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08/11/2011 | FRANCE | N°10/01816

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 08 novembre 2011, 10/01816


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01816.
Jugement Conseil de Prud'hommes de SAUMUR du 10 Juin 2010, enregistrée sous le no 09/ 00018
ARRÊT DU 08 Novembre 2011
APPELANTE :
E. U. R. L. X... GERARD Route de Saumoussay 49400 CHACE

représentée par Monsieur X..., gérant, assisté de Maître Claudine THOMAS, avocat au barreau d'ANGERS
INTIME :
Monsieur Christian Y...... 49260 MONTREUIL BELLAY

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 10/ 005392 du 20/ 10/

2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)
représenté par Maître Isabelle BERTON, a...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01816.
Jugement Conseil de Prud'hommes de SAUMUR du 10 Juin 2010, enregistrée sous le no 09/ 00018
ARRÊT DU 08 Novembre 2011
APPELANTE :
E. U. R. L. X... GERARD Route de Saumoussay 49400 CHACE

représentée par Monsieur X..., gérant, assisté de Maître Claudine THOMAS, avocat au barreau d'ANGERS
INTIME :
Monsieur Christian Y...... 49260 MONTREUIL BELLAY

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 10/ 005392 du 20/ 10/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)
représenté par Maître Isabelle BERTON, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 08 Novembre 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur Christian Y... a été embauché par contrat initiative emploi à durée indéterminée et à temps partiel du 15 décembre 2001 à effet au 2 janvier 2002 par l'eurl X... en qualité de chauffeur-livreur, au coefficient 115, avec un temps de travail hebdomadaire de 19H1/ 2 soit 84H1/ 2 par mois et un salaire mensuel brut de 576, 98 euros.
Un contrat à durée indéterminée du 1er décembre 2004 a été signé entre M. Y... et l'eurl X... portant les mêmes durées hebdomadaires et mensuelles d'emploi, et portant en annexe le " détail des horaires sur une année ".
Il y était prévu la possibilité d'heures complémentaires, rémunérées au taux normal, dans la limite de 10 % de la durée du travail.
M. Y... travaillait également 19H1/ 2 par semaine depuis le 1er février 2002 pour l'entreprise Talluau, dans le même emploi et aux mêmes conditions.
L'entreprise X... appliquait la convention collective nationale des transports routiers.
Les deux entreprises, l'eurl X... et l'eurl Talluau, appartenaient à la Société coopérative d'entreprises de transport à capital variable, la sarl Anjou Acheminement.
M. Y... a été victime d'un infarctus le 7 mai 2007, et a été en arrêt maladie de manière ininterrompue à compter de cette date.
Deux visites de reprise ont eu lieu, d'abord le 15 juillet 2008, puis le 31 juillet 2008, et M. Y... a été à cette dernière date déclaré définitivement inapte au travail par le médecin du travail, au poste habituel de chauffeur-livreur.
M. Y... a été, le 5 août 2008, convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 14 août 2008, puis licencié le 19 août 2008, pour inaptitude.
Il a saisi le conseil de prud'hommes de Saumur le 10 février 2009 pour obtenir paiement des sommes suivantes :
-8850 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-1617, 33 euros à titre d'indemnité de préavis, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009,
-10 505, 64 euros à titre de rappel de salaire, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009,
-1094, 58 euros à titre de d'indemnité de repas, avec intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009,
-2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et avec le bénéfice de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique,
-418, 60 euros au titre des dépens, représentant le coût de l'expertise réalisée par la société d'expertise comptable Getecom, ce, solidairement avec la société Talluau.
M. Y... a demandé qu'il soit ordonné à l'eurl X... de lui remettre un bulletin de salaire rectifié, une attestation assedic (pôle emploi) portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, ce, sous astreinte de 80 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la date de notification de la décision.
Par jugement du 10 juin 2010 le conseil de prud'hommes de Saumur a :
- dit que le licenciement de M. Y... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- dit que les demandes financières de M. Y... sont prescrites pour la période antérieure au 10 février 2004,
- condamné l'eurl X... à payer à M. Y... les sommes de :
• 3503, 34 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive
• 7494, 31 euros à titre de rappels de salaires, congés payés inclus
• 700 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamné l'eurl X... à remettre à M. Y... les bulletins de salaires correspondant au rappel effectué et en tenant compte de la prescription à compter du 10 février 2004 et une nouvelle attestation Assedic portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, sous astreinte de 10 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de15 jours suivant la notification de la présente décision.
