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08/11/2011 | FRANCE | N°10/01864

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 08 novembre 2011, 10/01864


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01864.
Jugement Conseil de Prud'hommes de SAUMUR, du 10 Juin 2010, enregistrée sous le no 09/ 00016

ARRÊT DU 08 Novembre 2011

APPELANTE :

E. U. R. L. X... DANIEL 8 rue des Petits Champs 49730 VARENNES SUR LOIRE

représentée par Monsieur Daniel X..., assisté de Maître Christian LORRILLIERE, avocat au barreau de NANTES

INTIME :

Monsieur Christian Z......... 49260 MONTREUIL BELLAY

(bénéficie d'une aide juridic

tionnelle Totale numéro... du 20/ 10/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)
représenté par M...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01864.
Jugement Conseil de Prud'hommes de SAUMUR, du 10 Juin 2010, enregistrée sous le no 09/ 00016

ARRÊT DU 08 Novembre 2011

APPELANTE :

E. U. R. L. X... DANIEL 8 rue des Petits Champs 49730 VARENNES SUR LOIRE

représentée par Monsieur Daniel X..., assisté de Maître Christian LORRILLIERE, avocat au barreau de NANTES

INTIME :

Monsieur Christian Z......... 49260 MONTREUIL BELLAY

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro... du 20/ 10/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)
représenté par Maître Isabelle BERTON, avocat au barreau de SAUMUR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 08 Novembre 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Christian Z... a été embauché, par contrat initiative emploi du 1er février 2002 par l'eurl X..., en qualité de chauffeur-livreur, au coefficient 115, avec un temps de travail hebdomadaire de 19H30 soit 84H30 par mois et un salaire mensuel brut de 576, 98 euros.
Il travaillait également 19H30 par semaine, depuis le 2 janvier 2002, pour l'entreprise Tual, dans le même emploi et aux mêmes conditions.
L'entreprise appliquait la convention collective nationale des transports routiers.
Les deux entreprises, l'eurl Tual et l'eurl X..., appartenaient à la Société coopérative d'entreprises de transport à capital variable, la sarl Anjou Acheminement.
M. Z... a été victime d'un infarctus le 7 mai 2007et a été en arrêt de travail sans interruption à compter de cette date.
Deux visites de reprise ont eu lieu, d'abord le 15 juillet 2008, puis le 31 juillet 2008, et M. Z... a été à cette dernière date déclaré définitivement inapte au travail par le médecin du travail au poste habituel de chauffeur-livreur.
M. Z... a été le 8 août 2008 convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 20 août 2008 puis licencié le 23 août 2008 pour inaptitude.
Il a saisi le conseil de prud'hommes de Saumur le 10 février 2009 pour obtenir paiement des sommes suivantes :
-8850 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-1617, 33 euros à titre d'indemnité de préavis, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009,
-9407, 39 euros à titre de rappel de salaire, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009,
-949, 01 euros à titre de d'indemnité de repas, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009,
-2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique,
-418, 60 euros au titre des dépens, représentant le coût de l'expertise réalisée par la société d'expertise comptable Getecom, ce solidairement avec la société Tual.
Par jugement du 10 juin 2010 le conseil de prud'hommes de Saumur a :
- dit que le licenciement de M. Z... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- dit que les demandes financières de M. Z... sont prescrites pour la période antérieure au 10 février 2004,

- condamné l'eurl X... à payer à M. Z... les sommes de :

• 2871, 90 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
• 7525, 91 euros à titre de rappels de salaires, congés payés inclus,
• 700 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamné l'eurl X... à remettre à M. Z... les bulletins de salaires correspondant au rappel effectué et en tenant compte de la prescription à compter du 10 février 2004, et une nouvelle attestation Assedic portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, sous astreinte de 10 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de15 jours suivant la notification de la présente décision.
- débouté M. Z... de ses autres demandes,
- débouté l'eurl X... de ses demandes,
- condamné l'eurl X... aux dépens.
Le jugement a été notifié à M. Z... le 6 juillet 2010 et à l'eurl X... le 7 juillet 2010.
L'eurl X... a fait appel le 16 juillet 2010 par lettre recommandée adressée au greffe de la cour qui en a effectué la transcription le 19 juillet 2010.

OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES

L'eurl X... demande à la cour, par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il déboute M. Z... de l'ensemble de ses demandes antérieures au 1er février 2004, de l'infirmer sur les autres points et de rejeter les demandes de M. Z... ; de condamner M. Z... à lui payer la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'eurl X... indique avoir consigné le montant des condamnations et délivré à M. Z... ses bulletins de salaire et son attestation Pôle Emploi.
Elle expose être une entreprise unipersonnelle, qui en dehors de son unique associé, Monsieur Daniel X..., n'emploie qu'un salarié à mi-temps, et ajoute exercer son activité de services de messagerie dans le cadre de l'adhésion à la société coopérative d'entreprises de transport, la sarl " Anjou Acheminement ".
Elle soutient à l'appui de son appel :
Sur le licenciement
-que L'eurl X... est une micro entreprise, et que les exigences légales posées en matière de reclassement doivent être considérées en tenant compte de cette donnée ; qu'il n'y a pas d'obligation pour l'employeur dans ce cas de créer un nouveau poste ; que l'eurl X... a même engagé une démarche auprès de M. Y..., gérant de la sarl Anjou Acheminement, et que la réponse de celui-ci a été, sans ambiguïté, négative.
Sur les demandes financières de M. Z...
- que celui-ci les fonde sur une évaluation comptable qu'il a fait établir par le cabinet Getecom, sur ses seules indications et que cette pièce, qu'il se constitue à lui-même pour preuve de ses réclamations, n'est nullement contradictoire ; qu'en outre, il confond les périodes de travail effectuées chez ses deux employeurs les entreprises Tual et X..., puisqu'il dit avoir jusqu'au 15 novembre 2005 travaillé chez X... alors qu'il s'agissait du vendredi ; que l'employeur communique, pour sa part, les fiches des périodes travaillées pour M. Z..., et ceci, mois par mois, pour les années 2004 à 2007 ; qu'il résulte de ces fiches que M. Z... a perçu en 2004 une rémunération pour 929 heures en travaillant 868 H1/ 2 ; en 2005 une rémunération pour 1014 heures en travaillant 912 heures, en 2006 une rémunération pour 1014 heures en travaillant 712 heures, en 2007une rémunération pour 338 heures en travaillant 322 H1/ 2 ; que pour 268 jours travaillés de février 2004 à avril 2007, il a perçu 282 primes de panier ; qu'il a donc été rempli de ses droits ; que le salarié a, en outre, reçu chaque mois un bulletin de paie portant le détail des horaires effectués et qu'il ne les a jamais contestés ; que ces bulletins, acceptés, font foi des heures réalisées, jusqu'à preuve du contraire.
M. Z... demande à la cour, par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse mais de l'infirmer sur les sommes allouées à ce titre, et de condamner l'eurl X... à lui payer la somme de 1617, 33 euros à titre d'indemnité de préavis, avec les intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009, et celle de 8850 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ; de l'infirmer en ce qu'il a dit ses demandes prescrites pour la période antérieure au 10 février 2009, et de condamner l'eurl X... à lui payer :
- la somme de 9407, 39 euros à titre de rappels de salaires, avec les intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,
- la somme de 949, 01 euros à titre d'indemnité repas, avec les intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes
M. Z... demande que l'eurl X... lui remette un bulletin de salaire rectifié, une attestation pôle emploi portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, ce, sous astreinte de 80 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la date de notification de la décision.
Il demande la condamnation de l'eurl X... à lui payer la somme de 2500 euros au titre des frais non répétibles de première instance et la somme de 2500 euros pour ceux d'appel, avec le bénéfice des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique, la condamnation de l'eurl X... aux dépens de première instance et d'appel et de la condamner solidairement avec l'eurl Tual à lui payer le coût de l'expertise Getecom soit la somme de 418, 60 euros.
M. Z... soutient :
Sur le licenciement
-que l'employeur avait l'obligation de chercher à le reclasser, même s'il avait été déclaré inapte à tout poste dans l'entreprise, et ne justifie pas de ses recherches ; le courrier de M. Y..., gérant de la sarl Anjou Acheminement a été fait le 4 novembre 2009 et donc pour les besoins de la cause ; l'absence de recherches réelles est révélée par le fait que la lettre de licenciement énonce une impossibilité de reclassement sans faire état de recherches effectives.

