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28/02/2012 | FRANCE | N°10/02493

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 28 février 2012, 10/02493


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02493.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 08 Septembre 2010, enregistrée sous le no 09/ 00595

ARRÊT DU 28 Février 2012

APPELANTE :

S. A. R. L. AXE DIFFUSION Zone Artisanale " Les Clottées " 72210 VOIVRES LES LE MANS

représentée par Maître Catherine POIRIER substituant Maître Alain BOUCHERON, (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIMEE :

Mademoiselle Corinne Y...... 72300 JUIGNE SUR SARTHE

présente,

assistée de Maître Olivia GUIBERT (SCP), avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02493.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 08 Septembre 2010, enregistrée sous le no 09/ 00595

ARRÊT DU 28 Février 2012

APPELANTE :

S. A. R. L. AXE DIFFUSION Zone Artisanale " Les Clottées " 72210 VOIVRES LES LE MANS

représentée par Maître Catherine POIRIER substituant Maître Alain BOUCHERON, (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIMEE :

Mademoiselle Corinne Y...... 72300 JUIGNE SUR SARTHE

présente, assistée de Maître Olivia GUIBERT (SCP), avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 28 Février 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
EXPOSE DU LITIGE
Mme Corinne Y... a été embauchée en contrat à durée déterminée le 19 février 2007 par la sarl Axe Diffusion en qualité de secrétaire commerciale coefficient 170 pour un horaire hebdomadaire de 39 heures et un salaire de 1527, 88 €.
Le 19 mars 2007, les parties ont signé un contrat à durée indéterminée pour le même poste.
Mme Corinne Y... a été convoquée le 11 août 2009 à un entretien préalable au licenciement fixé au 20 août 2009 et a été licenciée pour faute lourde le 25 août 2009.
Elle a saisi le 7 octobre 2009 le conseil de prud'hommes du Mans auquel elle a demandé de requalifier le contrat à durée déterminée du 19 février 2007 en contrat à durée indéterminée, et de condamner la sarl Axe Diffusion à lui payer à ce titre la somme de 2000 €.
Mme Corinne Y... a également demandé aux juges prud'homaux de dire que son licenciement ne reposait ni sur une faute lourde, ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse mais était abusif, et de condamner la sarl Axe Diffusion à lui payer en conséquence les sommes suivantes :-20 000 € à titre de dommages et intérêts,-1463, 57 € à titre d'indemnité de licenciement,-3745, 22 € à titre d'indemnité de préavis,-374, 52 € à titre de congés payés afférents,-219, 20 € au titre des congés payés non pris,-2000 € au titre du droit individuel à la formation (DIF),-4000 € pour remise tardive des documents de fin de contrat,-3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme Corinne Y... a demandé la condamnation de la sarl Axe Diffusion à lui remettre sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à venir l'attestation Pôle Emploi rectifiée, le certificat de travail rectifié, et le bulletin de paie correspondants aux condamnations à intervenir.
Par jugement du 8 septembre 2010, le conseil de prud'hommes du Mans a statué dans ces termes :- requalifie le contrat à durée déterminée du 19 février 2007 en contrat à durée indéterminée,- dit que le licenciement de Mme Corinne Y... ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,- condamne la sarl Axe Diffusion à verser à Mme Corinne Y... les sommes de : • 9 500 € à titre de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse • 2000 € à titre d'indemnité de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée • 1463, 57 € à titre d'indemnité de licenciement, • 3745, 22 € à titre d'indemnité de préavis, • 374, 52 € à titre de congés payés afférents, • 219, 20 € au titre des congés payés non pris, • 250 € au titre du droit individuel à la formation (DIF), • 350 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.- ordonne à la sarl Axe Diffusion de remettre à Mme Corinne Y... l'attestation Pôle Emploi rectifiée, le certificat de travail rectifié et le bulletin de paie conformes au jugement sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification,- se réserve le droit de liquider l'astreinte,- ordonne l'exécution provisoire,- déboute Mme Corinne Y... du surplus de ses demandes,- déboute la sarl Axe Diffusion de sa demande reconventionnelle,

- condamne la sarl Axe Diffusion aux dépens,

La décision a été notifiée le 10 septembre 2010 à Mme Corinne Y... et à la sarl Axe Diffusion qui en a fait appel par lettre postée le 5 octobre 2010.

OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES

La sarl Axe Diffusion demande à la cour, par observations orales faites à l'audience reprenant sans ajout ni retrait ses écritures déposées au greffe le 22 août 2011, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, d'infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau de :- réduire l'indemnité de requalification du contrat à durée déterminée à la somme de 1527, 88 €,- dire que Mme Corinne Y... a commis une faute lourde privative de l'indemnité de préavis, de l'indemnité de licenciement et d'indemnité de congés payés,- condamner Mme Corinne Y... à lui payer la somme de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- condamner Mme Corinne Y... aux dépens,

La sarl Axe Diffusion admet que le contrat à durée déterminée du 19 février 2007 est irrégulier en ce qu'il ne mentionne pas de terme, mais demande à la cour de fixer l'indemnité de requalification au minimum, puisque Mme Corinne Y... a bénéficié ensuite d'un contrat à durée indéterminée.
Elle soutient que le licenciement de Mme Corinne Y... est bien justifié par une faute lourde de la salariée et qu'elle produit les pièces démontrant :
- l'utilisation abusive de la carte bleue de l'entreprise (achats de produits commercialisés par la sarl Axe Diffusion achats d'alcools, achat de papier pour tirages photos), dont Mme Corinne Y... avait la responsabilité en l'absence du gérant M. A...,- la scannérisation de la signature du gérant pour s'octroyer un acompte de 500 €,- une absence sans autorisation le 10 juillet 2009.

Mme Corinne Y... demande à la cour par observations orales faites à l'audience reprenant sans ajout ni retrait ses écritures déposées au greffe le 7 novembre 2011 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le contrat à durée déterminée du 19 février 2007 en contrat à durée indéterminée et en ce qu'il a condamné la sarl Axe Diffusion à lui payer les sommes de :
• 2000 € à titre d'indemnité de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, • 1463, 57 € à titre d'indemnité de licenciement, • 3745, 22 € à titre d'indemnité de préavis, • 374, 52 € à titre de congés payés afférents, • 219, 20 € au titre des congés payés non pris,

Mme Corinne Y... formant appel incident demande à la cour d'infirmer le jugement pour le surplus et de condamner la sarl Axe Diffusion à lui payer les sommes de :