- débouté M. Y... de ses autres demandes.
- débouté l'eurl X... de ses demandes.
- condamné l'eurl X... aux dépens.
Le jugement a été notifié à l'eurl X... et à M. Y... le 6 juillet 2010.
L'eurl X... a fait appel le 12 juillet 2010 par lettre recommandée adressée au greffe de la cour qui en a effectué la transcription le 13 juillet 2010.
OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES
L'eurl X... demande à la cour, par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures, de confirmer le jugement du 10 juin 2010 en ce qu'il déboute M. Y... de ses demandes financières antérieures au 10 février 2004, et en ses demandes relatives aux indemnités de repas ; de l'infirmer sur les heures complémentaires et le licenciement, et rejeter les demandes faites par M. Y... à ce titre, de condamner M. Y... à lui payer la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'eurl X... soutient :
sur les demandes financières de M. Y...
- que l'expertise comptable produite par M. Y... à l'appui de ses demandes financières est unilatérale et fondée sur les seules affirmations de celui-ci ; elle présente de plus des erreurs, et se heurte à la prescription ; elle repose notamment sur l'affirmation que M. Y... a travaillé le lundi pour l'eurl X..., ce qui est inexact, puisqu'il ne travaillait que les mercredis et samedis, puis, à compter du 15 novembre 2004, un mercredi sur deux, le vendredi, et un samedi sur deux ; elle compte des indemnités repas le samedi, alors que M. Y... n'a travaillé que de 7 h à 10h ; M. Y... réclame donc le paiement de journées pour lesquelles il travaillait pour l'eurl Talluau.
- que l'eurl X... a, quant à elle, établi des décomptes journaliers récapitulés sous forme de tableaux mensuels, qui sont conformes aux bulletins de salaire, lesquels n'ont jamais été contestés par M. Y....
Sur le licenciement
-que le reclassement du salarié était impossible, car il était seul employé de la structure, et il n'est pas exigé de l'employeur qu'il créé un nouveau poste ; l'activité de l'eurl X... implique un déplacement régulier au Marché d'intérêt national d'Angers, et des livraisons toute la journée avec des ports de charge ; M. X... a aussi interrogé la sarl Anjou Acheminement, groupement auquel il appartient.
M. Y... demande à la cour, par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais de l'infirmer sur les sommes allouées à ce titre et de condamner l'eurl X... à lui payer la somme de 1617, 33 euros à titre d'indemnité de préavis, avec les intérêts au taux légal à compter du 10 février 2009, et celle de 8850 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ; de l'infirmer en ce qu'il a dit prescrites ses demandes pour la période antérieure au 10 février 2004, et de condamner l'eurl X... à lui payer :
- la somme de 10 505, 64 euros à titre de rappels de salaires, avec les intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,
- la somme de 1094, 58 euros à titre d'indemnités repas, avec les intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,
M. Y... demande que l'eurl X... lui remette un bulletin de salaire rectifié, une attestation pôle emploi portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, ce, sous astreinte de 80 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la date de notification de la décision.
Il demande la condamnation de l'eurl X... à lui payer la somme de 2500 euros au titre des frais non répétibles de première instance et la somme de 2500 euros pour ceux d'appel, avec le bénéfice des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique, la condamnation de l'eurl X... aux dépens de première instance et d'appel et de la condamner solidairement avec l'eurl Talluau à lui payer le coût de l'expertise Getecom.
M. Y... soutient :
sur le licenciement
-que l'employeur avait l'obligation de chercher à le reclasser, même s'il avait été déclaré inapte à tout poste dans l'entreprise, et ne justifie pas de ses recherches ; le courrier de M. Z..., gérant de la sarl Anjou Acheminement a été fait le 4 novembre 2009 et donc pour les besoins de la cause ; l'absence de recherches réelles est révélée par le fait que M. X... a écrit dès le 17 juillet 2008 au service de médecine du travail, qui a pris un premier avis d'inaptitude le 15, pour lui dire qu'il y avait impossibilité de reclassement, et le fait également que M. X... a écrit encore très vite au médecin du travail, puisque le 5 août 2008 après un second avis d'inaptitude du 31 juillet, pour lui dire qu'il avait décidé de licencier M. Y....
