COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT DU 29 Novembre 2011
ARRÊT N CLM/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01245. Jugement conseil d e prud'hommes d'ANGERS, du 12 Avril 2010, enregistrée sous le no F 08/ 00842
APPELANT :
Monsieur Kamel X...... 91200 ATHIS MONS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 10/ 006980 du 20/ 10/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)
représenté par Maître Julie Dodin DUTAY, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE :
S. A. R. L. AMUZIK CAFE " LE JAM CLUB " 12 rue Botanique 49100 ANGERS
représentée par Maître Jacques MONIER, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : MadameTIJOU,
ARRÊT : prononcé le 29 Novembre 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
Suivants statuts signés le 4 avril 2008, enregistrés le 26 mai suivant, M. Guillaume Y... et M. Kamel X... ont constitué la société AMUZIK CAFE (SARL) ayant pour objet l'exploitation d'un fonds de commerce de bar, brasserie ainsi que toutes activités accessoires, notamment, l'organisation de spectacles musicaux. Le capital social d'un montant de 5. 000 € était réparti en 500 parts, dont 375 détenues par M. Y..., désigné comme gérant, et 125 par M. X....
Suivant acte du 17 avril 2008 signé par M. Guillaume Y... et par M. Kamel X..., la société AMUZIK CAFE a pris à bail commercial des locaux situés à Angers, 12, rue Botanique. Aux termes de cet acte, messieurs Y... et X... se sont tous deux portés cautions solidaires et personnelles de la société afin de garantir le paiement des loyers. Le fonds exploité à l'enseigne " JAM CLUB " a ouvert le 26 avril 2008.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 29 avril 2008, à effet au 18 avril précédent, la société AMUZIK CAFE a embauché M. Kamel X... en qualité de serveur niveau 1 échelon 2, moyennant un salaire brut mensuel de 1. 426, 36 € pour un horaire de travail de 169 heures (39 heures par semaine), rémunération à laquelle s'ajoutait, à titre d'avantage en nature, un repas par service. La convention collective applicable est celle des " hôtels, cafés, restaurants ". Par avenant du 13 mai 2008, la durée hebdomadaire du travail de M. Kamel X... a été ramenée à 30 heures.
Il apparaît que M. Kamel X... n'a jamais libéré la part de capital social qu'il détenait. Par acte du 16 octobre 2008, enregistré le 30 octobre suivant, il a cédé à Mme Marie-Ange Y... les 125 parts lui appartenant dans le capital de la société AMUZIK CAFE moyennant le prix de 1 €.
Par lettre recommandée du 11 décembre 2008, la société AMUZIK CAFE a fait observer à M. Kamel X... qu'il était absent sans justificatif depuis le 8 décembre précédent et lui a demandé de justifier du motif de son absence, soulignant que ces faits constituaient un manquement grave à ses obligations.
Par lettre recommandée du 16 décembre 2008, M. X... lui a répondu qu'il avait, à plusieurs reprises, réclamé en vain le paiement d'heures de travail réalisées et non payées. Selon détail établi mois par mois, il évaluait le nombre de ces heures à 521 pour la période écoulée entre le 1er avril et le 2 octobre 2008, il en réclamait le paiement et indiquait qu'il n'était " pas question " qu'il reprenne quelque activité que ce soit tant que ses droits ne seraient pas respectés.
Le 23 décembre 2008, il a saisi le conseil de prud'hommes afin de se voir reconnaître la classification d'agent de maîtrise niveau IV échelon 2, d'obtenir le paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire, d'heures supplémentaires, de dommages et intérêts pour travail dissimulé, afin de voir requalifier sa démission motivée du 16 décembre 2008 en licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement abusif et pour remise tardive de l'attestation ASSEDIC et des documents de fin de contrat.