• 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, • 651 € au titre du D. I. F, • 4000 € pour remise tardive de l'attestation Pôle Emploi, • 3000 € pour résistance abusive, • 4000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle demande la condamnation de la sarl Axe Diffusion à lui remettre sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir l'attestation Pôle Emploi rectifiée, le certificat de travail rectifié et le bulletin de paie correspondants aux condamnations à intervenir.
Mme Corinne Y... relève que la lettre de licenciement qui lui a été adressée est " des plus curieuses " en ce qu'elle ne figure pas sur un papier à en-tête de la société, ne comporte pas la signature originale du gérant mais une mention " copie ", cette signature étant en outre différente de celle figurant sur la convocation à l'entretien préalable.
Elle rappelle qu'elle n'a obtenu l'attestation Pôle Emploi que le 24 septembre 2009, soit un mois après le licenciement et après avoir dû effectuer trois relances écrites, un déplacement à l'entreprise, et fait intervenir l'inspection du travail.
Mme Corinne Y... soutient que le contrat à durée déterminée du 19 février 2007 doit être requalifié en contrat à durée indéterminée car il n'indiquait pas de terme, et a méconnu par conséquent les dispositions de l'article L1242-7 du code du travail peu important qu'un contrat à durée indéterminée ait été signé ensuite ; que le montant de l'indemnité de requalification a été justement fixé par le conseil de prud'hommes du Mans à la somme de 2000 € puisque son dernier salaire mensuel avant le licenciement a été de 1872, 61 €.
Sur le licenciement Mme Corinne Y... soutient que le véritable motif est un motif économique et que le gérant M. A... a exposé les difficultés de la société lors de l'entretien préalable ; qu'il a d'ailleurs le même jour licencié deux autres salariés de la sarl Axe Diffusion, pour motif économique ; que son propre licenciement a été fondé sur une faute lourde dans le but de réaliser une économie en ne la remplissant pas des droits qui sont les siens dans le cadre d'un licenciement économique soit l'indemnité de préavis, l'indemnité de licenciement, le D. I. F, l'indemnité de congés payés, la convention de reclassement personnalisée ; que ce faisant la sarl Axe Diffusion a, surtout, fait preuve de mauvaise foi et porté atteinte à son honneur et à sa probité.
Mme Corinne Y... rappelle que le licenciement pour faute lourde est un licenciement disciplinaire et qu'il appartient à l'employeur de prouver la réalité de la faute du salarié et sa gravité, et même, s'agissant de la faute lourde, l'intention de nuire ; que la lettre de licenciement ne dit rien à ce sujet et que les pièces versées aux débats n'établissent pas une telle intention.
Mme Corinne Y... soutient encore :
- que les griefs invoqués en termes d'utilisation de la carte bleue de l'entreprise sont prescrits puisque l'employeur tout en affirmant les avoir découverts lors d'un contrôle comptable effectué " semaine 32 ", ne produit aucune pièce quant à ce dit contrôle, alors qu'une des factures d'achats est du 30 juin 2007 et que M. A... a de sa main fait des annotations sur des factures du 18 mars et du 8 juin 2009 ; qu'aucune mise à pied n'a été notifiée avec la convocation à l'entretien préalable.
- qu'en outre, elle n'a jamais eu la responsabilité de l'usage de la carte bleue, qui était à la disposition de tous les salariés ; qu'elle n'a fait aucun achat personnel et que lui sont imputés des achats faits par d'autres, comme les alcools et le papier photo ; qu'il est démontré que l'amende routière de 135 € a été réglée par un chèque signé par M. A..., s'agissant d'un défaut de contrôle technique du véhicule de l'entreprise, et que d'ailleurs ce grief est abandonné devant la cour.
- qu'un bon de congé a été signé par M. A... pour la journée du 10 juillet 2009, qu'elle n'a donc pas dissimulé cette absence, qui ne peut constituer une faute, a fortiori grave ou lourde.
- qu'elle n'a jamais scanné la signature du gérant, fait qui n'a pas été évoqué lors de l'entretien préalable, et que l'acompte du 29 juin 2009 n'était en rien fautif puisque connu de l'employeur et qu'il a été déduit de la paie du mois suivant soit juillet 2009.
- que la sarl Axe Diffusion devait lui verser, en exécution du jugement, la somme de 17 552, 51 € outre 350 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que malgré deux relances écrites aucun règlement n'est intervenu et qu'il lui a fallu faire appel à un huissier, ce qui a permis de recouvrer, entre le 26 avril et le 26 août 2011, la somme de 9000 € ; qu'une provision a dû cependant être versée à l'huissier pour les frais d'exécution ; que cette résistance abusive de la sarl Axe Diffusion lui a causé un préjudice.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le contrat a durée déterminée du 19 fevrier 2007
L'article L1242-7 du code du travail stipule que le contrat à durée déterminée comporte un terme fixé avec précision dès sa conclusion.
Le contrat de travail signé par Mme Corinne Y... le 19 février 2007 est ainsi rédigé : " l'engagement de mademoiselle Y... entrera en vigueur le 19 février 2007. Il prendra fin avec la réalisation de l'objet pour lequel il est conclu. Toutefois, la durée du présent contrat ne pourra être inférieure à une durée minimale d'un mois allant du 19 février 2007 au 18 mars 2007. "

