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03/04/2012 | FRANCE | N°10/01667

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 03 avril 2012, 10/01667


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01667.
Jugement Conseil de Prud'hommes de SAUMUR du 25 Mai 2010, enregistrée sous le no 08/ 00070

ARRÊT DU 03 Avril 2012

APPELANTS :
Monsieur Loïc X...... 49000 ANGERS
présent, assisté de Maître Lucie GUILLON substituant Maître Jean-Pierre BOUGNOUX (SCP), avocat au barreau d'ANGERS

L'A. G. S-C. G. E. A. DE RENNES Immeuble le Magister 4 cours Raphaël Binet 35069 RENNES CEDEX
représentée par Maître Bertrand CREN (SCP BDH AVOCAT

S), avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :
Maître Franklin Y..., ès-qualités de liquidateur à la liqui...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01667.
Jugement Conseil de Prud'hommes de SAUMUR du 25 Mai 2010, enregistrée sous le no 08/ 00070

ARRÊT DU 03 Avril 2012

APPELANTS :
Monsieur Loïc X...... 49000 ANGERS
présent, assisté de Maître Lucie GUILLON substituant Maître Jean-Pierre BOUGNOUX (SCP), avocat au barreau d'ANGERS

L'A. G. S-C. G. E. A. DE RENNES Immeuble le Magister 4 cours Raphaël Binet 35069 RENNES CEDEX
représentée par Maître Bertrand CREN (SCP BDH AVOCATS), avocat au barreau d'ANGERS

INTIME :
Maître Franklin Y..., ès-qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Frédéric Z... qui exerçait sous l'enseigne " Le Bar O Graph "... 49022 ANGERS CEDEX 02
représenté par Maître Lionel DESCAMPS (A. C. R.), avocat au barreau d'ANGERS, en présence de Monsieur Z...

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Janvier 2012, en audience publique, devant la cour, composée de : Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseur Madame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,

