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08/11/2011 | FRANCE | N°10/01783

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 08 novembre 2011, 10/01783


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01783.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, en date du 23 Juin 2010, enregistrée sous le no 09/ 00292

ARRÊT DU 08 Novembre 2011

APPELANTE :
Madame Laurence X... ... 38460 CHAMAGNIEU
présente, assistée de Maître Claude TERREAU, avocat au barreau du MANS

INTIMEE :
S. A. R. L. ARENA Parc d'Activité La Bertraie 72270 VILLAINES SOUS MALICORNE
représentée par Maître Arielle TORDJMAN, substituant Maître Charles TORDJMAN, avoca

t au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du ...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01783.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, en date du 23 Juin 2010, enregistrée sous le no 09/ 00292

ARRÊT DU 08 Novembre 2011

APPELANTE :
Madame Laurence X... ... 38460 CHAMAGNIEU
présente, assistée de Maître Claude TERREAU, avocat au barreau du MANS

INTIMEE :
S. A. R. L. ARENA Parc d'Activité La Bertraie 72270 VILLAINES SOUS MALICORNE
représentée par Maître Arielle TORDJMAN, substituant Maître Charles TORDJMAN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 08 Novembre 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame LECAPLAIN-MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******

EXPOSE DU LITIGE
Madame X... a été embauchée par la sarl ARENA le 8 janvier 2007 par contrat à durée indéterminée du 3 janvier 2007 comme attachée commerciale non cadre, avec un horaire de 39 heures par semaine et une rémunération mensuelle brute de 3000 euros la première année.
Sa zone de prospection était les départements 42, 69, 01, 38, 74, 73.
La sarl ARENA a été créée par Monsieur Jean-Luc Z... qui en est le gérant. Elle emploie 20 salariés et vend de la quincaillerie cuisine et de la quincaillerie bâtiment à des grands décideurs ou des PME ; elle dispose de 4 commerciaux, rattachés à Monsieur Gérard A..., manager commercial.
Mme X... a été convoquée le 17 février 2009 à un entretien préalable au licenciement fixé au 27 février 2009 et a été licenciée le 5 mars 2009.
Elle a saisi le conseil de prud'hommes du Mans pour contester la cause du licenciement, et obtenir la condamnation de la sarl ARENA à lui payer la somme de 33 096 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 23 juin 2010 le conseil de prud'hommes du MANS a débouté Mme X... de l'intégralité de ses demandes, débouté la sarl ARENA de sa demande au titre des frais irrépétibles, et condamné Mme X... aux dépens.
Le jugement a été notifié à la sarl ARENA et à Mme X... le 28 juin 2008.
Mme X... a fait appel de la décision par lettre recommandée du 8 juillet 2008, adressée au greffe de la cour, qui a transcrit la déclaration d'appel le 9 juillet 2008.
OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES
Mme X... demande à la cour, par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures, d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de dire que son licenciement a été abusif, en conséquence, de condamner la sarl ARENA à lui payer la somme de 33 096 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et celle de 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme X... soutient à l'appui de ses demandes, qu'en réalité elle a été licenciée, parce qu'elle n'acceptait pas la modification de rémunération que l'employeur voulait lui imposer ; que cette question a été abordée lors de l'entretien préalable au licenciement, ainsi que l'insuffisance de ses résultats, mais qu'il ne s'agit là d'aucun des griefs énoncés dans la lettre de licenciement qui lui reproche une insuffisance professionnelle.
Mme X... soutient sur ce point, d'une part, que son contrat de travail n'a jamais contenu une clause de résultats ou d'objectifs, d'autre part, quant à sa supposée insuffisance professionnelle, que c'est monsieur Z... lui-même qui voulait qu'elle reste au bureau le lundi et le vendredi pour préparer les rendez-vous avec les clients et pour rédiger ensuite les compte-rendus ; que Monsieur B... et Monsieur A... l'ont accompagnée pour assurer le suivi de ses activités, et que cela entrait simplement dans leurs attributions, parce qu'ils étaient ses supérieurs hiérarchiques ; enfin, qu'aucun des mels produits par l'employeur n'établit qu'elle n'aurait pas acquis les compétences techniques du métier.
La sarl ARENA demande à la cour, par observations orales reprenant sans ajout ni retrait ses écritures, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et de condamner Mme X... à lui payer la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La sarl ARENA soutient :
- qu'il y a bien conformité entre le contenu de l'entretien préalable et celui de la lettre de licenciement,
- que la modification de la structure de la rémunération de Mme X... était prévue à l'article 8 de son contrat de travail, et que la sarl ARENA a fait preuve de beaucoup de tolérance, puisqu'elle a accepté de différer, à l'issue de la première année et malgré des résultats déjà très insuffisants, mais pour ne pas la pénaliser, la mise en oeuvre de la rémunération variable.
- que les objectifs fixés à Mme X... étaient très raisonnables, et qu'elle n'a pourtant en 2007-2008 puis 2008-2009 atteint que 30 % de ceux-ci, ce qui témoigne d'une incapacité à maîtriser raisonnablement son activité commerciale ; que l'examen de son planning révèle qu'elle passait beaucoup trop de temps au bureau ; qu'en outre, messieurs B... et A... témoignent de ce qu'elle se défaussait sur eux d'une partie de ses responsabilités car elle ne maîtrisait pas la dimension technique des dossiers qu'elle présentait aux clients ; qu'ils ont passé beaucoup de temps à l'accompagner en clientèle mais ont constaté qu'elle avait pris l'habitude de les solliciter tout en restant en " repli " lors des rendez-vous, faute d'avoir acquis une connaissance technique des produits ; que le 28 novembre 2008, encore, près de deux ans après son entrée dans la société, Mme X... avait encore besoin que Monsieur Z... lui établisse un argumentaire pour le client " l'atelier de Saint Paul. " ; que l'insuffisance professionnelle de Mme X... est démontrée et a été justement relevée par les premiers juges.
- que Mme X... a bénéficié de toutes les formations nécessaires.
La sarl ARENA observe enfin, que Mme X... affirme avoir subi un état dépressif après le licenciement mais a pourtant signé dès mars 2009 un contrat de travail chez un concurrent de la sarl ARENA, avec un salaire fixe et une partie variable.