Cette rédaction méconnaît l'exigence de mention d'un terme visée à l'article L1242-7 du code du travail ce que ne conteste pas la sarl Axe Diffusion.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a requalifié le contrat à durée déterminée du 19 février 2007 en contrat à durée indéterminée, la circonstance que les parties aient conclu un contrat à durée indéterminée ne privant pas la salariée du droit de demander la requalification du contrat à durée déterminée initial qu'elle estime irrégulier en contrat à durée indéterminée et l'indemnité spéciale de requalification prévue par l'article L1245-2 du code du travail.
Le salaire mensuel de Mme Corinne Y... au moment du licenciement étant de 1872, 61 €, les premiers juges ont justement fixé l'indemnité de requalification, qui ne peut être inférieure à un mois de salaire, à la somme de 2000 €.
Sur le licenciement pour faute lourde
Il résulte des dispositions de l'article L1232-1 du code du travail, que tout licenciement pour motif personnel, c'est-à-dire inhérent à la personne du salarié, doit être motivé, justifié par une cause réelle et sérieuse, et que les faits invoqués par l'employeur doivent être exacts, précis, et objectifs.
La lettre de licenciement, visée à l'article L1232-6 du code du travail, comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur, et ses termes fixent le litige, le juge devant dans la limite des griefs qu'elle énonce, rechercher la cause du licenciement et en apprécier le caractère réel et sérieux au vu des éléments fournis par les parties.
La faute lourde est celle commise par le salarié dans l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise ; elle est privative de toute indemnité, y compris de l'indemnité compensatrice de congés payés.
Si l'employeur n'a pas la charge exclusive de la preuve de la cause réelle et sérieuse du licenciement il lui appartient de prouver l'intention de nuire de son salarié.
La lettre de licenciement adressée le 25 août 2009 à Mme Corinne Y... est ainsi libellée :
" Mademoiselle,
Lors de notre entretien du jeudi 20 août 2009, nous vous avons fait part des griefs que nous étions amenés à formuler à votre encontre.
Ces griefs sont les suivants.
Vous aviez la responsabilité d'une carte bleue de l'entreprise qui était destinée exclusivement au paiement du carburant et au paiement des péages autoroutiers pour les camions.
Cette carte bleue servait aussi à effectuer quelques achats pour des produits non distribués par l'entreprise.
Or, un contrôle de comptabilité, qui a eu lieu au cours de la semaine 32, a révélé que vous aviez acheté :- certains produits distribués par l'entreprise : papier WC, produits lave-mains-des produits alcoolisés-bières (pack de 24 Heineken) du Chablis et du Bourgogne alors que l'achat d'alcool n'a jamais été autorisé.- du papier pour tirage photos qui ne pouvait manifestement (servir ?) Que pour une utilisation personnelle D'autre part il est apparu que vous aviez fait payer à l'entreprise une somme de 135 € qui aurait servi au paiement de timbres amendes concernant le véhicule mis à disposition de M. Philippe X.... Or, vous n'êtes pas sans savoir qu'en ma qualité de chef d'entreprise, je n'ai jamais fait payer à l'entreprise le moindre timbre amende, et que le principe est que chaque personne qui a la responsabilité d'une voiture dans cette société est responsable des conséquences financières des délits ou des infractions qu'elle provoque.

De plus, vous avez été absente le 10 juillet 2009 de l'entreprise, sans remplir de fiche d'absence mais surtout sans déclarer cette absence au moment de l'établissement du salaire de juillet.

Enfin, et cet élément est manifestement le plus grave, vous avez scannérisé ma signature, ce qui vous a permis de faire, sans mon autorisation préalable, un virement d'acompte sur votre salaire de fin juin 2009 d'un montant de 500 €, avec celle-ci, ou avec un document pré-signé datant de mes congés de décembre 2008. Nous nous voyons donc dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail vous liant à notre entreprise. Les conséquences immédiates de votre comportement rendent impossible la poursuite de votre activité au service de l'entreprise, même pendant un préavis. Nous vous notifions par la présente votre licenciement immédiat pour faute lourde, sans préavis, ni indemnité de rupture. Vous cesserez définitivement de faire partie du personnel de l'entreprise à la première présentation de cette lettre. "

Quant à la forme de cette lettre, il apparaît que celle-ci est signée au nom de : " Michel A... gérant " et le paraphe qui figure sous cette mention est identique à celui qui se retrouve sur d'autres documents versés aux débats et portant la signature de M. A....

