COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale
ARRÊT N BAP/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02116.
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de SAUMUR, décision attaquée en date du 08 Septembre 2008, enregistrée sous le no 08/ 00018
ARRÊT DU 19 Avril 2011
APPELANTE : Mademoiselle Florence X...... 67520 MARLENHEIM
bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale en date du 16 Décembre 2010- numéro 2010/ 008895
représentée par Me Julien ROULLEAU, avocat au barreau d'ANGERS
INTIMEE : S. A. R. L. ANJOU TRAVAUX PUBLICS 17 rue de la Mairie 49700 BROSSAY
représentée par Me Ludovic TORNIER, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 22 Février 2011, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseur Madame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,
ARRÊT : du 19 Avril 2011 contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******
FAITS ET PROCEDURE
Mme Florence X... a été engagée par la société Anjou travaux publics, en qualité d'ingénieur de travaux publics, statut cadre, position B3, selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 3 juin 2004.
La convention collective applicable est celle, nationale, du bâtiment et des travaux publics.
Mme Florence X... a été licenciée, par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 décembre 2005.
Mme Florence X... a saisi, le 1er octobre 2007, le conseil de prud'hommes de Saumur aux fins que, l'exécution provisoire du jugement à intervenir étant par ailleurs ordonnée, la société Anjou travaux publics soit condamnée à lui verser :-65 964, 20 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-15 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,-21 879, 52 euros de rappel d'heures supplémentaires et 2 188 euros de congés payés afférents,-2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le conseil de prud'hommes de Saumur, par décision du 8 septembre 2008, a :- dit que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse,- condamné la société Anjou travaux publics à lui verser 10 500 euros d'indemnité de ce chef, outre 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,- rejeté l'ensemble de ses autres demandes,- condamné la société Anjou travaux publics aux éventuels dépens.
Ce jugement a été notifié à Mme Florence X... le 28 octobre 2008.
Mme Florence X... en a formé appel, par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 novembre 2008, limitant le dit appel, qu'elle a signé, au rejet de ses demandes relatives au caractère vexatoire du licenciement et aux heures supplémentaires.
L'affaire a fait l'objet d'une radiation par ordonnance en date du 15 septembre 2009.
Mme Florence X... a demandé son rétablissement, le 28 septembre 2009.
L'audience s'est tenue le 4 mai 2010 et a été mise en délibéré, délibéré qui a été prorogé à plusieurs reprises.
Par mention au dossier en date du 19 octobre 2010, une reprise des débats a été ordonnée à l'audience du 22 février 2011.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
À l'audience, Mme Florence X... maintient sa demande d'infirmation de la décision déférée sur le caractère vexatoire du licenciement et les heures supplémentaires, réclamant que la société Anjou travaux publics soit condamnée à lui verser :-74 062, 41 euros de dommages et intérêts du premier chef,-21 879, 52 euros de rappel de salaire du second chef.
Elle forme sinon de nouvelles demandes, à savoir que la société Anjou travaux publics soit condamnée à lui verser :-20 989, 26 euros d'indemnité pour travail dissimulé,-100 000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,-40 095 euros de dommages et intérêts pour non-paiement de l'avantage en nature.
Elle expose :
- avoir été confrontée au harcèlement de son employeur à compter de la mi-juin 2005, harcèlement qui s'est poursuivi même durant son arrêt maladie,
- qu'il lui a été dit de quitter son travail dès le jour de sa reprise et que, de plus, l'entretien préalable à son licenciement s'est déroulé dans des conditions inadmissibles,
- que la rémunération au forfait ne lui est pas applicable, car :. d'une part, celle-ci n'était pas possible dans l'entreprise, les dispositions conventionnelles qui la prévoient n'ayant pas fait l'objet d'un arrêté d'extension et, la société Anjou travaux publics n'étant pas adhérente d'une organisation patronale signataire des dites dispositions,. d'autre part, la clause de son contrat de travail qui stipulait cette dernière, en l'absence des précisions alors requises, était illicite,
- avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires, dues à l'ampleur des tâches qui lui avaient été confiées,
- que son employeur ne pouvait donc l'ignorer, comme le fait qu'il ne pouvait la payer sur la base d'un forfait, toutes choses qui illustrent l'intention frauduleuse qui animait celui-ci,
- que l'avantage en nature d'un véhicule de fonction cinq places, qui lui avait été promis, ne lui a pas été fourni.
