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05/07/2011 | FRANCE | N°10/01265

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 05 juillet 2011, 10/01265


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N BAP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01265.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 15 Avril 2010, enregistrée sous le no 09/ 00283

ARRÊT DU 05 Juillet 2011

APPELANTE :
Madame Stéphanie X......
représentée par Maître Isabelle ANDRIVON, avocat au barreau du MANS

INTIMES :
Maître Jacques Y..., ès-qualités de mandataire liquidateur de la SAS TECDIM ...
représenté par Maître Thierry PAVET (SCP), avocat au barreau du MANS

L'A. G. S., représentée par

le C. G. E. A DE RENNES 4 Cours Raphaël Binet Imm. Le Magister 35069 RENNES CEDEX
représentée par Maître Aurélie...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N BAP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01265.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, du 15 Avril 2010, enregistrée sous le no 09/ 00283

ARRÊT DU 05 Juillet 2011

APPELANTE :
Madame Stéphanie X......
représentée par Maître Isabelle ANDRIVON, avocat au barreau du MANS

INTIMES :
Maître Jacques Y..., ès-qualités de mandataire liquidateur de la SAS TECDIM ...
représenté par Maître Thierry PAVET (SCP), avocat au barreau du MANS

L'A. G. S., représentée par le C. G. E. A DE RENNES 4 Cours Raphaël Binet Imm. Le Magister 35069 RENNES CEDEX
représentée par Maître Aurélie DOMAIGNE (SCP), avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,

ARRÊT : prononcé le 05 Juillet 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCEDURE

Mme Stéphanie X...a été engagée par la société Tecdim, en qualité d'assistante de gestion, pour la période allant du 20 octobre 2003 au19 janvier 2004, selon contrat de travail à durée déterminée, qui a été renouvelé jusqu'au 19 avril 2004, avant de se transformer, le 20 avril 2004, en contrat de travail à durée indéterminée.
La société Tecdim a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Mamers en date du 27 décembre 2007, procédure convertie en liquidation judiciaire le19 novembre 2008.
Mme Stéphanie X...a été convoquée par Maître Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Tecdim, à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour motif économique, suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 26 janvier 2009.
L'entretien préalable s'est tenu le 2 février 2009.
Mme Stéphanie X...a été licenciée, effectivement pour motif économique, par Maître Y..., ès qualités, suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 6 février 2009.
Contestant, notamment, cette mesure, Mme Stéphanie X...a saisi le conseil de prud'hommes du Mans, le 23 avril 2009, aux fins que :
- sa créance sur la liquidation judiciaire de la société Tecdim soit fixée aux sommes ci-après :. 1 000 euros de dommages et intérêts, le représentant des salariés n'ayant pas été désigné conformément aux dispositions légales,. 21 213 euros d'indemnité, son licenciement étant sans cause réelle et sérieuse,. 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- il soit dit que, s'agissant des créances salariales, elles porteront intérêts de droit à compter de la demande et, s'agissant des créances indemnitaires, à compter de la décision à intervenir,- il soit dit et jugé que ces créances seront opposables au CGEA UNEDIC/ AGS Rennes dans la limite légale de sa garantie,- l'irrégularité de la procédure de licenciement soit relevée,- l'exécution provisoire de la décision à intervenir soit ordonnée,- Maître Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Tecdim, soit débouté de ses demandes,- Maître Y..., ès qualités, soit condamné en tous les dépens.

Par jugement en date du 15 avril 2010, le conseil de prud'hommes du Mans a :
- dit que Mme Stéphanie X...ne démontrait pas le préjudice lié à l'irrégularité de la procédure de convocation à l'entretien préalable,- dit que l'obligation de reclassement avait été respectée et que le licenciement de Mme Stéphanie X...reposait bien sur un motif économique lié à la liquidation judiciaire entraînant, elle-même, la disparition de la société Tecdim,- débouté, en conséquence, Mme Stéphanie X...de l'ensemble de ses demandes,- débouté Maître Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Tecdim, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- dit que chaque partie supporterait la charge de ses dépens.
Mme Stéphanie X...a formé régulièrement appel de cette décision, par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 mai 2010.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions du 4 mai 2011, reprises à l'audience, Mme Stéphanie X...sollicite l'infirmation du jugement déféré et que :
- sa créance soit fixée au sommes suivantes :. 1 000 euros de dommages et intérêts, pour irrégularité de la désignation du représentant des salariés,. 2 157euros d'indemnité, pour irrégularité de la procédure de licenciement,. 21 213 euros d'indemnité, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- Maître Y..., ès qualités, soit condamné à lui verser 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- l'arrêt à intervenir soit déclaré opposable au CGEA de Rennes,- l'exécution provisoire de la décision à intervenir soit ordonnée,- il soit dit que l'arrêt à intervenir portera intérêts de droit, à compter de la demande s'agissant des créances salariales et, à compter du jugement s'agissant des créances indemnitaires,- Maître Y..., ès qualités, soit condamné en tous les dépens.
Elle fait valoir que :
- les dispositions des articles L. 641-1, L. 621-4, L. 621-5 du code de commerce ont été enfreintes. il n'y a eu aucune information dans l'entreprise concernant l'élection du représentant des salariés,. il n'y a pas eu d'élection du représentant des salariés,. le représentant des salariés désigné est le fils du dirigeant de la société Tecdim,. le préjudice est certain pour des salariés qui, étant dépourvus d'institutions représentatives du personnel du fait de la taille de l'entreprise, ont été privés d'informations sur le déroulement de la procédure collective,
- la convocation à l'entretien préalable est irrégulière, en l'absence. du respect du délai de cinq jours ouvrables entre, la réception de cette convocation et, la tenue de l'entretien,. de la mention, dans le courrier, de l'adresse de la direction départementale du travail et de l'emploi,