Mme Corinne Y... ne tire aucune conséquence, en termes de validité de cet écrit, du fait qu'un tampon " copie " y soit porté.
Il y a lieu par conséquent de dire la lettre de licenciement du 25 août 2009 valide et d'examiner les griefs retenus par l'employeur à l'égard de sa salariée.
Ceux-ci sont au nombre de trois la société Axe Diffusion ne soutenant plus devant la cour que Mme Corinne Y... ait de manière fautive, avec la carte bleue de l'entreprise, payé une amende routière de 135 € pour un timbre amende subi par M. X..., un autre salarié, lors de la conduite du véhicule de l'entreprise ; M. X... atteste en effet qu'il s'est agi d'une part d'une amende liée à l'état du véhicule (défaut de visite technique) et d'autre part que le règlement de l'amende a été fait par chèque signé par M. A....
¤ Sur le grief d'utilisation personnelle de la carte bleue de l'entreprise :
La sarl Axe Diffusion affirme que Mme Corinne Y... avait en charge, à compter du 1ER juillet 2008 la comptabilisation des opérations bancaires et à compter du 1er janvier 2009 l'élaboration des états des rapprochements bancaires, que c'est donc " en toute logique " qu'elle avait aussi sous sa responsabilité l'utilisation de la carte bleue de l'entreprise lorsque M. A... était en déplacement.
Le contrat de travail de Mme Corinne Y... mentionne cependant qu'elle est engagée en qualité de secrétaire commerciale et énonce ses fonctions en son article2, en ces termes :- offres de prix-gestion commandes, bons livraisons clients-fiches techniques, fiches de données de sécurité-facturation clients-relances clients-saisie règlements clients