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À l'audience, la société Anjou travaux publics demande :- à titre liminaire, abandonnant après vérifications ces deux premières exceptions de procédure, qu'il soit dit que Mme Florence X... est :. irrecevable en son appel, du fait de l'acquiescement préalable donné au jugement querellé,. tout aussi irrecevable dans les prétentions vis-à-vis desquelles elle n'a pas interjeté appel,
- subsidiairement, que Mme Florence X... soit :. déboutée de l'intégralité de ses demandes,. condamnée à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,. condamnée aux entiers dépens.
Elle indique que :- le conseil de Mme Florence X...,. avait pleine qualité pour acquiescer au jugement,. qu'il l'a fait, sollicitant sans aucune réserve l'exécution de la décision et, alors que cette dernière n'avait pas été assortie de l'exécution provisoire,
- elle-même n'a pas interjeté appel du dit jugement, que ce soit à titre principal ou incident,
- Mme Florence X... a expressément mentionné dans son appel, le caractère partiel de ce dernier,
- les circonstances du licenciement de Mme Florence X... ne sont en rien vexatoires,
- elle n'a pas commis de harcèlement moral à l'encontre de Mme Florence X..., les simples allégations de cette dernière, à ce propos, ne pouvant tenir lieu d'éléments de preuve,
- Mme Florence X... relevait, par son contrat de travail, d'un forfait annuel en jours licite, comme :. autorisé par la convention collective, ayant appliqué volontairement en tant qu'employeur cette dernière dans l'entreprise, ainsi qu'il en avait le droit,. parfaitement connu de Mme Florence X..., celle-ci s'y référant dans le calcul de ses congés ne peut maintenant venir la dénier,
- les pièces produites par Mme Florence X... quant aux heures supplémentaires réclamées n'ont pas de valeur probatoire, et d'autant lorsque ces pièces sont rapportés à celles qu'elle verse de son côté,
- face à la remise en cause par Mme Florence X... de la convention de forfait, il n'y a pas travail dissimulé de sa part, n'ayant jamais eu l'intention de frauder,
- elle a bien fourni à Mme Florence X... un véhicule de fonction au titre de l'avantage en nature prévu.
MOTIFS DE LA DECISION
EN LA FORME
Sur l'acquiescement La société Anjou travaux publics, afin d'opposer à Mme Florence X... l'extinction de l'instance, se fonde sur l'article 410 du code de procédure civile qui dispose :
" L'acquiescement peut être exprès ou implicite. L'exécution sans réserve d'un jugement non exécutoire vaut acquiescement, hors les cas où celui-ci n'est pas permis ".
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Certes, le conseil de prud'hommes de Saumur n'avait pas assorti sa décision du 8 septembre 2008 de l'exécution provisoire.
Certes, M. François Y..., délégué CFTC, a envoyé le 22 octobre 2008 à la société Anjou travaux publics le courrier ci-après :
" Le conseil de prud'hommes de Saumur dans son jugement du 08/ 09/ 2008 a condamné la SARL ANJOU TRAVAUX PUBLICS au paiement des condamnation suivantes :. 10 500 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,. 800 € à titre de l'article 700 du NCPC soit un total de 11 300 €. Nous vous serions reconnaissants de nous adresser, dans les plus brefs délais, un chèque au nom de la CFTC. Dans l'attente... ".
Certes, la société Anjou travaux publics a réglé ce qui lui était demandé.
Certes, Mme Florence X... n'a interjeté appel du jugement que le 27 novembre 2008.
