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21/06/2011 | FRANCE | N°10/01565

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 21 juin 2011, 10/01565


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01565. Jugement Tribunal de Grande Instance d'ANGERS, du 15 Mars 2010, enregistrée sous le no 08/ 01623

ARRÊT DU 21 Juin 2011

APPELANTE :

L'I. R. C. A. N. T. E. C. (Institution de Retraite Complémentaire des Agents Non Titulaires de l'Etat et des Collectivités publiques) 33, rue de Villiers de l'Isle Adam 75971 PARIS CEDEX 10

représentée par la SCP DUFOURGBURG-GUILLOT, avoué à la cour, assistée de Maître Claire DESGREES-du-LOÜ-MAI

LLARD (dépôt dossier)

INTIME :

Monsieur Mohamed Y......

représenté par la SCP GONTIER-LANGLOI...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

ARRÊT N AD/ AT

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 01565. Jugement Tribunal de Grande Instance d'ANGERS, du 15 Mars 2010, enregistrée sous le no 08/ 01623

ARRÊT DU 21 Juin 2011

APPELANTE :

L'I. R. C. A. N. T. E. C. (Institution de Retraite Complémentaire des Agents Non Titulaires de l'Etat et des Collectivités publiques) 33, rue de Villiers de l'Isle Adam 75971 PARIS CEDEX 10

représentée par la SCP DUFOURGBURG-GUILLOT, avoué à la cour, assistée de Maître Claire DESGREES-du-LOÜ-MAILLARD (dépôt dossier)

INTIME :

Monsieur Mohamed Y......

représenté par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoué à la cour,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Avril 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame TIJOU,

ARRÊT : prononcé le 21 Juin 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame BRETON, président, et par Madame TIJOU, Adjoint administratif assermenté, ff de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Mohamed Y...est né au Maroc en 1938 et a servi comme engagé volontaire dans l'Armée Française du 24 décembre 1950 au 23 décembre 1954, au Maroc et en Indochine.
ll a le 3 décembre 2005, demandé à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC) la validation de ses années de service dans l'Armée Française et après s'être vu opposer un refus, a saisi le tribunal de Grande Instance d'Angers de sa demande.
Par jugement du 15 mars 2010, le tribunal de Grande Instance d'Angers a :
- condamné l'IRCANTEC à verser à monsieur Y...la pension due en raison des services accomplis dans l'armée Française, du 24 décembre 1950 au 23 décembre 1954,
- renvoyé monsieur Y...devant l'IRCANTEC pour la liquidation de ses droits, à charge pour lui de produire le relevé des trimestres pris en compte par le régime général d'assurance vieillesse,
- condamné l'IRCANTEC à payer à monsieur Y...la somme de 1400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sous réserve que l'avocat de monsieur Y...renonce à percevoir l'aide juridictionnelle,
- condamné l'IRCANTEC aux dépens.
L'IRCANTEC a fait appel de la décision.

OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES

L'IRCANTEC demande à la cour, par observations orales reprises sans ajout ni retrait dans ses écritures, d'annuler le jugement déféré, et à tout le moins, de le réformer, de débouter monsieur Y...de ses demandes et de le condamner aux dépens.
L'IRCANTEC soutient :
- que le tribunal s'est appuyé pour statuer sur trois pièces figurant au dossier de monsieur Y..., mais que celui-ci n'avait pas communiquées, et sur lesquelles elle n'a donc pas pu conclure ; que le principe du contradictoire, et la loyauté des débats, ont été violés, le jugement devant, de ce fait, être annulé.
- que monsieur Y..., comme engagé volontaire, a effectué ses services au Maroc et en Indochine, et ne remplit donc pas les conditions visées par les articles 1ER et 5èME du décret du 23 décembre 1970.
- que la convention générale de Sécurité sociale du 9 juillet 1965 ne s'applique pas au régime de l'IRCANTEC, qui n'est pas un régime de sécurité sociale.- qu'il est en tout état de cause indispensable, pour bénéficier du régime de l'IRCANTEC, d'être affilié au titre des années de service invoquées, au régime général de Sécurité Sociale ; que monsieur Y...ne produit aucune pièce attestant de l'accomplissement de cette condition, puisqu'aucun des trois documents communiqués à l'IRCANTEC après le prononcé du jugement ne fait cette démonstration.