Après vaine tentative de conciliation du 9 février 2009, l'affaire a été renvoyée en audience de jugement, mais, par ordonnance du 16 février 2009, le bureau de conciliation a ordonné à la société AMUZIK CAFE de verser à M. Kamel X... la somme de 204, 08 € à titre de provision du chef du salaire du mois d'août 2008 et ce, dans les huit jours du prononcé de ladite ordonnance, sous peine d'une astreinte de 20 € par jour de retard courant à compter du 9ème jour du prononcé de cette décision.
Par ordonnance du 28 avril 2009, la formation de référé du conseil de prud'hommes a ordonné à la société AMUZIK CAFE de remettre à M. Kamel X... l'attestation ASSEDIC portant mention du motif suivant : " prise d'acte à effet au 08 décembre 2008 " et ce, avant le 30 avril 2009.
Par jugement du 12 avril 2010, auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes d'Angers a débouté M. Kamel X... de l'ensemble de ses prétentions, débouté la société AMUZIK CAFE de sa demande d'indemnité de procédure et condamné M. X... aux dépens.
La société AMUZIK CAFE a laissé " non réclamé " le courrier de notification qui lui a été présenté le 28 avril 2010. M. Kamel X... a reçu notification du jugement le 12 mai 2010 et il en a relevé appel par déclaration au greffe du 11 mai 2010.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 21 janvier 2011, reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Kamel X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris ; sur la classification :- de juger que les fonctions qu'il exerçait effectivement relèvent de la classification " agent de maîtrise " niveau 4 échelon 2 de la convention collective des Hôtels-Cafés-Restaurants ;- en conséquence, de condamner la société AMUZIK CAFE à lui délivrer les bulletins de salaire rectifiés pour la période d'avril à décembre 2008 et à lui payer, à titre de rappel de salaire, la somme brute de 1333, 59 € outre 133, 35 € bruts de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal " en application de l'article 1153 du Code civil " et d'ordonner la capitalisation de ces intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du même code ;
sur les heures supplémentaires :- de constater qu'il a effectué des heures supplémentaires au cours des mois d'avril, mai, juin et septembre 2008 et de condamner la société AMUZIK CAFE à lui payer de ce chef la somme de 5477, 93 € à titre de rappel de salaire outre 547, 79 € bruts de congés payés afférents " avec intérêts au taux légal en application de l'article 1153 du Code civil " et d'ordonner la capitalisation de ces intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du même code ;- de la condamner à lui payer la somme de 10 038, 60 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé en application des dispositions des articles L. 8221-5 et 8223-1 du code du travail ;
au titre de la rupture du contrat travail :- de juger que sa démission motivée produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;- en conséquence, de condamner la société AMUZIK CAFE à lui payer les sommes suivantes : ¤ 3346, 10 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, ¤ 10 038, 60 € de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail, ¤ 1673, 10 € de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement en application des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail ;
sur le préjudice distinct :- en application des dispositions de l'article 1382 du code civil, de condamner la société AMUZIK CAFE à lui payer la somme de 10. 000 € à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation ASSEDIC et des documents de fin de contrat ;
en tout état de cause :- de dire qu'en application de l'article 1153 du code civil, les sommes dues produiront intérêts au taux légal ;- de prononcer la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1154 du même code ;- d'ordonner la remise de bulletins de paie et attestation ASSEDIC rectifiés ;- de condamner la société AMUZIK CAFE à lui payer la somme de 2. 500 € en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 dont distraction au profit de Maître Julie Dodin, avocat ;- de condamner la société AMUZIK CAFE aux entiers dépens outre les éventuels frais d'exécution.
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 23 février 2011, reprises oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société AMUZIK CAFE demande à la cour de débouter M. Kamel X... de son appel et de l'ensemble de ses prétentions, de confirmer le jugement entrepris et de condamner l'appelant à lui payer la somme de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
A la demande relative à la classification et au rappel de salaire y afférent, l'intimée oppose que M. X... " travestit la réalité " et " se donne une importance " dans le fonctionnement et l'organisation de l'établissement dont il ne rapporte pas la preuve, et elle conteste qu'il ait effectivement accompli les fonctions dont il se prévaut.
