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24/04/2012 | FRANCE | N°09/02712

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 24 avril 2012, 09/02712


COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale

ARRÊT N
CLM/AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02712
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, décision attaquée en date du 26 Novembre 2009, enregistrée sous le no 08/00394

ARRÊT DU 24 Avril 2012

APPELANTE :
S.A. NTN TRANSMISSIONS EUROPEZA des TrémelièresCUM72704 ALLONNES CEDEX
représentée par Maître Alain PIGEAU, avocat au barreau du MANS

INTIME :
Monsieur Gérard X......72270 MEZERAY
présent, assisté de Maître Marie-Laure DUFRESNE-CASTETS, avocat au barreau de CAEN

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, d...

COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale

ARRÊT N
CLM/AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02712
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, décision attaquée en date du 26 Novembre 2009, enregistrée sous le no 08/00394

ARRÊT DU 24 Avril 2012

APPELANTE :
S.A. NTN TRANSMISSIONS EUROPEZA des TrémelièresCUM72704 ALLONNES CEDEX
représentée par Maître Alain PIGEAU, avocat au barreau du MANS

INTIME :
Monsieur Gérard X......72270 MEZERAY
présent, assisté de Maître Marie-Laure DUFRESNE-CASTETS, avocat au barreau de CAEN

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, présidentMadame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseurMadame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier

ARRÊT :du 24 Avril 2012, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par madame LECAPLAIN MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******

