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07/02/2012 | FRANCE | N°10/02695

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 07 février 2012, 10/02695


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 07 Février 2012
ARRÊT N BAP/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02695. Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 30 Septembre 2010, enregistrée sous le no F 09/ 00639

APPELANT :

Maître Jacques X..., ès-qualités de mandataire liquidateur de la SAS T. M. T. Les Bureaux de L'Etoile... 72015 LE MANS CEDEX 2

représenté par Maître Thierry PAVET (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIMES :

C. G. E. A. UNEDIC/ AGS DE RENNES Le Magister 4 cours Raphaël Binet 35069 R

ENNES CEDEX

représenté par Maître Marie-Caroline MARTINEAU, substituant Maître Luc LANNE (SCP) avocat au ...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT DU 07 Février 2012
ARRÊT N BAP/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02695. Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 30 Septembre 2010, enregistrée sous le no F 09/ 00639

APPELANT :

Maître Jacques X..., ès-qualités de mandataire liquidateur de la SAS T. M. T. Les Bureaux de L'Etoile... 72015 LE MANS CEDEX 2

représenté par Maître Thierry PAVET (SCP), avocat au barreau du MANS

INTIMES :

C. G. E. A. UNEDIC/ AGS DE RENNES Le Magister 4 cours Raphaël Binet 35069 RENNES CEDEX

représenté par Maître Marie-Caroline MARTINEAU, substituant Maître Luc LANNE (SCP) avocat au barreau du MANS

Monsieur Christophe Y...... 72450 MONTFORT LE GESNOIS

représenté par Madame Sylvie Z..., déléguée syndicale,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Décembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 07 Février 2012, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCÉDURE
M. Christophe Y... a été engagé par la société Tavano Marc terrassement (TMT) en qualité de conducteur d'engins, niveau II, coefficient 185, contre une rémunération brute mensuelle de 8 112 francs pour une durée hebdomadaire de travail de 39 heures, selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 25 septembre 2000, à effet au 20 octobre 2000. Le contrat de travail stipulait par ailleurs une clause de dédit-formation du fait du financement par la société TMT au profit de M. Christophe Y... du permis C-32 tonnes. La convention collective applicable est celle, nationale, des ouvriers du bâtiment.

M. Christophe Y... a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute grave, avec mise à pied à titre conservatoire, par lettres recommandées avec accusé de réception du 11 septembre 2009, puis du 18 septembre 2009.
L'entretien préalable s'est tenu le 30 septembre 2009.
M. Christophe Y... a été licencié, effectivement pour faute grave, par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 octobre 2009.
La société TMT a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce du Mans du 27 octobre 2009, décision convertie en liquidation judiciaire par jugement du même tribunal du 5 janvier 2010. M. X... a été désigné successivement mandataire judiciaire, puis mandataire liquidateur.
M. Christophe Y..., après avoir contesté son licenciement auprès de son employeur par courrier du 13 octobre 2009, a saisi le conseil de prud'hommes du Mans le 5 novembre 2009 aux fins que :- il soit dit et jugé que son licenciement ne repose pas sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse,- en conséquence, sa créance sur la liquidation judiciaire de la société TMT soit fixée aux sommes suivantes. 2 918, 14 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 291, 81 euros de congés payés afférents,. 2 713, 87 euros d'indemnité de licenciement,. 1 144, 78 euros de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire,. 17 508, 84 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif,. 2 332, 20 euros au titre de la formation FIMO,. 750 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,- la décision à intervenir soit déclarée opposable au CGEA UNEDIC/ AGS de Rennes dans la limite de sa garantie légale,- M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, soit condamné aux entiers dépens.

Par jugement du 30 septembre 2010 auquel il est renvoyé pour l'exposé des motifs, le conseil de prud'hommes a :- dit que le licenciement ne reposait pas sur une faute grave, ni même sur une cause réelle et sérieuse et qu'il était donc abusif,- fixé la créance de M. Christophe Y... sur la liquidation judiciaire de la société TMT aux sommes suivantes. 17 508, 84 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif,. 2 918, 14 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 291, 81 euros de congés payés afférents,. 2 713, 87 euros d'indemnité de licenciement,. 1 144, 78 euros de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire,. 350 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,- rappelé que les sommes accordées porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société TMT de la convocation devant le bureau de conciliation (10 novembre 2009) pour les créances salariales, et à compter du pronocé du présent pour les créances indemnitaires,- débouté M. Christophe Y... du surplus de ses demandes,- déclaré le présent opposable au CGEA UNEDIC/ AGS de Rennes qui devra faire l'avance des dites créances dans la limite de sa garantie légale,- débouté M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, aux entiers dépens.