Elle conteste tout autant qu'il apporte de quelconques éléments propres à étayer la demande qu'il forme au titre des heures supplémentaires, dénie tout manquement de sa part dans l'exécution de ses obligations d'employeur et, soutenant que le salarié aurait cessé de venir travailler à compter du 25 septembre 2008 sans fournir de justificatif, elle conclut que le conseil de prud'hommes a, à juste titre, qualifié la rupture de démission.
Elle ajoute que, le contrat de travail étant devenu à temps partiel, M. X... ne pouvait effectuer que des heures complémentaires. Elle fait valoir que, plus âgé et expérimenté que le gérant de droit, M. X... quoiqu'associé et s'immisçant dans la gestion de la société, a habilement obtenu la conclusion d'un contrat de travail.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la qualification :
Attendu qu'en matière de rémunération, tout salarié a droit au minimum conventionnel correspondant à l'emploi qu'il occupe effectivement, l'employeur ne pouvant conférer au salarié une qualification inférieure à l'emploi effectivement occupé ;
Attendu que la qualification est en principe déterminée contractuellement aux termes du contrat de travail ; qu'en cas de contestation, la qualification doit être appréciée au regard des dispositions de la convention collective d'après les fonctions réellement exercées par le salarié et non en considération du titre qui lui est donné ;
Qu'il incombe à M. X... de rapporter la preuve de ce que l'emploi qu'il occupait et les tâches qu'il accomplissait effectivement au sein de la société Amuzik CAFE n'étaient pas celles d'un serveur comme mentionné dans son contrat de travail, mais correspondaient à celles d'un agent de maîtrise niveau IV échelon 2 de la convention collective des Hôtels-Cafés-Restaurants ;
Attendu que l'appelant expose avoir été démarché par M. Y..., qui exploitait un commerce de musique à Angers, pour qu'il devienne gérant de la société AMUZIK CAFE ; qu'ayant déjà été gérant de deux sociétés et ne souhaitant pas endosser de nouvelles responsabilités de cet ordre, il aurait décliné cette demande, de sorte qu'il a été embauché comme serveur ; que, M. Y... n'étant jamais présent au bar, ses fonctions réelles auraient toutefois consisté à assumer pleinement la gestion de l'établissement, tant sur le plan administratif, que sur le plan de son animation ; qu'il soutient qu'il était constamment présent auprès de la clientèle, assumant l'ouverture et la fermeture de l'établissement, la gestion du personnel, l'organisation des soirées de ce bar d'ambiance ; qu'il assurait tout le travail administratif de base : tenue du livre de caisse et saisie des recettes quotidiennes, réception du courrier, tri et classement des factures, calcul des tarifs des consommations, conception et réalisation des cartes de consommations et des dépliants ; préparation des commandes et réception des marchandises ;
Attendu que ces faits sont contestés par l'intimée ;
Attendu que la classification d'employé niveau 1, échelon 2 attribuée à M. X... aux termes de son contrat de travail prévoit " une scolarité obligatoire et formation sur le tas ", " l'emploi de matériel professionnel ", la réalisation de " tâches simples mais variées " effectuées dans le cadre d'" un contrôle direct et régulier ", le salarié se conformant aux consignes et instructions reçues ;
Que la classification d'agent de maîtrise au niveau 4 échelon 2 exige un niveau " BTS ou BAC ", acquis par voie scolaire, de formation interne équivalente ou par une expérience contrôlée et confirmée d'environ deux ans au niveau 4 échelon 1 ; qu'elle correspond à un emploi impliquant la mise en oeuvre de " moyens et méthodes nombreux et complexes ", une participation importante aux activités de gestion, avec un contrôle discontinu mais l'obligation de rendre régulièrement compte de son activité à des périodes non déterminées ;
