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28/06/2011 | FRANCE | N°09/01813

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 28 juin 2011, 09/01813


COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale

ARRÊT N BAP/AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/01813.Jugement Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LA MAYENNE, du 24 Juillet 2009, enregistrée sous le no 254

ARRÊT DU 28 Juin 2011
APPELANTE :
S.A.R.L. ATMOS37 rue des Balsamines72100 LE MANS
représentée par Maître Gilles PEDRON (SCP), avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
L'URSAFF DE LA MAYENNE41 rue des Fossés53087 LAVAL
représentée par Madame Dominique DENIS, munie d'un pouvoir spécial

A LA CAUSE :
Direction Régionale

des Affaires Sanitaires et Sociales des Pays de la Loire (DRASS) Rue René Viviani44062 NANTES CEDEX
avisée, ...

COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale

ARRÊT N BAP/AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/01813.Jugement Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LA MAYENNE, du 24 Juillet 2009, enregistrée sous le no 254

ARRÊT DU 28 Juin 2011
APPELANTE :
S.A.R.L. ATMOS37 rue des Balsamines72100 LE MANS
représentée par Maître Gilles PEDRON (SCP), avocat au barreau d'ANGERS

INTIMEE :
L'URSAFF DE LA MAYENNE41 rue des Fossés53087 LAVAL
représentée par Madame Dominique DENIS, munie d'un pouvoir spécial

A LA CAUSE :
Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales des Pays de la Loire (DRASS) Rue René Viviani44062 NANTES CEDEX
avisée, absente, sans observations écrites

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Avril 2011, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, présidentMadame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseurMadame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,
ARRÊT :du 28 Juin 2011 contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCEDURE

Le 29 juillet 2005, l'URSSAF de la Mayenne (l'URSSAF) procédait à un contrôle inopiné à l'hôtel BetB à Changé. Cet établissement avait passé contrat, pour le nettoyage de ses chambres, avec la société Atmos propreté (société Atmos), sur laquelle les vérifications se portaient. La période concernée par les dites vérifications allait du 1er mai 2004 au 28 février 2006 et, le contrôle était clôturé le 29 juin 2006.
À l'issue, l'URSSAF :
- dressait, d'une part, un procès-verbal pour travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés, en application de l'article L.324-9 du code du travail (ancienne numérotation), à l'encontre de la société Atmos et de son gérant, qu'elle transmettait au procureur de la République de Laval,
- établissait, d'autre part, une lettre d'observations, conformément à l'article R.234-59, alinéa 4, du code de la sécurité sociale, par laquelle elle faisait connaître à la société Atmos qu'était envisagé un rappel de cotisations à son égard, à hauteur de 15 991 euros au total, pour travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés (minoration des heures de travail, prime de transport au prorata, congés payés afférents), lettre distribuée à son destinataire le 28 juillet 2006.
La société Atmos communiquait à l'URSSAF ses observations, au sens de l'article R.234-59 alinéa 5 du code de la sécurité sociale, par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 août 2006.
L'URSSAF signifiait à la société Atmos, par courrier du 27 septembre 2006, qu'elle maintenait le redressement.
Une mise en demeure d'avoir à régler les 15 991 euros de cotisations, outre 1 597 euros de majorations de retard, soit un total de 17 588 euros, était délivrée, le 15 novembre 2006, par l'URSSAF à la société Atmos, par lettre recommandée avec accusé de réception, en application de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 4 décembre 2006, la société Atmos contestait cette mise en demeure devant la commission de recours amiable de l'URSSAF de la Mayenne.
Sans réponse de cette commission, considérant qu'elle avait affaire à une décision de rejet implicite de sa part, la société Atmos saisissait, par requête du 21 février 2007, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Mayenne.
La société Atmos demandait que :
- la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de l'URSSAF soit infirmée,- les redressements qui lui ont été notifiés soient annulés,- l'URSSAF de la Mayenne soit condamnée à lui verser 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 24 juillet 2009, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Mayenne- validait le redressement opéré par l'URSSAF de la Mayenne,- déboutait la société Atmos de l'ensemble de ses demandes.
La société Atmos formait régulièrement appel de cette décision, le 4 août 2009, par lettre recommandée avec accusé de réception.
Le tribunal correctionnel de Laval avait entre-temps, par jugement du 4 décembre 2008 qui n'a pas été frappé d'appel, accueilli, au visa de l'article L.611-10, devenu L.8113-7, du code du travail, l'exception de nullité des poursuites soulevée par la société Atmos Le Mans et l'EURL Atmos Laval, via leur représentant légal.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions du 7 décembre 2010, reprises à l'audience, la société Atmos sollicite l'infirmation du jugement déféré et, reprenant ses demandes de première instance, que :- la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de l'URSSAF soit infirmée,- les redressements qui lui ont été notifiés soient annulés,- l'URSSAF de la Mayenne soit condamnée à lui verser 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que :
- l'URSSAF ayant agi dans le cadre dérogatoire de l'article R.234-59, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, propre au travail dissimulé, il faut se référer aux textes du code du travail et non à ceux du code de la sécurité sociale,. il appartient à l'URSSAF d'établir les éléments du travail dissimulé qu'elle lui impute,. l'URSSAF a dressé un procès-verbal de ce chef et, les constations qui y sont contenues forment la base légale du redressement ensuite opéré (article L.8271-8-1 du code du travail),. faute pour l'URSSAF de produire ce procès-verbal, le redressement est nul, puisque privé de tout fondement légal,