Sur ses demandes en rappels de salaires et d'indemnités de repas
-que l'eurl X... n'avait mis en place aucun procédé pour établir les heures de travail accomplies par le salarié ; qu'il produit pour sa part le tableau récapitulatif établi par la société d'expertise Getecom et que ce tableau est soumis à la contradiction, l'eurl X... pouvant demander une contre-expertise, ce qu'elle ne fait pas ; qu'il n'a signé aucun relevé d'heures hebdomadaire, et que les décomptes produits par l'employeur ne sont pas explicites ; qu'en outre, l'employeur effectue de fait un " lissage " des heures à l'année, ce qui n'est pas prévu par le contrat de travail.
- que ses demandes financières ne sont pas prescrites avant le 10 février 2004, car il faut appliquer l'article 2224 du code civil qui dit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'il faut donc retenir comme point de départ de la prescription la date de fin de la relation salariale, soit le 23 août 2008, et non la date de la saisine du conseil de prud'hommes de Saumur qui a été le 10 février 2009.
- qu'il étaye ses demandes en présentant un tableau récapitulatif dressé par la société Getecom pour la période 2003/ 2007, celle-ci ayant recherché, pour l'établir, les dispositions de la convention collective sur le travail de nuit, sur l'indemnité de repas, et sur la rémunération minimale conventionnelle majorée selon l'ancienneté du salarié.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le licenciement
Il est établi que M. Y... a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 7 mai 2007 jusqu'en juillet 2008.
Dans ces conditions, son arrêt de travail ayant excédé 21 jours, il bénéficiait par application des dispositions des articles R4624-21 et R4624-22 du code du travail d'un examen de reprise du travail, devant permettre d'apprécier son aptitude médicale à reprendre son ancien emploi.
Mme A..., médecin du travail, avait dès le 12 juin 2008, indiqué dans un courrier adressé à M. X..., aux fins de recherche d'un reclassement adapté, que son salarié ne pouvait plus assurer des manutentions lourdes, des livraisons, quel que soit le poids des colis, des montées ou descentes d'escalier ni des cadences rapides de travail ; que la conduite d'un véhicule n'était pas contre-indiquée ;
Dans son premier avis d'inaptitude, daté du 15 juillet 2008, elle redisait qu'un emploi sédentaire ou de conduite serait compatible avec l'état de santé de M. Y....
A l'issue des deux examens prévus à l'article R4624-31 du code du travail, le médecin du travail, le 31 juillet 2008, déclarait M. Y... inapte définitivement à l'emploi de chauffeur-livreur, avec cette précision : " pas de poste adapté dans l'entreprise ".
Dès lors, par application de l'article L1226-2 du code du travail, l'employeur était dans l'obligation de proposer un autre emploi au salarié, adapté à ses capacités, ce, en prenant en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications formulées par celui-ci sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail, ou aménagement du temps de travail.
Si le médecin du travail conclut à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise et à l'impossibilité de son reclassement dans l'entreprise, l'employeur n'est en effet pas pour autant dispensé de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise, et, le cas échéant, au sein du groupe auquel il appartient, au besoin par la mise en oeuvre des mesures susvisées ; le délai pour rechercher un reclassement ne commence à courir qu'à compter de la date de la seconde visite de reprise.
L'inaptitude du salarié, constatée par le médecin du travail, n'est pas, à elle seule, susceptible de caractériser un motif légitime de licenciement ; seuls l'impossibilité de reclassement ou le refus injustifié du salarié du poste qui lui est proposé sont de nature à constituer une cause réelle et sérieuse de rupture du contrat de travail.