Cette décision a été notifiée à M. Christophe Y..., à M. X..., ès qualités, et au CGEA de Rennes le 5 octobre 2010. M. X..., ès qualités, en a formé régulièrement appel par lettre recommandée avec accusé de réception postée le 26 octobre 2010.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

À l'audience, reprenant également oralement ses conclusions du 31 octobre 2011, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a considéré que le licenciement de M. Christophe Y... n'était justifié ni par une faute grave, ni par une cause réelle et sérieuse, a fait droit à ses demandes financières corollaires. Il demande donc que M. Christophe Y... soit débouté de l'ensemble de ses prétentions de ces chefs et condamné à lui verser 1 500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, outre qu'il soit condamné aux entiers dépens.
Il fait valoir que :- la prescription n'est pas acquise ; en effet, M. Christophe Y... a refusé de répondre aux interrogations réitérées de son employeur relativement à la possession de sa carte conducteur, attitude dont l'employeur a fini par tirer les conséquences,- la faute grave est démontrée en ce que o il appartient quand même au chauffeur de justifier auprès de son employeur qu'il est apte à la conduite des véhicules que ce dernier lui confie, o si M. Christophe Y... était en possession de la carte conducteur, son refus d'en justifier auprès de la société TMT constitue une insubordination inadmissible, o si M. Christophe Y... n'était pas en possession de la carte conducteur, il a conduit des véhicules sans être titulaire du document indispensable pour ce faire, engageant ainsi sa responsabilité pénale et civile, mais également celle de la société TMT, ce qui est tout aussi inadmissible, o dans les deux cas, son maintien dans l'entreprise était impossible,- relativement à la formation FIMO, rien n'empêchait le salarié, au fait de son obligation de validation tous les cinq ans, de déclencher le passage de cette formation, l'employeur n'ayant aucun intérêt à refuser d'y faire droit.

* * * *
Par conclusions du 5 décembre 2011 reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, l'association pour la Gestion du régime de garantie des créances des salariés (l'AGS), agissant par le truchement du Centre de gestion et d'études (CGEA) de Rennes, sollicite, formant appel incident :- au principal, l'infirmation du jugement déféré quant aux dispositions lui faisant grief,- subsidiairement, de dire et juger qu'elle ne sera tenue à garantie que dans les limites et plafonds légaux des articles L. 3253-8, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.

Elle s'associe aux observations du mandataire liquidateur. Elle somme, par les présentes, M. Christophe Y... de verser aux débats sa carte de conducteur de poids lourds. Elle fait observer, à titre subsidiaire, que la somme qui a été allouée à M. Christophe Y... à titre de dommages et intérêts est excessive au regard du minimum légal.

* * * *
À l'audience, reprenant également oralement ses conclusions du 5 décembre 2011, ici expressément visées et auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, M. Christophe Y... sollicite la confirmation du jugement déféré et qu'au surplus, lui soient accordés 1 000 au titre de ses frais irrépétibles d'appel et que M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, soit condamné aux entiers dépens.
Il réplique que :- en l'absence de toute date précise quant à la connaissance par l'employeur du fait fautif du salarié sur lequel il fonde son licenciement, la prescription est acquise,- de toute façon, l'employeur ne peut lui opposer sa propre faute, puisque c'est à lui qu'incombait, avec l'entrée en vigueur du décret du 10 mars 2006, d'accomplir les démarches nécessaires à l'obtention de la carte de conducteur désormais requise pour la conduite des véhicules poids lourds par son salarié,- au surplus, il a été licencié, et pour faute grave, car il ne faisait que réclamer son dû à son employeur (ses congés payés qui lui ont été finalement réglés par le mandataire liquidateur), employeur vis-à-vis duquel une procédure collective a été ouverte peu de temps après, une liquidation judiciaire finissant par être prononcée,- son préjudice a exactement été estimé par les premiers juges.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera constaté, en préambule, que M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, n'étend plus son appel aux dispositions du jugement de première instance ayant débouté M. Christophe Y... de sa demande d'indemnisation au titre de la formation FIMO, de même que l'AGS et M. Christophe Y... ne forment pas appel incident de ce chef. En l'absence de moyen finalement développé en cause d'appel, la décision des premiers juges sera confirmée sur ce point.
* * * *
L'article L. 1235-1 du code du travail donne pouvoir au juge, devant lequel un licenciement est contesté, d'apprécier notamment la régularité de la procédure suivie.
L'article 1332-4 du code du travail dispose que : " Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ". Néanmoins, l'employeur peut invoquer une faute prescrite lorsqu'un nouveau fait fautif du salarié est constaté. Ceci suppose, toutefois, que les deux fautes procèdent d'un comportement identique. Par ailleurs, l'employeur peut prendre en compte un fait fautif antérieur à deux mois, dans la mesure où le comportement du salarié a persisté dans l'intervalle. Enfin, dans la mesure où un fait fautif a été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de ce qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement des poursuites. La connaissance des faits fautifs par l'employeur s'entend de l'information exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés au salarié.

