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13/12/2011 | FRANCE | N°10/01059

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 13 décembre 2011, 10/01059


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 13 Décembre 2011
ARRÊT N AD/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01059. Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 09 Avril 2010, enregistrée sous le no 09/ 00222

APPELANT :
Monsieur Sébastien X...... 72230 GUECELARD
présent, assisté de Maître Christine BORDET-LESUEUR, avocat au barreau de CHARTRES

INTIMEE :
S. A. S. ETOILE DU MAINE 72 Route d'Angers-BP 4 72230 MONCE EN BELIN
représentée par Maître Jean-Luc JACQUET, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR

:
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été dé...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 13 Décembre 2011
ARRÊT N AD/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01059. Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 09 Avril 2010, enregistrée sous le no 09/ 00222

APPELANT :
Monsieur Sébastien X...... 72230 GUECELARD
présent, assisté de Maître Christine BORDET-LESUEUR, avocat au barreau de CHARTRES

INTIMEE :
S. A. S. ETOILE DU MAINE 72 Route d'Angers-BP 4 72230 MONCE EN BELIN
représentée par Maître Jean-Luc JACQUET, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 13 Décembre 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

EXPOSE DU LITIGE
M. Sébastien X... a été embauché le 8 janvier 2001 en contrat à durée indéterminée à effet au 15 janvier 2001, par la sas Etoile du Maine 72 dont l'activité est la vente de véhicules utilitaires et industriels, comme conseiller commercial véhicules utilitaires, avec un statut cadre, position 1, indice 72, sur le secteur du département de la Sarthe et selon un forfait annuel de 217 jours travaillés.
La convention collective applicable est la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités annexes, ainsi que du contrôle technique automobile, du 15 janvier 1981.
M. X... a perçu une rémunération fixe de 7500 F outre " 10 % de la marge liée VN/ VO véhicules utilitaires ", 500 F de prime par nouveau client si marge supérieure à 5000F par contrat de location et par contrat d'entretien, et une prime de 10 000F si l'objectif annuel est atteint.
Par avenant du 6 décembre 2002 les partenaires sociaux ont révisé la classification des emplois et la sas Etoile du Maine 72 a notifié en conséquence le 16 mai 2003 à M. X... qu'il était à compter du 1er juin 2003 classé conseiller des ventes UL niveau I degré B avec un salaire minimum conventionnel de 1080 € (au lieu de 754, 63 €). Le 28 janvier 2009 M. X... a signé l'acte de formation d'une société W. L. M. ayant pour objet la vente de spas-saunas-hammam et l'a immatriculée au registre du commerce et des sociétés du Mans ; il y apparaît comme gérant, ainsi que M. A....
Après l'envoi d'un premier courrier du 28 janvier 2009 dans lequel il demandait à " être rétabli dans des conditions de travail normales ", M. X..., par lettre adressée à la sas Etoile du Maine 72 en recommandé avec accusé de réception du 23 février 2009, a pris acte de la rupture du contrat de travail, en la disant imputable à l'employeur.
M. X... a saisi le conseil de prud'hommes du Mans le 2 avril 2009, pour obtenir la condamnation de la sas Etoile du Maine 72 à lui payer les sommes suivantes :- indemnité de licenciement : 7 582, 75 €- indemnité compensatrice de préavis : 14205 €-- congés payés y afférents : 1 420 €.- Solde de congés payés : 9759. 18 €.- Solde de commissions : 6272 €- congés payés sur commissions : 627. 20 €- rappel de salaire : 38. 706, 74 €- congés payés afférents : 3. 870, 67 €- remboursement frais financiers : 785, 80 €- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 56 000 €- article 700 du code de procédure civile : 4 000 €

Par jugement du 9 avril 2010 le conseil de prud'hommes du Mans a débouté M. X... de ses demandes, dit que la rupture du contrat de travail s'analyse en une démission, et condamné M. X... à payer à la sas Etoile du Maine 72 la somme de 9598 € pour non respect du préavis et la somme de 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement a été notifié le 13 avril 2010 à la sas Etoile du Maine 72 et à M. X... qui en a fait appel par lettre recommandée avec accusé de réception postée le 20 avril 2010.
OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES
M. X... demande à la cour par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures, d'infirmer le jugement, de dire que sa prise d'acte de la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de condamner la sas Etoile du Maine 72 à lui verser les sommes de :
- indemnité de licenciement : 7 582, 75 €- indemnité compensatrice de préavis : 14 205 €- congés payés afférents : 1 420 €- solde de congés payés : 9759, 18 € ramené à 8378, 17 € depuis la communication adverse-solde de commissions : 6272 € ramené à 5152 € depuis la communication adverse-congés payés sur commissions : 627, 20 € ramené à 515, 20 € depuis la communication adverse-rappel de salaire : 38. 706, 74 €- congés payés afférents : 3. 870, 67 €- remboursement frais financiers : 785, 80 €- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 56 000 €-4000 € au titre de l'Article 700 du code de procédure civile
M. X... demande la délivrance de I'attestation ASSEDIC et du certificat de travail, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;
M. X... soutient à l'appui de ses demandes :
- que sa prise d'acte doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse puisqu'il démontre les manquements de l'employeur à ses obligations contractuelles, qui ont été :
• de lui créer sans contrepartie une surcharge de travail, par l'absence de chef des ventes à partir d'avril 2007, et du fait de l'absence de contrôle des différentes étapes liées à la vente, ce qui l'a obligé à assurer le suivi administratif des dossiers ;
• de régler avec retard ses commissions, et sans en expliquer le montant ;
• de diminuer la marge de vente, et donc sa commission, qui est de 10 % de la marge, par l'imputation des frais financiers subis par l'entreprise lorsqu'un client règle au-delà du délai dont elle dispose elle-même pour payer le véhicule au constructeur, alors que cette imputation n'est pas prévue au contrat de travail ; que le montant de ces " frais financiers " doit lui être remboursé ;
M. X... soutient également qu'il lui restait dû 53 jours de congés payés, non réglés, alors que la sas Etoile du Maine 72 en admet en tout cas 45, 50 ; qu'il lui restait aussi un solde de commissions, et qu'il a travaillé certains samedis et dimanches, qui sont des jours hors forfait, et doivent donc lui être réglés ;
La sas Etoile du Maine 72 demande à la cour par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures de :
- constater que la rupture du contrat de travail résulte de la seule volonté unilatérale de M. X... au moment de la création de sa propre entreprise ; que la prise d'acte s'analyse en une démission ;
- débouter M. X... de toutes ses demandes ;
- à titre reconventionnel, de condamner M. X... à lui payer à titre de dommages et intérêts, pour non-respect du préavis la somme de 9 598, 00 € ;
- de condamner M. X... à lui payer la somme de 4 000, 00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
La sas Etoile du Maine 72 soutient :
- quant à l'absence de chef des ventes, d'une part que M. Y... a effectué cette fonction après avril 2007 ; d'autre part que M. X... ne réalisait déjà pas, avant cette date, les tâches administratives lui incombant et résultant pourtant de la définition de ses fonctions par la convention collective ;
- quant à l'imputation des frais financiers sur les commissions qu'il s'agit d'un usage général et constant, parfaitement connu de M. X..., ainsi que d'une donnée économique objective, et que ses propres fiches de ventes du salarié montrent qu'il tenait lui-même compte des frais financiers dans le calcul de la rentabilité d'une opération ;
- quant au règlement des commissions, que celui-ci est intervenu dès paiement par le client, parfois avec Ie décalage normal d'un mois découlant de la nécessité d'établir la paye à sa date mensuelle ; que le montant de celles-ci n'était pas inexpliqué puisque M. X... avait accès au dossier complet avec toutes les factures liées à l'achat et à la vente, ainsi que cela résulte des fiches de décision qu'il a établies lui-même ; que certaines affaires ne sont pas encore soldées ;
- quant aux congés payés, que 45, 50 jours lui restaient dûs mais ont été compensés par le préavis que M. X... devait et n'a pas effectué ; que la brusque rupture du contrat de travail par M. X... a préjudicié à l'organisation de l'entreprise et justifie une indemnisation qui ne saurait être inférieure, eu égard aux fonctions de M. X..., à deux mois de salaire soit la somme de 9598 €.
