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17/05/2011 | FRANCE | N°09/02950

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 17 mai 2011, 09/02950


ARRÊT N AD/ SLG

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02950. (RG 10/ 000194 joint)

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 30 Novembre 2009, enregistrée sous le no 08/ 00635

ARRÊT DU 17 Mai 2011

APPELANTES :

ASSOCIATION NATIONALE DE PREVENTION EN ALCOOLOGIE ET ADDICTOLOGIE (ANPAA) 20 rue Saint Fiacre 75002 PARIS

représentée par Maître Catherine GIAFFERI, avocat au barreau de PARIS

Madame Amélie X... ...72220 MARIGNE LAILLE

représentée par

Maître Aurélie DOMAIGNÉ, avocat substituant Maître Luc LALANNE, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA C...

ARRÊT N AD/ SLG

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02950. (RG 10/ 000194 joint)

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 30 Novembre 2009, enregistrée sous le no 08/ 00635

ARRÊT DU 17 Mai 2011

APPELANTES :

ASSOCIATION NATIONALE DE PREVENTION EN ALCOOLOGIE ET ADDICTOLOGIE (ANPAA) 20 rue Saint Fiacre 75002 PARIS

représentée par Maître Catherine GIAFFERI, avocat au barreau de PARIS

Madame Amélie X... ...72220 MARIGNE LAILLE

représentée par Maître Aurélie DOMAIGNÉ, avocat substituant Maître Luc LALANNE, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Mars 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-Bernard BRETON, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,

ARRÊT : prononcé le 17 Mai 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
EXPOSE DU LITIGE
Madame Amélie X... a été engagée en qualité d'animateur, 7ème échelon, coefficient 327 de la grille des animateurs, avec un salaire brut mensuel de 1383, 21 euros, par l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72, selon contrat à durée déterminée du 26 août 2002 puis contrat à durée indéterminée du 26 février 2003, au même coefficient, avec un salaire mensuel brut de 1402, 83 euros.
Le 26 mars 2003 les organisations représentatives et la direction de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 ont signé un accord portant sur le tranfert de l'accord d'entreprise de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 du 28 mars 1986 vers la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, accord énonçant les règles de classification et de rémunération applicables à compter du 1ER juillet 2003 au personnel.
Madame Amélie X... a en conséquence été, par avenant no2 du 1er juillet 2003, classée dans la grille des animateurs 1er groupe au coefficient 438, échelon 3, pour un salaire brut mensuel de 1654, 12 euros.
Au 1er septembre 2005 elle a été classée à l'échelon 5 coefficient 465 puis le 1ER septembre 2007 à l'échelon 6 coefficient 482.
Le 14 septembre 2007 elle a demandé à son l'employeur à bénéficier du statut d'animateur socio-éducatif, dont elle considérait qu'il correspondait à la réalité de son activité mais par lettre du 14 avril 2008 l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 lui a fait savoir que la direction des ressources humaines lui avait refusé ce statut.
Madame Amélie X... considérant que sa collègue mademoiselle A... avait été classée sur la grille des animateurs socio-éducatifs lors de son recrutement en mars 2006, et qu'elle exerçait les mêmes fonctions que celle-ci, a revendiqué le classement sur cette grille au coefficient 503 échelon 4 à compter de mars 2006, puis au coefficient 537 échelon 5 à compter du 1er septembre 2007.
Le 16 décembre 2008 madame Amélie X... a saisi le conseil de prud'hommes du MANS pour se voir reconnaître le statut d'animateur socio-éducatif, se voir appliquer en conséquence la grille de classification correspondante dans la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1996, se voir appliquer le coefficient 503 échelon 4 du 1ER mars 2006 au 1ER septembre 2007, le coefficient 537 du 1ER septembre 2007 au 1ER septembre 2009 et le coefficient 570 à compter du 1er septembre 2009.
Madame Amélie X... a demandé paiement des salaires correspondant à l'application de ces coefficients.
Par jugement du 30 novembre 2009 le conseil de prud'hommes du MANS a dit que madame Amélie X... ne pouvait pas bénéficier du statut d'animateur socio-éducatif mais a condamné l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72, par application du principe d'égalité des salaires à travail égal, à payer à madame Amélie X... les sommes de 2600 euros à titre d'indemnité de 200 euros par mois pendant 13 mois et dit que madame Amélie X... devait bénéficier du même coefficient que ses collègues.
L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 a fait appel de la décision et madame Amélie X... également.
Les appels ont été joints par ordonnance de la cour du 2 février 2010.

OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES

Madame Amélie X... demande à la cour par observations orales reprises sans ajout ni retrait dans ses écritures de lui reconnaître le statut d'animateur socio-éducatif avec application de la grille de classification prévue par la convention collective à compter du 1ER mars 2006, soit au coefficient 503. Elle demande la condamnation de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 à lui verser les rappels de salaires correspondants, soit la somme de 10 712, 40 euros du 1er mars 2006 au 31 août 2010, et un rappel de salaire de 269, 69 euros par mois à compter du 1ER septembre 2010, jusqu'à l'arrêt à intervenir, puis à faire application de la grille des animateurs socio-éducatifs, avec prise en compte de son ancienneté.

Madame Amélie X... demande en outre la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 aux dépens
Madame Amélie X... soutient qu'elle exerçait, comme ses collègues, des fonctions d'animateur socio-éducatif, comme le montre sa fiche de poste, éditée en 2007, et les activités qui lui ont été attribuées, soit :
• la prévention primaire des conduites addictives auprés de 3 collèges interventions auprès des personnes placées sous main de justice auprès des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) et au sein de la maison d'arrêt. • l'élaboration d'une charte contre les addictions des jeunes qui la vise comme animatrice • des interventions dans les milieux festifs • des interventions dans les milieux précaires • le fonctionnement général de l'association

Madame Amélie X... soutient que l'accord de transfert ne l'a pas distinguée parmi d'autres collègues et que la nouvelle classification et l'augmentation des salaires qui en résultent ne sont que la conséquence d'une mise aux normes obligatoire.