Aucune mention de responsabilités d'ordre bancaire ou comptable n'apparaît, et la sarl Axe Diffusion ne produit aucun document attribuant à Mme Corinne Y... la responsabilité de l'utilisation de la carte bleue de l'entreprise ni aucune consigne quant aux achats autorisés ou exclus.
Les nombreuses attestations de salariés versées aux débats par Mme Corinne Y... démontrent au contraire que cet usage était partagé par l'ensemble des salariés de la sarl Axe Diffusion et que nul ne lui rendait compte de l'utilisation faite.
Le conseiller de Mme Corinne Y... lors de l'entretien préalable a indiqué dans son compte-rendu avoir demandé à M. A... s'il existait des modes opératoires ou des procédures écrites pour l'utilisation de la carte bleue et que celui-ci lui a répondu que rien n'avait été mis en place, et que la carte était à la disposition des salariés au bureau de " Corinne ".
Aucun grief n'est donc caractérisé qui aurait consisté pour la salariée en un défaut de surveillance de l'utilisation de la carte bleue de l'entreprise en l'absence du gérant.
Quant à une utilisation personnelle de cette carte bancaire par Mme Corinne Y... une facture du 30 juin 2007, un ticket d'achat du 11mai 2009 pour 6, 94 € de sucre, un ticket du 28 juin 2009 pour des achats de boissons, le ticket du 18 mars 2009 portant trace d'achats de café et de vins de Bourgogne, un ticket du 16 mars 2009, sont couverts par la prescription visée à l'article L1332-4 du code du travail puisque l'engagement de la procédure, qui est de nature disciplinaire, s'agissant d'un licenciement pour faute lourde, a eu lieu plus de deux mois après leur découverte : en effet, si M. A... allègue de la réalisation d'un contrôle comptable " semaine 32 ", qui lui aurait fait découvrir les agissements fautifs de Mme Corinne Y..., il n'apporte aucune preuve de la réalité de ce contrôle, alors qu'au contraire des mentions manuscrites figurent sur les tickets d'achats, telles " pourquoi des gobelets ? vous aviez la flemme de laver vos verres ? " témoignent d'un contrôle au fur et à mesure et qui a été son fait.
En outre, aucun des achats invoqués par l'employeur ne peut être attribué avec certitude à Mme Corinne Y..., car ces achats apparaissent sur des tickets de caisse, et sur deux factures no07060536 et no0090004947dont l'auteur n'est pas identifié ; il s'agit en outre d'achats de mines, trombones feutres ou dossiers suspendus, qui sont des produits de nature à être utilisés par l'entreprise, et aussi de papier hygiénique, d'eau, de café, de jus d'orange et de sucre, produits également de nature à servir à un usage collectif ; M. X..., responsable maintenance atteste avoir acheté le papier photo pour l'étiquetage de certains produits ; les achats d'alcool consistent en un unique pack de 24 bières, une crème cassis de 3, 25 €, un Chablis de 6, 49 € et un Bourgogne blanc de 3, 49 €, réunis sur un même ticket, ces achats ne pouvant être attribués à Mme Corinne Y... plutôt qu'à un autre salarié, pas plus qu'il n'est établi par l'employeur qu'ils aient eu une utilisation personnelle plutôt que collective ; Mme B..., assistante commerciale, atteste uniquement que du papier photo a été commandé alors que la société n'en utilise pas ce qui est contredit par M. X..., et affirme qu'elle a vu Mme Corinne Y... " imprimer des photos sur l'imprimante de M. X... " ce qui ne renseigne pas sur le caractère personnel ou non de l'usage.
La réalité de ce grief n'est donc pas établie par la sarl Axe Diffusion.
¤ Sur le grief d'absence non autorisée du 10 juillet 2009 :
L'employeur fait grief à Mme Corinne Y... d'avoir été absente de l'entreprise le 10 juillet 2009 sans en avoir eu l'autorisation, et sans avoir rempli une fiche d'absence ; la sarl Axe Diffusion allègue en outre que la demande de congé pour la date du 10 juillet 2009, produite par la salariée, porte une signature de M. A... qui a été scannée.
Il est cependant établi que le document produit par Mme Corinne Y... est établi dans les formes habituelles à l'entreprise, puisque le gérant de la sarl Axe Diffusion ne cochait jamais la case " accepté " et se contentait de signer la demande, dont il conservait l'original tandis qu'une simple copie était restituée au salarié.
Ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges, le gérant de la sarl Axe Diffusion a par conséquent à tout le moins régularisé cette absence, s'il ne l'avait pas autorisée initialement.
L'employeur en affirmant seulement : " il est permis de croire que Mme Corinne Y... a pu une nouvelle fois scannériser la signature de M. A... afin de justifier son absence ", sans faire la démonstration de l'opération informatique alléguée, ne caractérise aucune faute de la salariée, a fortiori aucune faute grave, et moins encore marquant une intention de nuire à l'entreprise.
¤ Sur le grief de scannérisation de la signature de M. A... pour versement d'un acompte sur salaire de 500 € :
Ce grief n'a pas été évoqué lors de l'entretien préalable, tandis que la possibilité de se voir verser un acompte sur salaire est expressément mentionnée dans le contrat de travail de Mme Corinne Y....