- que le tableau de jours travaillés " hors forfait " qu'a dressé M. X... ne comporte ni date ni précisions et aboutit à un calcul totalement arbitraire que rien n'étaye ;

MOTIFS DE LA DECISION
Sur la prise d'acte de la rupture
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, ceux d'une démission ;
La prise d'acte ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'à la condition que les faits invoqués soient, non seulement, établis, mais constituent des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur.
Dans le courrier du 23 février 2009 adressé à son employeur, M. X... indique à celui-ci qu'il prend acte de la rupture du contrat de travail et qu'il la lui impute, dans ces termes :
" Monsieur,
Par courrier en date du 28 janvier 2009, je vous ai demande de bien vouloir me rétablir des conditions de travail normales, afin de pouvoir exécuter mon contrat de travail. En effet, j'ai attiré votre attention sur l ‘ absence d'une organisation rationnelle ayant une Incidence de surcroît sur mes résultats générant une situation préjudiciable à mon égard.
Je vous ai d'ailleurs, de surcroît, indiqué que je ne pouvais plus accepter diverses situations que j'ai évoquées aux termes de mon précédent courrier affectant mes droits au titre de ma rémunération.
Aucune modification ni réponse ne m'ont été apportées.
Pour I'ensemble de ces motifs, je ne peux dans de telles conditions, poursuivre mon contrat de travail au sein de votre société.
Je vous indique prendre acte de la rupture de mon contrat, rupture qui vous est Imputable.
Je vous précise qu'il ne s'agit en aucune façon d'une démission.
Je solliciterai auprès de la juridiction compétente une juste indemnisation au titre de la rupture de mon contrat qui produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. "
Ce courrier vient à la suite d'un premier écrit du 28 janvier 2009, ainsi libellé et auquel M. X... a estimé n'avoir pas reçu de réponse :
" Monsieur Y...,
Lors de nos derniers entretiens, je vous ai fait part de différents éléments qui nuisent tant a I'ambiance de travail qu'a mon activité commerciale proprement dite.
Ma seule implication n'est pas suffisante dans Ie développement durable d'une activité commerciale saine et constructive. La gestion du portefeuille que vous m'avez confiée s'avère de plus en plus compliquée avec l'absence notamment d'un chef des ventes depuis plus d'un an. La charge de travail s'en est nettement ressentie (gestion des commandes, approvisionnements, relations avec Ie constructeur, gestion des conflits commerciaux...).
L'absence d'une organisation rationnelle a bien évidemment une forte incidence sur mes résultats. L'enthousiasme ne fait malheureusement pas tout lorsque l'on n'est qu'un seul maillon de la chaîne.
L'aspect financier entre également en cause, avec l'apparition de frais financiers déduits sur les marges depuis l'an passe, ce qui n'est aucunement prévu contractuellement, alors que certaines commissions me sont payées plus de 6 mois après livraison et règlement total du dossier. Et qui plus est, il apparaît sur mes bulletins de salaire, à de nombreuses reprises, l'intitulé « avance sur commissions » en place de « commissions VN-VO » sans aucune explication ni décompte.
De plus, malgré mon dévouement la société, rappel de Monsieur Z... (nouveau directeur de la société) m'a profondément choqué en évoquant un climat de suspicion tant sur mon intégrité commerciale que sur ma qualité de travail. Cette intervention intempestive vient s'inscrire très difficilement dans ce contexte commercial et relationnel.