- et, si l'URSSAF venait à produire ce procès-verbal en appel, celui-ci ne peut être retenu en tant que moyen de preuve, ayant été déclaré nul par le tribunal correctionnel de Laval par une décision aujourd'hui définitive,. l'annulation des poursuites qui a été prononcée par cette juridiction inclut nécessairement celle de l'acte qui fonde la poursuite,. retenir, tout de même, ce procès-verbal revient à violer le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil,
- et, si ce procès-verbal était produit et considéré comme un moyen de preuve admissible, il ne peut suffire à établir le travail dissimulé,. le travail dissimulé étant un délit, comporte un élément intentionnel,. la force probante d'un procès-verbal de constatation se limitant, conformément à l'article 429 du code de procédure pénale, à ce que le rédacteur a vu, entendu ou constaté personnellement, pour qu'il fasse la preuve de l'élément intentionnel susvisé, encore faudrait-il que son auteur y ait consigné l'aveu de la société,. comme ce n'est pas le cas, l'élément intentionnel nécessaire fait défaut,- sa bonne foi s'induit, d'ailleurs, de la lettre d'observations-même de l'URSSAF,. conformément à l'article R.234-59, alinéa 4, du code de la sécurité sociale, l'URSSAF devait mentionner, dans cette lettre d'observations, les éléments qui l'amenaient à écarter la bonne foi de la société,. ne l'ayant pas fait, la bonne foi de la société est, et reste, présumée,
- de toute façon, les éléments de fait retenus à l'appui du travail dissimulé, qui peuvent être déduits de la lettre d'observations, conduisent à écarter toute infraction de ce type de la part de la société,. l'URSSAF a adopté un raisonnement déductif général, sur la moyenne de temps qui serait nécessaire au ménage d'une chambre, à partir des allégations d'une seule salariée, salariée que la société a préféré régler, uniquement du fait que le procès serait plus coûteux, bien que les dires de cette salariée ne soient pas fondés,. cette salariée n'avait aucune expérience professionnelle antérieure dans le domaine et, le contrat passé avec elle était un contrat de courte durée, dans le cadre d'un remplacement, . cette salariée a déclaré qu'elle avait déduit ses temps de pause, mais sans préciser à quel moment ces pauses s'étaient inscrites et quelle avait été leur durée,. cette salariée ayant, néanmoins, été payée de ses réclamations, cela accrédite, de nouveau, la bonne foi de la société, . de plus, cette salariée a accepté, par contrat, la "cadence de travail", cadence qu'elle n'a jamais remise en cause, comme quoi celle-ci était impossible à tenir, durant le temps d'exécution de son contrat de travail, . ce sont les salariés, et eux seuls, qui donnaient leur volume de travail et signaient, chaque mois, un avenant de régularisation,. le nombre de chambres fixé est, au demeurant, parfaitement réalisable, . l'URSSAF ne peut affirmer que, les propos de la salariée dont il s'agit étaient en concordance avec ceux de ses collègues de travail ensuite recueillis, les auditions des dites collègues étant, au contraire, discordantes, . l'URSSAF ne peut pas plus affirmer que ces mêmes propos ont été validés par l'inspection du travail, cette validation n'étant justifiée par aucune pièce,. la valeur probante des diverses auditions est, par ailleurs, à relativiser,. l'une des salariés, ainsi auditionnée, a saisi le conseil de prud'hommes de demande de rappel de salaires, sur la base du calcul de l'URSSAF; or, elle a été déboutée et, s'est ensuite désistée de son appel,. certains procès-verbaux d'auditions, de salariés différents, ont été réalisés, le même jour, à la même heure, par les deux mêmes inspecteurs de l'URSSAF et, sont identiques, au mot près,. surtout, les procès-verbaux d'auditions réalisées dans les locaux de l'URSSAF sont nuls et, donc irrecevables, puisqu'au visa de l'article R.234-59, alinéa 4, du code de la sécurité sociale et non de l'article L.8271-11 du code du travail, qui les aurait, seul, permises .
