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29/11/2011 | FRANCE | N°11/00064

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 29 novembre 2011, 11/00064


COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale

ARRÊT N BAP/AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/00064.Jugement Tribunal de Grande Instance du MANS, du 29 Décembre 2010, enregistrée sous le no 10/05947

ARRÊT DU 29 Novembre 2011

APPELANTE :
SAS RENAULT13/15 Quai Alphonse Le Gallo92100 BOULOGNE BILLANCOURT
représentée par la SCP CHATTELEYN et GEORGE, avoués à la cour, assistée de Maître Béatrice POLA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :
Le Syndicat FORCE OUVRIERE ACI RENAULT LE MANS60 avenue d'Estienne d'Orves72000 LE MANS
représent

é par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la cour, assistée de Maître Claude TERREAU, avocat au barreau d...

COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale

ARRÊT N BAP/AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/00064.Jugement Tribunal de Grande Instance du MANS, du 29 Décembre 2010, enregistrée sous le no 10/05947

ARRÊT DU 29 Novembre 2011

APPELANTE :
SAS RENAULT13/15 Quai Alphonse Le Gallo92100 BOULOGNE BILLANCOURT
représentée par la SCP CHATTELEYN et GEORGE, avoués à la cour, assistée de Maître Béatrice POLA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :
Le Syndicat FORCE OUVRIERE ACI RENAULT LE MANS60 avenue d'Estienne d'Orves72000 LE MANS
représenté par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la cour, assistée de Maître Claude TERREAU, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 Septembre 2011, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, présidentMadame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseurMadame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Christine LEVEUF,
ARRÊT :du 29 Novembre 2011 contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame ARNAUD-PETIT, pour le président empêché, et par MadameLE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******
FAITS ET PROCÉDURE
La société Renault dispose d'un établissement au Mans, qui a pour principale activité la conception, la validation et la fabrication de systèmes et modules de liaison au sol et qui emploie 2 436 salariés.
Le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, qui était au nombre des organisations syndicales représentatives dans l'établissement, a perdu ce statut (de même que le syndicat CFTC) à l'occasion des élections au comité d'établissement en date du 7 juin 2010. Il n'a réuni que 7,10 % des suffrages exprimés sur les 10 % requis.
Par courriers du 18 juin 2010, au visa des articles L.2122-1, L.2143-3 alinéa 1 et L.2142-8 du code du travail, la société Renault a notifié à la déléguée syndicale FO, A.C.I. Renault Le Mans, mandatée dans l'établissement, d'une part que, conformément aux dispositions du protocole d'accord pré-électoral, son mandat prendrait fin de plein droit au 1er juillet 2008, d'autre part qu'elle n'était plus habilitée à bénéficier d'un local individuel aménagé.
Par lettre du 8 juillet 2010, le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, a notamment informé la société Renault qu'en application des articles L.2142-1 et L.2142-1-3 du code du travail ainsi que de l'accord d'entreprise du 23 juin 2000 et de l'accord relatif à la couverture sociale du 5 juillet 1991, il entendait nommer sur l'établissement du Mans "trois représentants de la section syndicale ayant les mêmes prérogatives que les délégués syndicaux d'établissement, y compris le crédit de 30 heures chacun (ou à défaut de nommer un RSS disposant de 90 heures) ainsi que ... continuer à disposer au même titre que les délégués syndicaux d'un local syndical individuel, et pour la section syndicale, le bénéfice du crédit global qui correspond tant aux effectifs de l'établissement qu'à leurs résultats aux dernières élections, le cas des résultats inférieurs à 10 % étant déjà prévu, soit 525 heures", outre que leur (leurs) "représentant s de section syndicale soit soient d'office représentant s syndical aux dans toutes les instances (CE, CHSCT, DP et commissions)".
La société Renault lui a opposé une réponse négative le 16 juillet 2010, précisant à sa représentante de section désignée par l'Union départementale FO de la Sarthe au sein de l'établissement du Mans, que conformément aux articles L.2142-1-1, L.2142-1-3 et L.2142-8 du code du travail il ne pouvait y avoir sur Le Mans qu'un représentant unique de section syndicale FO, A.C.I. Renault Le Mans, qui serait doté d'un crédit de 4 heures par mois dans le cadre de son mandat et partagerait un local avec le syndicat CFTC.