Attendu que les seules pièces versées aux débats par M. X... au soutien de sa demande sont, d'une part, une attestation de M. Christophe Z..., ancien salarié de l'intimée en qualité de barman, qui indique que l'appelant a effectué la majeure partie des travaux réalisés avant l'ouverture de l'établissement, qu'il était chargé de l'ouverture du bar, qu'il effectuait souvent la fermeture et travaillait tous les jours au moins jusqu'à 22 heures, qu'il effectuait les achats de marchandises et réceptionnait les livraisons du brasseur tous les mercredis matin, d'autre part, quatre affichettes publicitaires du bar d'ambiance le " Jam Club " exploité par l'intimée, deux cartes de consommations et tarifs, et trois programmes relatifs aux soirées organisées en mai, juin, juillet, septembre et octobre 2008 ;
Attendu que ces affichettes publicitaires et programmes sont inopérants pour faire la preuve des affirmations de l'appelant selon lesquelles il aurait organisé les soirées auxquelles ces documents font référence et assuré en fait la gestion tant administrative que matérielle de l'établissement ; Attendu, s'agissant du témoignage de M. Z..., qu'outre le fait qu'il est isolé et n'est conforté par aucun élément objectif, en tout état de cause, il n'en ressort pas que l'appelant ait effectivement assumé l'ensemble des tâches de gestion dont il se prévaut, le témoin mentionnant seulement des achats de marchandises et la réception, un matin par semaine, des livraisons assurées par le brasseur, ce qui ne permet pas de caractériser un emploi couvrant toutes les tâches de gestion du personnel, de tenue de la comptabilité quotidienne et de la caisse, de réalisation des supports commerciaux et de conception de l'animation dont se prévaut M. X... ;
Que le jugement doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a débouté ce dernier de sa demande de reconnaissance de la classification d'agent de maîtrise niveau 4 échelon 2 de la convention collective des " Hôtels-Cafés-Restaurants " et de la demande de rappel de salaire y afférente ;
Sur les heures supplémentaires :
Attendu que, s'il résulte des dispositions de l'article L 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, il appartient toutefois au salarié qui demande le paiement d'heures supplémentaires de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, l'employeur devant ensuite fournir les éléments propres à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;
Attendu que le contrat de travail initial du 29 avril 2008 prévoit une durée hebdomadaire de travail de 39 heures, conforme à l'horaire en vigueur dans l'entreprise ; que l'avenant du 13 mai 2008 ramène, dès sa date, l'horaire hebdomadaire de travail de M. X... à 30 heures en précisant qu'elles seront réparties à raison de 6 heures par jour du mardi au samedi " selon un planning qui sera remis au salarié au moins 7 jours à l'avance " ; que l'appelant conteste que cet avenant, instituant un temps partiel, ait jamais été mis en oeuvre et soutient qu'il a toujours été employé sous l'égide du contrat initial à temps complet et ce, dès le 3 avril 2008 et non pas seulement à compter du 18 avril 2008 comme mentionné dans le contrat de travail ;
Attendu que le détail des heures qu'il prétend avoir accomplies s'établit comme suit :- du 3 au 30 avril 2008 : 313 heures travaillées pour 71 heures payées-mai 2008 : 253 heures travaillées pour 169 heures payées-juin 2008 : 233 heures travaillées pour 130 heures payées-juillet 2008 : 107 heures travaillées pour 130 heures payées-août 2008 : 115 heures travaillées pour 130 heures payées-septembre 2008 : 169 heures travaillées pour 130 heures payées
Attendu que les heures payées telles qu'invoquées par l'appelant correspondent strictement à celle mentionnées sur l'attestation destinée à l'ASSEDIC ;
Attendu qu'au soutien de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires, M. X... verse aux débats un décompte des heures de travail qu'il prétend avoir réalisé semaine après semaine (pièce no 13) ainsi que les attestations établies par M. Christophe Z..., ancien salarié de la société AMUZIK CAFE, par trois personnes qui indiquent lui avoir rendu visite au bar à plusieurs reprises, et par deux commerçants exploitant des fonds voisins du " JAM CLUB " et ayant fréquenté l'établissement ;