Certes, la société Anjou travaux publics n'a formé aucun appel.
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Il n'empêche que les articles 411 et suivants du code de procédure civile font une distinction entre représentation en justice et assistance en justice.
" La personne investie d'un mandat de représentation en justice est réputée, à l'égard du juge et de la partie adverse, avoir reçu pouvoir spécial de faire ou accepter un désistement, d'acquiescer, de faire, accepter ou donner des offres, un aveu ou un consentement ", conformément à l'article 417 du dit code.
En revanche, " la mission d'assistance en justice emporte pouvoir et devoir de conseiller la partie et de présenter sa défense sans l'obliger ", ainsi qu'il est dit à l'article 412 du même code.
Il ressort des mentions de la décision du 8 septembre 2008 du conseil de prud'hommes de Saumur que M. François Y... n'a fait qu'assister Mme Florence X..., qui était présente devant les premiers juges.
En conséquence, M. François Y... ne pouvait, sans mandat spécial de Mme Florence X..., acquiescer en son nom au jugement ainsi rendu.
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Or, M. François Y... n'avait pas été nanti par Mme Florence X... d'un tel mandat, lorsqu'il a sollicité de la société Anjou travaux publics l'exécution des condamnations prononcées (cf son courrier précité).
Et, la société Anjou travaux publics ne peut se retrancher, afin de dire le contraire, derrière le " pouvoir " établi le 4 juillet 2007 par Mme Florence X... à M. François Y....
Reprendre le contenu du dit pouvoir permet, en effet, de conclure au fait qu'il ne comportait pas celui d'acquiescer :
"... constitue pour mandataire le syndicat CFTC... représenté par Monsieur Y.... Je donne pouvoir au syndicat CFTC pour-traiter, compromettre ou transiger, après que j'en ai été préalablement informée et que j'ai donné mon accord sur la situation qui m'oppose à l'entreprise ATP Anjou travaux publics... devant le conseil de prud'hommes de Saumur-et procéder en conséquence a tous actes, conciliation, aveu ou désistement, citer, défendre, plaider, déposer toutes conclusions, former toutes demandes principales, reconventionnelles, additionnelles ou autre, obtenir toutes décisions judiciaires, de les faire exécuter, passer et signer tous actes ou pièces à tous les stades de la procédure, conciliation, jugement, référé, mesures d'instruction, voies d'exécution, et plus généralement de faire tout ce que le mandataire jugera utile, après que j'en ai été préalablement informés et que j'ai donné mon accord. J'autorise le syndicat CFTC à recouvrir, encaisser, percevoir, toutes sommes ou fonds en mon nom et pour mon compte ".
M. François Y... quand il se tourne, le 22 octobre 2008, vers la société Anjou travaux publics se place dans la dernière ligne du pouvoir qui lui a été confié.
Il peut d'autant moins y avoir " acquiescement implicite ", que Mme Florence X... ne reçoit la notification de la décision du conseil de prud'hommes de Saumur que le 28 octobre 2008, donc postérieurement, ainsi qu'en atteste sa signature sur l'avis de la lettre recommandée.
L'appel de Mme Florence X... est, dès lors, parfaitement recevable.
Sur l'étendue de l'appel Ont été rappelées les demandes qu'avait formulées Mme Florence X... au conseil de prud'hommes et, les réponses qui y ont été apportées par cette juridiction.
Ont été de même rappelés les termes de la déclaration d'appel de Mme Florence X..., termes que celle-ci maintient strictement devant la cour. Mme Florence X... n'a pas, pour cela, interdiction de présenter en appel des demandes nouvelles, que la cour se doit d'examiner, le principe du contradictoire ayant été respecté.
Ce n'est là que l'application de la règle de l'unicité de l'instance, contenue à l'article R. 1452-7 du code du travail.
La demande de la société Anjou travaux publics, non fondée, ne pourra qu'être rejetée.
AU FOND
Sur le caractère vexatoire Un salarié, licencié dans des conditions vexatoires ou brutales, peut prétendre à des dommages et intérêts en raison du préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi.