FAITS ET PROCÉDURE :
Né en 1950, M. Gérard X... a été salarié de la Régie Nationale des Usines Renault du 17 novembre 1975 au 31 décembre 1998, puis de la société Nouvelle Transmissions du Mans (société SNT) du 1er janvier 1999 au 30 juin 2001. Dans le cadre d'une cession totale de l'activité des transmissions du groupe Renault et en application des dispositions, alors, de l'article L 122-12 ancien du code du travail, M. X... est devenu le salarié de la société NTN Transmissions Europe à compter du 1er juillet 2001, avec reprise de son ancienneté acquise au sein de la Régie Nationale des Usines Renault et de la société Nouvelle Transmissions du Mans. Il a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 31 décembre 2007.M. X... a, par ailleurs, milité au sein du syndicat CGT et rempli divers mandats de représentation du personnel de 1981 à 2001 au sein des sociétés Renault et SNT.
A compter du 1er juillet 2001, la société NTN Transmissions Europe a appliqué à M. X... des conditions de rémunération identiques à celles qui lui étaient appliquées antérieurement, soit un coefficient de 185 et un salaire mensuel brut de base de 1 106,43 €.
Par lettre recommandée du 15 juillet 2004, se référant à l'accord Renault du 14 décembre 2001 "relatif au règlement des litiges résultant d'évolutions professionnelles de représentants du personnel" et à la note Renault d'application no 2004/324 du 19 avril 2004 précisant, notamment, la situation du personnel transféré dans le cadre de l'article L 122-12 du code du travail, et soutenant avoir subi une discrimination quant à l'évolution de sa carrière et de sa rémunération en raison de son engagement syndical en tant qu'élu de la CGT et ce, depuis l'année 1982, date de sa prise de mandat, M. X... a demandé à la société NTN Transmissions Europe d'examiner son dossier dans sa globalité afin que soit réparé le préjudice résultant pour lui de cette discrimination.
Le 16 septembre 2004, la société NTN Transmissions Europe lui a répondu que l'accord Renault du 14 décembre 2001 ne trouvait pas à s'appliquer en son sein comme ne faisant partie ni directement, ni indirectement du statut collectif de l'entreprise ; qu'en conséquence, il lui appartenait d'apprécier les initiatives à prendre à l'égard de la société Renault pour la période au cours de laquelle il avait été son salarié ; qu'enfin, une fois intervenue une solution amiable ou judiciaire au différend l'opposant à la société Renault, il pourrait l'en avertir en lui donnant connaissance des "éléments de fait permettant selon lui d'invoquer cette même discrimination" en son sein, sur quoi alors, et dans le respect des principes jurisprudentiels, ses doléances pourraient être examinées.
M. X... ayant fait valoir ses revendications auprès de ses deux précédents employeurs, en application des dispositions de l'article 2044 du code civil, le 20 juin 2007, un accord transactionnel a été conclu entre lui et les sociétés Renault et SNT, aux termes duquel ces dernières ont accepté de lui verser la somme brute de 8 982,10 € à titre d'indemnité transactionnelle destinée à couvrir le préjudice matériel, professionnel et moral qu'il estimait avoir subi du chef de son évolution de carrière. Par courrier du 21 juin 2007, M. X... a fait part à la société NTN Transmissions Europe de cet accord transactionnel, lui a rappelé que, dans le cadre de la cession d'activité des transmissions "Renault-SNT" en sa faveur, elle s'était engagée à ce que les anciens salariés de ces deux entreprises ne subissent pas de perte de salaire, et il lui a en conséquence demandé de "régulariser" sa situation "vis à vis du préjudice reconnu par Renault".
Par lettre du 31 août 2007, la société appelante a :- pris acte de cet accord transactionnel intervenu en application de l'accord de méthode du 14 décembre 2001, dont elle a rappelé qu'il ne trouvait pas à s'appliquer en son sein, et de l'obtention d'une indemnité destinée à réparer le préjudice résultant pour M. X... d'une discrimination subie au cours de sa collaboration au sein du groupe Renault ;- constaté qu'il s'était inscrit dans la logique des dispositions de l'article L 122-12-1 du code du travail et relevé que la modification dans la situation juridique de l'employeur n'avait pas pour effet de mettre à la charge du nouvel employeur les créances indemnitaires de nature à réparer les conséquences dommageables d'une faute imputable au précédent employeur ;- considéré qu'en l'absence de toute discrimination subie en son sein, son préjudice avait été intégralement réparé, et relevé que l'indemnisation obtenue dans le cadre transactionnel ne lui permettait pas de revendiquer, de manière directe ou indirecte, une reconstitution de carrière ou une revalorisation de sa rémunération en son sein, ce qui reviendrait à lui faire supporter les conséquences financières d'une faute qu'elle n'a pas commise, alors qu'elle respecte toutes les obligations découlant du contrat de travail.