MOTIFS DE LA DECISION
Sur la cause du licenciement
Il résulte des dispositions de l'article L1232-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel doit être motivé, et justifié par une cause réelle et sérieuse.
Les faits invoqués par l'employeur doivent être exacts, précis, objectifs et revêtir une certaine gravité.
La lettre de licenciement, visée à l'article L1232-6 du code du travail, comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur, et ses termes fixent le litige.
Il appartient au juge de rechercher la cause du licenciement, et d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, au vu des éléments fournis par les partie. ;
La lettre de licenciement adressée le 5 mars 2009 à Mme X... est ainsi libellée :
" Les informations techniques nécessaires à la réalisation dans de bonnes conditions de votre métier de commercial n'étaient pas assimilées, malgré des formations régulières effectuées par l'entreprise, ce qui avait pour conséquence de vous rendre vulnérable en clientèle (surtout chez les grands comptes) et de ce fait de réduire la capacité de la société à se développer normalement dans votre secteur.
Cette absence d'acquisition des éléments minimum techniques handicapait significativement la crédibilité de l'entreprise d'autant plus que ce manque avait pour conséquence une demande importante d'assistance de votre part auprès du siège.
Nous considérons que ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Votre préavis d'une durée de trois mois débutera à la première présentation de la présente lettre.
Nous avons décidé de vous dispenser de l'exécution de votre préavis qui vous sera toutefois payé. "
La sarl ARENA expose qu'elle a pour métier la vente de matériels de quincaillerie industrielle, et qu'elle a développé un concept de distribution basé sur une offre personnalisée faite à chaque client, ou sorte de " sur mesure industriel ", ce qui oblige les commerciaux à une grande technicité, mais aussi à des visites répétées des prospects dont ils doivent identifier le besoin exact pour leur faire une offre pertinente ; qu'il ne s'agit pas de la vente " one shot " à laquelle Mme X... était habituée en venant des magasins Brice qui vendent de l'habillement.
Le contenu de l'entretien préalable au licenciement, retranscrit par le conseiller de la salariée, démontre qu'il a été reproché à Mme X... d'avoir des résultats trop faibles et de ne pas être en capacité de devenir un commercial autonome.
Il est établi, quant aux résultats, qu'aucune clause d'objectifs ne figurait dans le contrat de travail.
Des objectifs peuvent néanmoins, quoique non contractualisés, être définis par l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction.
Mme X... ne conteste pas qu'un objectif lui ait été fixé chaque année, de 400 000 euros d'abord, puis de 555 000 euros ensuite, avec un chiffre d'affaires déjà existant de 100 000 euros.
Ces objectifs ont été énoncés dès juillet 2007, la sarl ARENA précisant dans l'écrit adressé à Mme X... qu'elle avait besoin d'une progression moyenne annuelle de 25 % pour se développer.
Il est avéré que Mme X... a, pour la période allant de septembre 2007à août 2008, réalisé un chiffre d'affaires de 140 702 euros, et pour celle allant de septembre 2008 à février 2009, un chiffre d'affaires de 79 771 euros, ce qui a représenté 30 % de l'objectif, l'employeur établissant que ses trois autres commerciaux atteignaient de septembre 2008 à février 2009 des chiffres respectifs de 724 397 euros, 1 529 661 euros et 2 428 717 euros.
Répondant par mel le 26 janvier 2009 à Monsieur Z... qui pointait ses qualités d'enthousiasme et d'énergie, mais aussi des défauts de manque de mémorisation des informations techniques, et de déficit de connaissances et d'apprentissages, Mme X... indiquait : " je suis consciente que je coûte à la société et que sans un chiffre d'affaires suffisant je ne suis pas rentable pour ARENA, c'est pourquoi je me bats tous les jours pour récupérer des clients afin d'atteindre les objectifs que tu m'as fixé ".