Le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, maintenant les termes de son courrier du 8 juillet 2010, la société Renault s'est faite autoriser, par requête du 27 octobre 2010 déposée auprès du président du tribunal de grande instance du Mans, à l'assigner à jour fixe pour l'audience de ce tribunal en date du 16 novembre 2010, à 14 heures 15, afin que la perte de représentativité de ce syndicat soit constatée et qu'il lui soit ordonné de partager son local avec le syndicat CFTC.
L'assignation a été délivrée au syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, le 29 octobre 2010.
Par jugement du 29 décembre 2010 auquel il sera renvoyé pour l'exposé des motifs, le tribunal de grande instance du Mans a :- ordonné au syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de partager son local syndical avec le syndicat CFTC, - débouté le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de ses demandes reconventionnelles tendant à voir désigner trois représentants de section syndicale sur l'établissement du Mans, dotés d'un crédit de 30 heures chacun et prenant part aux différentes institutions représentatives du personnel, ainsi qu'à bénéficier d'un crédit global annuel de 525 heures de délégation,- accueilli la demande reconventionnelle du syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de désignation d'un représentant aux accords, disant que le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, est en droit de désigner un représentant ayant pour mission de suivre l'application de l'accord du 5 juillet 1991 relatif à la couverture sociale, bénéficiant pour ce faire d'un crédit d'heures de 10 heures par mois,- laissé à chacune des parties la charge de ses dépens,- débouté le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 10 janvier 2011 au greffe de la cour, la société Renault a formé appel à l'encontre de la disposition de cette décision accordant le droit au syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de désigner un représentant ayant pour mission de suivre l'application de l'accord du 5 juillet 1991, avec un crédit d'heures de 10 heures par mois.
Par conclusions déposées au greffe de la cour le 13 avril 2011, le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, a formé appel incident des autres dispositions de cette décision.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 septembre 2011.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions du 8 juin 2011, reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient aussi de se reporter, la société Renault s'en tient aux termes de son appel limité et, demande à la cour, statuant à nouveau sur ce point, de dire et juger que le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, ne peut procéder à la désignation d'un délégué aux accords, qu'en outre le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans soit déclaré irrecevable et, en tout cas, non fondé en son appel incident, les dispositions du jugement entrepris se voyant confirmées de ces chefs, qu'il soit enfin statué ce que de droit quant aux dépens, et que distraction soit ordonnée pour ceux le concernant au profit de l'avoué soussigné.
Elle fait valoir que :- pour ce qui concerne le représentant aux accordso ce représentant du personnel a été institué, au sein de la société et de ses établissements, par voie conventionnelle, à savoir par l'accord collectif d'entreprise du 5 juillet 1991, dont les dispositions à ce propos sont reprises dans l'accord collectif du 23 juin 2000,o il est constant que lorsqu'un accord collectif d'entreprise ou d'établissement vise "les signataires du présent accord", comme en l'espèce, il ne peut s'agir, en application de l'article L.2232-12 du code du travail, que des organisations syndicales représentatives au sein de l'entreprise ou de l'établissement,o une interprétation différente aurait pour effet d'attribuer à un syndicat non représentatif des prérogatives inhérentes à un syndicat représentatif et donc plus de droits qu'autorisés par la loi, o la loi du 20 août 2008 a bien réservé les prérogatives relatives à la négociation collective et à la désignation des représentants du personnel aux seules organisations syndicales représentatives au sein de l'entreprise ou de l'établissement,o la cour de cassation veille à l'application de ces règles et a jugé que la loi du 20 août 2008 était d'ordre public absolu,o les dispositions des articles L.2324-2 et L.2142-1 du code du travail, en ce qu'elles sont des exceptions à la règle de la représentativité, ne peuvent qu'être interprétées strictement et, de toute façon, ne confèrent au représentant de la section syndicale dont il est question aucune prérogative au plan de la négociation des accords collectifs,