C'est dans ces circonstances que, le 15 juillet 2008, M. Gérard X... a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice résultant pour lui de la poursuite, à compter du 1er juillet 2001, au sein de la société NTN Transmissions Europe, de la discrimination syndicale subie dans son évolution de carrière au sein des sociétés Renault et SNT.
Par jugement du 26 novembre 2009 auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes du Mans a :- dit que le préjudice lié à la discrimination syndicale que M. Gérard X... a subie dans son évolution de carrière au sein des sociétés Renault et SNT s'est poursuivi après le 1er juillet 2001, date de son transfert au sein de la société NTN Transmissions Europe;- dit que M. Gérard X... a subi une discrimination syndicale depuis le 1er juillet 2001 ;- condamné la société NTN Transmissions Europe à lui payer la somme de 3 964,21 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, sans préjudice d'une indemnité de procédure de 350 € ;- débouté la société NTN Transmissions Europe de sa demande formée au titre des frais irrépétibles et l'a condamnée aux dépens.
La société NTN Transmissions Europe et M. X... ont reçu notification de ce jugement respectivement les 1er et 2 décembre 2009 ; l'employeur en a régulièrement relevé appel par lettre recommandée postée le 4 décembre suivant.
L'affaire a été renvoyée à la demande des parties lors des audiences des 30 novembre 2010 et 31 mai 2011 pour être finalement plaidée le 31 janvier 2012.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
La société NTN Transmissions Europe demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter M. Gérard X... de ses prétentions, de le condamner à lui payer la somme de 800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Invoquant une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée attachée à la portée du protocole transactionnel signé le 20 juin 2007, l'appelante soutient tout d'abord que, M. X... s'étant, aux termes de l'article 2 de cet acte, estimé définitivement rempli de tous ses droits du chef de la conclusion et de l'exécution des relations contractuelles l'unissant à la société Renault ou à toute autre société du groupe Renault, ces relations étant "appréciées" à la date de signature de l'acte, et l'intéressé ayant fait valoir ses droits à la retraite le 31 décembre 2007, il s'ensuit, qu'en l'absence de mention dans le protocole d'un droit à indemnisation en raison de sa situation au jour du transfert de son contrat de travail, il a définitivement et irrévocablement reconnu avoir été rempli de ses droits par le versement de la somme convenue et ne plus avoir de réclamation à formuler, quel que soit l'employeur concerné.
L'employeur soutient en second lieu que le raisonnement de M. X... qui, selon lui, revient à prétendre lui faire supporter les conséquences financières d'un préjudice de carrière qui ne lui est pas imputable et lui est même totalement étranger, emporte violation des dispositions de l'article L 122-12 ancien du code du travail, devenu L 1224-1 et L 1224-2, et de la jurisprudence y afférente de laquelle il résulte que le transfert d'un contrat de travail ne peut pas avoir pour effet d'obliger le nouvel employeur au paiement des créances indemnitaires sanctionnant une faute de l'ancien employeur.Il estime que le raisonnement du salarié et celui des premiers juges revient à considérer, de façon erronée, que la conclusion d'une transaction avec le premier employeur pourrait avoir pour effet, nonobstant l'absence de responsabilité contractuelle ou quasi-délictuelle du nouvel employeur, de générer, rétroactivement, de nouvelles obligations à la charge de ce dernier, telle une reconstitution de carrière.
Enfin, la société NTN Transmissions Europe rappelle que la discrimination suppose un comportement délibéré et volontaire de l'employeur duquel une indemnisation est sollicitée. Elle oppose que, même en présence d'un transfert du contrat de travail, on ne peut pas admettre, comme le souhaite M. X..., une nouvelle notion dans le cadre de laquelle la discrimination ne serait que la conséquence d'une discrimination antérieurement commise par le précédent employeur. Or elle fait valoir que le salarié n'allègue à son encontre aucun fait ou acte laissant supposer qu'en son sein, et au cours des périodes d'exécution du contrat de travail la concernant, il aurait été victime d'une discrimination directe ou indirecte.