Attendu, s'agissant de la période litigieuse antérieure au 18 avril 2008, que M. Z... atteste que M. X... a effectué " la majeure partie des travaux d'avant ouverture " du bar et que ces travaux ont débuté le 3 avril 2008 ; que Mme Evelyne A... et M. Jean-Paul B..., commerçants voisins, relatent quant à eux, avoir vu l'appelant effectuer les préparatifs " d'avant ouverture du bar durant les trois premières semaines du mois d'avril 2008 ", M. B... précisant avoir alors constaté à plusieurs reprises la présence de M. X... dès 7 heures le matin ; Attendu que l'intimée indique que les travaux qui ont précédé l'ouverture de l'établissement ont été réalisés tant par M. X... que par M. Y... en leur qualité d'associés de la société AMUZIK CAFE ;
Attendu qu'il n'apparaît pas que M. Z... ait pu personnellement constater que M. X... aurait accompli la majeure partie de ces travaux dans la mesure où il résulte de son contrat de travail et de sa lettre de démission (Pièces no 13 et 14 de l'intimée) qu'il a été au service de l'intimée en tant que barman seulement à compter du 9 mai 2008 ; qu'aucun élément objectif ne permet de retenir qu'il ait pu être témoin de faits qui se sont déroulés, dans l'établissement, antérieurement à son embauche ;
Attendu, en outre, qu'il résulte clairement des trois attestations susvisées que les tâches accomplies par M. X... au cours des trois premières semaines d'avril 2008 ont exclusivement consisté en des travaux et préparatifs destinés à permettre l'ouverture de l'établissement ; Attendu qu'en sa qualité d'associé de la société AMUZIK CAFE depuis le 4 avril 2008, engagé pour elle en qualité de caution, l'appelant avait parfaitement intérêt à participer à la réalisation de tels travaux et préparatifs indispensables à l'ouverture de l'établissement et à son exploitation prochaine ; que les témoignages produits ne font pas preuve de ce qu'il les aurait accomplis dans le cadre d'un lien de subordination avec la société AMUZIK CAFE, lien que M. X... ne tente d'ailleurs pas de caractériser et qu'aucun élément objectif ne vient étayer, l'appelant ne soutenant pas, notamment, qu'il aurait accompli ces tâches sous l'autorité et les directives de M. Y... dont il était de près de vingt ans l'aîné ;
Attendu, M. X... ne rapportant pas la preuve de ce que son contrat de travail aurait pris effet dès le 3 avril 2008, qu'il est mal fondé à invoquer l'accomplissement d'heures supplémentaires au cours de la période écoulée depuis cette date jusqu'au 17 avril 2008 inclus, veille de la prise d'effet de son contrat de travail ;
Attendu, s'agissant de la période écoulée du 18 avril au 28 septembre 2008, que la demande en paiement d'heures supplémentaires est étayée par le décompte produit par l'appelant, mentionnant, semaine par semaine, le nombre d'heures de travail accomplies et détaillant les heures supplémentaires, décompte auquel l'employeur a toute faculté de répondre, et par les attestations concordantes des témoins susvisés desquelles il résulte que M. X... était très régulièrement présent au bar au moins jusqu'à 21 heures/ 22 heures, et qu'ils sont restés plusieurs fois en sa compagnie jusqu'à la fermeture de l'établissement à 2 heures du matin, horaire de fermeture qui ne fait pas débat ;
Attendu que la société AMUZIK CAFE ne produit aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'elle énonce, sans aucun justificatif à l'appui, les horaires d'ouverture du bar au cours des périodes successives du 26 avril au 30 juin, du 1er au 31 juillet, puis du 1er au 31 août 2008 et ce qu'ont été, selon elle, les horaires de travail de l'appelant ; que son affirmation selon laquelle il n'aurait travaillé que trois fois jusqu'à 2 heures du matin, à savoir, les 26 avril (jour de l'ouverture), 7 juin (concert exceptionnel) et 21 juin 2008 (Fête de la musique) n'est corroborée par aucun élément et se trouve contredite par les témoignages produits par son adversaire ; que les témoignages qu'elle verse aux débats ne permettent ni de justifier des horaires effectivement réalisés par M. X..., ni de combattre utilement les attestations produites par ce dernier ; qu'en effet, Melle Lisa C... indique seulement avoir constaté " à plusieurs reprises l'absence de M. X..., le soir, après 20 heures " et, atteste, en tant que nouvelle salariée de la société AMUZIK CAFE, être systématiquement payée des heures de travail qu'elle accomplit ; que Melle Lise Y... relate, quant à elle, qu'elle travaillait au sein de la société AMUZIK CAFE le vendredi et le samedi pour remplacer M. X... de 19 h à 2 h du matin, ce qui n'empêche pas que ce dernier ait pu travailler les autres jours bien au-delà de 19 heures ;