Elle ajoute qu'elle perçoit, compte tenu de son ancienneté, un salaire inférieur à celui de ses collègues ainsi qu'il ressort des grilles des animateurs socio-éducatifs sans que cette différence puisse être justifiée par la différence de diplôme ; qu'elle a obtenu un diplôme d'Etudes Supérieures d'Université (D. E. S. U.), " prises en charge des addictions ", le 16 février 2010, équivalent au niveau bac + 4.
Madame Amélie X... continue à soutenir cependant qu'elle exerçait, avant l'obtention de ce diplôme, les fonctions d'animateur socio-éducatif comme ses collègues ; qu'il n'y avait pas de distinction sur le titre attribué, tous étant nommés " animateurs " ; que l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 ne justifie pas de la pertinence d'une différence de traitement fondée sur le diplôme, la convention collective nationale visant pour l'embauche d'un animateur socio-éducatif la détention d'un DEFA (diplôme d'Etat aux fonctions d'animation) et d'un CAPASE, (Certificat d'aptitude à la promotion des activités socio-éducatives et à l'exercice des professions socio-éducatives) alors que l'association continue à embaucher comme animateurs socio-éducatifs des personnels qui ne sont pas détenteurs de ces diplômes.
Elle persiste par conséquent à demander son classement au coefficient 503 de la grille des animateurs socio-éducatifs dès le 1er mars 2006 (alors qu'elle était à cette date classée sur la grille des animateurs au coefficient 465), puis à compter du 1er septembre 2007 au coefficient 537 de la grille des animateurs socio-éducatifs, (elle était alors au coefficient 482 de la grille des animateurs) et à compter du 1er septembre 2009 au coefficient 570 de la grille des animateurs socio-éducatifs.
Elle chiffre le rappel de salaires bruts en résultant, du 1ER mars 2006 au 1ER septembre 2010, à 10 712, 40 euros.
L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 demande à la Cour par observations orales reprises sans ajout ni retrait dans ses écritures, de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes du MANS en ce qu'il a refusé à madame Amélie X... de bénéficier du statut d'animateur socio-éducatif en l'absence de qualification nécessaire, d'infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que madame Amélie X... pouvait prétendre au même coefficient que ses collègues, de débouter madame Amélie X... de ses demandes en rappels de salaires chiffrées à compter du 1ER mars 2006, au visa du DESU obtenu le 16 février 2010 seulement, et de l'avenant du 24 septembre 2010 avec effet rétroactif au 1er février 2010 faisant bénéficier madame Amélie X... d'un positionnement au coefficient 537 de la grille des animateurs socio-éducatifs ; de la condamner à restituer les sommes versées en exécution du jugement soit 2008, 06 euros, et à lui payer la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 observe que la condamnation prononcée par le conseil de prud'hommes du MANS à payer à madame Amélie X... " 2600 euros à titre d'indemnité correspondant à 200 euros mensuels sur 13 mois " n'est pas explicitée par les premiers juges, et ne correspond à aucune demande ; que le conseil de prud'hommes du MANS a d'autre part dit " que madame Amélie X... bénéficiera du même coefficient que ses collègues ", sans préciser ce coefficient dans le dispositif alors que mademoiselle A... et monsieur B... n'ont pas le même coefficient l'un et l'autre ; que la décision est donc inapplicable et doit être infirmée, l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 ayant dans l'intérêt de madame Amélie X... et pour exécuter le jugement choisi du classer madame Amélie X... le 1er septembre 2009 au coefficient le plus élevé, soit celui de monsieur B... (503).
L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 fait valoir que madame Amélie X... n'est pas titulaire du DEFA ni du CAPASE, diplômes exigés par la convention collective de 1966 pour être embauché comme animateur socio-éducatif mais qu'elle n'était jusqu'à l'obtention du DESU, détentrice que du BAC ; qu'elle ne se trouve donc pas dans la situation de ses collègues mademoiselle A..., qui dispose d'un DESS de sciences humaines et conduites addictives, mention très bien et d'un master de " psychologie sociale et communautaire de la santé ", et monsieur B... qui dispose d'un D. U. T. " carrières sociales option animation sociale et socio culturelle) ; qu'elle bénéficie du classement le plus haut (537 échelon 5) et du salaire le plus élevé depuis le

17 février 2010, date d'obtention par elle du DESU ; que la commission exécutive avait, le 15 novembre 2007, soumis son accession au poste d'animatrice socio-éducative à l'engagement de formations complémentaires ; que l'accord de transfert, enfin, avait permis à madame Amélie X... de bénéficier d'un indice plus élevé que celui lié à son ancienneté.

L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 soutient encore que mademoiselle A... disposait d'une formation lui donnant une vision globale de la problématique des conduites addictives, et une idée précise des motifs et pratiques des acteurs des autres champs, avec des compétences de médiation, de management des relations humaines, de pilotage de réseau, une " réflexion philosophique et un regard anthropologique sur la société actuelle et ses valeurs " ; que le master de psychologie sociale lui donnait des connaissances dans le domaine de la prévention et la prise en charge, dans celui de l'action éducative et de la santé ; qu'elle pouvait ainsi notamment élaborer des questionnaires et des grilles d'entretien, faire un diagnostic individuel, animer un groupe de travail.
Elle rappelle pour monsieur B..., que le DUT carrières sociales assure une formation en méthodologies, institutions, politiques sociales, politiques culturelles et comporte une approche comportementale, lui permet de s'adresser à des publics variés et de proposer des actions spécifiques adaptées et que ce diplôme donne " une autonomie pour exercer la fonction d'animateur qui peut être exercée avec une vue d'ensemble dont ne dispose pas quelqu'un qui n'a pas suivi le même cursus. "
L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 ajoute que madame C... ... qui a été embauchée comme animateur socio-éducatif a elle aussi un DUT carrières sociales ; que la jurisprudence considère que la différence de formation constitue une raison objective et pertinente justifiant la différence de rémunération entre deux salariés et que sa commission exécutive du 15 novembre 2007 avait soumis le positionnement de madame Amélie X... comme animateur socio-éducatif à la condition qu'elle suive une formation complémentaire ; que l'employeur a pris en charge cette formation, pour un montant de 11 390 euros et dès l'obtention du diplôme, a classé madame Amélie X..., avec son ancienneté, sur la grille des animateurs socio-éducatifs, soit après 7 ans de présence, et pour deux ans, au coefficient 537, avec un salaire mensuel de base de 2008, 38 euros et un taux horaire de 13, 24 euros, supérieur à celui de ses collègues.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LE RAPPEL DE SALAIRE
Le principe jurisprudentiel " à travail égal, salaire égal ", oblige l'employeur à assurer une égalité de rémunération entre des travailleurs effectuant un même travail et à établir une différence de rémunération uniquement sur des raisons objectives, dont il appartient au juge d'apprécier la réalité ainsi que la pertinence.
Le salarié qui soutient que ce principe a été méconnu à son endroit doit soumettre au juge les éléments de fait caractérisant une inégalité de rémunération et il incombe à l'employeur de rapporter la réalité des éléments objectifs justifiant l'inégalité invoquée.
Madame Amélie X... a été engagée le 26 août 2002 en contrat à durée déterminée devenu contrat à durée indéterminée le 26 février 2003 comme animatrice