Subsidiairement, s'il ne lui était pas donné satisfaction sur ces points, la société Atmos n'en entend pas moins obtenir l'annulation du redressement opéré, dénonçant:- l'application par l'URSSAF de l'article R.242-5 du code de la sécurité sociale, alors que cet organisme n'a pas justifié que . la comptabilité de la société serait irrégulière,. elle était dans l'impossibilité d'opérer le redressement sur des bases réelles,- le caractère excessif de ce redressement. au regard des différences très importantes dans les déclarations des salariés, sur le temps moyen qu'il leur fallait pour le ménage d'une chambre, . alors que c'est sur la base haute, mentionnée par une seule salariée, que le redressement a été effectué pour l'ensemble des salariés, - le fait que ce redressement fasse référence à une salariée, dont les prétentions, de ce chef, ont pourtant été écartées par des décisions qui ont autorité de la chose jugée,- le fait que le raisonnement suivi par l'URSSAF soit en contradiction totale avec les conditions habituelles de conclusion de ce type de marché et la réalité économique.
* * * *
Par conclusions du 1er avril 2011, reprises à l'audience, l'URSSAF de la Mayenne sollicite la confirmation du jugement déféré et que, la société Atmos voyant l'ensemble de ses prétentions rejetées, soit condamnée à lui verser2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle réplique que :
a) en la forme
- elle était bien compétente à agir dans le cadre du travail dissimulé, ainsi qu'en dispose l'article L.8271-7 du code du travail,- en cas d'établissement d'un procès-verbal à ce titre et, conformément à l'article L.8271-8 du code du travail, celui-ci doit être transmis au procureur de la République et non au contrevenant,- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal correctionnel de Laval, l'article L.8113-7 du code du travail n'était pas applicable en la matière, comme concernant les inspecteurs du travail, auxquels il fait obligation de communiquer à l'employeur un exemplaire de la procédure qu'il dresse, mais pour les infractions en matière de durée du travail et non de travail dissimulé, - même si ce jugement du tribunal correctionnel de Laval est définitif, le principe de l'autorité de la chose jugée du pénal sur le civil ne peut être opposé, car . ce n'est pas le procès-verbal constatant le travail dissimulé, qui avait été transmis au procureur de la République, qui a été annulé,. c'est la procédure et, en outre, pour une question de forme et non de fond,. subsiste, de toute façon, la réclamation des cotisations par minoration d'assiette,- l'article R.234-59 du code de la sécurité sociale n'interdit nullement aux inspecteurs de l'URSSAF de procéder aux auditions des salariés dans ses locaux,- l'article R.234-59 du code de la sécurité sociale doit être, au surplus, complété par les articles L.8271-7 et L.8271-11 du code du travail, qui permettent, à tous les agents de contrôle habilités, de procéder aux auditions des dits salariés en quelque lieu que ce soit,- la cour a à statuer en fonction de la lettre d'observations, pour laquelle le principe du contradictoire a bien été respecté, conformément aux dispositions de l'article R.234-59 du code de la sécurité sociale, puisque cette lettre, notifiée à la suite du contrôle intervenu, mentionne les anomalies constatées, avec pour chaque chef de redressement, la période et les bases de calcul des cotisations,
b) au fond
- les contrats de travail prévoient une rémunération par heure travaillée,- dans les faits, les salariés sont payés en fonction du nombre de chambres effectuées, ce qui est contraire à la convention collective ainsi que l'a confirmé l'inspection du travail,- la rémunération à la prestation n'est pas niée par l'employeur, qui fait d'ailleurs régulariser des "additifs", chaque mois, à chaque salarié, afin de traduire les choses en termes d'horaires,- le nombre de chambres nettoyées, retenu par la société comme base, ne tient compte ni. du temps à l'extérieur de la chambre, où diverses tâches sont à faire,. du temps d'attente, si le client n'a pas encore libéré la chambre,. des tâches supplémentaires demandées par les gérants de l'hôtel,tous éléments qui représentent, pourtant, un temps de travail effectif pour les salariés,- certes, le dossier d'une salariée a été pris en exemple parce qu'il a abouti au règlement à la salariée des heures qui lui étaient dues, après interventions de l'inspection du travail auprès de la société,- mais, ce n'est pas un dossier singulier, les salariés, entendus par ailleurs, ayant confirmé qu'ils ne pouvaient tenir la cadence imposée par l'employeur,- il y avait donc bien minoration de l'assiette des cotisations, en relation avec un travail dissimulé, des heures de travail accomplies par les salariés n'étant pas déclarées par l'employeur, avec retentissement sur les congés payés et la prime de transport corollaires.