- le mandataire liquidateur n'a pas respecté l'obligation de reclassement qui lui incombe,
. la convention collective applicable, de l'imprimerie du labeur, qui prévoit un périmètre de reclassement, n'a pas été respectée,. les lettres envoyées dans le cadre de la recherche menée sont des lettres-type, qui ne précisent ni les caractéristiques de l'emploi qu'elle occupait, ni ses qualifications,. la proposition de poste, qui a été reçue, ne lui a pas été transmise,. les recherches de reclassement ne figurent pas dans la lettre de convocation à l'entretien préalable,. les recherches de reclassement ont été entamées concomitamment à l'envoi de la convocation à l'entretien préalable, alors que le mandataire liquidateur était nommé bien antérieurement et, le licenciement, lui-même, a été prononcé dans les douze jours suivant cette convocation,. le licenciement a été notifié avant la fin du délai de quinze jours imparti au mandataire liquidateur pour y procéder.
* * * *
Par conclusions du 4 mai 2011, reprises à l'audience, Maître Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Tecdim, sollicite la confirmation du jugement déféré et que, Mme Stéphanie X...soit condamnée à lui verser 400 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel et, supporte les entiers dépens.
Il réplique que :
- la demande, au titre d'une prétendue irrégularité de la désignation du représentant des salariés lors de l'ouverture des opérations de liquidation judiciaire, et même si cette irrégularité existait, n'a pas d'intérêt. elle ne saurait remettre en cause, ni le jugement de liquidation judiciaire, ni les conséquences de ce jugement sur l'emploi, ni le mandat qui lui a été donné quant aux dites conséquences,. la situation de la société était irrémédiablement compromise et ce, quelle que soit la qualité ou les conditions de désignation du représentant des salariés,. aucun salarié ne s'est présenté pour cette désignation et, c'est dans ces conditions, que le représentant légal de la société s'est tourné vers son fils à cette fin,. il n'y a donc pas de lien de causalité entre cette prétendue irrégularité et un quelconque préjudice qu'aurait subi Mme Stéphanie X...à cet égard, qui justifierait l'allocation d'une somme forfaitaire à titre de dommages et intérêts,
- sur l'irrégularité de la procédure de licenciement. la lettre de convocation à l'entretien préalable, ayant été reçue le 27 janvier et l'entretien préalable mené le 2 février suivant, le délai légal de cinq jours a été respecté,. Mme Stéphanie X...ne justifie pas du préjudice que lui a causé l'absence de mention, dans ce courrier, de l'adresse de la direction départementale du travail et de l'emploi,. l'indemnité que prévoit le code du travail de ce chef, équivalente à un mois de rémunération, n'a pas un caractère automatique,
- l'obligation de reclassement a été respectée. l'omission de la mention des recherches de reclassement dans la lettre de licenciement n'implique pas que ces dernières n'aient pas été effectuées,. les recherches ont été faites en conformité avec les dispositions conventionnelles,. Mme Stéphanie X...n'a pas fait acte de candidature sur le poste ressorti des recherches.