Attendu que l'avenant du 13 mai 2008 aux termes duquel les parties ont décidé de ramener, dès cette date, l'horaire hebdomadaire de travail de M. X... à 30 heures, soit un horaire mensuel de 130 heures, a bien été signé par les deux parties ; que l'attestation ASSEDIC mentionne toutefois que l'horaire de travail du mois de mai a été de 169 heures ; qu'ainsi, l'employeur à lui-même reconnu que M. X... avait travaillé à temps plein pendant tout le mois de mai ; et attendu qu'il résulte des éléments produits par ce dernier qu'à compter du 1er juin 2008, son temps de travail au cours de chacune des semaines litigieuses a non seulement excédé la limite légale autorisée au titre des heures complémentaires par l'article L 3123-17 du code du travail, mais systématiquement dépassé 39 heures par semaine ; qu'une telle situation justifiant la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, l'appelant est donc bien fondé à soutenir que son contrat de travail a toujours été à temps plein et à solliciter le paiement d'heures supplémentaires selon le décompte qu'il a établi, étant observé en outre que sa réclamation comptabilisée sur la base des majorations applicables pour heures supplémentaires n'apparaît pas défavorable à l'employeur par rapport à celles applicables au titre des heures complémentaires ;
Attendu que, déduction faite de la période écoulée du 3 au 17 avril 2008 inclus, il résulte des éléments produits que M. X... a effectué, entre le 18 avril et le 28 septembre 2008, 337, 25 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées ; qu'il est donc en droit de prétendre de ce chef au paiement d'un rappel de salaire d'un montant de 4 679, 37 € outre 467, 93 € de congés payés afférents que, par voie d'infirmation du jugement déféré, la société AMUZIK CAFE sera condamnée à lui payer ;
Attendu, s'agissant d'une créance salariale, que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2009, date de présentation à l'intimée de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception portant convocation à l'audience de conciliation à laquelle l'intéressée était bien représentée par son gérant ; attendu, les conditions de l'article 1154 du code civil étant remplies, qu'il convient d'ordonner la capitalisation des intérêts ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé :
Attendu que l'article L 8223-1 du code du travail, relatif aux droits des salariés en cas de recours par l'employeur au travail dissimulé, dispose qu'" en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire " ;
Mais attendu que, conformément aux dispositions des articles L 8221-3 et L 8221-5 du code du travail, la dissimulation d'emploi salarié prévue par le texte susvisé n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ;
Attendu que l'appelant affirme que ce caractère intentionnel est en l'espèce manifeste et il le déduit de ce que l'intimée serait allée jusqu'à formaliser un " faux avenant au contrat de travail " ; mais attendu que, si M. X... indique que, dans les faits, il a continué à travailler à temps plein, il ne conteste pas avoir signé l'avenant du 13 mai 2008 et il ne remet pas en cause l'authenticité de sa signature ;
Et attendu que le caractère intentionnel du défaut de paiement des heures supplémentaires reconnues en faveur de l'appelant n'apparaît pas caractérisé compte tenu des circonstances particulières de la cause desquelles il ressort que M. X..., bien plus âgé et expérimenté que le gérant de droit, était à la fois salarié et associé de la société AMUZIK CAFE, statut qu'il a conservé jusqu'au 16 octobre 2008, soit au-delà de la période litigieuse, et qui lui valait de détenir une procuration sur le compte bancaire ouvert au nom de cette dernière et d'être engagé pour elle en qualité de caution ; que, l'implication de l'appelant dans les affaires et la direction de la société employeur au moment du non paiement des heures supplémentaires ne permet pas de caractériser l'élément intentionnel indispensable à la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L 8223-1 du code du travail ; que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. Kamel X... de sa demande de dommages et intérêts de ce chef ;