MOTIFS DE LA DECISION

Il doit être précisé, en préambule, que pour ce qui concerne les textes devant régir le litige, il faut se replacer au temps du contrôle, donc dans les années 2005 et 2006.
* * * *
La société Atmos Le Mans et l'EURL Atmos Laval, représentées par leur gérant, M. Jean-Luc B..., ont été convoquées, le 17 juillet 2008, devant le tribunal correctionnel de Laval, afin de répondre de travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés, portant sur- dix-neuf salariés, entre le 1er mai et le 31 décembre 2004,- dix salariés, entre le 1er janvier et le 31 décembre 2005,- quatre salariés, entre courant janvier et février 2006,pour avoir "mentionné sur leur bulletin de paye un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué, notamment en calculant artificiellement le temps de travail des salariés par référence au nombre de chambres effectuées".
Par jugement du 4 décembre 2008, le tribunal correctionnel a "fait droit à l'exception de nullité soulevée" par les entreprises susmentionnées.
Cette décision, n'ayant pas été frappée d'appel, est définitive à ce jour.
L'article 4, alinéa 2, du code de procédure pénale consacre la règle de la primauté du juge pénal sur le juge civil. Elle interdit au juge civil de remettre en question ce qui a été irrévocablement, nécessairement et certainement jugé par le juge pénal, tant sur l'existence du fait qui forme la base commune des actions publique et civile, que sur la qualification et la culpabilité de celui à qui ce fait est imputé. C'est le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil.
Le tribunal correctionnel de Laval a motivé sa décision de la manière suivante:
"L'article L.611-10 du code du travail, devenu depuis L.8113-7, énonce que l'agent verbalisateur a l'obligation, en cas d'infraction aux dispositions relatives à la durée du travail (ce qui est le cas en l'espèce puisqu'il existe une discussion sur le calcul des heures travaillées) d'établir un troisième exemplaire de son procès-verbal et de le remettre au contrevenant, le premier exemplaire devant être envoyé au Préfet du département et, le second devant être déposé au Parquet.Le défaut de remise d'un exemplaire du procès-verbal au contrevenant constitue par lui-même une atteinte aux droits de la défense entachant de nullité la procédure pénale qui a suivi.En l'espèce, il ne fait aucun doute que le procès-verbal dressé par Mesdames C... et D..., inspectrices du recouvrement de l'URSSAF de la Mayenne, a été établi en seulement deux exemplaires puisqu'elles le précisent dans leur courrier de transmission au Parquet en date du 26 juillet 2006 et, qu'il n'a pas été remis un exemplaire au contrevenant, les deux inspectrices précisant à la fin de leur procès-verbal clôturé le 7 juillet 2006 que la société ATMOS et Monsieur Jean-Luc B..., gérant, "ont été avisés par courrier qu'un procès-verbal avait été dressé à leur encontre" ce qui exclut en toute clarté l'indication d'une remise du procès-verbal au contrevenant .Il s'en déduit que l'exception de nullité de la procédure doit être accueillie".
Il résulte de cette motivation que :
- le procès-verbal dressé par l'URSSAF à la société Atmos, pour travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés, n'a pas été annulé par le tribunal correctionnel,
- en revanche, l'ensemble de la procédure menée suite à ce procès-verbal a, elle, été annulée.
Dire le contraire, ainsi que le demande la société Atmos, reviendrait à ajouter à la décision rendue et, le procès-verbal dressé par l'URSSAF à la société Atmos, pour travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés, peut toujours être invoqué, sans pour cela se heurter au principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil. * * * *
L'URSSAF a agi dans le cadre de la lutte pour travail dissimulé, ainsi qu'elle y est expressément autorisée par l'article L.324-12, alinéa 1, du code du travail, aujourd'hui L.8271-7, 4o.
Dans ce cadre spécifique (cf l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale qui l'autorise à ne pas envoyer d'avis préalable à la société concernée), l'URSSAF peut établir :
- d'un côté et, en application de l'article L.324-12, alinéa 2, du code du travail, aujourd'hui L.8271-8, un procès-verbal pour infraction de travail dissimulé, qu'elle transmet au procureur de la République et, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire,
- de l'autre et, conformément à l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, une lettre d'observations, relative aux suites du travail dissimulé constaté du chef de la législation en matière de sécurité sociale, qu'elle adresse à la société concernée.
C'est cette lettre d'observations qui, pour les suites du chef de la législation en matière de sécurité sociale, constitue la formalité substantielle, destinée à assurer le caractère contradictoire du contrôle alors réalisé et, la sauvegarde des droits de la défense.