Il importe peu, pour cela, que le licenciement ait ou non une cause réelle et sérieuse.
Il n'est pas niable que, c'est dès le retour de maladie de Mme Florence X..., que la société Anjou travaux publics a entamé une procédure de licenciement à son encontre.
Ce licenciement a, d'ores et déjà, été sanctionné comme dépourvu de cause réelle et sérieuse et, Mme Florence X... n'a pas fait appel du montant des dommages et intérêts qui lui ont été alors accordés.
Quant à l'entretien préalable, elle était assistée d'un délégué du personnel de l'entreprise, M. Marcel Z....
Mme Florence X... a produit un compte-rendu de cet entretien préalable (pièce no FH 14), annexé à une attestation de M. Marcel Z..., dans laquelle ce dernier déclare (pièce no FH 15) :
" J'atteste l'exactitude des feuillets 1 et 2 ci-joints, il s'agit du compte-rendu de l'entretien préalable de licenciement réalisé le 15. 12. 2005. Florence ne m'a jamais manqué de respect et je ne l'ai jamais vu manquer de respect à une autre personne devant moi. Je n'ai rien à lui reprocher, je dirais qu'elle est sociable et tolérante, je pense que les motifs ne tiennent pas debout. Florence est trop intègre pour eux et çà les dérange ". M. Marcel Z... est revenu par la suite sur cette attestation, délivrant à la société Anjou travaux publics l'attestation suivante (pièce no9) :
" Déclare avoir établi l'attestation suivant la demande de Mlle X... Florence ; celle-ci m'a harcelé de coups de téléphone jusqu'à des 21 heures pour obtenir ce document. Devant son insistance et pour avoir la paix j'ai signé. Elle m'a dicté mot pour mot ce que je devais écrire. Le rapport qu'elle a rédigé je l'ai signé sans même le relire. Elle est venue jusqu'à mon domicile un dimanche matin pour récupérer ma pièce d'identité, que je n'ai jamais voulu lui remettre ".
Effectivement, Mme Florence X... convient qu'elle n'a pas obtenu de justificatif de son identité de la part de M. Marcel Z..., bien qu'elle le lui ait demandé.
Une telle attitude de M. Marcel Z... se comprend, lorsque l'on met en parallèle le compte-rendu d'entretien préalable précité et les notes prises par Mme Florence X... durant cet entretien préalable (pièce no FH 20). Les similitudes sont telles, qu'il ne peut y avoir de doute sur le rédacteur du dit compte-rendu.
Nul ne peut, conformément à l'article 1315 du code civil, se constituer une preuve à lui-même.
Mme Florence X... sera, en conséquence, déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.
Sur les heures supplémentaires La société Anjou travaux publics est régie par la convention collective du bâtiment et des travaux publics.
Les entreprises du secteur ont conclu, le 6 novembre 1998, un accord au plan national " sur l'organisation, la réduction du temps de travail et sur l'emploi dans le bâtiment et les travaux publics ".
Cet accord était bien applicable au sein de la société Anjou travaux publics, puisqu'il avait été étendu par arrêté en date du 23 février 1999, qui avait été publié au Journal officiel du 26 février 1999.
Mme Florence X..., ayant été embauchée au statut cadre, position B3, faisait partie du personnel d'encadrement susceptible de faire l'objet d'une convention de forfait annuel en jours.
Toutefois, le code du travail, dans son article L. 212-15-3 applicable à l'époque, spécifiait que :
" La convention ou l'accord collectif prévoyant la conclusion de forfaits en jours doit fixer le nombre de jours travaillés " (ce nombre ne pouvait alors dépasser 217 jours).
Or, rien de tel dans la seule pièce versée par la société Anjou travaux publics relative à cet accord, soit son titre III propre au personnel d'encadrement, dans lequel " le nombre de jours travaillés " ne figure pas.