Monsieur Y...est représenté par maître Langlois, avoué, qui indique à la cour qu'il n'a eu mandat que de représentation, et ne présente ni pièces ni conclusions, s'en rapportant à la motivation du jugement du 15 mars 2010 soit :
- que monsieur Y...a nécessairement cotisé au régime de retraite français pendant quatre ans comme engagé volontaire au sein de l'Armée Française, et peut donc prétendre à une prise en compte de sa situation par le régime général d'assurance vieillesse de la Sécurité Sociale et par l'IRCANTEC, en application des dispositions de l'article L65 du code des pensions civiles et militaires.
- que les trois documents qu'il produit sont relatifs à une demande de pension de retraite.
- que monsieur Y..., en sa qualité de ressortissant marocain, se voit appliquer la convention générale de Sécurité Sociale franco-marocaine du 9 juillet 1965, modifiée par avenant du 21 mai 1979, laquelle a une autorité supérieure au décret du 23 décembre 1970 qui a créé l'IRCANTEC, et établit une égalité de traitement entre les ressortissants des deux Etats au regard des législations de Sécurité Sociale de chacun d'eux ; que cette convention s'applique au régime général d'assurance vieillesse, et par extension, au régime obligatoire complémentaire du régime d'assurance vieillesse qu'est l'IRCANTEC, même si celui-ci n'est pas au nombre des régimes légaux de Sécurité Sociale.
- que l'égalité de traitement posée par la convention entre les ressortissants des deux Etats s'oppose à ce que soit pris en compte le lieu d'accomplissement des services, cette condition territoriale apparaissant alors comme discriminatoire.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de nullité du jugement
L'article 16 du code de procédure civile stipule que : " le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; Il ne peut retenir dans sa décision, les moyens, les explications, et les documents invoqués, ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. "
La jurisprudence établit que le juge ne saurait donc, sans méconnaître le principe de la contradiction, fonder sa décision sur un document produit après la clôture des débats, sans que les parties aient été mises à même de s'expliquer contradictoirement à leur propos.
Il est établi que les trois pièces visées dans le jugement du 15 mars 2010, et consistant en un courrier du 24 mai 2006 de la Caisse Nationale d'Assurance vieillesse (CNAV) de Paris, un courrier du 5 octobre 2006 de la CRAV d'Alsace-Lorraine, et un courrier du 5 octobre 2007 de la CNAV, ont été versées aux débats par monsieur Y...sans avoir été préalablement communiquées à l'IRCANTEC ; les conclusions de l'IRCANTEC n'en font pas mention et ne s'expliquent pas à leur sujet ; le bordereau de communication de pièces du 22 septembre 2008 du conseil de monsieur Y...ne vise que quatre pièces, de nature différente ; enfin l'IRCANTEC établit avoir eu communication de ces trois pièces, par Fax, le 4 mai 2010 soit postérieurement au prononcé du jugement du tribunal de grande instance d'Angers.
Ces documents ont pourtant un intérêt majeur pour la résolution du litige puisque monsieur Y...les produit aux fins de démonstration de son affiliation au régime général de sécurité sociale sur les quatre années de services dans l'Armée Française.
L'IRCANTEC n'ayant pas été en mesure de critiquer ces pièces, le principe de la contradiction a été évincé et le jugement doit, pour ce motif, être dit nul.
En application de l'article 562 du code de procédure civile, la nullité ainsi prononcée ne portant pas sur une irrégularité de l'acte introductif d'instance, la cour est en mesure de statuer sur le fond du litige.
Sur la demande de monsieur Y...d'attribution d'une pension de retraite Ircantec
L'article L65 du code des pensions civiles et militaires de retraite dit que : " le fonctionnaire civil ou le militaire, qui vient à quitter le service sans pouvoir obtenir une pension ou une solde de réforme, est rétabli, en ce qui concerne l'assurance vieillesse, dans la situation qu'il aurait eue s'il avait été affilié pendant la même période au régime général des assurances sociales et à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités locales. "
Aux termes du décret no70-1277 du 23 décembre 1970, l'agent non titulaire de l'Etat peut obtenir la validation à titre gratuit par l'IRCANTEC des services invoqués s'il les a accomplis sur un territoire où le régime général de Sécurité Sociale était applicable.
Si tel n'est pas le cas pour monsieur Y..., celui-ci se voit cependant appliquer, comme ressortissant marocain, la convention générale de Sécurité Sociale franco-marocaine, convention bilatérale qui constitue une norme juridique supérieure au décret du 23 décembre 1970, et qui, ayant pour objet de coordonner l'application aux ressortissants des deux pays, des législations marocaine et française sur les prestations familiales, les assurances vieillesse, maladie, maternité invalidité et accidents du travail, s'applique par conséquent au régime obligatoire complémentaire du régime générale de l'assurance vieillesse qu'est l'IRCANTEC.
Il appartient à monsieur Y...de démontrer qu'il est bien affilié, au titre de ses années de service dans l'Armée Française, au régime général de Sécurité Sociale.
Les trois pièces qui sont versées aux débats, et dont l''IRCANTEC a eu communication au cours de la procédure d'appel, sont :
- un accusé de réception, le 24 mai 2006, par la CNAV, d'une demande de retraite formée par monsieur Y...auquel la Caisse conseille de renvoyer par retour une demande de paiement par virement.
- un courrier du 5 octobre 2010 de transmission par la CNAV à la Caisse Régionale d'Assurance Vieillesse d'Alsace-Moselle d'une demande de rachat de cotisations de monsieur Y....
- un écrit de la CNAV du 5 octobre 2007 à monsieur Y...dans lequel la Caisse lui notifie le rejet de sa demande de validation par rachat de ses " périodes d'incorporation accomplies dans l'Armée Française " Aucun de ces trois documents ne démontre que les services de Monsieur Y...comme engagé volontaire dans l'Armée Française du 24 décembre 1950 au 23 décembre 1954 aient été pris en compte au titre du régime général de la Sécurité Sociale.