Par conséquent, je vous demande de me rétablir des conditions de travail normales, me permettant d'exécuter mon contrat de travail, et également de me remplir de l'ensemble de mes droits au titre de la rémunération qui doit m'être allouée, sinon je serai contraint d'en tirer toute conséquence et de saisir les juridictions compétentes pour faire valoir mes droits. "
Les griefs formulés à l'égard de l'employeur et aux motifs desquels le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail ne sont donc pas imprécis et vagues ainsi que l'ont retenu les premiers juges en s'en tenant à l'écrit du 23 février 2009 : ils sont énoncés dans le courrier du 28 janvier 2009, et la cour doit par conséquent rechercher si leur réalité est démontrée, ainsi que leur gravité ;
Le fait, acquis aux débats, que M. X... ait, avec M. A..., constitué le 28 janvier 2009, puis immatriculé au registre du commerce et des sociétés du Mans, le 17 février 2009, une société de vente de spas, saunas, hammam, et autres biens domestiques, est sans portée sur cette recherche, puisque M. X... apparaît comme co-gérant de la société W. L. M. ;
Il n'a pas enfreint les dispositions de l'article 8 de son contrat de travail qui lui faisaient obligation de " réserver l'exclusivité de ses services rémunérés à la S. A. Etoile du Maine 72. ", et aucune démonstration n'est faite ni même soutenue, de ce que cette création de société aurait absorbé le temps disponible de M. X... ce qui l'aurait obligé à cesser son activité salariée et aurait constitué le motif d'une démission ;

¤ Sur la surcharge de travail résultant de l'absence de chef des ventes
Tout en affirmant avoir dû, après le départ de M. B..., chef des ventes, en avril 2007, procéder à une gestion des dossiers qui ne relevait pas de ses attributions, c'est-à-dire assurer un suivi non pas seulement commercial mais administratif et financier, M. X... ne produit ni courriers de relance à l'adresse de clients en retard de paiement, ni écrits au constructeur au sujet des approvisionnements de véhicules, mais uniquement des fiches de commandes, imprimées, dont on ignore qui les a renseignées informatiquement, et sur lesquelles il a porté des annotations manuscrites non signifiantes ;
Il est d'autre part acquis que le suivi administratif des dossiers était assuré par Mme C..., assistante commerciale, et Mme D..., secrétaire ;
L'incident survenu en janvier 2004 dans le dossier du client E..., dont M. X... se sert pour affirmer qu'il effectuait, par défaut, un contrôle des étapes de vente, témoigne seulement d'une difficulté unique, survenue entre ce client et Mme F..., secrétaire, qui remplaçait Mme C..., du 6 au 19 janvier 2004 ; M. X... était enfin classé aux termes de la convention collective des services de l'automobile, et de l'avenant contractuel du 16 mai 2003, " conseiller des ventes UL, niveau I-B ;
Il devait par conséquent, selon la définition conventionnelle de cette fonction, réaliser " l'ensemble des activités concourant d'une part à la commercialisation des véhicules et produits périphériques, et d'autre part à la reprise des véhicules d'occasion " ; et aussi assurer " la gestion administrative des activités de commercialisation " ;
Aucun manquement de la sas Etoile du Maine 72 à ses obligations contractuelles n'est donc établi sur ce point ;
¤ Sur le règlement tardif des commissions, leur caractère imprécis et l'imputation des frais financiers de l'entreprise sur leur montant :
M. X... a été rémunéré par la perception conjuguée d'un salaire mensuel fixe qui s'est élevé en février 2009 à 1561 €, et de " commissions VN-VO " de nature variable, ce en application du contrat de travail du 8 janvier 2001 et de l'avenant du 16 mai 2003 ;
Quant au montant des commissions, le contrat de travail indique uniquement qu'elle sont de " 10 % de la marge liée VN/ VO véhicules utilitaires " ;