M. Gérard X... demande quant à lui à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la discrimination syndicale qu'il a subie dans son évolution de carrière au sein des sociétés Renault et SNT s'est poursuivie, à partir du 1er juillet 2001, au sein de la société NTN Transmissions Europe et, formant appel incident, il entend voir porter à la somme de 4 388,94 € le montant des dommages et intérêts propres à réparer le préjudice qui est résulté pour lui de cette discrimination subie au sein de l'appelante.Il sollicite la somme de 1200 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de l'appelante aux dépens.
A la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, l'intimé rétorque que l'appelante ne peut pas se prévaloir d'une transaction à laquelle elle n'était pas partie, que le seul préjudice indemnisé est celui subi, et dont le montant a été arrêté, à la date de son départ du groupe Renault, qu'en signant la transaction, il a donc seulement reconnu être définitivement rempli de ses droits du chef de ses relations contractuelles avec les sociétés du groupe Renault et non avec la société NTN Transmissions Europe ; que les énonciations contenues dans l'article 2 du protocole transactionnel ne permettent nullement de considérer que l'indemnisation aurait couvert le préjudice de carrière subi après son départ du groupe Renault.
Au fond, à l'audience, par la voix de son conseil, M. X... précise qu'il ne demande pas l'application de la transaction et il déclare abandonner le moyen selon lequel, la société NTN Transmissions Europe serait, en application des dispositions de l'article L 122-12 ancien du code du travail, devenu l'article L 1224-1, subrogée purement et simplement, et de manière générale, dans tous les droits, obligations et engagements des sociétés Renault et SNT et, par voie de conséquence, obligée à raison de la discrimination syndicale qu'il a subie au sein de ces entreprises et dont les effets préjudiciables se sont poursuivis au cours de sa relation de travail avec l'appelante.
Il précise que ce n'est pas la faute des précédents employeurs qu'il invoque pour réclamer réparation du strict préjudice qu'il a subi depuis la reprise de son contrat travail par la société NTN Transmissions Europe, mais bien la faute de cette dernière.
Il estime que l'attitude discriminatoire de celle-ci à son égard résulte de ce qu'elle a refusé de réajuster son salaire dont il a été reconnu qu'il procédait d'une discrimination à raison de ses activités syndicales, alors que ce réajustement s'imposait ne serait-ce qu'en vertu de l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail. Il fait observer que l'appelante ne fournit aucune explication pour tenter d'établir que sa décision serait justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée attachée au protocole transactionnel : Attendu que le premier moyen soulevé par la société NTN Transmissions Europe s'analyse en une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée qu'elle estime attachée au protocole transactionnel du 20 juin 2007 ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1er de cet accord, M. X... s'est vu attribuer par la société Renault et par la société SNT la somme brute forfaitaire et définitive de 8 982,10 € d'indemnité transactionnelle couvrant le préjudice matériel, professionnel et moral qu'il estime avoir subi au titre de son évolution de carrière ;Attendu qu'à l'appui de la fin de non-recevoir qu'elle soulève, l'appelante invoque les dispositions de l'article 2 du protocole ainsi rédigé : "En contrepartie de ce qui précède, M. Gérard X... s'estime définitivement rempli de tous ses droits du chef de la conclusion, de l'exécution des relations contractuelles qui l'unissent à la société Renault ou toute autre société du groupe Renault, appréciées à la date de signature de la présente transaction.M. Gérard X... s'engage en conséquence à renoncer irrévocablement à toute action, de quelque nature que ce soit, devant toute juridiction française ou étrangère, du chef de la conclusion, de l'exécution des relations contractuelles qui l'unissent à la société Renault à la date de la signature de la présente transaction." ;
Mais attendu qu'aux termes des articles 2049 et 2052 du code civil, une transaction ne règle que le ou les différends qui s'y trouve(nt) compris et n'a l'autorité de chose jugée en dernier ressort que dans cette mesure et entre les parties qui l'ont conclue ;