- pour ce qui concerne l'appel incident du syndicat FO, A.C.I. Renault Le Manso en application de l'article L.2142-1 du code du travail, le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans ne peut prétendre qu'à un représentant de section syndicale au sein de l'établissement du Mans ; c'est aussi l'interprétation qu'en donnent la circulaire du 13 novembre 2008 et la cour de cassation,o l'article L.2142-1-3 du code du travail prévoit que le représentant de section syndicale ne dispose que d'un minimum de 4 heures par mois afin de remplir son mandat, la circulaire précitée étant venue préciser que seul un accord de branche ou d'entreprise pouvait augmenter ce quota ; un tel accord n'existe pas en l'espèce,o les pouvoirs du représentant de section syndicale sont définis aux articles L.2142-1-1 et L.2324-2 du code du travail ; sauf à répondre à la situation de ce dernier texte, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, le représentant de section syndicale ne peut siéger aux réunions des instances représentatives du personnel qui sont réservées aux élus du personnel, o l'accord du 23 juin 2000 ne peut s'appliquer au représentant de section syndicale puisqu'il a été conclu alors que ce représentant n'existait pas encore ; le raisonnement analogique permettant la transposition des dites dispositions conventionnelles propres au délégué syndical au représentant de section syndicale n'est pas possible, o les conditions dans lesquelles un local syndical doit être mis par l'employeur à la disposition des sections syndicales présentes dans l'entreprise ou l'établissement sont posées par l'article L.2142-8 du code du travail ; l'accord du 23 juin 2000 avait d'ores et déjà fait dépendre de la notion de représentativité du syndicat au sein de l'établissement l'attribution d'un local individuel ; le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, ne remplit plus les conditions de représentativité qui lui permettraient, au sein de l'établissement qui doit seul être considéré, de conserver ce local individuel,o sur la question du crédit global d'heures de l'organisation syndicale, l'accord du 23 juin 2000 auquel se réfère le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, stipule que ce crédit d'heures est réservé aux organisations syndicales représentatives dans l'établissement, ce qui n'est plus son cas.
* * * *
Par conclusions du 13 septembre 2011, reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient aussi de se reporter, le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, sollicite la confirmation du jugement déféré quant à sa disposition relative au représentant aux accords. Il forme un appel incident pour le surplus, dont il demande l'infirmation et, qu'en conséquence :- trois représentants de la section syndicale, ayant les mêmes prérogatives que les délégués syndicaux d'établissement, y compris le crédit d'heures de 30 heures chacun, soient nommés sur l'établissement du Mans,- en tant que de besoin, soit ordonnée la présence des trois représentants de section syndicale comme membres des instances, au sein du comité d'entreprise, du CHSCT, des délégués du personnel et des commissions,- soit dit qu'il doit bénéficier d'un crédit global annuel de 525 heures,- la société Renault soit condamnée à lui verser 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,- et rejetant toutes prétentions contraires comme non recevables et, en tout cas, non fondées, la société Renault soit condamnée aux dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Il réplique que :- pour ce qui concerne l'appel principalo la loi du 20 août 2008 ne peut conduire à réduire le droit de représentation des syndicats, tout au contraire son objectif a été d'accorder aux organisations syndicales non représentatives des prérogatives afin de leur permettre de rivaliser avec les organisations syndicales représentatives, o la loi du 20 août 2008 n'a pas pour effet de supprimer le droit de désignation d'un représentant pour le suivi d'accords comme l'accord du 23 juin 2000, toujours en vigueur, le prévoyait,o l'accord du 23 juin 2000 ne pose, pour cette désignation, aucune condition de représentativité de l'organisation syndicale au sein de l'établissement,o il était bien signataire de cet accord du 23 juin 2000 et reste représentatif au plan de l'entreprise,o la jurisprudence citée a trait à d'autres situations et n'est donc pas transposable à l'espèce, - pour ce qui concerne son appel incident o sa représentativité sur l'ensemble de l'entreprise avoisine les 20 %,o la loi du 20 août 2008 ne doit pas conduire à exclure la représentation dans un établissement d'un syndicat qui a une telle représentativité sur l'ensemble de l'entreprise,o de plus, l'accord antérieur du 23 juin 2000, qui n'a jamais été dénoncé et dont la validité ne