Si l'employeur ne démontre pas avoir effectué la recherche de reclassement, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Il est constant que le médecin du travail a, le 15 juillet 2008, reprenant le contenu de son écrit de juin 2008, précisé que M. Y... " ne pouvait exécuter de manutentions lourdes, les livraisons et tous déplacements à pied, rapides ou prolongés, mais qu'un poste sédentaire ou de conduite pourrait convenir " et a constaté le 31 juillet l'inaptitude définitive au poste habituel de chauffeur-livreur, en ajoutant : " pas de poste adapté dans l'entreprise ".
Il résulte du courrier adressé le17 juillet 2008 par M. X... au médecin du travail, que l'employeur a, dès le surlendemain de la première visite, annoncé à la médecine du travail : " tous les postes nécessaires au fonctionnement de notre entreprise comportent le port de charges lourdes ou des livraisons rapides à pied ; aussi, aucun reclassement ne semble possible " ; ces recherches de reclassement, qui ont été effectuées avant même l'établissement par le médecin du travail de l'avis d'inaptitude définitive, ne peuvent être prises en compte.
L'eurl X... soutient que son seul salarié étant, outre M. X... lui-même, M. Y..., les possibilités de reclassement étaient rendues quasi-inexistantes de fait.
M. X... expose néanmoins qu'il " ne s'est pas cantonné à sa très petite entreprise pour tenter de reclasser M. Y... ", mais soutient avoir en juillet 2008, demandé à M. Z..., gérant de la sarl Anjou Acheminement, " quels étaient les postes à pourvoir pour son salarié inapte à son poste ".
L'employeur ne produit cependant à l'appui de cette affirmation aucune lettre de consultation de la sarl Anjou Acheminement, et ne justifie, par conséquent, pas non plus de la date précise à laquelle il aurait questionné celle-ci.
Il ne démontre pas l'avoir fait le 31 juillet 2008, c'est-à-dire le jour même de l'établissement par le médecin du travail de l'avis d'inaptitude définitive, ni ne justifie de démarches postérieures à cette date.
Là encore, la recherche de reclassement, faite " en juillet 2008 " apparaît donc comme ayant eu lieu de façon prématurée, et reste par conséquent inopposable au salarié.
Enfin, l'attestation délivrée par M. Z..., gérant de la sarl Anjou Acheminement, est datée du 4 novembre 2011 ; elle n'est, par conséquent, pas contemporaine de la recherche, et son contenu ne renseigne pas sur la date à laquelle M. X... aurait recherché un reclassement pour son salarié.
L'eurl X... ne démontre donc pas qu'elle ait effectué une recherche de reclassement, effective et sérieuse, tenant compte de l'avis médical d'inaptitude du 31 juillet 2008, et le licenciement de M. Y... est, par conséquent, sans cause réelle et sérieuse.

L'entreprise ayant moins de 11 salariés, M. Y... peut prétendre, par application des dispositions de l'article L 1235-5 du code du travail, à une indemnité correspondant au préjudice subi ; il avait six ans d'ancienneté dans l'entreprise, et 54 ans au moment du licenciement ; il s'agit d'un mi-temps ; sa situation actuelle d'emploi n'est pas exposée.
Le salaire mensuel moyen des trois derniers mois s'établit à 736 euros. (84. 50 euros/ H x 8. 71).
Il y a lieu, dans ces conditions, de condamner l'eurl X... à verser à M. Y... à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 736 euros x 5 mois soit 3680 euros, le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur étant infirmé sur le seul quantum de l'indemnité.
En outre, si le salarié ne peut, en principe, prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude.
L'indemnité de préavis due à M. Y... est donc, selon sa demande, qui correspond à deux mois de salaire, avec les congés payés y afférents, de 1617, 33 euros ; le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur est infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Le jugement est confirmé en ce qu'il ordonné remise par l'eurl X... d'une nouvelle attestation Pôle Emploi portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur et infirmé, en ce qu'il a ordonné une astreinte, que les circonstances ne justifient pas.
Cette somme sera augmentée, par application des dispositions de l'article 1153 du code civil, des intérêts de retard, calculés au taux légal, à compter du 21 février 2009, date de signature par l'eurl X... de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Saumur, qui a porté à sa connaissance les demandes de M. Y....