Elle a été placée, à compter de son embauche, au 7ème échelon et au coefficient 327 repris dans l'avenant du 26 février 2003, ce qui correspondait à la reprise de son ancienneté dans un emploi précédent à la protection judiciaire de la Jeunesse, puisque le 1er échelon sur la grille de l'animateur est au coefficient 262.

Lors du transfert de l'accord d'entreprise de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 vers la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, et par avenant contractuel du 1ER juillet 2003 elle a été placée dans la grille des animateurs 1ER groupe au coefficient 438 échelon 3, ce qui a correspondu à une augmentation de rémunération mensuelle de 136, 11 euros.
Ce coefficient a été porté à 453 au 1ER septembre 2003 puis à 465 en septembre 2005 et 482 en septembre 2007.
Madame Amélie X... a bénéficié d'un congé parental du 1er avril 2007 au 31 mars 2009, date à laquelle elle a repli un emploi à temps complet.
Le profil de poste " animateur ", établi en janvier 2007 par le siège national des ressources humaines de l'A. N. P. A. A. dit que l'animateur " intervient généralement dans le milieu scolaire... également dans les milieux professionnels, et décrit ainsi ses fonctions : " l'animateur transmet des connaissances en addictologie sur la base de méthodes et d'outils interactifs créés en interne ou en externe dans le cadre d'une démarche projet. Il s'agit de susciter une modification des comportements des publics... Les actions de sensibilisation doivent permettre l'appropriation par les usagers d'une conscience des risques...- On peut différencier les missions de l'animateur de prévention chargé des actions auprès de différents publics à travers l'organisation de séances d'information, de débats et d'animations de groupes...- De celles de l'animateur socio-éducatif (de rue) qui a un rôle préventif mais aussi éducatif auprès des milieux à risques... L'animateur doit acquérir et maîtriser les connaissances de base en addictologie et être capable de gérer un groupe en adaptant son intervention. "

Cette fiche rappelle les compétences techniques exigées, soit : des connaissances de la messagerie électronique, de l'internet, du traitement de texte, et les aptitudes comportementales requises ; Elle vise comme diplômes exigés par la convention collective nationale le DUT pour être animateur, le CAPASE ou le DEFA pour être animateur socio-éducatif.
La convention collective nationale en son annexe 3 décrit ainsi les postes d'animateur et d'animateur socio-éducatif :
Animateur (Titulaire du D. U. T. formation de niveau 3) : exerçant effectivement des fonctions d'animation sociale ou socio-éducative en dehors du temps d'enseignement ou de formation professionnelle dans les emplois créés explicitement à cette fin dans des services services de prévention ou dans des établissements et services dont la nature et l'importance justifient de cette animation sociale et socio-éducative.