Les conditions générales de vente qui sont annexées à chaque bon de commande d'un véhicule permettent de savoir que le solde du prix du véhicule, après versement d'un acompte de 10 % à la commande, doit être versé " au plus tard le jour de la livraison ", l'acheteur étant redevable ensuite de pénalités, et que si la vente du véhicule neuf est liée à la reprise d'un véhicule d'occasion, une valeur de reprise est établie ;

Les nombreuses fiches de vente versées aux débats par l'une et l'autre partie sont pré-imprimées et montrent que la " marge VN/ VO " est le résultat de la marge initiale, résultant de la différence entre le prix de vente et le coût d'achat pour le vendeur, diminuée de frais divers (plaques, gaz oil, carte grise..) et d'une éventuelle " perte VO ", qui n'apparaît qu'une seule fois sur l'ensemble des fiches produites ;
La marge est par conséquent établie dés la vente, et aucun délai de versement de la commission au salarié ne figure ni sur ces fiches, ni dans le contrat de travail comme étant subordonné à la cession du véhicule d'occasion repris ;
Les mentions portées informatiquement par la sas Etoile du Maine 72 sur les listings reprenant les dates de versement de ses commissions à M. X... en 2007, 2008 et jusqu'en février 2009, telles que : " garantie 3 mois sur VO ", " dossier réglé normalement sous 30 à 45 jours en attente cessions ", et " nous attendons toujours au moins 45 jours pour cessions à venir " ne correspondent à aucune disposition contractuelle et ne peuvent en conséquence justifier un versement de la commission au bout de 403 jours, 295, 283, 271 jours etc... comme cela apparaît pour de nombreuses transactions ; (pièce no13. 2 de la sas Etoile du Maine 72 correspondant à la pièce 7 de M. X...) ;
Il apparaît en outre qu'à compter de juillet 2007 les fiches de vente ne sont plus imprimées de la même manière mais portent une ligne " règlement client le : (date) avec un calcul multipliant le nombre de jours de retard de paiement par une somme (inexpliquée) et un taux de 0, 4 %, le total obtenu venant diminuer la marge VN/ VO calculée plus haut ;
La sas Etoile du Maine 72 soutient que la prise en compte des frais financiers constitue un " usage ", et que ceux-ci sont une " donnée économique objective ", alors que la réalité des frais financiers allégués, et leur taux, ne sont aucunement justifiés, et que de surcroît la convention collective du commerce et de la réparation automobile stipule en son article 6. 06 :
" Le personnel directement affecté à la vente de véhicules est rémunéré :- soit par un salaire forfaitaire, indépendant des ventes réalisées,- soit par des primes et un fixe.... Les entreprises doivent communiquer, par note de service, au personnel directement affecté à la vente de véhicules le barème de base des primes de vente par véhicule et ses règles d'application ; les modifications apportées à ce barème devront faire l'objet d'une nouvelle communication. Un nouveau barème doit faire l'objet d'un avenant au contrat de travail ; si son application complète aux 3 mois précédent devait conduire à une rémunération inférieure à celle effectivement perçue par l'ensemble du personnel concerné, l'employeur est alors tenu de fournir ses bases de calcul ; "
Les règles de calcul des commissions n'ont pas été communiquées à M. X..., en tout cas à compter de 2007 alors qu'elle étaient diminuées par l'introduction dans le montant de la marge des frais financiers de l'entreprise : l'employeur a manqué à son obligation contractuelle et conventionnelle puisque la rémunération du travail a été imprécise et fixée de manière unilatérale, ce de manière systématique et constante ; le grief énoncé par M. X... est dans ces conditions établi et de nature à justifier la prise d'acte de la rupture de la relation de travail, laquelle est imputable à l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; le jugement est infirmé en ce qu'il a qualifié la rupture de démission ;
M. X... avait plus de deux ans d'ancienneté (8 ans) dans l'entreprise dont l'effectif était inférieur à 11 salariés ; par application des dispositions des articles L 1234-9 et L1235-5 du code du travail, il peut prétendre au versement d'une indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ainsi qu'au versement d'une indemnité correspondant au préjudice subi du fait de la rupture ;