La société TMT a licencié M. Christophe Y... le 3 octobre 2009 pour faute grave se fondant sur l'acte d'insubordination suivant : " Nous vous avons demandé à plusieurs reprises votre carte de conducteur poids lourds. Vous n'avez pu nous présenter cette carte ".

L'engagement des poursuites disciplinaires remonte quant à lui au11 septembre 2009, date à laquelle la société TMT a adressé à M. Christophe Y... une convocation à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour faute grave. Peu importe que la société TMT ait renouvelé cette convocation le 18 septembre 2009, déplaçant l'entretien préalable à une date ultérieure. Ce report ne suspend pas, en effet, le cours de la prescription de deux mois.
En application de l'article L. 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit être motivée. Le ou les motif (s) invoqué (s), même s'il (s) n'a (n'ont) pas à être daté (s) doit (doivent) être précis, c'est à dire matériellement vérifiable (s). La lettre de licenciement qu'a reçue M. Christophe Y... répond apparemment à cette exigence de motivation. Cependant, comme il n'y est pas indiqué de date (s) quant aux faits qui y sont mentionnés, encore faut-il, puisque le salarié excipe de leur prescription, que la société TMT fournisse, à l'appui, des éléments permettant de situer les dits faits. Or, la société TMT ne produit strictement aucune pièce permettant de déterminer les dates exactes auxquelles elle aurait sollicité de M. Christophe Y... sa carte de conducteur (qui ne se confond pas avec le permis poids lourds, ayant été introduite par un décret du 10 mars 2006 relatif aux obligations des employeurs de conducteurs salariés exerçant leur activité sur des véhicules équipés d'un chronotachygraphe électronique), sollicitations qui :- d'une part, se seraient traduites par une absence de réponse de M. Christophe Y...,- d'autre part, au moins pour la dernière puisqu'il y en aurait eu plusieurs, s'inscrirait dans le délai légal de deux mois de prescription, soit en l'espèce entre le 11 juillet et le 11 septembre 2009.

À défaut de faire cette preuve, les faits invoqués par la société TMT au soutien du licenciement de M. Christophe Y... doivent être considérés comme prescrits.
* * * *
À supposer que ces faits ne soient pas prescrits, il convient, en application de l'article L. 1235-1 du code du travail, d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs énoncés dans le courrier qui notifie la mesure.
Les termes de cette missive fixant les limites du litige, celle-ci sera reprise ci-après : " Pour faire suite à notre convocation par lettre recommandée avec accusé réception envoyée le 18 septembre 2009 à un entretien préalable prévu le 30 septembre 2009 auquel vous vous êtes rendu et en vertu des dispositions du Code du Travail qui donne à l'employeur comme au salarié le droit de mettre fin au contrat de travail, nous avons le regret de vous notifier, par la présente lettre recommandée avec accusé de réception, votre licenciement pour faute grave liée aux faits suivants : Nous vous avons demandé à plusieurs reprises votre carte de conducteur poids lourds. Vous n'avez pu nous présenter cette carte. Par conséquent, votre comportement s'analyse comme un acte d'insubordination à l'égard de votre employeur. Ce comportement irrespectueux démontre votre manque de sérieux et un manque de conscience professionnelle. Cet acte est particulièrement inacceptable car il occasionne des dysfonctionnements majeurs pour notre société. Lors de l'entretien préalable, nous vous avons exposé nos griefs à votre encontre. Vos réponses ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Vous comprendrez aisément que cet acte d'insubordination qui vous est personnellement imputable constitue une violation grave et délibérée de vos obligations contractuelles qui ne peut être tolérée au sein de notre Société. Votre comportement fautif perturbe gravement l'organisation et le bon fonctionnement de la Société et nécessite une réaction rapide de notre part dans l'intérêt même de l'entreprise. Au regard notamment de vos fonctions, les faits reprochés constituent des fautes contractuelles graves rendant impossibles votre maintien au sein de la Société, ce qui a justifié la mesure immédiate de mise à pied conservatoire jusqu'au terme de la présente procédure. En conséquence, nous sommes amenés à vous notifier votre licenciement pour faute grave au vu des faits précités... ".

La faute grave est effectivement celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur de l'établir. Or, la société TMT ne produit strictement aucune pièce permettant d'accréditer qu'elle aurait sollicité à plusieurs reprises de M. Christophe Y... sa carte de conducteur, sollicitations qui se seraient traduites à chaque fois par une absence de réponse.