La demande de monsieur Y...d'attribution d'une pension de retraite IRCANTEC au titre des services sus-visés doit être rejetée.
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de monsieur Y...les frais engagés dans l'instance, alors qu'il a, devant le premier juge, laissé l'IRCANTEC dans l'attente de ses justificatifs, et les a finalement versés sans communication préalable, et qu'il omet, devant la cour, de répondre aux conclusions de l'appelant.
Le jugement est réformé en ce qu'il a condamné l'IRCANTEC à payer à monsieur Y...la somme de 1400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur Y...est condamné au paiement des dépens de première instance qui seront recouvrés conformément aux règle sur l'aide juridique et au paiement des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
ANNULE le jugement du tribunal de grande instance d'Angers du 15 mars 2010
Statuant sur le fond, en application de l'article 562 du code de procédure civile,
REJETTE la demande de monsieur Y...d'attribution d'une pension de retraite IRCANTEC pour sa période de services comme engagé volontaire dans l'Armée Française du 24 décembre 1950 au 23 décembre 1954.
REJETTE la demande formée par monsieur Y...en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE monsieur Y...aux dépens de première instance qui seront recouvrés conformément aux règles sur l'aide juridique, ainsi qu'aux dépens d'appel.

L'Adjoint administratif assermenté, LE PRÉSIDENT,

Annick TIJOU Marie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/01565
Date de la décision : 21/06/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-06-21;10.01565 ?
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