peut donc être remise en cause, lui octroie des droits de représentation, la mise à disposition d'un local et un crédit global annuel de délégation dépendant de l'effectif salarié,o s'il a perdu, du fait des élections du 7 juin 2010, le droit de désigner trois délégués syndicaux sur l'établissement du Mans, il n'a pas pour autant perdu le droit de nommer des représentants auprès de la direction du dit établissement ainsi qu'en disposent les articles L.2142-1-1 et L.2142-1-3 du code du travail, o il est constant, certes, que l'accord du 23 juin 2000 ne pouvait prévoir le représentant de section puisqu'instauré par la loi du 20 août 2008 et que, à l'époque, la notion de représentativité syndicale n'était pas la même, o néanmoins, la perte du délégué syndical dans l'établissement du Mans, en lien avec le résultat des dernières élections professionnelles, doit s'accompagner de la désignations de représentants de section sur le fondement de l'article L.2142-1-1 du code du travail, le nombre et les prérogatives de ces représentants devant quant à eux être déterminés conformément à l'accord du 23 juin 2000,o dans les cas où le représentant de section syndicale se substitue au délégué syndical, deviennent applicables les dispositions conventionnelles plus favorables que les dispositions légales,o l'accord du 23 juin 2000 ne soumet à aucune condition de représentativité dans l'établissement le fait pour un syndicat de disposer d'un local individuel au sein de l'établissement ; le droit dont il bénéficiait, de mise à disposition d'un local exclusif, ne peut de fait être remis en cause par les élections du 7 juin 2010,o l'accord du 23 juin 2000 prend d'ores et déjà en compte, dans ses dispositions instaurant un crédit global annuel d'heures par syndicat, le fait que le pourcentage atteint aux élections par ce syndicat puisse être inférieur à 10 % ; il n'y donc aucune raison pour que ce droit, qui a fait l'objet de négociations avec la direction qui ont abouti à cet accord dont il est signataire, soit supprimé.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Les dispositions relatives au droit syndical dans l'entreprise et dans les établissements ont été largement remaniées par la loi no2008-789 du 20 août 2008, qui est entrée en application le 21 suivant. Ainsi, les conditions de la représentativité syndicale au sein des entreprises et des établissements ont été modifiées, un nouvel acteur étant créé, le représentant de section syndicale.
À la suite des élections professionnelles au comité d'établissement de l'établissement Renault du Mans du 7 juin 2010, le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, qui était jusqu'alors représentatif au sein de l'établissement, a perdu ce caractère en lien avec l'application combinée des nouveaux critères définis par les articles L.2121-1 et L.2122-1 du code du travail. Alors que le recueil d'"au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections" est nécessaire afin de prétendre à cette représentativité, il n'a réuni que 7,10 % des dits suffrages. Le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, ne conteste pas cette perte, d'ailleurs.
Le mandat de la déléguée syndicale FO, A.C.I. Renault Le Mans, au sein de l'établissement a consécutivement pris fin, celle-ci ayant été désignée par l'Union départementale FO de la Sarthe représentante de section syndicale, toujours dans le même établissement.
Le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, demande que les droits reconnus par les accords collectifs des 5 juillet 1991 et 23 juin 2000 lui restent acquis, à savoir qu'il y ait trois représentants de section syndicale dans l'établissement, avec chacun un crédit de 30 heures pour exercer leur mandat, la possibilité pour eux d'être présents dans les différentes institutions représentatives du personnel, un local qui leur soit propre, outre que la section bénéficie d'un crédit global annuel de 525 heures de délégation, enfin qu'il puisse désigner un préposé au suivi de l'accord de protection sociale qui dispose de 10 heures à cette fin.
L'accord d'entreprise "relatif à la couverture sociale des salariés de Renault" en date du 5 juillet 1991, prévoit dans ses "clauses administratives et juridiques" , au chapitre 1, que le présent accord s'applique à l'ensemble des établissements de la société Renault (article 1), qu'il est conclu pour une durée indéterminée (article 1), qu' "un représentant désigné par Organisation Syndicale signataire dans les établissements suivants, ... Usines du Mans ..., sera habilité à examiner ou à soumettre à la Direction de l'Etablissement considéré tout problème local lié à l'application des dispositions de l'accord ; à cet effet il disposera d'une franchise mensuelle globale de 10 heures ..." (article 2).