L'article 4. 11 de la convention collective applicable indique que l'indemnité de licenciement doit être, à partir de deux ans d'ancienneté, de 2/ 10 ème mois par année à compter de la date d'entrée dans l'entreprise, et que cette indemnité est calculée sur la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels dont l'intéressé a bénéficié au cours des 12 derniers mois de son contrat de travail ;
Le salaire moyen de M. X... calculé sur les 12 dernier mois est de 4799 €, ce qui établit l'indemnité de licenciement à un montant de : 4799 x 2 = 959, 80 € x 8 soit 7678, 40 €, somme qui doit être ramenée à la demande de M. X... 10 soit : 7582, 75 €, la cour ne pouvant statuer au-delà ; M. X..., né le 21 septembre 1974, avait 34 ans au moment de la rupture du contrat de travail et il a participé à la même époque à la constitution d'une société sur le développement économique de laquelle il ne donne aucun élément d'information, pas plus qu'il ne renseigne la cour sur sa situation de ressources actuelle ;
Il est justifié de condamner la sas Etoile du Maine 72 à lui verser à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 47000 € ;
M. X... a également droit, du fait de son ancienneté et de sa classification professionnelle, et par application des dispositions de l'article 6. 09 de la convention collective, à une indemnité de préavis de trois mois, soit à la somme de 14 205 €, outre les congés payés afférents soit 1420, 50 € ;
La sas Etoile du Maine 72 devra remettre à M. X... une attestation pôle emploi et un certificat de travail rectifiés selon les dispositions du présent arrêt ; l'astreinte n'est justifiée par aucune circonstance particulière et la demande de M. X... à ce titre est rejetée ;
Sur les jours travaillés hors forfait
Le contrat de travail de M. X... énonce en son article 4 que la durée de travail du salarié est " de 217 jours travaillés par an, ce nombre étant fixé par l'article 1-09 f) de la convention collective nationale du commerce et de la réparation automobile, et en tenant compte du nombre maximum de jours de congés défini à l'article L223-2 du code du travail ", et ce " compte-tenu du degré d'autonomie dont dispose M. X... " ;
Le contrat de travail prévoit aussi que le salarié bénéficiera d'un droit à congé payé annuel correspondant à 2, 5 jours ouvrables par mois de travail effectif et également d'un repos hebdomadaire de un jour et demi incluant le dimanche " ;
Ces dispositions sont conformes aux prescriptions des articles L221-2, L221-4 et L220-1 du code du travail, en vigueur au moment de la conclusion du contrat de travail de M. X... qui permettent d'abandonner tout calcul en heures de travail et de comptabiliser le temps de travail en journées ou demi-journées de travail accomplies ;
Dans les termes de l'article 1. 09 de la convention collective applicable, les cadres peuvent " lorsque l'exercice de leurs fonctions nécessite une large autonomie dans l'organisation de leur temps de travail ", conclure une convention de forfait en jours, dont les modalités doivent être indiquées dans le contrat de travail ;
La convention collective ajoute que : " le forfait en jours s'accompagne d'un contrôle du nombre de jours travaillés, au moyen d'un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées travaillées, ainsi que la qualification des jours non travaillés en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail. Ce document est établi en 2 exemplaires, un pour chacune des parties, et complété au fur et à mesure de l'année ; il est signé chaque semaine par le salarié, puis par l'employeur ou son représentant ;
Il résulte de ces dispositions que le salarié, compte tenu de son autonomie dans l'exercice de ses fonctions, établit, signe, puis fait signer à l'employeur aux fins de contrôle, un tableau hebdomadaire récapitulatif et daté de ses journées travaillées ;