ARRÊT : du 03 Avril 2012 contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******
FAITS ET PROCÉDURE :
M. Frédéric Z... exploitait en nom personnel, sous l'enseigne le " Bar O'Graph ", le bar-restaurant situé dans l'enceinte de l'aéroport d'Angers-Marcé. Tout d'abord ouvert uniquement au club aéronautique, à compter d'octobre 2007, cet établissement est devenu le bar-restaurant de l'aéroport.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 1er octobre 2007, M. Frédéric Z... a embauché M Loïc X... en qualité de serveur à temps partiel, 20 heures par semaine, la convention collective applicable étant celle, nationale, des Hôtels-Cafés-Restaurants du 30 avril 1997.
Soutenant avoir travaillé dans l'établissement, de 2002 à septembre 2007, du mardi au dimanche inclus, 8 heures par jour (de11h à 19h environ), sans être déclaré ni rémunéré à hauteur du travail fourni, et n'avoir jamais cessé de travailler à temps plein, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 28 février 2008, M Loïc X... a demandé à M. Frédéric Z... de lui payer l'arriéré de ses salaires afférents à la période considérée et de modifier son contrat de travail en contrat de travail à temps plein moyennant le salaire correspondant prévu par la convention collective. Il a adressé une copie de ce courrier à l'inspection du travail le 4 mars 2008.
Sa réclamation étant restée sans réponse, par lettre du 4 avril 2008, il a saisi le conseil de prud'hommes afin de voir consacrer l'existence d'un contrat de travail entre lui et M. Frédéric Z... du chef de la période de mai 2002 à septembre 2007 inclus, selon un horaire de 11 h à 19 h du mardi au dimanche. Il demandait le paiement de la somme brute de 110 434, 66 € à titre de rappel de salaires et de celle de 8561, 25 € de dommages et intérêts pour repos compensateurs, sollicitant qu'il lui soit donné acte de ce qu'il avait reçu la somme nette de 29 133 €.
Par courrier du 23 mai 2008, M. Frédéric Z... a fait connaître à M. Loïc X... que, du fait de la prise d'acte intervenue le 19 mai précédent, il estimait le contrat de travail conclu entre eux rompu de son fait et il l'invitait à venir chercher son certificat de travail ainsi que l'attestation ASSEDIC.
Après vaine tentative de conciliation du 5 juin 2008 et une décision du 12 juin suivant aux termes de laquelle le bureau de conciliation a rejeté la demande de provision de M. X..., par jugement du 25 mai 2010 rendu en formation de départage, auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes de Saumur, considérant que la preuve d'un contrat de travail n'était pas rapportée pour la période de mai 2002 à septembre 2007, a débouté M Loïc X... de l'ensemble de ses prétentions et l'a condamné à payer à M. Frédéric Z... la somme de 1000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens.
M. Frédéric Z... et M. Loïc X... ont reçu notification de ce jugement respectivement les 4 et 8 juin 2010.
Ce dernier en a relevé appel par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postée le 29 juin suivant.
L'audience de jugement devant le conseil de prud'hommes s'est déroulée le 8 décembre 2009. Par décision du tribunal de commerce d'Angers du 13 janvier 2010, M. Frédéric Z... a été déclaré en liquidation judiciaire, M. Franklin Y... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur.
Les parties ont été convoquées par le greffe pour l'audience du 28 juin 2011. A leur demande, l'affaire a alors été renvoyée contradictoirement au 3 janvier 2012.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 16 mai 2011, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Loïc X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris ;- de juger qu'il a été lié à M. Frédéric Z... par un contrat de travail de mai 2002 à septembre 2007 ;- de constater qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 19 mai 2008 et de juger que cette prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;- en conséquence, de fixer sa créance sur la liquidation judiciaire de M. Frédéric Z... aux sommes suivantes : ¤ 106 631, 98 € bruts à titre de rappel de salaires pour la période de mai 2002 à septembre 2007 ; ¤ 17 507, 01 € bruts à titre d'indemnités de repos compensateurs obligatoires non pris ; ¤ 1604, 24 € bruts d'indemnité compensatrice de préavis ; ¤ 160, 42 € bruts de congés payés afférents ; ¤ 4812, 72 € nets d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ; ¤ 9625, 44 € de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;- de lui donner acte de ce qu'il reconnaît avoir reçu de M. Frédéric Z... la somme nette de 29 133 € à titre de salaires pour la période Courant de mai 2002 à septembre 2007 ;- de déclarer le présent arrêt opposable à l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés ;- d'ordonner l'établissement des bulletins de salaire afférents aux condamnations prononcées en sa faveur ;- de condamner M. Franklin Y..., pris en qualité de mandataire liquidateur de M. Frédéric Z..., à lui payer la somme de 4000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