L'accord du 23 juin 2000, conclu par la société Renault avec les organisations syndicales CFDT, CFE-CGC, CFTC et FO, pour une durée indéterminée, porte sur "la représentation du personnel et la concertation sociale", et a été modifié par avenants des 23 mai 2001, 14 et 21 décembre 2001, 6 mai 2003, 18 novembre 2004, 14 février 2005, 22 septembre 2005. Y sont traités, au titre 1, chapitre 1 des délégués syndicaux, comprenant les délégués syndicaux centraux d'une part et les délégués syndicaux d'établissement d'autre part.Les délégués syndicaux centraux sont définis comme "les représentants des organisations syndicales représentatives au niveau de l'entreprise auprès de la direction générale", alors que les délégués syndicaux d'établissement sont "les représentants des organisations syndicales auprès des directions d'établissement". Plus précisément, pour ce qui est des délégués syndicaux centraux, "chaque fédération syndicale nationale représentative au niveau de l'entreprise peut désigner un délégué syndical central, un délégué syndical central adjoint pour les établissements industriels et un délégué syndical central adjoint pour les établissements d'ingénierie-tertiaire". Les dispositions concernant les délégués syndicaux d'établissement sont, quant à elles contenues à l'article 1.3, qui se décompose lui-même en six subdivisions, avec des sous-subdivisions ; notamment :- 1.3.1- "Le délégué syndical d'établissement est désigné par le syndicat territorial dont il relève. Le nombre des délégués syndicaux d'établissement est fixé conformément à l'article R.412-2 du code du travail",- 1.3.2- "Les délégués syndicaux des établissements industriels ... bénéficient chacun d'un crédit mensuel de 30 heures ...",- 1.3.3- "Un représentant est désigné en application de l'accord relatif à la couverture sociale du 5 juillet 1991, par organisation syndicale signataire, dans chaque établissement ... Il bénéficie d'un crédit d'heures de 10 heures par mois",- 1.4.1- "Des locaux convenant à l'exercice de leur mission sont mis à disposition des délégués syndicaux dans chacun des établissements de Renault S.A.. Dans tous les établissements industriels ..., chaque organisation syndicale dispose d'un bureau équipé ...",- 1.4.2- "Au niveau de chaque établissement, toute organisation syndicale représentative ayant régulièrement constitué une section syndicale bénéficie ... d'un crédit global d'heures, par année civile, constitué d'une part fixe pour toute organisation syndicale représentative au niveau de l'établissement et d'une part variable établie en fonction du pourcentage de voix exprimées aux élections du comité d'établissement par tranche de 10 % ...".
Certes, ces dispositions qui n'ont pas été dénoncées sont toujours en vigueur. Néanmoins, ne faisant évidemment pas allusion au représentant de section syndicale, introduit postérieurement, qu'elles soient transposables à la situation du syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, au sein de l'établissement du Mans, passé le 10 juin 2008, au motif qu'elles seraient plus favorables, reste à examiner.
Déjà, il n'est pas possible de raisonner par analogie entre représentant de section syndicale et délégué syndical en invoquant la finalité de la loi du 20 août 2008, via la création du représentant de section syndicale. Si cette loi a bien entendu élargir le champ syndical dans l'entreprise ou l'établissement, en permettant à des syndicats qui n'ont pas satisfait aux critères électoraux de représentativité de bénéficier de certains moyens et protections conférés aux organisations syndicales représentatives (le représentant de section syndicale exerce des attributions dévolues à la section syndicale, mais ne peut négocier et conclure des accords qu'à titre exceptionnel), ce bénéfice n'est que transitoire.Il ne s'agit pas, en effet, d'organiser dans l'entreprise ou l'établissement deux niveaux permanents de représentativité syndicale, qui pourraient être qualifiée de pleine pour le syndicat représentatif et de partielle pour le syndicat non représentatif. Le sens de la fonction de représentant de section syndicale est, avant tout, de rendre représentatif, lors des prochaines élections de l'entreprise ou de l'établissement, le syndicat qui ne l'est pas, afin de permettre à ce syndicat devenu représentatif de désigner, cette fois, un délégué syndical. C'est en cela, et ce n'est qu'en cela, que le représentant de section syndicale est légitime à agir, les moyens et protections qui lui ont été conférés devant être strictement interprétés, de fait.
Ensuite, la représentativité d'un syndicat s'apprécie au jour où le syndicat exerce une prérogative conditionnée par son caractère représentatif, de sorte que la participation d'un syndicat à un accord collectif n'emporte pas reconnaissance d'une représentativité du dit syndicat pour l'avenir.
Enfin, le périmètre légal de la représentativité syndicale s'apprécie, si des comités d'établissement existent dans l'entreprise, au niveau de chaque établissement. Un syndicat ne peut désigner un délégué syndical ou des délégués syndicaux que dans les seuls établissements où il est représentatif. Un syndicat peut donc être représentatif dans certains établissements, sans l'être nécessairement dans l'entreprise comme, à l'inverse, il peut être représentatif dans l'ensemble de l'entreprise, sans l'être nécessairement dans tous les établissements.
C'est en considération de ces différentes données que seront repris chacun des éléments en litige.