M. X... ne produit pas un tel document mais un compte de jours travaillés du 1er février 2004 au 28 février 2009, non signé de l'employeur, et qui est dressé mois par mois de cette manière : du 1er février 2004 au 31 mai 2004 : février : 20 jours travaillés-samedis travaillés : 1X 0, 50.... Du 1er juin 2004 au 31 mai 2005 : Septembre : 22 jours travaillés-samedis travaillés : 2 x0, 50 + 1 complet-dimanche travaillé : 1
Ce décompte qui ne comporte aucune date, ni pour les samedis dits travaillés hors forfait, ni pour le dimanche travaillé, situé chaque année sur le mois de septembre sans autre indication, n'est pas suffisamment précis pour permettre à la sas Etoile du Maine 72 de répondre en apportant ses propres éléments sur les journées effectivement réalisées ;
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu que ces éléments ne permettent pas d'étayer la demande de rappels de salaires formée par M. X... ;
Sur le solde de congés payés
La sas Etoile du Maine 72 admet devoir à M. X... un solde de 45, 50 jours de congés payés, qui apparaît sur le bulletin de paie de février 2009 et que celui-ci retient pour réclamer à ce titre la somme de 8378, 17 € ;
M. X... ayant un droit à congés payés de 30 jours par an, il est établi que le solde existant en février 2009 correspond à deux périodes de référence successives ;
Cependant, même si le solde de congés payés litigieux a été acquis au titre de la période antérieure à la période de référence en cours à la date de la rupture, ce solde doit être pris en compte puisqu'il a été reporté sur cette dernière période avec l'accord de l'employeur, comme en atteste la mention portée sur le bulletin de paie de février 2009 ;
En application des dispositions des articles L3141-22 à L3141-26 du code du travail M. X... doit recevoir, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé égale au 10ème de la rémunération brute totale perçue au cours de la période de référence ;
La rémunération brute perçue par M. X... du 1er juin 2007 au 31 mai 2008 a été de 52 474, 23 € et celle perçue du 1er juin 2008 au 31 mai 2009 de 38 325, 12 € ;
Le solde de congés payés s'élève donc à 5247, 42 € + 3832, 51 € = 9079, 93 € dont il faut soustraire la somme de 2897, 02 € portée sur le bulletin de paie de juillet 2009 au titre des congés payés sur commissions, ce qui l'établit finalement au montant de 6182, 91 € ;
Le jugement est infirmé en ce qu'il a rejeté la demande ;
Sur le solde de commissions
M. X... demande le paiement d'un solde de commissions dû pour 23 dossiers (sur les 28 initialement mentionnés) non terminés, listés conformément au tableau également dressé par la sas Etoile du Maine 72 (pièce 17 de celle-ci).
Selon cette dernière, les paiements afférents à ces ventes seraient toujours en cours, motif pour lequel elles n'auraient encore donné lieu à aucun chiffrage de commission. Les parties s'accordent sur un principe de créance en faveur du salarié au titre de ces ventes. Celles-ci remontant à 2007/ 2008, l'argument de l'employeur tiré de règlements toujours en cours pour l'ensemble des 23 dossiers litigieux n'apparaît pas sérieux.
Il convient donc, avant dire droit sur la demande en paiement formée par M. X... au titre des commissions :- d'inviter la sas Etoile du Maine 72 à justifier de l'évolution de chacun des 23 dossiers en cause s'agissant du prix dû par le client en établissant, au moyen de tous justificatifs : ¤ si ce prix a été ou non intégralement réglé et, dans l'affirmative, à quelle date, ¤ dans la négative, à justifier du solde restant dû à la date la plus proche possible de l'audience de réouverture des débats, sous peine, pour la cour, de tirer toutes conséquences de l'absence ou du refus de production des justificatifs sollicités ;- d'inviter les parties à établir un décompte clair et précis des commissions dues et M. X... à chiffrer sa demande.
La réouverture des débats est ordonnée, à cette fin et sur ce point, à l'audience du 12 mars 2012 à 14 heures.
