de rappel de salaire au titre de la rémunération du temps passé entre la pointeuse et la salle de pause ;
6) Sur la demande de dommages et intérêts liée au paiement différé du rappel de salaire :
Attendu qu'à l'appui de sa demande de dommages et intérêts, nouvelle en cause d'appel, le salarié intimé fait valoir que, par lettre officielle du 22 avril 2011, son conseil a sollicité de la société Carrefour Hypermarchés, conformément aux règles déontologiques réglementant la profession d'avocat, le paiement des sommes allouées par le conseil de prud'hommes entre ses mains et par chèque à l'ordre de la CARPA ; que, nonobstant cette demande officielle, la société appelante lui a réglé directement la somme " ordonnée " par le conseil de prud'hommes et ce, en ajoutant une ligne sur son bulletin de salaire du mois de mai 2011 ; qu'il soutient qu'un tel mode de paiement est pour lui à l'origine d'un préjudice en ce qu'intervenant en bloc au lieu d'être étalé sur cinq années, comme tel aurait dû être le cas, il emporte un changement de tranche vis à vis de l'administration fiscale et une perte de leurs droits auprès de la caisse d'allocations familiales ;
Mais attendu, comme le fait observer la société Carrefour Hypermarchés, que M. Vincent X..., qui procède par voie d'affirmation pour invoquer un changement de tranche fiscale ou la perte de droits au titre des allocations familiales, ne produit aucune pièce pour tenter d'établir la réalité du préjudice qu'il invoque ; que cette preuve fait d'autant plus défaut que sa demande de rappel de salaires est finalement rejetée en cause d'appel ; que ce chef de demande sera donc rejeté ;
7) Sur l'intervention du syndicat CFDT de Maine et Loire :
Attendu qu'en résistant de manière injustifiée et de façon persistante aux réclamations légitimes des salariés et du syndicat CFDT de Maine et Loire relatives au respect des dispositions légales en matière de salaire minimum de croissance, et au traitement corrélatif du versement du forfait pause, ainsi qu'à celles concernant les frais d'entretien des tenues de travail dont elle impose le port, la société Carrefour Hypermarchés a causé aux intérêts collectifs que défend le syndicat CFDT de Maine et Loire un préjudice dont la cour a assuré la réparation aux termes de l'arrêt rendu ce jour dans l'instance enregistrée au répertoire général sous le no 11/ 314 ensuite de l'appel interjeté contre le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Angers le 22 novembre 2010 (RG no 09/ 1106) ;
Qu'il convient donc de déclarer bien fondée en son principe la demande du syndicat CFDT de Maine et Loire, et de rappeler que le préjudice invoqué a été réparé aux termes de l'arrêt rendu ce jour dans le cadre de l'instance enregistrée au répertoire général sous le no 11/ 314 ;
8) Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Attendu, chaque partie succombant partiellement en cause d'appel, qu'il convient de dire que la société appelante, d'une part, les intimés, d'autre part, conserveront la charge de leurs propres dépens et frais irrépétibles d'appel, le jugement entrepris étant confirmé en ses dispositions de ces chefs ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire ;
Déclare irrecevable la demande de production de bulletins de salaire, telle que libellée aux termes de la note en délibéré no 1 du 11 mai 2012 des intimés
Rejette des débats leur note en délibéré no 2 du 30 mai 2012, enregistrée au greffe le 1er juin suivant ;
Confirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives au temps d'habillage et de déshabillage, aux frais irrépétibles et aux dépens, et en ce qu'il a déclaré bien fondée en son principe la demande indemnitaire du syndicat CFDT de Maine et Loire ;
****
L'infirme en ses dispositions relatives au rappel de salaire alloué à M. Vincent X... et au montant de la somme allouée en contrepartie de l'entretien des tenues de travail ;
Statuant à nouveau de ces chefs et ajoutant au jugement entrepris,
Déclare M. Vincent X... irrecevable en sa demande de rappel de salaire pour la période antérieure au 22 juillet 2004 ;
Condamne la société Carrefour Hypermarchés à lui payer la somme de 2 104, 78 € à titre de rappel de salaire pour la période du 4 mars 2005 au 31 décembre 2008 ;
Rappelle que le présent arrêt, infirmatif sur ces points, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées par l'appelante en exécution du jugement déféré, et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, de la présente décision ;
Déboute M. Vincent X... de sa demande d'actualisation de rappel de salaire ;
Dit n'y avoir lieu à " dire que, pour l'avenir, la société Carrefour Hypermarchés devra rémunérer les temps de pause en sus du salaire de référence " ;
Ordonne à la société Carrefour Hypermarchés de délivrer au salarié intimé, au titre des périodes au cours desquelles il a pu être rémunéré au SMIC, comprises entre le 4 mars 2005, date de son embauche, et le 30 juin 2012, des bulletins de salaire faisant apparaître la rémunération des temps de pause en dehors du salaire de référence et ce, dans les quatre mois de la date du présent arrêt, sous peine, passé ce délai, d'une astreinte de 50 € par jour de retard et par salarié concerné ;
**** Condamne la société Carrefour Hypermarchés à payer à M. Vincent X..., au titre des frais d'entretien des tenues de travail, la somme de 1 320 € pour la période du 4 mars 2005 au 30 juin 2012 ;
****
Déboute M. Vincent X... de sa demande formée au titre du temps passé entre la pointeuse et la salle de pause, et de sa demande de dommages et intérêts ;
Dit que le préjudice invoqué par le syndicat CFDT de Maine et Loire a été réparé aux termes de l'arrêt rendu ce jour dans le cadre de l'instance enregistrée au répertoire général sous le no 11/ 314 ;
Déboute toutes les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.