Par conclusions du 9 mai 2011, reprises à l'audience, l'AGS, via le CGEA de Rennes :
- s'en rapporte sur l'irrégularité de la procédure de licenciement alléguée, le préjudice subi ne pouvant, de toute façon, être que de pur principe,
- pour le surplus, sollicite la confirmation du jugement déféré,
- subsidiairement, qu'il soit dit que sa garantie ne s'exercera que dans les limites et plafonds légaux.
Elle indique que :
- lors des élections des délégués du personnel, aucun des salariés de l'entreprise n'a accepté de présenter sa candidature, ce qui explique que le dirigeant de la société ait dû faire appel à son fils, afin que, justement, les salariés puissent être représentés dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire,
- les recherches de reclassement ont été conduites autant qu'elles étaient possibles. le mandataire liquidateur a alerté différentes entreprises sarthoises, dont l'activité est identique à celle de la société Tecdim,. vu les termes du courrier à ces entreprises, les recherche doivent être considérées comme suffisamment personnalisées,. le mandataire liquidateur n'a reçu qu'une seule réponse, relativement à un poste possible,
- Mme Stéphanie X...ne justifie pas de son évolution professionnelle, depuis le licenciement.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la désignation d'un représentant des salariés
L'article L621-4 du code de commerce dispose en son 2ème alinéa, dans sa version applicable à la cause :
" Il (le tribunal de commerce) invite le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel à désigner un représentant parmi les salariés de l'entreprise. En l'absence de comité d'entreprise et de délégués du personnel, les salariés élisent leur représentant, qui exerce les fonctions dévolues à ces institutions... Les modalités de désignation ou d'élection du représentant des salariés sont précisées par décret en Conseil d'Etat. Lorsque aucun représentant des salariés ne peut être désigné ou élu, un procès-verbal de carence est établi par le chef d'entreprise ".
L'article L621-5 du même code, toujours dans sa version applicable à la cause, précise :
" Aucun parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, du chef d'entreprise ou des dirigeants, s'il s'agit d'une personne morale, ne peut être désigné à l'une des fonctions prévues à l'article L621-4 sauf dans les cas où cette disposition empêche la désignation d'un représentant des salariés ".
L'article L641-1 du même code, en son 3ème alinéa, encore dans sa version applicable à la cause, prévoit qu'en cas de liquidation judiciaire :
" Un représentant des salariés est désigné dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L621-4.... Il exerce la mission prévue à l'article L652-2 ".
Et cet article L652-2 du code de commerce dispose, à son tour, dans sa version applicable à la cause :
" Les relevés des créances résultant des contrats de travail sont soumis pour vérification par le mandataire judiciaire au représentant des salariés mentionné à l'article L621-4. Le mandataire judiciaire doit lui communiquer tous documents et informations utiles. En cas de difficultés, le représentant des salariés peut s'adresser à l'administrateur et, le cas échéant, saisir le juge-commissaire. Il est tenu à l'obligation de discrétion mentionnée à l'article L. 432-7 du code du travail. Le temps passé à l'exercice de sa mission est considéré de plein droit comme temps de travail et payé par l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur, selon le cas, à l'échéance normale ".
* * * *
L'effectif de la société Tecdim étant de moins de onze salariés, elle n'était pas soumise à l'obligation d'avoir des délégués du personnel et/ ou un comité d'entreprise.
La représentation salariale, nécessaire dans le cadre de la procédure collective, devait donc en passer par l'élection.
Si cette élection était impossible, il appartenait à la société Tecdim de dresser un procès-verbal de carence, et non d'auto-désigner un salarié, fils du dirigeant de l'entreprise de surcroît.
Au surplus, la société Tecdim ne rapporte pas la preuve de ses allégations quant à l'impossibilité d'organiser la dite élection.
De par ces manquements, la société Tecdim a privé ses salariés des droits que leur confèrent la loi, droits qui leur sont ouverts, même dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire.
En conséquence, il existe bien un préjudice pour ce qui concerne Mme Stéphanie X..., dont l'indemnisation sera fixée à la somme de 300 euros.
Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement
En cas de liquidation judiciaire d'une société, c'est en application de cette décision de liquidation que le mandataire liquidateur est autorisé à procéder au licenciement du personnel (articles L641-10, 631-17 et L641-4 du code de commerce, dans leur version applicable à la cause).
L'on a affaire à un licenciement pour motif économique, lié à la cessation d'activité définitive de l'entreprise.
Le mandataire liquidateur n'en est pas moins tenu, préalablement, de respecter les dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail, selon lesquelles ce licenciement ne peut intervenir que :
" lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ".
* * * *
Les possibilités de reclassement doivent être recherchées, en principe, dans le périmètre de l'entreprise, périmètre qui peut toutefois se voir étendu, ainsi par des dispositions conventionnelles.
La société Tecdim relevait de la convention collective de l'imprimerie du labeur et des textes qui lui sont rattachés.