Que la société NTN Transmissions Europe, qui ne soutient pas faire partie du groupe Renault au sens de la clause susvisée et qui n'était pas partie à la transaction conclue le 20 juin 2007, ne peut ni se prévaloir du bénéfice de ses dispositions, ni invoquer l'autorité de chose jugée pouvant y être attachée ; Et attendu que, contrairement à ce qu'elle soutient, il résulte clairement tant de l'article 2 susvisé que des termes de l'exposé liminaire de l'accord transactionnel que l'objet de cette transaction est bien limité à l'indemnisation du préjudice subi par M. X... au titre de l'évolution de sa carrière de 1981 à 1998 au sein de la société Renault et de 1999 à 2001 au sein de la société Nouvelles de Transmissions du Mans ; que l'intimé est donc bien fondé à soutenir que le seul préjudice indemnisé par le biais de cet accord est celui subi jusqu'à la date de son départ du groupe Renault et qu'il a seulement reconnu être rempli de ses droits du chef de ses relations contractuelles avec la société Renault et les sociétés du groupe Renault, et non du chef de ses relations contractuelles avec la société NTN Transmissions Europe ; qu'il soutient encore à juste titre que l'expression "appréciées à la date de la signature de la présente transaction" ne permet pas de retenir que l'indemnité allouée aurait eu pour objet de réparer le préjudice par lui subi, après son départ du groupe Renault, voire jusqu'à la date de conclusion de l'accord ;Que la fin de non-recevoir soulevée par l'appelante doit donc être rejetée ;
Sur la discrimination : Attendu qu'aux termes de l'article L 1132-1 du code du travail, "Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi no 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, (...) en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme ou en raison de son état de santé ou de son handicap";
Attendu qu'en application des articles L 1132-1, L 1134-1 et L 2141-5 du code du travail, il appartient au salarié qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte de présenter des éléments de fait laissant supposer son existence ; qu'il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;Attendu, par ailleurs, que l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés ;
Attendu qu'il convient de donner acte à M. X... de ce qu'il abandonne le moyen tiré de la subrogation de la société NTN Transmissions Europe dans les obligations et engagements des sociétés Renault et SNT, résultant de l'application des articles L 1224-1, et L 1224-2 du code du travail et du transfert de son contrat de travail à l'appelante ; qu'il ne soutient donc plus que cette dernière serait obligée à raison de la discrimination syndicale qu'il a subie au sein de ces entreprises et de la poursuite de ses effets préjudiciables postérieurement au 1er juillet 2001 ;
Attendu que la discrimination procède d'un traitement différent en raison de l'un des motifs prohibés par la loi ; Qu'en l'espèce, M. X... invoque une discrimination en raison de ses activités syndicales ; que la protection est acquise à tout militant syndicaliste même non investi d'un mandat ;
Attendu que la réalité d'activités syndicales exercées par l'intimé tant antérieurement au 1er juillet 2001, qu'au sein de la société NTN Transmissions Europe, n'est pas discutée en l'espèce, les parties indiquant qu'il a milité au sein du syndicat CGT et qu'il a exercé des mandats de représentant du personnel de 1981 à 2001 ;
Attendu que le seul élément de fait discriminatoire invoqué par M. X... est le refus de la société NTN Transmissions Europe de réajuster son salaire quoiqu'il ait été reconnu discriminatoire aux termes de la transaction conclue le 11 juin 2007, et de l'avoir repris au même niveau de salaire mensuel brut de base de 1106,85 €, pour un coefficient de 185, qui était le sien au 30 juin 2001 alors qu'il est établi par les éléments de calcul retenus par les sociétés Renault et SNT dans le cadre de la transaction que l'écart mensuel entre son salaire et le salaire moyen des autres salariés placés dans les mêmes conditions d'emploi et d'ancienneté s'élevait, au 31 décembre 2000, à la somme de 46,49 € à son détriment;Attendu que le salarié précise bien qu'il a déterminé son préjudice mensuel "à partir de l'écart mensuel constaté entre son salaire et le salaire moyen des autres salariés placés dans les mêmes conditions d'emploi et d'ancienneté, soit 46,49 € au 31 décembre 2000 selon les différences de traitement retenues par les sociétés Renault et SNT." ;Attendu qu'il résulte du tableau qu'il produit (sa pièce no 19) pour justifier du calcul du préjudice qu'il impute à l'appelante que M. X... est donc parti d'un écart de salaire mensuel brut de 46,50 € à son détriment à compter du 1er juillet 2001, date de son entrée au sein de la société NTN, cet écart correspondant à celui déterminé et subi au 31 décembre 2000 alors qu'il était salarié de la société TNS ; attendu qu'il a ensuite actualisé cet écart en appliquant, au fil du temps, jusqu'à la fin décembre 2007, le taux