Sur le remboursement des frais financiers
La prise en compte des frais financiers de l'entreprise dans le montant de la marge réalisée pour chaque vente de véhicule n'a pas été contractualisée, ainsi qu'il a été détaillé au titre de la rupture du contrat de travail, et n'est pas, dans ces conditions, conforme aux dispositions de la convention collective ;
M. X... en demande à bon droit le remboursement ;
Il présente à cet effet un tableau récapitulatif des sommes qui ont été, au titre des frais financiers retirées de la marge réalisée pour des commandes prises de janvier 2007 à novembre 2008 dans des dossiers Soccoim Veolia, Gobe (6 dossiers), PLL (34 dossiers), Dumur, LCB, Blondeau, ACT, CRT, LMBTP, Time France ; (sa pièce 17), ce pour un total de 7858 € ;
Les montants de frais financiers visés sur ce récapitulatif sont conformes à ceux calculés sur chaque fiche de vente ;
La marge étant diminuée à chaque fois du montant des frais, puis la commission calculée à 10 % de cette marge diminuée, il reste en effet dû à M. X... un total de 10 % de 7858 € soit 785, 80 €, que la sas Etoile du Maine 72 est condamnée à lui payer, le jugement étant infirmé en ce qu'il a rejeté la demande ;
Sur la demande reconventionnelle de la sas etoile du maine 72
La cour retenant la rupture du contrat de travail comme imputable à l'employeur, la demande de celui-ci du paiement d'une indemnisation de l'absence de préavis à la démission est rejetée ; le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné M. X... à payer la somme de 9598 € à ce titre à la sas Etoile du Maine 72 ;
sur les frais irrépétibles et les dépens
Il parait inéquitable de laisser à la charge de M. X... les frais engagés dans l'instance et non compris dans les dépens : la sas Etoile du Maine 72 est condamnée à lui payer, pour l'en indemniser et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2500 € au titre des frais engagés dans la première instance et dans l'instance d'appel ;
La demande de la sas Etoile du Maine 72 à ce titre est rejetée ;
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont infirmées, la sas Etoile du Maine 72 succombant en appel ; celle-ci est en conséquence condamnée au paiement des dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes du Mans du 9 avril 2010 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande de M. X... à titre de rappels de salaires pour jours travaillés hors forfait,
Statuant à nouveau pour le surplus,
DIT la rupture du contrat de travail imputable à la sas Etoile du Maine 72,
CONDAMNE la sas Etoile du Maine 72 à payer à M. X... les sommes de :-47000 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse-14205 € à titre d'indemnité de préavis et la somme de 1420, 50 € à titre de congés payés afférents,-7582, 75 € à titre d'indemnité de licenciement,-6182, 91 € à titre de solde de congés payés,

-785, 80 € au titre des frais financiers soustraits des commissions,
DIT que les intérêts calculés au taux légal seront dûs sur les condamnations prononcées, à compter de l'accusé de réception par la sas Etoile du Maine 72 de la convocation à l'audience de conciliation du conseil de prud'hommes du Mans pour ce qui est des créances de nature salariale et à compter du prononcé du jugement, en ses dispositions confirmées, ou du présent arrêt, pour ce qui est des créances de nature indemnitaire ;
Avant dire droit sur la demande de M. X... en paiement des commissions :
- invite la sas Etoile du Maine 72 à justifier de l'évolution de chacun des 23 dossiers en cause s'agissant du prix dû par le client en établissant, au moyen de tous justificatifs : ¤ si ce prix a été ou non intégralement réglé et, dans l'affirmative, à quelle date, ¤ dans la négative, à justifier du solde restant dû à la date la plus proche possible de l'audience de réouverture des débats, sous peine, pour la cour, de tirer toutes conséquences de l'absence ou du refus de production des justificatifs sollicités ;
- invite les parties à établir un décompte clair et précis des commissions dues et M. X... à chiffrer sa demande ;
Ordonne à ces fins et sur ce strict point la réouverture des débats à l'audience du 12 MARS 2012 à 14 heures,
DEBOUTE la sas Etoile du Maine 72 de sa demande en paiement de la somme de 9598 €.
ORDONNE à la sas Etoile du Maine 72 de remettre à M. X... une attestation pôle emploi et un certificat de travail rectifiés selon les dispositions du présent arrêt.
DIT n'y avoir lieu à astreinte.
CONDAMNE la sas Etoile du Maine 72 à payer à M. X... la somme de 2500 € au titre des frais non compris dans les dépens et engagés dans la première instance ainsi que dans l'instance d'appel.
DEBOUTE la sas Etoile du Maine 72 de sa demande à ce titre.
CONDAMNE la sas Etoile du Maine 72 aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01059
Date de la décision : 13/12/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-12-13;10.01059 ?
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