Elle attribuait dans le même mel ses difficultés à un manque de suivi et d'assistance dans un domaine technique, qu'elle découvrait, et se plaignait d'avoir " été lâchée sur le terrain sans vraiment d'aide personnalisée ".
L'examen de ses plannings montre cependant une forte présence au bureau, encore fin 2008 et début 2009 et un déficit de rendez-vous, les 3 jours de prospection et les 15 rendez-vous hebdomadaires demandés par la sarl ARENA et stipulés à l'article 4 du contrat de travail, n'apparaissant jamais sur ses agendas.
Monsieur B..., responsable de la promotion industrielle, et Monsieur A..., manager commercial, attestent d'autre part, que Mme X... a sollicité leur soutien non pas seulement au début de ses activités, mais de façon habituelle et " permanente " ; qu'elle ne préparait pas assez ses rendez-vous, et qu'elle était donc pour eux deux " dévoreuse de leur temps " au détriment de leurs propres missions.
Les mels produits par la sarl ARENA montrent également qu'en octobre, novembre décembre 2008, Mme X... a sollicité la présence de monsieur B... ou de Monsieur A... à de nombreux rendez-vous, et que le 2 février 2009 encore, elle sollicitait de leur part des dates pour qu'ils l'appuient auprès de 7 clients à revisiter.
Il apparaît également, que par mel du 26 novembre 2008, Monsieur Z... a proposé à Mme X... tout un argumentaire pour que l'Atelier de Saint Paul, qui avait des besoins correspondant à l'offre de la sarl ARENA, quitte son fournisseur et achète les produits de la société, mais que Mme X... lui a répondu qu'elle ne " sentait pas ce client ", qu'elle pensait que celui-ci voulait juste comparer les prix et qu'elle allait " perdre son temps " sur ce dossier.
Il est encore démontré que Mme X... avait, fin 2008, huit clients quand les trois autres commerciaux en avaient entre vingt-et-un et vingt-quatre.
Il est donc établi que Mme X... n'avait pas, après deux ans de présence dans l'entreprise, malgré les formations reçues et l'assistance apportée par d'autres salariés, acquis les connaissances techniques nécessaires pour développer la clientèle de la sarl ARENA ; qu'elle a manifesté, par ce déficit de connaissances mais aussi en ayant une mauvaise organisation de travail et en manquant d'autonomie, une insuffisance professionnelle qui a eu pour effet ses mauvais résultats de vente.
L'argument d'une modification de rémunération imposée par l'employeur, et qu'elle n'aurait pas acceptée, ne peut pas être utilement invoqué par Mme X... comme cause réelle de son licenciement, puisque d'une part le contrat de travail prévoyait qu'à partir de la deuxième année d'emploi cette rémunération serait composée d'un fixe et d'un pourcentage qui restait à définir, et puisque la sarl ARENA n'avait pas encore, au moment du licenciement, appliqué cette clause contractuelle mais au contraire maintenu le fixe de 3000 euros par mois prévu pour la première année.
Le jugement du conseil de prud'hommes du MANS est en conséquence confirmé en ce qu'il a considéré que l'insuffisance professionnelle de Mme X... constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement et a débouté celle-ci de ses demandes.
Sur les frais irrépetibles et les dépens
Il parait inéquitable de laisser à la charge de la sarl ARENA les frais engagés dans l'instance et non compris dans les dépens ; Mme X... est condamnée à lui payer, pour l'en indemniser et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 600 euros.
Mme X... qui succombe à l'instance d'appel en supporte les dépens.
Le jugement du conseil de prud'hommes du Mans est confirmé en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens.

PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 juin 2010 par le conseil de prud'hommes du Mans. Y ajoutant,
Condamne Mme X... à payer à la sarl ARENA la somme de 600 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme X... aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01783
Date de la décision : 08/11/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-11-08;10.01783 ?
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