Le jugement est confirmé en ce qu'il ordonné remise par l'eurl X... d'une nouvelle attestation Pole Emploi portant mention du préavis et de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur et infirmé en ce qu'il a ordonné une astreinte, que les circonstances ne justifient pas ;
Le montant de l'indemnité de préavis, et de l'indemnité de licenciement rectifiée, seront portés sur le document rectificatif ;
Sur les rappels de salaires
M. Y... revendique paiement par l'eurl X... d'heures complémentaires de travail, ainsi que d'indemnités de repas, ce, à compter de juillet 2003, au motif selon lui que par application des dispositions de l'article 2224du code civil et de l'article L3245-1 du code du travail, le point de départ de la prescription quinquennale serait la date à laquelle la relation salariale a pris fin, soit le 23 août 2003, et non la date de la saisine de la juridiction prud'homale.
Aux termes de son propre raisonnement, les mois de juillet et août 2003 sont par conséquent à exclure de sa demande chiffrée, puisque le cabinet d'expertise comptable Getecom les a inclus dans ses tableaux récapitulatifs d'heures travaillées.
Au demeurant, si l'article L3245-1 du code du travail prévoit en effet que " l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil ", la loi 2008-561 du 17 juin 2008 fixe le point de départ de la prescription au " jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits " et par conséquent, pour les salaires, à partir de la date d'exigibilité de ceux-ci.
Cette date de connaissance des faits et d'exigibilité est celle de remise du bulletin de paie, qui intervient au 30 du mois écoulé.
Les demandes salariales de M. Y... ont commencé à se prescrire pour chaque mois en fin de mois.
La prescription est cependant interrompue, selon les règles de droit commun de l'article 2244 du code civil, par une citation en justice.
Le conseil de prud'hommes est saisi sur simple requête écrite, laquelle a eu lieu en l'espèce le 10 février 2009.
En conséquence, seul peut être examiné le paiement des heures effectuées après le 10 février 2004, les demandes en paiement pour des heures antérieures à cette date s'avérant irrecevables comme prescrites.
Le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur est confirmé sur ce point.
Il apparaît à la lecture du relevé d'heures établi pour M. Y... par la société Getecom, que les dépassements hebdomadaires allégués et non prescrits se situent pour l'essentiel entre février 2004 et novembre 2005, M. Y... chiffrant sur cette période son horaire hebdomadaire effectué à 26 h1/ 2 au lieu de 19 h 1/ 2, et à 52 h 1/ 2 sur deux semaines d'avril, quatre semaines d'août et une semaine de décembre ; à partir de novembre 2005, le dépassement décrit n'est plus que mensuel, par non prise en compte sur les mois de mars 2006, août 2006, novembre 2006 et mars 2007, d'une cinquième semaine de travail.
L'expertise sur laquelle s'appuie M. Y... a été établie, selon le courrier que lui a adressé la société Getecom avec ses travaux, et selon le libellé de la note d'honoraires de celle-ci, à partir des " entretiens menés avec M. Y... et des bulletins de salaire ".
S'il résulte de l'article L 3171-4 (ancien L 212-1-1) du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
A l'appui de sa demande de rappel de salaire pour heures complémentaires, M. Y... se contente de verser aux débats une " expertise comptable " établie à sa demande par le cabinet Getecom, sans que soit versé aux débats aucun relevé journalier des heures restées impayées.
Le cabinet Getecom indique d'ailleurs dans le courrier de transmission de ses travaux à M. Y..., qu'il s'est exclusivement basé, pour établir les tableaux représentant les temps de travail hebdomadaires de M. Y... dans l'entreprise, de 2003 à 2007, sur les " entretiens menés avec M. Y... et les bulletins de salaire ".
Le fait que le calcul des heures alléguées soit fait par un comptable professionnel, qui a, en outre, vérifié les dispositions de la convention collective sur le travail de nuit, sur l'indemnité de repas, et sur la rémunération minimale conventionnelle majorée selon l'ancienneté du salarié, ne pallie pas le fait que ce travail s'appuie sur les seules " déclarations " du salarié, sans aucun support écrit, et par conséquent, sans aucune possibilité de vérification de concordance entre le tableau et un quelconque relevé. L'eurl X... soutient qu'elle a, pour sa part, établi des relevés mensuels, qui sont parfaitement en cohérence avec les bulletins de salaire, tandis que M. Y... s'est trompé en disant travailler le lundi pour elle, alors que ce jour-là était un jour de travail chez la société Talluau.