Sur les demandes de rappels de salaires et d'indemnités de repas

-que l'eurl Tual n'avait mis en place aucun procédé pour établir les heures de travail accomplies par le salarié ; qu'il produit pour sa part le tableau récapitulatif établi par la société d'expertise Getecom, et que ce tableau est soumis à la contradiction, l'eurl X... pouvant demander une contre-expertise, ce qu'elle ne fait pas ; qu'il n'a signé aucun relevé d'heures hebdomadaire, et que les décomptes produits par l'employeur ne sont pas explicites ; qu'en outre, il effectue un " lissage " des heures à l'année, ce qui n'est pas prévu par le contrat de travail.
- que ses demandes financières ne sont pas prescrites avant le 10 février 2004, car il faut appliquer l'article 2224 du code civil qui dit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'il faut donc retenir comme point de départ de la prescription la date de fin de la relation salariale, soit le 23 août 2008, et non la date de la saisine du conseil de prud'hommes de Saumur qui a été le 10 février 2009.
- qu'il étaye ses demandes en présentant un tableau récapitulatif dressé par la société Getecom pour la période 2003/ 2007, celle-ci ayant recherché, pour l'établir, les dispositions de la convention collective sur le travail de nuit, sur l'indemnité de repas, et sur la rémunération minimale conventionnelle majorée selon l'ancienneté du salarié.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le licenciement
Il est établi que M. Z... a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 7 mai 2007 et jusqu'en juillet 2008.
Dans ces conditions, son arrêt de travail ayant excédé 21 jours, il bénéficiait, par application des dispositions des articles R4624-21 et R4624-22 du code du travail, d'un examen de reprise du travail, devant permettre d'apprécier son aptitude médicale à reprendre son ancien emploi.
L'eurl X... ne produit aux débats que la fiche d'inaptitude dressée le 31 juillet 2008 par Mme B..., médecin du travail, avec pour seule mention d'employeur " eurl Tual Gérard ".
Il est constant cependant, ainsi que l'établissent les pièces versées par M. Z..., que le médecin du travail a, le 15 juillet 2008, reprenant le contenu d'un écrit de juin 2008, et réalisant la première visite de reprise du travail du salarié, précisé que M. Z... " ne pouvait exécuter de manutentions lourdes, les livraisons et tous déplacements à pied, rapides ou prolongés, mais qu'un poste sédentaire ou de conduite pourrait convenir.
A l'issue des deux examens prévus à l'article R4624-31 du code du travail, le médecin du travail, déclarait le 31 juillet 2008, M. Z... inapte définitivement à l'emploi de chauffeur-livreur, avec cette précision : " pas de poste adapté dans l'entreprise ".
Dès lors, par application de l'article L1226-2 du code du travail, l'employeur était dans l'obligation de proposer un autre emploi au salarié, adapté à ses capacités, ce, en prenant en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications formulées par celui-ci sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail, ou aménagement du temps de travail.
Si le médecin du travail conclut à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise et à l'impossibilité de son reclassement dans l'entreprise, l'employeur n'est en effet pas pour autant dispensé de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, et, le cas échéant, au sein du groupe auquel il appartient, au besoin par la mise en oeuvre des mesures susvisées ; le délai pour rechercher un reclassement ne commence à courir qu'à compter de la date de la seconde visite de reprise.
L'inaptitude du salarié, constatée par le médecin du travail, n'est pas, à elle seule, susceptible de caractériser un motif légitime de licenciement ; seuls l'impossibilité de reclassement ou le refus injustifié du salarié du poste qui lui est proposé sont de nature à constituer une cause réelle et sérieuse de rupture du contrat de travail.
A défaut par l'employeur d'avoir effectué la recherche de reclassement, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
L'eurl X... soutient que son seul salarié étant, outre M. X... lui-même, M. Z..., les possibilités de reclassement étaient rendues quasi-inexistantes de fait.

M. X... expose cependant avoir, en juillet 2008, demandé à M. Y..., gérant de la sarl Anjou Acheminement, " quels étaient les postes à pourvoir pour son salarié inapte à son poste ".
L'employeur ne produit cependant à l'appui de cette affirmation aucune lettre de consultation de la sarl Anjou Acheminement et ne justifie, par conséquent pas non plus de la date précise à laquelle il aurait questionné celle-ci.