Animateur socio-éducatif : Justifiant du D. E. F. A. (Diplôme d'Etat aux fonctions d'animation) institué par le décret du 28 janvier 1979 et du certificat d'aptitude à la promotion des activités socio éducatives et à l'exercice des professions socio-éducatives (CAPASE) institué par l'arrêté du 5 février 1970 du secrétaire d'Etat auprès du Premier Ministre chargé de la jeunesse, des sports et des loisirs, exerçant effectivement des fonctions d'animation sociale ou socio-éducative en dehors du temps d'enseignement ou de formation professionnelle dans les emplois créés explicitement à cette fin dans des services de prévention ou dans des établissements et services dont la nature et l'importance justifient de cette animation sociale et socio-éducative.

Le DEFA, diplôme reconnu de niveau III (bac + 2 ans) est selon une note du Ministère des Affaires sociales et du Travail, un diplôme qui atteste d'une qualification professionnelle permettant de gérer un équipement, de mettre en oeuvre des interventions éducatives ou sociales, d'animer une structure collective, de conduire un projet.

Il est dit qu'il prépare au métier de cadre de l'animation que le titulaire du DEFA peut occuper un poste de responsabilité au sein du secteur public, du secteur associatif et du secteur commercial et que le DUT Carrières sociales option animation sociale et socioculturelle dispense de la formation générale et donne directement accès à l'expérience d'animation.
La convention collective nationale stipule donc expressément que l'animateur socio-éducatif doit " justifier " de la détention de deux diplômes, dont le DEFA, de niveau bac + 2.
Il s'agit d'un critère majeur puisque le contenu des fonctions d'animateur et d'animateur socio-éducatif est décrit dans les mêmes termes.
Madame X... ne remplit pas la condition de diplôme exigée par la convention collective, ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges : elle doit être déboutée de sa demande de classement au 1er mars 2006 sur la grille des animateurs socio-éducatifs au coefficient 503.
Outre le niveau de connaissances théoriques lié à la détention d'un diplôme de niveau universitaire bac + 2, le DEFA est d'autre part un diplôme préparant au métier de " cadre de l'animation " et à des " postes de responsabilité ".
L'arrêt rendu le 28 octobre 2008 par la Cour d'Appel d'Angers dans l'affaire D...- association MONTJOIE, et invoqué par madame X... comme précédent, avait relevé que monsieur D... disposait d'un diplôme universitaire de formation aux relations humaines et à l'animation des groupes de niveau bac + 4, qu'il était décrit par son l'employeur comme " éducateur spécialisé, référent des jeunes accueillis, intervenant auprès des familles des jeunes " et qu'il " était placé dans la même situation que ses collègues titulaires du diplôme d'éducateur spécialisé, pour effectuer le même travail comportant, notamment les mêmes actions, les mêmes responsabilités, les mêmes missions d'encadrement, et les mêmes fonctions de formation auprès des élèves " éducateurs spécialisés ".
Madame Amélie X... a été quant à elle recrutée, avec un bac mention sciences médico-sociales, pour " la mise en oeuvre de projets de prévention auprès d'adolescents et d'adultes ", tandis que mademoiselle A..., avec un DESS sciences humaines et conduites addictives avait, dans le secteur de compétence exercé par l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72, un niveau de cadre, et des connaissances transversales du fait de l'obtention également d'un master de psychologie sociale et communautaire de la santé.
L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 a donc pu légitimement considérer que mademoiselle A... avait des diplômes de niveau supérieur à ceux exigés par la convention collective comme devant être un minimum mais non pas à l'exclusion de tout autre.
Monsieur B... et madame C..., détenteurs d'un DUT justifiaient également d'un niveau de connaissances théoriques équivalent à celui du DEFA puisque seule l'expérience d'animation reste alors à acquérir, selon la fiche-programme de ce cursus.
Cette position a constamment été celle de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 qui a certes en commission exécutive du 15 novembre 2007 donné un avis favorable à la classification de madame Amélie X... sur la grille des animateurs socio-éducatifs, à titre de " dérogation " mais en demandant à madame Amélie X... " de poursuivre sa formation et de s'inscrire dans un cursus de DEFA ou de CAPASE "
La direction des ressources humaines de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 tout en considérant que les conditions de positionnement sur la grille des animateurs socio-éducatifs n'étaient pas remplies, a adhéré à " la nécessité d'un renforcement de ses qualifications par la formation " et indiqué soutenir toute demande de formation de l'intéressée.
Il résulte encore du rapport d'activités 2007 de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 comme du tableau de répartition des programmes d'actions du 17 juin 2008 que madame Amélie X... a été affectée à des missions de " formations, sensibilisations et soutien méthodologique au bénéfice des publics jeunes " et de " sensibilisation des publics sous main de justice ", consistant en des interventions en milieu scolaire, en présence de l'enseignant, ou en maison d'arrêt, ou milieu pénitentiaire ouvert, avec les agents du SPIP (service pénitentiaire d'insertion et de probation), là où mademoiselle A... apparaît comme ayant eu la charge de " travail auprès des apprentis ", du " développement de travail dans les CFA (centres de formation des apprentis), de " service d'appui, d'accompagnement judiciaire ", et d'actions en " milieu du travail " et auprès des " publics précaires ".
Même si mademoiselle A... atteste qu'elle même et madame Amélie X... se remplaçaient sur leurs interventions, celles ci n'apparaissent pas, dans leur globalité, comme ayant été de même nature, outre le niveau de savoir théorique dispensé aux publics concernés sur les addictions abordées, décrit comme étant pour un animateur " la maîtrise des connaissances de base en addictologie " alors que le détenteur d'un DESS et d'un master spécialisés dispose de connaissances croisées et approfondies.
Monsieur B... et madame C... justifiaient aussi, quoique à un moindre degré, de cette formation théorique permettant de dispenser un discours global et élaboré.
L'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72 justifie par conséquent de l'existence d'éléments objectifs et pertinents justifiant la différence de rémunération entre ses salariés et n'a pas méconnu la règle " à travail égal, salaire égal ".
En témoigne encore le fait que l'employeur, ainsi qu'il l'avait annoncé dans ses écrits, a financé au bénéfice de madame Amélie X... une formation universitaire de une année, qui a eu pour lui un coût de 11 350 euros, et a classé la salariée sur la grille des animateurs socio-éducatifs, avec son ancienneté, dès l'obtention du diplôme, soit le DESU, diplôme de niveau bac + 4. (sachant que madame Amélie X... avait accédé à cette formation par la procédure de VAPP (validation des acquis professionnels et personnels).