A l'appui de sa demande en reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail au cours de la période mai 2002 à septembre 2007, et se prévalant des attestations qu'il produit, M. X... soutient :- qu'il fournissait à M. Z... une prestation de travail régulière, du mardi au dimanche inclus, chaque jour de 11 h à 19 h, sans préjudice de certaines soirées, cette prestation de travail consistant, avant 11 h, à aller faire des achats de ravitaillement, puis, à servir au bar et au restaurant, à procéder au nettoyage, à nouveau à assurer le service au bar enfin d'après-midi ;- qu'il était soumis au x horaires d'ouverture de l'établissement et aux consignes de M. Z..., notamment quant aux courses à effectuer ;- que ce dernier a été verbalisé pour travail dissimulé.
Il établit sa demande de rappel de salaire sur la base d'un temps de travail hebdomadaire de 48 heures pour la période de mai 2002 à septembre 2007 inclus. En l'absence de contrat de travail écrit, il s'estime à tout le moins fondé à obtenir le paiement d'un rappel de salaire sur la base d'un temps complet normal dans le secteur considéré, soit 39 heures par semaine. Il ajoute qu'ayant été privé de ses repos compensateurs, il a droit au paiement d'une indemnité destinée à les compenser.
Enfin, il fait valoir que sa prise d'acte de la rupture, intervenue par courrier du 19 mai 2008, est parfaitement fondée par les motifs suivants :- le non paiement par M. Z... de son salaire de mars 2002 à septembre 2007 et le refus de régulariser la situation ;- le défaut de déclaration préalable à l'embauche en 2002 ;- le défaut de remise de bulletins de paie pour la période de mars 2002 à septembre 2007 ;- le refus, depuis octobre 2007, de le rémunérer pour le temps plein qu'il a réellement accompli.
Aux termes de ses dernières écritures déposées au greffe le 21 décembre 2011, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Franklin Y..., pris en qualité de mandataire liquidateur de M. Frédéric Z..., demande à la cour de débouter M Loïc X... de son appel et de l'ensemble de ses prétentions, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de dire que la prise d'acte de la rupture doit produire les effets d'une démission, de condamner l'appelant à lui payer une indemnité de procédure de 300 € en cause d'appel, et à supporter les dépens d'appel.
L'intimé conteste l'existence d'un contrat de travail au cours de la période mai 2002 à septembre 2007, et il oppose que les témoignages produits par M. X... ne permettent pas de faire la preuve du contrat de travail allégué, ni même celle de sa présence quotidienne au " Bar O'Graph " aux horaires qu'il invoque. Il explique que M. X... était passionné d'aéronautique et un ami de M. Z... auquel il avait demandé s'il pouvait lui donner " un coup de main " de temps en temps à l'établissement. Il soutient que l'appelant venait en tant qu'ami, et de son plein gré, quand il le souhaitait, n'était astreint à aucun horaire particulier, et ne recevait aucune instruction de la part de M. Z... qui ne lui demandait aucun compte ; que cette situation explique d'ailleurs que M. X... n'ait jamais formé de réclamation pendant cinq ans, ni considéré les dédommagements qu'il a reçus comme des salaires puisqu'il n'a déclaré ces sommes ni aux services fiscaux, ni à l'ASSEDIC. M. Franklin Y... argue donc de ce que fait à tout le moins défaut la condition liée à l'existence d'un lien de subordination.
S'agissant de la rupture du contrat de travail conclu le 1er octobre 2007, il soutient qu'en l'absence d'une quelconque faute commise par M. Z..., la rupture de contrat de travail doit produire les effets d'une démission.
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 30 décembre 2011, soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés intervenant par le truchement du C. G. E. A de Rennes demande à la cour :- de lui donner acte de son intervention volontaire par le C. G. E. A de Rennes ;- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de débouter M Loïc X... de ses prétentions ;- à titre subsidiaire, de constater que ses demandes salariales sont pour partie atteintes par la prescription et de rejeter les demandes de rappel de salaire et indemnitaires au titre du repos compensateur pour la période antérieure au 7 avril 2003 ;- à titre subsidiaire, pour le cas où une créance serait fixée au profit de M. Loïc X... sur la liquidation judiciaire de M. Frédéric Z..., de juger qu'elle ne la garantira que dans les limites prévues par l'article L 3253-8 du code du travail et les plafonds fixés par les articles L 3253-17 et D 3253-5 du même code.
L'AGS estime que M. X... ne rapporte nullement la preuve du contrat de travail qu'il invoque et fait observer que la circonstance qu'il ait été présent au sein de l'établissement de façon plus ou moins régulière est tout à fait insuffisante pour caractériser le contrat de travail allégué.