Un accord national du 24 mars 1970, sur les problèmes généraux de l'emploi, étendu par arrêté du 22 décembre 1971, publié au Journal officiel du 4 janvier 1972, a prévu, en son article 19, que :
" Lorsque le reclassement dans l'entreprise n'aura pas été possible... l'entreprise devra chercher les possibilités de reclassement susceptibles de convenir aux salariés dont le licenciement aura été décidé, de préférence dans une entreprise rattachée aux industries graphiques et située dans la même localité ou dans une localité voisine. À défaut de solution au plan local, le reclassement sera recherché dans les mêmes conditions sur le plan de la région. Le problème sera soumis à la commission régionale de l'emploi s'il en existe une dans la région intéressée. Les instances régionales ou départementales des organisations professionnelles signataires apporteront à cette recherche un concours actif. Les instances nationales feront de même s'il apparaît que l'ampleur du problème dépasse le cadre régional. Dans ce cas, le problème sera soumis à l'examen de la commission nationale de l'emploi. Les entreprises feront connaître les possibilités de reclassement au comité d'entreprise ou d'établissement ou à défaut de comité d'entreprise, aux délégués du personnel, ainsi qu'au personnel intéressé... ".
Maître Y..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Tecdim, justifie que, le 26 janvier 2009, il a sollicité " dans la perspective d'un reclassement externe du personnel de... Tecdim ", les entreprises ci-après :
- Le réveil républicain, 72 400 La Ferté Bernard,- L'imprimerie la fertoise, 72 400 La Chapelle du Bois,- Copie conforme, 72 400 La Ferté Bernard,- Ag roto feuilles, 72 400 La Ferté Bernard.
La société Tecdim avait, elle-même, son siège social sur La Ferté Bernard.
Les dispositions conventionnelles rappelées sont claires. Maître Y..., ès qualités, ne pouvait ainsi restreindre le champ de ses recherches de reclassement au seul département de la Sarthe. Il devait, également, conduire ces dernières au plan de la région.
La méconnaissance par Maître Y..., ès qualités, des dispositions conventionnelles étendant le périmètre de reclassement constitue un manquement à l'obligation de reclassement préalable au licenciement et, prive celui-ci de cause réelle et sérieuse.
* * * *
Par ailleurs et quasi-surabondamment, en procédant à ces recherches par l'envoi d'une lettre-circulaire, dans laquelle aucune précision n'était donnée quant au (x) salarié (s) à licencier, que ce soit au plan du métier exercé et des aptitudes présentées, Maître Y..., ès qualités, n'a pas non plus rempli l'obligation de reclassement préalable au licenciement dont il était redevable et, a privé celui-ci de cause réelle et sérieuse.
Les quatre courriers envoyés sont, en effet, identiques :
"... J'ai l'honneur de vous informer que par jugement du tribunal de commerce..., j'ai été désigné en qualité de mandataire... à la liquidation judiciaire de... En cette dernière qualité, je vous précise mon intention et mon obligation de procéder au licenciement pour motif économique de l'ensemble du personnel.

Cependant compte tenu de votre activité similaire et complémentaire, je me permets de vous solliciter dans la perspective d'un reclassement externe du personnel de la SAS TECDIM. Vous voudrez bien, par courrier, me faire connaître dans les plus brefs délais, les postes que vous pourriez proposer au personnel de cette dernière. Dans l'attente de vous lire, Vous souhaitant bonne réception de la présente et restant à votre entière disposition pour tout renseignement complémentaire... ".
* * * *
Seule, la société Copie conforme avait répondu, en ces termes :
" Suite à votre lettre d'information du 26 janvier 2009, je vous informe être à la recherche d'une personne à mi-temps pour un CDI, vous trouverez ci-dessous le No d'annonce correspondant au Pôle Emploi de la Ferté-Bernard qui s'occupe de gérer le dossier. Pour information nous sommes sous le code APE 1812Z de l'imprimerie mais dans le secteur Reprographique travaux de ville (impression jet d'encre, laser, tirage de plan, faire-part...) ".
Tout autant quasi-surabondamment, Maître Y..., ès qualités, ne rapporte pas la preuve, qui pèse sur lui, de ce qu'il a proposé ce poste à Mme Stéphanie X.... À lui, effectivement, de produire l'offre écrite et précise faite à l'intéressée.
Or, rien de tel ne figure au dossier. L'on ignore même le contenu du poste dont il est question. De fait, Maître Y..., ès qualités, n'a encore pas rempli l'obligation de reclassement préalable au licenciement dont il était redevable et, a privé celui-ci de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement
L'article L. 1235-5 du code du travail permet au salarié, qui ne compte pas plus de deux ans d'ancienneté chez son employeur ou, dont l'effectif salarié habituel de l'entreprise n'est pas supérieur à onze, qui a subi un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'obtenir une indemnité.
* * * *
Lorsqu'elle a été licenciée, Mme Stéphanie X...avait cinq ans, trois mois et dix-sept jours d'ancienneté au sein de la société Tecdim et, allait sur ses trente-trois ans. Elle justifie de sa prise en charge par le pôle emploi. Elle reste, néanmoins, taisante sur ses recherches afin de retrouver un travail.
Dans ces conditions, et au regard des bulletins de salaire versés, l'indemnité due à Mme Stéphanie X...pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera fixée à la somme de 15 000 euros.