Et de fait, la question de la réalité-même du grief invoqué par la société TMT à l'appui du licenciement de M. Christophe Y... se pose, alors que le décret no2006-303 du 10 mars 2006 relatif aux obligations des employeurs de conducteurs salariés exerçant leur activité sur des véhicules équipés d'un chronotachygraphe électronique, en vigueur,- impose, sous peine de sanctions pénales, au conducteur salarié affecté à la conduite d'un véhicule soumis aux dispositions du règlement CEE no3820/ 85 du 20 décembre 1985, équipé d'un appareil de contrôle conforme à l'annexe I B du règlement CEE no3821/ 85 du 20 décembre 1985, d'être détenteur d'une carte conducteur en cours de validité,- et que, la redevance d'usage de la dite carte est dans tous les cas à la charge de l'employeur. Il n'est donc pas possible que la société TMT ait pu ignorer et/ ou tolérer pendant plus de trois années que M. Christophe Y... n'ait pas été titulaire de cette carte conducteur, d'autant qu'il lui appartenait en tant qu'employeur d'informer ses conducteurs de cette nouvelle réglementation, de les former, ainsi que, comme on vient de le dire, de payer la dite carte conducteur. L'alternative est que la société TMT ne possédait pas de véhicules équipés de chronotachygraphes numériques pour lesquels cette carte conducteur est nécessaire, puisque c'est sur cette carte, insérée dans le chronotachygraphe numérique, qu'est enregistrée l'activité du conducteur et, qu'elle s'est donc saisie d'un prétexte afin de licencier un salarié vis-à-vis duquel elle était en difficulté du fait de ses réclamations financières. Il est établi en effet que M. Christophe Y..., du fait du défaut de paiement par la société TMT de l'ensemble de ses cotisations auprès de la caisse de congés payés, n'avait pas perçu ses congés payés qui ont été régularisés dans le cadre de la procédure collective, à hauteur de 2 335, 28 euros.

Dans ces conditions, aucune faute grave ne peut être retenue à l'encontre de M. Christophe Y..., pas plus d'ailleurs qu'une faute qui serait une cause réelle et sérieuse de licenciement.
* * * *
Par voie de conséquence, le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement de M. Christophe Y... par la société TMT ne reposait ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse doit être confirmé.
* * * *
M. Christophe Y... est dès lors en droit d'obtenir les indemnités de rupture qui ne lui ont pas été versées, ainsi qu'un rappel de salaire au titre de la période de mise à pied à titre conservatoire. Les montants n'en sont pas contestés ; la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle a alloué à M. Christophe Y... :. 2 918, 14 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 291, 81 euros de congés payés afférents,. 2 713, 87 euros d'indemnité de licenciement,. 1 144, 78 euros de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire.

M. Christophe Y... peut aussi prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ayant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise comptant elle-même plus de onze salariés lors du licenciement (cf attestation Assedic), ce sont les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail qui ont vocation à s'appliquer, d'après lesquelles : "... le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ". C'est la rémunération brute dont bénéficiait le salarié pendant les six derniers mois précédant la rupture de son contrat de travail qui est à considérer comme base d'indemnité minimale. L'éventuel surcroît relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.

M. Christophe Y... allait sur ses 42 ans et avait une ancienneté, l'ayant décomptée uniquement à partir de la signature de son contrat de travail à durée indéterminée chez TMT et la cour est tenue par sa demande, de neuf ans et neuf jours au moment de son licenciement. Il ne verse aucun élément justifiant de sa situation passé cette date.

Dans ces conditions et au regard de l'attestation Assedic qui lui a été remise, comme de ses deux derniers bulletins de salaire, infirmant le jugement déféré, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui a été octroyée à M. Christophe Y... sera ramenée à la somme de 14 500 euros.
Ces créances sont évidemment fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société TMT et, l'AGS n'est tenue à garantie que dans les limites et plafonds légaux des articles L. 3253-8, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.
Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, en l'absence de justification de ce que le Pôle emploi a versé des indemnités de chômage à M. Christophe Y....
* * * *
Les dispositions de la décision entreprise relativement aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées.
M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, succombant en son appel en sa majeure partie sera condamné à verser à M. Christophe Y... 800 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, étant débouté de sa propre demande de ce chef, et supportera les entiers dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris, hormis quant au montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Statuant à nouveau de ce chef,
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société TMT la créance de M. Christophe Y... d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 14 500 euros,
Dit que l'AGS n'est tenue à garantie que dans les limites et plafonds légaux des articles L. 3253-8, L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail,
Condamne M. X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société TMT, à verser à M. Christophe Y... 800 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel,
Déboute M. X..., ès qualités, de sa demande du même chef,
Condamne M. X..., ès qualités, aux entiers dépens de l'instance d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02695
Date de la décision : 07/02/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2012-02-07;10.02695 ?
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