Le contrat de travail de Mme Florence X... n'est pas plus prolixe sur ce point, puisqu'il stipule simplement que :
" En contrepartie de l'accomplissement de ses fonctions, le salarié percevra un salaire mensuel net de... 2 744, 08 €. Cette rémunération est basée sur un forfait annuel en jours ".
La société Anjou travaux publics évoque un forfait annuel de 216 jours :- sans éléments qui permettent de dire si c'est là le fruit d'une négociation valable au sein de l'entreprise, menée en application de l'accord collectif,- sans établir l'accord exprès de Mme Florence X..., pourtant requis par l'accord précité, à la mise en place d'une convention de forfait sur cette base (sa pièce no10 ne peut nullement être authentifiée comme étant de la main de Mme Florence X...).
Le même contrat de travail est tout aussi taisant, en contravention encore avec l'accord dont s'agit, qui impose qu'y soit mentionnée :
" la ou les contreparties dont bénéficie le salarié pour ce mode d'organisation de travail sans référence horaire (jours de repos spécifiques ajoutant aux congés légaux et conventionnels, ouverture d'un C. E. T. ou tout autre avantage défini lors d'un examen de leur situation avec leur employeur) ".
Dans ces conditions, la société Anjou travaux publics ne peut opposer à Mme Florence X... une quelconque convention de forfait annuel en jours.
L'on revient, de fait, aux règles classiques en matière de durée du travail et la question des heures supplémentaires doit être envisagée.
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L'article L. 3171-4 du code du travail dispose : " En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles... ".
La preuve des heures supplémentaires effectuées par le salarié est de fait partagée ; au salarié d'étayer préalablement sa demande et à l'employeur d'apporter les justifications nécessaires.
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Mme Florence X... fournit des relevés de fichiers et de mails informatiques (no FH 22 A et No10) ainsi que des attestations (no FH 22 B, no FH 39, no FH 40, no FH 41, no FH 43).
Ces pièces beaucoup trop imprécises et/ ou contredites par celles versées par la société Anjou travaux publics pour suffire à étayer sa demande.
Des dates et heures de modification de fichiers informatiques, de réception de mails informatiques, ne peuvent être représentatives, sans autres éléments au soutien. Au surplus, Mme Florence X... avait quand même le statut cadre et, un ordinateur portable avait été mis par l'entreprise à sa disposition. Elle avait donc une certaine latitude dans l'organisation de son travail.
Les attestations de MM. Fabrice A... et Marc B..., qui sont des amis de Mme Florence X..., ne sont pas plus déterminantes :
- M. Fabrice A..., " il s'agit dans un premier temps des heures effectuées par Melle X... au-delà de 18h30 voire au-delà de 20h au sein de cette entreprise " ; l'a t'il constaté lui-même, à quelle fréquence, sur quelle période..., sur ce dernier point il s'en tient finalement à la durée du contrat de travail de Mme Florence X..., alors que cette dernière a été absente plusieurs mois,- M. Marc B..., " j'appelais souvent Mlle Florence X..., en fin d'après-midi, début de soirée... finissant moi-même... tardivement je savais qu'elle était encore au travail ou venait juste de le quitter " ; les observations qui viennent d'être faites peuvent être reproduites.
Enfin, les divers éléments quant aux réunions de chantiers ne sont pas plus décisifs :- "... lieu la plupart du temps à 16h30 et qui se terminaient souvent assez tard après l'heure de la débauche ",- "... fixés soit le matin 9h 10h... mais souvent je l'ai rencontrée le soir après ma débauche soit 17h30 17h45 ",- "... le mardi à 16h30 ",- " lundi 15 novembre 2004 à 8h30 sur le site... ".
La société Anjou travaux publics, de par aussi bien des pièces techniques (convocations de chantiers...) que des attestations de salariés de l'entreprise qui travaillaient avec Mme Florence X..., prouve, de toute façon, l'absence de réalisme des heures supplémentaires invoquées (no58-1, 58-2, 58-3, 59-1, 59-2, 59-3, 60-1, 60-2, 60-3, 60-4, 60-5, 60-6, 60-7, 61-1, 61-2, 61-3, 61-4, 61-5, 61-6, 30, 31, 32, 55, 54, 52 et 57).