L'attestation délivrée par M. Y..., gérant de la sarl Anjou Acheminement, est datée du 4 novembre 2011 ; elle n'est par conséquent pas contemporaine de la recherche, et son contenu ne renseigne pas sur la date à laquelle M. X... aurait recherché auprès d'elle un reclassement pour son salarié.
M. X... ne démontre pas avoir fait cette recherche seulement à compter du 31 juillet 2008, c'est-à-dire, au plus tôt, le jour même de l'établissement par le médecin du travail de l'avis d'inaptitude définitive.
Il n'est pas plus justifié de démarches postérieures au 31 juillet 2008.
Faite " en juillet 2008 ", la recherche de reclassement alléguée apparaît donc comme ayant eu lieu de façon prématurée, et reste par conséquent inopposable au salarié dont le licenciement est dès lors sans cause réelle et sérieuse.
L'entreprise ayant moins de 11 salariés, M. Z... peut prétendre, par application des dispositions de l'article L 1235-5 du code du travail, à une indemnité correspondant au préjudice subi ; il avait six ans d'ancienneté dans l'entreprise, et 54 ans au moment du licenciement ; il s'agissait d'un mi-temps.
Le salaire mensuel moyen des trois derniers mois s'établit à 736 euros. (84. 50 euros/ H x 8. 71).

Il y a lieu, dans ces conditions, de condamner l'eurl X... à verser à M. Z... à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 736 euros x 5 mois soit 3680 euros, le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur étant infirmé sur le seul quantum de l'indemnité.

En outre, si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude.
L'indemnité de préavis due à M. Z... est donc, selon sa demande, qui correspond à deux mois de salaire, avec les congés payés y afférents, de 1617, 33 euros ; le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur est infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Cette somme sera, par application des dispositions de l'article 1153 du code civil, augmentée des intérêts de retard, calculés au taux légal, à compter du 21 février 2009, date de signature par l'eurl X... de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Saumur, qui a porté à sa connaissance les demandes de M. Z....
Le jugement est confirmé en ce qu'il ordonné remise par l'eurl X... d'une nouvelle attestation Pôle Emploi portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur et infirmé en ce qu'il a ordonné une astreinte, que les circonstances ne justifient pas.
Le montant de l'indemnité de préavis, et de l'indemnité de licenciement rectifiée, seront portés sur le document rectificatif.
Sur les rappels de salaires
M. Z... revendique paiement par l'eurl X... d'heures complémentaires de travail, ainsi que d'indemnités de repas, ce, à compter de juillet 2003 au motif selon lui que par application des dispositions de l'article 2224du code civil et de l'article L3245-1 du code du travail, le point de départ de la prescription quinquennale serait la date à laquelle la relation salariale a pris fin, soit le 23 août 2003, et non la date de la saisine de la juridiction prud'homale.
Aux termes de son propre raisonnement, les mois de juillet et août 2003 sont par conséquent à exclure de sa demande chiffrée, puisque le cabinet d'expertise comptable Getecom les a inclus dans ses tableaux récapitulatifs d'heures travaillées.
Au demeurant, si l'article L3245-1 du code du travail prévoit en effet que " l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil ", la loi 2008-561 du 17 juin 2008 fixe le point de départ de la prescription au " jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits " et par conséquent, pour les salaires, à partir de la date d'exigibilité de ceux-ci.
Cette date de connaissance des faits et d'exigibilité est celle de remise du bulletin de paie, qui intervient au 30 du mois écoulé.
Les demandes salariales de M. Z... ont commencé à se prescrire pour chaque mois en fin de mois.
La prescription est cependant interrompue, selon les règles de droit commun de l'article 2244 du code civil, par une citation en justice.
Le conseil de prud'hommes est saisi sur simple requête écrite, laquelle a eu lieu en l'espèce le 10 février 2009.
En conséquence, seul peut être examiné le paiement des heures effectuées après le 10 février 2004, les demandes en paiement pour des heures antérieures à cette date s'avérant irrecevables comme prescrites.
Le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur est confirmé sur ce point.
S'il résulte de l'article L 3171-4 (ancien L 212-1-1) du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
A l'appui de sa demande de rappel de salaire pour heures complémentaires, M. Z... se contente de verser aux débats une " expertise comptable " établie à sa demande par le cabinet Getecom, sans que soit versé aux débats aucun relevé journalier des heures complémentaires alléguées.
Le cabinet Getecom indique d'ailleurs dans le courrier de transmission de ses travaux à M. Z..., qu'il s'est exclusivement basé, pour établir les tableaux représentant les temps de travail hebdomadaires de M. Z... dans l'entreprise X... de 2003 à 2007, sur les " entretiens menés avec M. Z... et les bulletins de salaire ".
Le fait que le calcul des heures alléguées soit fait par un comptable professionnel, qui a, en outre, vérifié les dispositions de la convention collective sur le travail de nuit, sur l'indemnité de repas, et sur la rémunération minimale conventionnelle majorée selon l'ancienneté du salarié, ne pallie pas le fait que ce travail s'appuie sur les seules " déclarations " du salarié, sans aucun support écrit, et par conséquent sans aucune possibilité de vérification entre le tableau et un quelconque relevé. La demande de M. Z... ne peut, dans ces conditions, être considérée comme étayée, et reste insuffisante pour qu'il soit procédé à une remise en cause des bulletins de paie remis par l'employeur.