A) La désignation de trois représentants de section syndicale
Le délégué syndical n'est donc pas le représentant de section syndicale, chacun ayant ses spécificités et, il n'est pas possible de plaquer des dispositions conventionnelles propres aux délégués syndicaux, que peuvent désigner les organisation syndicales représentatives, sur le représentant de section syndicale, que peuvent désigner les organisation syndicales non représentatives.
Le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, n'étant plus représentatif dans l'établissement Renault du Mans à compter du 7 juin 2010 ne pouvait désigner qu'un seul et unique représentant de section syndicale au sein de l'établissement, ainsi que le prévoient les articles L.2142-1 et L.2142-1-1 du code du travail.
Si l'article L.2142-1-2 du code du travail renvoie expressément à certaines dispositions relatives aux délégués syndicaux, communes aux représentants de section syndicale, les dispositions de l'article L.2143-12 du même code selon lesquelles "le nombre des délégués syndicaux de chaque section syndicale dans chaque entreprise ou établissement est calculé selon un décret en Conseil d'État compte tenu de l'effectif des salariés" (ici, trois conformément à l'article R.2143-2), ne sont aucunement visées par l'article L.2142-1-2 précité et restent ainsi propres aux délégués syndicaux.
Le jugement déféré, qui a débouté le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande, doit être confirmé sur ce point.
B) Le crédit de 30 heures
En application de l'article L.2142-1-3 du code du travail, le représentant de section syndicale dispose d'au moins quatre heures par mois afin d'exercer ses fonctions.
Si la circulaire 2008/20 du 13 novembre 2008 indique que ce délai peut être augmenté par dispositions conventionnelles, ne peuvent avoir de valeur à cet effet que les accords négociés postérieurement au 21 août 2008.
Le jugement déféré, qui a débouté le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande, doit être confirmé sur ce point.
C) La présence dans les institutions représentatives du personnel
L'article L.2143-23 du code du travail prévoit que "par dérogation à l'article L.2142-1-1 et lorsqu'en raison d'une carence au premier tour des élections professionnelles, un délégué syndical n'a pu être désigné au sein de l'entreprise ou de l'établissement ou lorsqu'il n'existe pas de délégué syndical dans l'entreprise ou l'établissement, le représentant de la section syndicale visé aux articles L.2141-1-1 et L.2141-1-4 désigné par une organisation syndicale de salariés affiliée à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel peut disposer, sur mandatement par son organisation syndicale, du pouvoir de négocier et conclure un accord d'entreprise ou d'établissement ...".
En dehors de cette configuration, qui n'est de plus pas celle dans laquelle se trouvait le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans au sortir des élections professionnelles du 7 juin 2010, le représentant de section syndicale ne peut siéger dans les institutions représentatives du personnel.
Le jugement déféré, qui a débouté le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande, doit être confirmé sur ce point.
D) Le local individuel
L'article L.2142-8 du code du travail indique :"Dans les entreprises ou établissements de plus de deux cents salariés, l'employeur met à la disposition des sections syndicales un local commun convenant à l'exercice de la mission de leurs délégués.Dans les entreprises ou établissements de mille salariés et plus, l'employeur met en outre à la disposition de chaque section syndicale constituée par une organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement un local convenable, aménagé et doté du matériel nécessaire à son fonctionnement".
L'établissement Renault du Mans comptant plus de mille salariés, la direction de Renault était tenue de mettre un local à la disposition de chacune des organisations syndicales représentatives dans cet établissement et non au plan de l'entreprise. Or, le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, n'ayant pas atteint le score électoral requis par la loi, n'était plus représentatif sur l'établissement et, par conséquent, ne pouvait plus prétendre à un local spécifique, se devant d'occuper le local commun aux sections syndicales.
Il est établi, désormais, qu'en ce qu'elle soumet la représentation des organisations syndicales à la condition d'avoir obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés lors de du premier tour de l'élection des membres du comité d'entreprise ou d'établissement, la loi du 20 août 2008 est d'ordre public absolu, ce qui interdit par la suite à un accord collectif comme à un employeur de reconnaître la qualité d'organisation syndicale représentative à une organisation qui n'a pas satisfait à cette condition.
L'accord du 23 juin 2000 avancé par le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans afin de conserver ce "privilège" ne dit pas autre chose d'ailleurs. En effet, l'article 1.4.1. précité, qui traite de cette question, ne peut faire l'objet d'une lecture distributive mais bien d'une lecture globale et, il en ressort que le bénéfice d'un local séparé appartient aux organisations syndicales susceptibles de désigner des délégués syndicaux dans l'établissement et donc représentatives dans cet établissement (cf en ce sens encore l'article L.2143-3 du code du travail quant à la désignation des délégués syndicaux).