Mme Florence X... va, d'aillleurs, jusqu'à solliciter le paiement d'heures supplémentaires durant la période où son contrat de travail était suspendu pour cause d'arrêt maladie (elle a été en congés payés à compter du 28 juillet 2005, puis, victime d'un accident au cours de ses congés, en arrêt maladie du 24 août 2005 au 4 décembre 2005 inclus).
La demande de Mme Florence X... au titre d'heures supplémentaires sera, du coup, rejetée.
Sur le travail dissimulé La demande d'indemnité pour travail dissimulé reposait sur le fait que la société Anjou travaux publics n'avait pas porté toutes les heures de travail effectif de Mme Florence X... sur les bulletins de salaire de cette dernière.
Le débouté qui vient d'intervenir conduit, également, à un rejet de cette demande.
Sur le harcèlement moral " Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel " indique l'article L. 1152-1 du code du travail.
En cas de litige, les règles de preuve sont aménagées par l'article L. 1154-1 du code du travail qui précise : "... le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ".
Mme Florence X... est dans l'allégation totale quant au harcèlement moral qu'elle reproche à son employeur, qui se serait exercé y compris au cours de la période où elle se trouvait en arrêt de travail :- le discrédit que celui-ci aurait jeté sur ses capacités professionnelles devant tous, elle n'a aucune pièce l'illustrant,- le fait que celui-ci l'ait contrainte à continuer à travailler, bien qu'en maladie, ses pièces, no FH 8 et FH 9 ne permettent pas de le conclure, sauf à ce qu'il lui ait été demandé son avis sur un chantier qu'elle avait effectivement géré de janvier à avril 2005, ce qui ne peut être qualifié d'agissement répété ; par ailleurs le ton qu'elle emploie (... je reste joignable... cordialement) ne laisse en rien supposer qu'elle ait été victime de tels agissements,- le fait qu'elle ait dû reprendre son travail malgré ses difficultés de santé, ce n'est pas parce qu'elle a déposé plainte (no FH 10) pour des " appels téléphoniques malveillants " sur une période allant du 3 au 14 octobre 2005, que les dits appels, dont il reste à prouver la réalité, émanent de son employeur,- le fait que les actes dénoncés aient retenti négativement sur sa santé, ce ne sont pas les deux avis délivrés par la médecine du travail les 21 octobre et 2 décembre 2005 qui en attestent, de même que le certificat en date du 17 mars 2006 de son médecin traitant qui indique uniquement qu'il l'a " soignée pour des symptômes anxieux depuis le mois d'août 2005 ".
La demande de Mme Florence X..., quant à un harcèlement moral, sera en conséquence rejetée.
Sur l'avantage en nature Le contrat de travail de Mme Florence X... incluait dans sa rémunération un véhicule de fonction.
Il était dit : " Pour les besoins du service, l'entreprise met à la disposition du salarié un véhicule de fonction. Celui-ci pourra être utilisé également pour ses besoins personnels. La police d'assurance est souscrite par l'employeur qui s'engage à en acquitter les primes. Les frais d'essence et d'entretien du véhicule seront à la charge de l'employeur... ".
La société Anjou travaux publics a bien fourni à Mme Florence X... une voiture neuve, de marque Toyota, type Corolla 115 D4D Sol.
Mme Florence X... ne prouve pas quel préjudice elle pourrait, dans ces conditions, subir. Elle devra être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Rejette les exceptions d'irrecevabilité soulevées par la société Anjou travaux publics,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute Mme Florence X... de l'intégralité de ses demandes,
Condamne Mme Florence X... à verser à la société Anjou travaux publics la somme de 450 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel,
Condamne Mme Florence X... aux dépens de l'instance d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions en matière d'aide juridictionnelle.