Sur la rupture du contrat de travail :
Attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, ceux d'une démission ;
Que la prise d'acte ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'à la condition que les faits invoqués soient, non seulement, établis, mais constituent des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur et faire obstacle à la poursuite du contrat de travail ;
Attendu que le courrier recommandé avec demande d'avis de réception adressé par M. Kamel X... à la société AMUZIK CAFE le 16 décembre 2008, dont l'intimée a accusé réception le 22 décembre suivant est ainsi libellé : " Monsieur, Je vous ai à plusieurs reprises, ainsi qu'à votre comptable, fait part de mon désaccord concernant de nombreuses heures de travail effectuées entre le 1er avril et le 2 octobre 2008. Vous n'êtes pas sans savoir que tout travail non déclaré et non rémunéré constitue une infraction très grave au code du travail. Voici donc le détail des heures dont je réclame le paiement : Avril 2008 : 313 heures effectuées. 71 heures déclarées et payées. 242 heures non déclarées et non payées. Mai 2008 : 253 heures effectuées. 169 heures déclarées et payées. 84 heures non déclarées et non payées. Juin 2008 : 233 heures effectuées. 130 heures déclarées et payées. 103 heures non déclarées et non payées. Août 2008 : 130 heures effectuées. Rémunération 605, 58 euros en espèces. Reste dû : 204, 08 euros. Septembre 2008 : 169 heures effectuées. 100 heures déclarées et payées. 69 non déclarées et non payées. Octobre 2008 : 23 heures effectuées. 0 heure déclarée. 0 heure payée. Lors de mes multiples demandes de régularisation de cette situation vous avez jugé bon de me répondre que je n'avais, en tant qu'ancien associé, aucun recours pour faire valoir mes droits. Il est donc hors de question que je reprenne quelque activité que ce soit au sein de votre société tant que mes droits ne seront pas respectés. Vous me contraignez donc à alarmer les services de la Direction Départementale du Travail, l'URSSAF et les Prud'hommes afin d'obtenir gain de cause. " ;
Attendu que les parties s'accordent pour considérer ce courrier comme une prise d'acte de la rupture par le salarié aux torts de son employeur ; que, dans le cadre de la présente instance, M. X... s'en tient au grief tiré du défaut de paiement de l'intégralité des heures de travail qu'il a accomplies ;
Attendu que le paiement du salaire constitue une obligation essentielle à la charge de l'employeur ; qu'indépendamment de tout caractère intentionnel, le défaut de paiement de l'intégralité des heures de travail accomplies imputable à la société AMUZIK CAFE, et précédemment établi, constitue de sa part un manquement grave à ses obligations d'employeur, qui faisait obstacle à la poursuite du contrat de travail et justifie que la rupture produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef ;
Attendu que M. Kamel X... peut prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis ;
Attendu que son contrat de travail prévoit que le délai de préavis dû en cas de rupture est celui prévu par le code du travail " ainsi que la convention collective des " Hôtels-Cafés-Restaurants " en fonction de l'ancienneté que le salarié aura acquise au moment de son départ ;
Attendu que l'article 30 de la convention collective des " Hôtels-Cafés-Restaurants " prévoit que la durée du délai de préavis pour les employés ayant une ancienneté comprise entre six mois et deux ans est d'un mois ; que cette durée correspond à celle prévue par l'article 1234-1 2o du code du travail ;
Attendu que l'appelant est donc mal fondé à réclamer le paiement d'une indemnité de préavis correspondant à deux mois de salaire ; attendu que le salaire brut moyen mensuel qu'il aurait dû percevoir en dernier lieu, pendant la période du préavis, s'établit, compte tenu du rappel d'heures supplémentaires, à la somme de 1639, 47 € que la société AMUZIK CAFE sera condamnée à lui payer à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