Le jugement du conseil de prud'hommes du MANS du 30 novembre 2009 est infirmé en ce qu'il fait droit à la demande des rappels de salaires de madame X... par application de la règle " à travail égal, salaire égal ".

Il ne paraît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge des frais engagés dans l'instance et non compris dans les dépens.
Madame Amélie X..., qui perd le procès, est condamnée au paiement des dépens.

SUR LA DEMANDE DE L'A. N. P. A. A. EN RESTITUTION DE LA SOMME DE 2000, 06 EUROS

L'arrêt infirmatif emporte de plein droit obligation de restitution et constitue le titre exécutoire ouvrant droit à cette restitution. Les sommes restituées ne portent intérêts au taux légal qu'à compter de la notification de l'arrêt, valant mise en demeure. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur la demande de l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie 72.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
VU l'ordonnance de la COUR du 2 février 2010 ordonnant la jonction des appels enregistrés sous les numéros de rôle RG09/ 02950 et RG10/ 00194,
REFORMANT le jugement du conseil de prud'hommes du Mans du 30 novembre 2009,
DIT n'y avoir lieu à classification de madame Amélie X... au 1 er mars 2006 au coefficient 503 sur la grille des animateurs socio-éducatifs,
DEBOUTE madame Amélie X... de ses demandes de rappels de salaires,
LAISSE à chaque partie la charge de ses frais non compris dans les dépens,
CONDAMNE madame Amélie X... aux dépens de première instance et d'appel,
DIT n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution de sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLMarie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/02950
Date de la décision : 17/05/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-05-17;09.02950 ?
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