Il est acquis d'autre part que M. A... ne refusait jamais d'accéder à une telle demande, ainsi qu'il ressort de l'attestation de Mme B..., assistante commerciale qui est produite par l'employeur.
Il est également certain que Mme Corinne Y... n'a pas opéré de façon dissimulée puisqu'elle a dit avoir réalisé ce virement dès le 2 juillet 2009 à Mme B..., qui là encore en atteste en exposant qu'en lui donnant le nom de la banque sur laquelle son salaire pouvait être versé Mme Corinne Y... lui a dit " mais tu me vireras 500 € de moins sur ma paie je me suis fait un virement d'acompte ".
Si le bulletin de paie de juillet 2009, établi par le cabinet comptable, ne porte pas mention de cet acompte, il n'est pas contesté par l'employeur que la somme en question n'a pas été versée en juillet à Mme Corinne Y..., puisqu'elle avait indiqué l'avoir d'ores et déjà perçue.
L'employeur fait d'autre part grief à Mme Corinne Y... d'avoir scanné sa signature pour faire ce virement bancaire ; il a d'ailleurs le 16 septembre 2009 déposé plainte auprès de la gendarmerie de la Suze sur Sarthe en indiquant : " Corinne a scanné ma signature sur son poste informatique, vraisemblablement pour l'utiliser. Elle l'avait effacée mais un informaticien l'a rétablie ".
M. A... a, ce jour là, précisé aux enquêteurs que " cette somme de 500 € a été soustrait sur son salaire du mois suivant ", ce qui démontre qu'aucun détournement de fonds n'a eu lieu au préjudice de l'entreprise, et malgré ses affirmations sur la découverte d'un scan de sa signature sur le poste informatique de Mme Corinne Y... par un informaticien de l'entreprise, il ne verse aux débats aucune attestation ou pièce en ce sens alors que celle-ci pourrait établir la matérialité du grief.
Il est d'autre part acquis, et affirmé par M. A... comme par Mme B..., que des feuilles pré-signées étaient laissées à disposition pour des virements urgents, la télétransmission effectuée le 29 juin 2009 pour virement de 500 € sur le compte BPO de Mme Corinne Y... portant en effet la signature du gérant en bas de page et non sous le texte.
M. A... a indiqué à ce sujet : " Y... Corinne a utilisé une feuille que j'avais précédemment signée, ce que je fais quand je pars en vacances. Je signe toujours au bas de la page comme sur la demande de virement effectuée. Là, je n'étais pas en vacances, donc j'aurais signé juste au dessous de la demande.
Le virement de 500 €, dans un contexte d'acceptation et même de contractualisation de la pratique, au moyen d'un document pré-signé et annoncé au service comptable par la salariée elle-même, qui n'a de ce fait perçu aucune somme indue, ne caractérise pas une intention de nuire à l'employeur, n'a pas de caractère de gravité pouvant empêcher le maintien de la salariée dans l'entreprise, et ne constitue pas même un fait fautif pouvant être retenu comme une cause de licenciement.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et a justement alloué à Mme Corinne Y... les indemnités de rupture du contrat de travail, soit l'indemnité de licenciement pour un montant de 1463, 57 € calculé en application des dispositions de l'article R1234- 2du code du travail, et l'indemnité de préavis, qui correspond compte-tenu de l'ancienneté de Mme Corinne Y... et par application des dispositions de l'article L1234-1 du code du travail, auxquelles renvoie le contrat de travail du 19 mars 2007, à deux mois de salaire, soit à la somme de 3745, 22 € outre 374, 52 € au titre des congés payés y afférents.
Le jugement est encore confirmé en ce qu'il a condamné la sarl Axe Diffusion, en l'absence de toute faute lourde de la salariée, à lui payer au titre des congés payés non pris, la somme de 219, 20 €.
Mme Corinne Y... comptant plus de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise au moment de son licenciement (ancienneté de 2 ans et sept mois) et la sarl Axe Diffusion employant au moins onze salariés (douze au moment du licenciement) trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article 1235-3 du code du travail selon lesquelles l'indemnité due au salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, lesquels, en l'occurrence, se sont élevés à la somme de 11 714, 18 € ainsi qu'il apparaît sur l'attestation Pôle emploi établie le 31 août 2009.
Le jugement doit en conséquence être infirmé en ce qu'il a alloué à Mme Corinne Y... une indemnité correspondant à cinq mois de salaire, inférieure à 11 714 €.
Mme Corinne Y... était âgée de 30 ans au moment de la rupture et ne fait pas état de charges de famille ; elle indique " avoir eu du mal à retrouver un emploi " sans donner plus de précisions sur sa situation professionnelle ; il lui sera dans ces conditions justement alloué une indemnité pour licenciement abusif de 16 000 €.
Sur le droit individuel à la formation
Mme Corinne Y... avait au moment de la rupture du contrat de travail acquis 57 heures au titre du droit individuel à la formation, et a été privée de leur utilisation, le licenciement étant notifié pour faute lourde ; elle a de ce fait nécessairement subi un préjudice qui sera réparé par le versement à titre de dommages et intérêts de la somme de 615 €.