Attendu, M. X... ayant une ancienneté de moins de deux ans dans l'entreprise au moment de la rupture et celle-ci employant habituellement moins de onze salariés, que trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article 1235-5 du code du travail selon lesquelles il peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant au préjudice subi ;
Attendu que la cour dispose d'éléments d'appréciations suffisants pour évaluer le préjudice subi par l'appelant à la somme de 3824 € que la société AMUZIK CAFE sera condamnée à lui payer à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
Attendu, le contrat de travail de M. Kamel X... ayant été rompu par une prise d'acte du salarié et non par un licenciement, que les dispositions de l'article L. 1235-2 du code du travail ne trouvent pas à s'appliquer et que l'appelant ne peut pas prétendre au paiement d'une indemnité pour licenciement irrégulier ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de prétention ;
Attendu, que les deux dernières sommes susvisées ayant un caractère indemnitaire, qu'elles porteront intérêts aux taux légal à compter du présent arrêt ;
Sur les dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation ASSEDIC et des documents de fin de contrat :
Attendu que M. Kamel X... justifie de ce que la société AMUZIK CAFE lui a adressé l'attestation ASSEDIC et les documents de fin de contrat seulement par pli posté le 19 mai 2009 après qu'ait été nécessaires une instance en référé ayant donné lieu à l'ordonnance du 28 avril 2009 et une lettre de réclamation du 7 mai 2009 ;
Attendu que la remise tardive à un salarié des documents ASSEDIC qui lui sont indispensables pour s'inscrire au chômage, obtenir des indemnités de chômage et rechercher un emploi crée un préjudice nécessaire au salarié qui en est victime ; que le préjudice subi de ce chef par M. Kamel X... sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 500 € que la société AMUZIK CAFE sera condamnée à lui payer avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
**** Attendu qu'il n'y a pas lieu à capitalisation des intérêts s'agissant des sommes allouées à titre indemnitaire, les conditions de l'article 1154 du code civil n'étant pas remplies de ces chefs ;
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Attendu, M. Kamel X... prospérant en son recours, que la société AMUZIK CAFE sera condamnée aux dépens d'appel et, par voie d'infirmation du jugement déféré, aux dépens de première instance ;
Attendu qu'il ne paraît pas inéquitable en l'espèce de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, le jugement entrepris étant donc confirmé sur ce point ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, pas arrêt contradictoire ;
Confirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives à la qualification et au rappel de salaire y afférent, aux demandes de dommages et intérêts pour travail dissimulé, pour licenciement irrégulier et aux frais irrépétibles ;
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau ;
Dit que la rupture du contrat de travail conclu entre la société AMUZIK CAFE et M. Kamel X..., intervenue le 16 décembre 2008, s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société AMUZIK CAFE à payer à M. Kamel X... les sommes suivantes :- à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires : 4 679, 37 € (quatre mille six cent soixante dix-neuf euros et trente-sept centimes) outre 467, 93 € (quatre cent soixante-sept euros et quatre-vingt treize centimes) de congés payés afférents avec intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2009 et capitalisation des dits intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ;- à titre d'indemnité compensatrice de préavis : 1639, 47 € (mille six cent trente neuf euros et quarante-sept centimes) ;- à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 3 824 € (trois mille huit cent vingt-quatre euros) ;- à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation ASSEDIC et des documents de fin de contrat : 500 € (cinq cents euros) ;
Dit que ces trois dernières sommes porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et rejette la demande de capitalisation des intérêts en ce qui les concerne ;
Y ajoutant, déboute les parties de leurs demandes formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Condamne la société AMUZIK CAFE aux entiers dépens de première instance et d'appel.