Le jugement déféré, qui a débouté le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande, doit être confirmé sur ce point.
E) Le crédit de 525 heures
Le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans se réfère, quant à ce crédit annuel de 525 heures qui devrait être maintenu à la section, à l'article 1.4.2. de l'accord du 23 juin 2000 rapporté ci-dessus.
Cet article vise, comme pouvant bénéficier de ce crédit d'heures, les organisations syndicales représentatives dans l'établissement, la commission paritaire de suivi de l'accord, qui s'était réunie le 20 février 2001, ayant confirmé l'interprétation à donner du "crédit global de la section syndicale" en ces termes :"Par organisation syndicale, on entend, pour l'application de l'accord du 23 juin 2000, comme d'ailleurs il était entendu pour l'application de l'accord antérieur du 12 juillet 1984, toute organisation représentative au niveau de l'établissement au sens des élections des comités d'établissement. Dans ces conditions, le bénéfice de l'article 1.4.2. s'applique une fois par organisation syndicale, qu'elle soit constituée sous forme de syndicat ou de section syndicale, pour chacun des onze établissements de RENAULT S.A.".
Cependant ainsi que cela vient d'être dit, la loi du 20 août 2008, en ce qu'elle a fait de ces 10 % minimum de suffrages exprimés le critère dirimant de la représentativité syndicale dans l'entreprise ou l'établissement, est d'ordre public absolu et, ne peut se voir remise en cause de ce chef par une disposition conventionnelle ou un engagement unilatéral de l'employeur. À l'époque, l'accord du 23 juin 2000 ouvrait ce crédit d'heures aux organisations syndicales représentatives dans l'établissement dès avant les 10 % de suffrages exprimés recueillis par l'organisation ; cette disposition ne peut plus trouver application aujourd'hui.
Le jugement déféré, qui a débouté le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande, doit être confirmé sur ce point.
F) Le représentant aux accords
Les dispositions évoquant la possibilité de désignation d'un "préposé" au suivi de l'accord du 5 juillet 1991"relatif à la couverture sociale des salariés de Renault" ont été rappelées supra.
Deux textes se conjuguent, l'accord du 5 juillet 1991et celui du 23 juin 2000 qui ne peuvent être lus séparément. Si ces accords n'ont, ni l'un ni l'autre, parlé d'organisations représentatives, ils ont en revanche tous deux parlé d'organisations signataires dans l'établissement, le second ayant, en outre, évoqué ce point dans les développements consacrés aux délégués syndicaux dans l'établissement.
Or, qui dit organisations signataires, comme délégués syndicaux, dit organisations syndicales représentatives et, ce n'est pas parce que le syndicat FO conserve ce caractère de représentativité dans l'entreprise et/ou que le syndicat FO A.C.I. Renault Le Mans avait auparavant ce caractère de représentativité dans l'établissement , que cela permet au second de prétendre, passé le 7 juin 2010 et sa perte de représentativité au Mans, de voir désigner un représentant au suivi des accords, avec les heures de délégation corollaires, au sein du dit établissement.
Le jugement déféré, qui a accueilli le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, en sa demande, doit être cette fois infirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement en date du 29 décembre 2010 du tribunal de grande instance du Mans en toutes ses dispositions, hormis en ce qu'il a dit que le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, est en droit de désigner un représentant ayant pour mission de suivre l'application de l'accord du 5 juillet 1991 relatif à la couverture sociale et bénéficie pour ce faire d'un crédit d'heures de 10 heures par mois,
Statuant à nouveau sur ce point,
Déboute le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande de voir désigner un représentant ayant pour mission de suivre l'application de l'accord du 5 juillet 1991 relatif à la couverture sociale des salariés, avec pour ce faire un crédit d'heures de 10 heures par mois,
Y ajoutant,
Déboute le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne le syndicat FO, A.C.I. Renault Le Mans, aux entiers dépens de la présente procédure d'appel et dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile en faveur de la SCP D. Chatteleyn et B. George.

LE GREFFIER, P/LE PRÉSIDENT empêché,
Sylvie LE GALL Brigitte ARNAUD-PETIT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00064
Date de la décision : 29/11/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-11-29;11.00064 ?
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