La demande de M. Y... ne peut, dans ces conditions, être considérée comme étayée, et reste insuffisante pour qu'il soit procédé à une remise en cause des bulletins de paie remis par l'employeur, et des relevés qu'il verse aux débats.
Le jugement est infirmé, et la demande de M. Y... de rappels de salaires, est rejetée.
Sur les indemnités de repas
La convention collective nationale des transports routiers, versée aux débats par l'eurl X..., est ainsi rédigée en son chapitre 12- section 1- 3o :
Déplacements comportant un ou plusieurs repas hors du lieu de travail, (sous réserve que l'amplitude de la journée de travail couvre les périodes 11H45/ 14H ou 18H45/ 21H15) : indemnité de repas versée pour chaque repas.
S'agissant d'une activité exclusive de livraisons, les repas se passent donc hors du lieu de travail et l'indemnité est due dès lors que l'amplitude conventionnelle est effectuée.
Le cabinet Getecom retient, pour la période allant de décembre 2003 au 14 novembre 2005, deux jours par semaine pour lesquels l'amplitude de travail couvre la période 11H45/ 14H, le lundi et le mercredi, puis à partir du 15 novembre 2005, deux jours aussi, le mercredi, mais une semaine sur deux, et le vendredi.
Il s'agit là encore de déclarations du salarié, sans qu'aucun relevé ne soit produit.
Le jugement est, en conséquence, confirmé en ce qu'il a rejeté la demande en rappels d'indemnités de repas de M. Y... ;
sur les frais irrépetibles et les dépens
Il parait inéquitable de laisser à la charge de M. Y... les frais engagés dans l'instance d'appel et non compris dans les dépens ; l'eurl X... est condamnée à lui payer, pour l'en indemniser, et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 800 euros qui sera recouvrée selon les dispositions visées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique.
La demande formée par l'eurl X... à ce titre est rejetée.
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles de première instance sont confirmées.
Les dépens de première instance et d'appel restent à la charge de l'eurl X....
L'expertise Getecom, qui a été faite à l'initiative d'une partie, et non ordonnée par le juge, ne peut être comprise dans les dépens de l'instance.
Son coût, qui ne pourrait être intégré que dans l'indemnité allouée au titre des frais irrépétibles, doit rester à la charge de M. Y..., qui succombe en sa demande de rappels de salaires.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Saumur du 10 juin 2010 en ce qu'il a :
- dit que les demandes financières de M. Y... sont irrecevables comme prescrites pour la période antérieure au 10 février 2004,
- dit que le licenciement de M. Y... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- rejeté la demande de M. Y... au titre des indemnités de repas,
- condamné l'eurl X... à payer à M. Y... la somme de 700 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté l'eurl X... de ses demandes,
- condamné l'eurl X... à remettre à M. Y... une attestation pôle emploi rectifiée quant à la cause de la rupture du contrat de travail.
L'INFIRME pour le surplus,
Statuant a nouveau,
CONDAMNE l'eurl X... à payer à M. Y... la somme de 3680 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
CONDAMNE l'eurl X... à payer à M. Y... la somme de 1617, 33 euros à titre d'indemnité de préavis, congés payés incidents inclus.
Dit que les condamnations de nature salariale seront augmentées des intérêts au taux légal à compter du 21 février 2009, date de signature par l'eurl X... de l'accusé de réception de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Saumur.
DIT que l'attestation pôle emploi portera mention de l'indemnité de préavis et de l'indemnité de licenciement rectifiée.
CONDAMNE l'eurl X... aux dépens d'appel.
REJETTE la demande de M. Y... en paiement du coût de l'expertise Getecom.
CONDAMNE en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique l'eurl X... à payer à Maître Berton, avocate de M. Y..., la somme de 800 euros au titre des honoraires et frais que M. Y... aurait exposés dans l'instance d'appel s'il n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, et rappelle que Maître Berton, si elle recouvre cette somme, devra renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01816
Date de la décision : 08/11/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-11-08;10.01816 ?
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