d'augmentation générale des salaires successivement appliqué au sein de la société NTN Transmissions Europe ; qu'à la faveur de l'application de ces taux successifs, l'écart péjoratif mensuel ressort ainsi à 46,96 € du mois de mars au mois de septembre 2002, à 47,43 € du mois d'octobre 2002 au mois de janvier 2003 inclus, à 47,91 € du mois de février au mois d'avril 2003 inclus, et ainsi de suite pour s'établir en dernier lieu à la somme de 51,27 € à compter du mois de septembre 2007 ; attendu que la somme de ces différences mensuelles de salaire pour la période en cause du 1er juillet 2001 au 31 décembre 2007 s'élève à 3539,47 €, somme que le salarié affecte d'un coefficient de majoration de 24 % pour aboutir au montant de sa réclamation de 4388,94 €, étant précisé que le conseil de prud'hommes a limité ce taux de majoration à 12 % ;
Attendu que le raisonnement de l'intimé et le mode de détermination du préjudice qu'il invoque reviennent bien à solliciter de l'appelante la réparation d'un préjudice, certes subi à compter du 1er juillet 2001, mais généré par l'attitude discriminatoire des sociétés Renault et SNT à son égard puisqu'en effet, il part de la base (la différence de 46,50 €) déterminée dans le cadre de l'accord transactionnel auquel l'appelante est étrangère, par application de règles fixées aux termes d'un accord de méthode du 14 décembre 2001 exclu de son champ conventionnel, et prenant en considération un panel de comparaison incluant uniquement les rémunérations versées à 11 salariés du groupe Renault, sans venir soutenir qu'il n'aurait pas bénéficié, comme les autres salariés, de toutes les augmentations de salaires appliquées au sein de la société NTN Transmissions Europe à compter de juillet 2001 ;
Attendu qu'il résulte en effet des explications de M. X..., de ses bulletins de salaire ainsi que des décisions successives d'augmentation générale des salaires prises au sein de la société NTN Transmissions Europe, que cette dernière l'a repris aux mêmes conditions de rémunération que celles qui étaient les siennes au sein de la société SNT juste avant le transfert du contrat de travail, avec le bénéfice de toute l'ancienneté acquise au sein du groupe Renault, et qu'elle lui a bien appliqué, ce qui ne fait pas débat, entre le 1er juillet 2001 et le 31 décembre 2007 date de son départ en retraite, les augmentations de salaire mises en oeuvre au sein de l'entreprise en faveur de l'ensemble des salariés; que, ce faisant, elle a respecté les obligations qui étaient les siennes dans le cadre de la reprise du contrat de travail de l'intimé et exécuté ce contrat de bonne foi ;Que ce dernier ne soutient pas que la société NTN Transmissions Europe aurait agi de façon péjorative sur la rémunération qui était la sienne lors de la reprise ou sur l'évolution de cette rémunération, l'aurait privé de certaines évolutions, de primes ou autres avantages ; Or attendu que le fait pour l'appelante de ne pas avoir corrigé les effets préjudiciables, sur la rémunération de M. X..., d'agissements discriminatoires exclusivement imputables à des tiers, à savoir les sociétés Renault et TNS, et mis en lumière par l'accord transactionnel conclu le 20 juin 2007, ne constitue pas un élément de fait laissant supposer de sa part une discrimination directe ou indirecte à l'égard du salarié en raison de ses activités syndicales ;
Attendu que le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société NTN Transmissions Europe à payer à M. Gérard X... la somme de 3 964,21 € à titre de dommages et intérêts et ce dernier, débouté de sa demande indemnitaire formée à l'encontre de son dernier employeur ;
Sur les dépens et frais irrépétibles :Attendu, la société NTN Transmissions Europe prospérant en son recours que, par voie d'infirmation du jugement entrepris, M. X... sera condamné aux entiers dépens de première instance et d'appel et débouté de ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ; Attendu qu'au regard des situations de fortune respectives des parties, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la société NTN Transmissions Europe la charge de l'ensemble des frais irrépétibles qu'elle a pu exposer ;

PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée attachée au protocole transactionnel ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. Gérard X... de l'ensemble de ses demandes ;
Déboute la société NTN Transmissions Europe de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. Gérard X... aux entiers dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/02712
Date de la décision : 24/04/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2012-04-24;09.02712 ?
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