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur l'existence d'un contrat de travail au cours de la période de mai 2002 à septembre 2007 :
Attendu qu'il incombe à l'appelant, qui entend voir consacrer l'existence d'un contrat de travail du chef de cette période, d'en rapporter la preuve ;
Attendu que le contrat de travail est la convention par laquelle une personne physique s'engage à mettre son activité à la disposition d'une autre personne, physique ou morale, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant une rémunération ; que la qualification de contrat de travail suppose donc la réunion de trois éléments, à savoir : une prestation personnelle de travail, une rémunération et un lien de subordination juridique permanente ;
Que ce dernier est caractérisé par l'exécution d'une prestation de travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des instructions et des directives, d'en contrôler la bonne exécution et, si nécessaire, de sanctionner les manquements de son subordonné ;
Attendu qu'il ne fait pas débat que M. Z... et M. X... étaient étroitement liés par une relation d'amitié qui est invoquée dans le cadre de la présente instance par M. Franklin Y... ès-qualités, que l'appelant a évoquée d'emblée auprès de l'inspecteur de l'URSSAF qu'il a rencontré le 14 août 2008, en expliquant que c'est en raison de ces relations d'amitié, et après un licenciement, qu'il a commencé à aider M. Frédéric Z... dans l'exploitation de son bar, et qui est décrite par certains témoins ;
Attendu qu'il n'est pas non plus contesté qu'au cours de la période litigieuse, qui correspond à l'époque où le bar/ restaurant était ouvert uniquement aux personnes fréquentant l'aéroclub, M. X... a bien exécuté une prestation personnelle de travail en servant au bar et en salle ;
Attendu que ce dernier indique avoir reçu de M. Z..., en contrepartie de ses prestations au " Bar O'Graph ", des sommes en espèces pour un montant de 3 000 € en 2002, de 3 500 € en 2003, de 4 500 € en 2004, de 1 500 € en 2005 outre la remise d'un chèque de 4 133 €, de 4 000 € en 2006 et de 5 500 € en 2007 outre un prêt de 3 000 € destiné à l'aider à régler sa dette de loyer et qui fut enregistré aux services fiscaux le 17 janvier 2007 ; attendu que, devant les premiers juges, M. Z... a précisé que ces sommes étaient destinées à rémunérer les " coups de main " de M. X... et il a affirmé avoir intégralement rémunéré ces interventions ; que, comme l'ont retenu les premiers juges, l'existence d'une rémunération en contrepartie des prestations fournies est donc également justifiée ;
Attendu qu'à l'appui de sa thèse selon laquelle, au cours de la période litigieuse, il travaillait pour le compte de M. Z..., 8 heures par jour, du mardi au dimanche inclus sans préjudice de certains extra, dans le strict respect des horaires d'ouverture de l'établissement et ce, dans une relation de subordination à M. Z... qui lui dictait le travail à accomplir, M. Loïc X... verse aux débats six attestations, deux photographies le montrant au bar du " Bar O'Graph ", le procès-verbal établi le 24 mars 2009 par l'inspecteur agréé de l'URSSAF de Maine et Loire, la relation écrite qu'il a faite à ce dernier de sa situation le 14 août 2008 et un document qu'il a établi en vue de la vente de places pour assister à la diffusion du film " Les Chevaliers du ciel " en avant-première ;
Attendu que M. Thierry A... indique avoir été servi par M. Loïc X... lorsqu'il venait au " Bar O'Graph " et ce, tant le matin, le midi que l'après-midi, ainsi que le soir lors de soirées organisées, notamment en fin d'année ; Attendu que M. Mathieu B... indique s'être rendu " à plusieurs reprises " au " Bar O'Graph " entre 2003 et 2008 et avoir alors constaté que M. X... effectuait le service en salle ; que Mme Patricia C... relate quant à elle l'avoir vu travailler comme serveur, " à chacun de ses passages midi, après-midi et soirées ", entre 2003 et 2008, tandis que M. Vincent D... indique avoir " constaté la présence " de M. X... au " Bar O'Graph ", en tant que serveur, " lors du week-end Anjou Ailes Rétro en 2007 " ;
Attendu que Mme Patricia E..., qui travaillait au secrétariat de l'aéroclub, indique avoir constaté la présence de M. X... au bar, du mardi au samedi, où il arrivait entre 10h30 et 11h et se trouvait toujours lorsqu'elle-même quittait son travail à 18 heures ;
Attendu, enfin qu'en cause d'appel, l'appelant produit une attestation établie le 19 avril 2011 par Mme Catherine F..., hôtesse d'accueil au SUPER U de Corzé, laquelle énonce qu'il venait faire les courses pour la société " Bar O'Graph " chaque matin ;
Attendu que toutes ces attestations sont lapidaires, aucune n'étant précise et circonstanciée ; que les témoignages de MM. A... et G..., et celui de Mme C..., dont on ignore combien de fois ils sont venus au " Bar O'Graph " ou selon quelle fréquence ils y venaient, ne permettent pas, par voie de conséquence, de faire preuve de la fréquence de la présence de M. X... ; que M. D... n'y a, quant à lui, vu l'appelant qu'une seule fois ;