Sur la régularité de la procédure de licenciement
L'article L. 1232-2 du code du travail dispose :
" L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation.
L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou de la remise en main propre de la lettre de convocation ".
* * * *
Maître Y..., ès qualités, a convoqué Mme Stéphanie X...à un entretien préalable en vue d'un licenciement pour motif économique, devant se tenir le 2 février 2009, par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 janvier 2009.
Cette lettre a été présentée à son destinataire le 27 janvier 2009.
La computation du délai légal de cinq jours obéit aux règles fixées par les articles 641 et 642 du code de procédure civile.
Le jour de la présentation de la lettre recommandée, qui fait courir le délai, ne compte pas.
Le dimanche, qui n'est pas un jour ouvrable, ne compte pas non plus.
Le délai expire le dernier jour, à minuit.
Le décompte doit donc débuter le 28 janvier 2009, qui était un mercredi et, ne peut être retenu dans ce décompte le 1er février 2009, qui était un dimanche.
Dès lors, l'entretien préalable s'étant bien déroulé le 2 février 2009, Mme Stéphanie X...n'a pas bénéficié des cinq jours " pleins " qui lui revenaient, pour pouvoir préparer sa défense. L'entretien préalable ne pouvait avoir lieu, au plus tôt, que le 3 février 2009.
La procédure de licenciement est irrégulière.
* * * *
La convocation délivrée précise :
"... vous avez la possibilité de vous faire assister... par une personne de votre choix qui appartient au personnel de l'entreprise ou par une personne extérieure figurant sur la liste établie par le préfet que vous pouvez vous procurer, soit auprès de la mairie de votre lieu de travail, soit auprès de la Direction Départementale du Travail, soit auprès des services de la Préfecture ".
Ainsi que le relève Mme Stéphanie X..., l'adresse de la direction départementale du travail n'a pas été spécifiée.
Cette omission, en elle-même, rend également la procédure de licenciement irrégulière.
* * * *
Mme Stéphanie X...peut prétendre, du fait des irrégularités de procédure commises, à une indemnité, qui est, dans son cas, cumulable avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L'inobservation de la procédure de licenciement est, nécessairement, source de préjudice pour le salarié.
Si l'article L. 1235-5 du code du travail indique, dans son premier alinéa, 1o, que ne sont pas, en principe, applicables " au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entrepris employant habituellement moins de onze salariés ", les sanctions prévues, en la matière, par l'article L. 1235-2 du même code, c'est différent, en application de son second alinéa, " en cas de méconnaissance des dispositions des articles L. 1232-4... relatives à l'assistance du salarié par un conseiller ".
L'employeur, ou ici le mandataire liquidateur, est considéré comme ayant enfreint les dispositions relatives à l'assistance du salarié, lorsqu'il n'a pas mentionné toutes les informations requises, de ce chef, dans la convocation à l'entretien préalable.
L'article L. 1235-2 du code du travail prévoit que " si le licenciement d'un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée... le juge... accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ". Il s'agit là d'un plafond et non pas d'un plancher.
En conséquence, l'indemnité due à Mme Stéphanie X...pour irrégularité de la procédure de licenciement sera fixée à la somme de 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
DIT que le licenciement de Mme Stéphanie X...est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
FIXE les créances de Mme Stéphanie X...à la liquidation judiciaire de la société Tecdim aux sommes suivantes :
. 15 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 500 euros d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement,
. 300 euros d'indemnité pour non-respect de la procédure de désignation du représentant des salariés dans le cadre de la procédure collective,
. 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

DIT que les créances porteront intérêts au taux légal, s'agissant de créances indemnitaires, à compter de l'arrêt rendu,
DIT que le présent arrêt est opposable à l'AGS dans les limites et plafonds légaux,
DIT que les dépens d'appel seront employés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire de la société Tecdim.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALL Marie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01265
Date de la décision : 05/07/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-07-05;10.01265 ?
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