Les mentions de la lettre d'observations, de même que celles de la mise en demeure des articles L.244-2 et R.244-1 du code de la sécurité sociale, doivent permettre au redevable de connaître les causes, les bases ainsi que les périodes des redressements opérés.
L'URSSAF n'a pas procédé autrement, en l'espèce, et la société Atmos ne s'est aucunement méprise sur le cadre dans lequel cet organisme avait agi.
La lettre d'observations du 26 juillet 2006, comme la mise en demeure du 15 novembre 2006, toutes pièces reçues par la société Atmos, répondent aux exigences textuelles précitées.
La non-production par l'URSSAF du procès-verbal que cette dernière a dressé, au titre de l'infraction de travail dissimulé, ne peut, par conséquent, ainsi que le soutient la société Atmos, être un motif d'annulation, tant du contrôle lié à l'application de la législation en matière de sécurité sociale, que du redressement subséquent.
* * * *
Il n'en demeure pas moins que, le contrôle lié à l'application de la législation en matière de sécurité sociale et, le redressement subséquent, prennent leur source dans l'infraction pour travail dissimulé, en l'espèce de dissimulation d'emplois salariés, telle que prévue par l'article L.324-10, alinéas 4 et 5 du code du travail, aujourd'hui L.8221-5.
Or, la société Atmos conteste avoir commis une telle infraction, aussi bien au plan matériel qu'intentionnel.
On l'a dit (cf supra), le tribunal correctionnel de Laval ne s'est pas prononcé sur le fait que la dite infraction soit, ou non, constituée à l'encontre de la société Atmos.
Il revient à la cour, après les premiers juges, d'apprécier s'il y a bien eu travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés au sein de la société Atmos et ce, pour les périodes et les salariés visés par l'URSSAF dans sa lettre d'observations et la mise en demeure qui a suivi celle-ci.
* * * *
La société Atmos ne se contente pas de simples dénégations pour dire que, les faits qui lui sont prêtés n'ont pas existé. Elle verse aussi diverses pièces, dont des procès-verbaux d'auditions de salariés, auditions réalisées par l'URSSAF dans le cadre de l'enquête pour travail dissimulé conduite par cette dernière.
La société Atmos affirme, d'ailleurs, que ces procès-verbaux sont nuls, puisqu'au visa de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, alors que l'URSSAF a entendu ces salariés dans ses locaux.
L'URSSAF peut dire le contraire ; il est, toutefois, certain que, lorsqu'elle procède à des auditions dans le cadre de l'article R.243-59 précité, celles-ci ne peuvent, d'une part concerner que les salariés, d'autre part qu'être faites dans l'entreprise ou sur les lieux du travail des dits salariés.
Cependant, ainsi que cela a été rappelé (cf supra) :
- l'URSSAF n'a pas agi, ici, en application de cet article R.243-59 mais, en application des articles L.324-12, alinéas 1 et 2, du code du travail, aujourd'hui L.8271-7, 4o et L.8271-8,- la société Atmos ne s'est jamais méprise sur le cadre de cette action.
L'URSSAF avait, donc, le pouvoir de procéder, conformément à l'article L.324-12, alinéa 8, du code du travail, aujourd'hui L.8271-11, aux auditions des salariés de la société Atmos, "en quelque lieu que ce soit", lieu qui pouvait être ses propres bureaux.
Le fait que l'URSSAF ait visé un article inadéquat n'a causé aucun grief à la société Atmos.
* * * *
L'on en revient à la preuve nécessaire du travail dissimulé reproché à la société Atmos.
Dans le principe, cela a été dit (cf supra), la cour est valablement saisie par la lettre d'observations et la mise en demeure de l'URSSAF à l'égard de la société Atmos.
À la consultation des pièces versées par les parties, l'on s'aperçoit toutefois que, l'une des auditions d'une salariée, salariée comprise dans le redressement opéré, ne figure qu'au dossier de la société Atmos et non à celui de l'URSSAF.
C'est pourtant à partir de l'analyse de ces auditions que l'URSSAF a conclu au redressement vis-à-vis de la société Atmos.
La cour doit, en conséquence, pouvoir disposer de l'ensemble des éléments destinés à l'éclairer relativement au travail dissimulé.
L'URSSAF sera, dès lors, invitée à produire l'intégralité du procès-verbal pour travail dissimulé, par dissimulation d'emplois salariés, que cet organisme a dressé contre la société Atmos et transmis au procureur de la République, auditions des salariés comprises.
La réouverture des débats à l'audience du 24 novembre 2011 à 14 heures sera, par ailleurs, ordonnée, le présent valant convocation des parties et de leur avocat.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Avant dire droit,
Invite l'URSSAF de la Mayenne à produire le procès-verbal pour travail dissimulé, par dissimulation d'emplois salariés, que cet organisme a dressé contre la société Atmos et transmis au procureur de la République de Laval, en son intégralité, auditions des salariés comprises,
Ordonne la réouverture des débats à l'audience du 24 NOVEMBRE 2011 à 14 heures,
Dit que le présent vaut convocation des parties et de leur avocat,
Réserve les demandes.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALL Marie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/01813
Date de la décision : 28/06/2011
Sens de l'arrêt : Renvoi à une autre audience
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-06-28;09.01813 ?
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