Que seule l'attestation de Mme E... vient appuyer la thèse de ce dernier selon laquelle il était présent quotidiennement et selon une amplitude horaire de 8 heures ; que c'est à juste titre que M. Franklin Y..., ès-qualités, fait observer que le témoignage de Mme F... n'a été produit qu'en cause d'appel et que ses énonciations ne permettent nullement de situer dans le temps les venues de M. X... au magasin ; qu'il ne permet donc pas d'établir que les courses quotidiennes dont elle fait état se rapportent à la période litigieuse plutôt qu'à celle ayant commencé à courir le 1er octobre 2007, date à laquelle un contrat de travail a été conclu entre les parties, et à partir de laquelle l'établissement est devenu le bar-restaurant de tout l'aéroport ;
Attendu qu'une seule de ces attestations accrédite donc la thèse de M. X... quant à la fréquence et à la durée quotidienne de sa présence au " Bar O'Graph " mais qu'aucun de ces témoignages ne fournit le moindre élément de nature à appuyer l'idée de l'existence d'un lien de subordination entre M. X... et M. Z... ; qu'aucun des témoins n'indique, en effet, avoir entendu ce dernier donner des ordres ou directives à l'appelant, ni avoir constaté qu'il aurait contrôlé la prestation de travail fournie par celui-ci ou sa présence et sa ponctualité, encore moins qu'il aurait usé d'un pouvoir de sanction d'une quelconque manière ;
Attendu que M. Franklin Y..., ès-qualités, verse aux débats neuf attestations circonstanciées de personnes qui fréquentaient très régulièrement, voire quotidiennement, le " Bar O'Graph " depuis de nombreuses années, et qui s'accordent pour indiquer que M. Loïc X... venait servir au bar et en salle de façon très irrégulière, pour rendre service à M. Frédéric Z... avec lequel il était très ami au point que certains clients le considéraient comme de " la famille " ; qu'ils relèvent n'avoir jamais entendu ce dernier donner de quelconques instructions à l'appelant et précisent que celui-ci avait toute une vie sociale via l'aéroclub et le " Bar O'Graph ", ce que M. X... a d'ailleurs lui-même relaté à l'inspecteur de l'URSSAF ; que certains témoins relatent que l'appelant indiquait être assuré de la perception de prestations ASSEDIC pendant trois ans après son licenciement et être bien ainsi dans sa vie ; que, selon Mme Patricia H..., il avait également déclaré avoir un emploi dans un magasin de bricolage appartenant à sa famille à Chalonnes sur Loire ;
Attendu que le procès-verbal dressé le 24 mars 2009 par l'inspecteur assermenté de l'URSSAF n'apporte aucun élément probant au sujet du contrat de travail litigieux en ce qu'il se contente de reprendre la version des faits de M. X..., ainsi que celle, contraire, de M. Z..., et en ce qu'il se contente de faire état de la production " d'un nombre important de tickets de caisse " signés par M. X... et relatifs à des achats réalisés au magasin SUPER U pour le compte de M. Z... ; mais attendu que le procès-verbal ne comporte aucune indication, notamment quant aux dates de ces achats, à leur nature, à leur importance (quantités de produits achetés) et au nombre des tickets ; que le procès-verbal ne rend donc nullement compte de la prestation de travail qu'ont pu, le cas échéant, représenter ces achats effectués par M. X... pour le compte de l'exploitation de M. Z... ;
Attendu que les deux ou trois photographies montrant M. X... au bar du " Bar O'Graph " n'ont aucune valeur probante quant à la réalité du contrat de travail allégué ; qu'enfin, l'appelant est mal fondé à soutenir que la mention " LOIC DU BAROGRAPH, PROPOSE AU PERSONNEL SGAAM DES PLACES EN AVANT PREMIERE POUR LE FILM LES CHEVALIERS DU CIEL " portée sur un document, qu'il apparaît avoir établi lui-même, destiné à être renseigné par les personnes souhaitant retenir des places de cinéma, ferait la preuve de sa qualité de membre du personnel du " Bar O'Graph " ;
Attendu qu'il suit de là que, comme l'ont exactement retenu les premiers juges, M. Loïc X... ne produit aucun élément, ni aucune pièce de nature à justifier que les prestations qu'il a fournies entre mai 2002 et septembre 2007 à M. Frédéric Z... se seraient inscrites dans le cadre d'un lien de subordination ; qu'il ne justifie pas d'instructions et de directives émanant de M. Z..., ni d'un contrôle, de sa part, de leur bonne exécution ; qu'enfin, il n'établit pas en quoi ce dernier aurait eu le pouvoir de sanctionner ses éventuels manquements ;
Attendu que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. Loïc X... de sa demande tendant à voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail le liant à ce dernier pour la période mai 2002/ septembre 2007, et de ses demandes de rappel de salaire pour la période considérée, et d'indemnité compensatrice de repos compensateurs ;