Sur la remise tardive de l'attestation pôle emploi Licenciée le 25 août 2009, Mme Corinne Y... s'est présentée à l'entreprise le 3 septembre 2009, puis a écrit le 9 septembre 2009, et a fait intervenir l'inspection du travail le 11 septembre 2009 ; elle a reçu le 14 septembre 2009 une attestation Pôle Emploi inutilisable, car non signée par l'employeur, puis le document utile, le 24 septembre 2009.

La multiplicité des demandes et l'obtention du document nécessaire pour son inscription à Pôle Emploi un mois après le licenciement lui a nécessairement causé un préjudice que la cour évalue à la somme de 1000 €.
La sarl Axe Diffusion est condamnée à remettre à Mme Corinne Y... l'attestation Pôle Emploi rectifiée, le certificat de travail rectifié, un bulletin de paie rectifié, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé 15 jours à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de deux mois.
Sur la demande pour résistance abusive
Mme Corinne Y... justifie avoir, par l'intermédiaire de son conseil, réclamé le 13 septembre 2010, puis le 28 septembre 2010, le versement des sommes prononcées par le conseil de prud'hommes du Mans à titre de condamnation de la sarl Axe Diffusion, avec exécution provisoire, soit un montant de 17 552, 51 €.
Elle a dû saisir un huissier et n'avait au 26 août 2011, soit un an après le prononcé de la décision, recouvré que la somme de 9 000 € ; Cette attitude caractérise de la part de la sarl Axe Diffusion, qui n'a pas sollicité la suspension de l'exécution provisoire et n'allègue pas de difficultés de trésorerie justifiant ce non paiement, une résistance abusive à exécuter le jugement.
ll en est résulté pour Mme Y... un préjudice distinct de celui réparé par le versement des intérêts moratoires puisqu'elle a dû engager des frais pour obtenir l'exécution du jugement, qui était assortie de l'exécution provisoire ; la sarl Axe Diffusion est condamnée à lui payer à titre de dommages et intérêts, la somme de 1000 €.
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
Il parait inéquitable de laisser à la charge de Mme Corinne Y... les frais engagés dans l'instance d'appel et non compris dans les dépens ; la sarl Axe Diffusion est condamnée à lui payer, pour l'en indemniser et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2000 € ; la sarl Axe Diffusion est déboutée de sa demande à ce titre.

Succombant à l'instance d'appel, la sarl Axe Diffusion est condamnée aux dépens.
Les dispositions du jugement sur les dépens et les frais non compris dans les dépens sont confirmées.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes du Mans du 8 septembre 2010, sauf en ce qu'il a condamné la sarl Axe Diffusion à payer à Mme Corinne Y... la somme de 9500 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 250 € pour perte du droit individuel à la formation ;
Statuant à nouveau sur ces deux points :
CONDAMNE la sarl Axe Diffusion à payer à Mme Corinne Y... la somme de 16 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
CONDAMNE la sarl Axe Diffusion à payer à Mme Corinne Y... la somme de 615 € à titre de dommages et intérêts pour perte du droit individuel à la formation ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la sarl Axe Diffusion à payer à Mme Corinne Y... la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation Pôle Emploi ;
CONDAMNE la sarl Axe Diffusion à payer à Mme Corinne Y... la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
CONDAMNE la sarl Axe Diffusion à remettre à Mme Corinne Y... l'attestation Pôle Emploi rectifiée, le certificat de travail rectifié, un bulletin de paie rectifié, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé 15 jours à compter de la notification du présent arrêt et pour une durée de deux mois ;
CONDAMNE la sarl Axe Diffusion à payer à Mme Corinne Y... la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE la sarl Axe Diffusion de sa demande à ce titre ;
CONDAMNE la sarl Axe Diffusion aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02493
Date de la décision : 28/02/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2012-02-28;10.02493 ?
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