Le jugement est infirmé et la demande de M. Z... de rappel de salaires pour heures complémentaires est rejetée.
Sur les indemnités de repas
La convention collective nationale des transports routiers, versée aux débats, est ainsi rédigée en son chapitre 12- section 1- 3o :
Déplacements comportant un ou plusieurs repas hors du lieu de travail, (sous réserve que l'amplitude de la journée de travail couvre les périodes 11H45/ 14H ou 18H45/ 21H15) : indemnité de repas versée pour chaque repas.
S'agissant d'une activité exclusive de livraisons, les repas se passent donc hors du lieu de travail et l'indemnité est due dès lors que l'amplitude conventionnelle est effectuée.
Les bulletins de salaire produits aux débats permettent de constater que M. Z... a perçu 282 primes de panier pour 268 jours travaillés, de février 2004 à avril 2007, qu'il a donc été rempli de ses droits.

En effet, si le cabinet Getecom retient, dans la lettre qu'il a adressée à M. Z... le 28 mai 2009, pour la période non prescrite allant de février 2004 à mai 2007, deux jours par semaine pour lesquels l'amplitude de travail couvre, la période 11H45/ 14H, soit le mardi et le vendredi jusqu'au 14 novembre 2005 puis à partir du 15 novembre 2005 : le lundi et le mardi, ce qui augmente le nombre des indemnités de repas dues : il s'agit là encore de déclarations du salarié, qui ne sont étayées par aucune pièce, notamment un relevé.

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande en rappels d'indemnités de repas de M. Z....
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il parait inéquitable de laisser à la charge de M. Z... les frais engagés dans l'instance d'appel et non compris dans les dépens ; l'eurl X... est condamnée à lui payer, pour l'en indemniser et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 800 euros qui sera recouvrée selon les dispositions visées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique.
La demande formée par l'eurl X... à ce titre est rejetée.
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles de première instance sont confirmées.
Les dépens de première instance et d'appel restent à la charge de l'eurl X....
L'expertise Getecom, qui a été faite à l'initiative d'une partie, et non ordonnée par le juge, ne peut être comprise dans les dépens de l'instance.
Son coût, qui ne pourrait être intégré que dans l'indemnité allouée au titre des frais irrépétibles, doit rester à la charge de M. Z..., qui succombe en sa demande de rappels de salaires.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur du 10 juin 2010 en ce qu'il a :
- dit que les demandes financières de M. Z... sont irrecevables comme prescrites pour la période antérieure au 10 février 2004,
- rejeté la demande de M. Z... au titre des indemnités de repas,
- dit que le licenciement de M. Z... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamné l'eurl X... à payer à M. Z... la somme de 700 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté l'eurl X... de ses demandes,
- condamné l'eurl X... à remettre à M. Z... une attestation pole emploi rectifiée quant à la cause de la rupture du contrat de travail.

L'INFIRME pour le surplus.

Statuant à nouveau,
CONDAMNE l'eurl X... à payer à M. Z... la somme de 3680 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
CONDAMNE l'eurl X... à payer à M. Z... la somme de 1617, 33 euros à titre d'indemnité de préavis, congés payés incidents inclus.
DIT que les condamnations de nature salariale seront augmentées des intérêts au taux légal à compter du 21 février 2009, date de signature par l'eurl X... de l'accusé de réception de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Saumur.
DIT que l'attestation pôle emploi portera mention de l'indemnité de préavis et de l'indemnité de licenciement rectifiée.
CONDAMNE l'eurl X... aux dépens d'appel.
REJETTE la demande de M. Z... en paiement de l'expertise Getecom.
CONDAMNE en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique l'eurl X... à payer à Maître Isabelle Berton, avocate de monsieur Z..., la somme de 800 euros au titre des honoraires et frais que monsieur Z... aurait exposés dans l'instance d'appel s'il n'avait pas eu l'aide juridictionnelle et rappelle que Maître Berton, si elle recouvre cette somme, devra renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLCatherine LECAPLAIN-MOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01864
Date de la décision : 08/11/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-11-08;10.01864 ?
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