Sur la prise d'acte :
Attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, ceux d'une démission ;
Que la prise d'acte ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'à la condition que les faits invoqués soient, non seulement, établis, mais constituent des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur et faire obstacle à la poursuite du contrat de travail ;
Attendu que le courrier recommandé avec demande d'avis de réception adressé par M. Loïc X... à M. Frédéric Z... le 19 mai 2008 est ainsi libellé : " Monsieur, Je vous informe que je prends acte de la rupture de mon contrat de travail, compte tenu de l'inexécution de vos obligations fondamentales de me payer mes salaires et de payer les cotisations sociales afférentes pendant de nombreuses années. Par lettre recommandée AR en date du 28 février 2008, distribuée le 5 mars et demeurée à ce jour sans réponse, je vous rappelais notamment que vous restiez me devoir une importante somme à titre de salaires. J'ajoutais que cette absence de paiement tant des salaires que des cotisations afférentes me cause un double préjudice :- Absence de couverture sociale (maladie, chômage, retraite,...).- Problèmes avec mes créanciers, et notamment avec mon bailleur. Ma décision prend effet dès présentation de la présente lettre, ainsi que mon attestation destinée à l'ASSEDIC. " ;
Attendu, M. X... ayant été débouté de sa demande de reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail du chef de la période mai 2002 à septembre 2007, qu'il est mal fondé à soutenir que M. Z... aurait commis une faute en omettant de lui payer des salaires, de s'acquitter des cotisations sociales dues par l'employeur et de lui délivrer des bulletins de salaire du chef de cette période ; Attendu qu'à l'appui de sa prise d'acte, M. X... invoque également de refus de l'employeur, depuis le mois d'octobre 2007, de le rémunérer pour un temps plein, correspondant, selon lui, au temps de travail qu'il a réellement accompli ;
Mais attendu que le contrat de travail conclu le 1er octobre 2007 l'a été pour un temps partiel de 20 heures par semaine, réparties du mardi au samedi inclus, selon des horaires très réguliers et très précisément déterminés, et moyennant un salaire horaire de 8, 44 € correspondant au montant du SMIC alors en vigueur ;
Attendu que, tout en soutenant que M. Z... l'aurait employé à temps plein à compter du 1er octobre 2007, M. X... ne saisit la cour d'aucune demande de rappel de salaire afférente à la période ayant commencé à courir à compter de cette date, sa demande en paiement de la somme de 106 631, 98 € concernant exclusivement la période de mai 2002 à septembre 2007 inclus ; qu'il ne produit aucune pièce, pas même un décompte d'heures établi par ses soins, au soutien de son affirmation selon laquelle il aurait travaillé non pas 20 heures par semaine, mais à temps plein depuis le 1er octobre 2007 ; qu'il ne rapporte donc pas non plus la preuve de la faute qu'il invoque à l'encontre de son employeur au titre de l'exécution du contrat de travail conclu le 1er octobre 2007 du chef duquel il a été rémunéré pour l'horaire convenu et régulièrement déclaré ;
Attendu que le conseil de prud'hommes a omis de répondre aux demandes formées par M. X... au titre de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail ;
Attendu, l'appelant étant défaillant à rapporter la preuve d'une quelconque faute de l'employeur, qu'ajoutant au jugement entrepris, il convient de dire que sa prise d'acte du 19 mai 2008 s'analyse en une démission et de le débouter de ses demandes en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de ses demandes en délivrance de bulletins de salaire et d'une attestation Pôle emploi rectifiés ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé :
Attendu M. Loïc X..., succombant tant en sa demande de reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail du chef de la période mai 2002/ septembre 2007, qu'en ses demandes relatives à la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail conclu le 1er octobre 2007, laquelle produit les effets d'une démission, qu'il est mal fondé à invoquer une quelconque situation de travail dissimulé et un préjudice en résultant pour lui ;
Qu'ajoutant au jugement déféré, il convient donc de le débouter de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Attendu que succombant en son recours, M. Loïc X... sera condamné aux dépens d'appel et à payer à M. Franklin Y..., ès-qualités, en cause d'appel, une indemnité de procédure de 300 €, le jugement déféré étant confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. Loïc X..., intervenue le 19 mai 2008, doit produire les effets d'une démission ;
En conséquence, le déboute de l'ensemble de ses demandes relatives à la rupture ;
Le déboute de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé et de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le condamne à payer de ce chef à M. Franklin Y..., pris en qualité de mandataire liquidateur de M. Frédéric Z..., la somme de 300 € (trois cents euros) ;
Déclare le présent arrêt commun et opposable à l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, intervenant par le biais du C. G. E. A de Rennes ;
Condamne M. Loïc X... aux dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01667
Date de la décision : 03/04/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2012-04-03;10.01667 ?
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