COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N CLM/ SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 01377.
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 29 Mai 2009, enregistrée sous le no 08/ 00450
ARRÊT DU 19 Avril 2011
APPELANT : Monsieur Vincent X...... 72530 YVRE L'EVEQUE
présent, assisté de Maître Nicole BEAUDOUIN, avocat au barreau du MANS
INTIMEE :
FEDERATION DEPARTEMENTALE ADMR 6 rue Victor Duruy 72650 ST SATURNIN
en présence de Madame Martine Gavoyer, présidente de l'ADMR, assistée de Maître Estelle MARTINET, avocat substituant la SELARL ALCVYA CONSEIL (me ROUSSELIN-JABOULAY), avocats au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Janvier 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-Bernard BRETON, conseiller Madame Catherine LECAPLAIN MOREL, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller
Greffier lors des débats : Madame LE GALL,
ARRÊT : prononcé le 19 Avril 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
La Fédération ADMR de La Sarthe est une association sans but lucratif dont l'objet est de fédérer et d'apporter un soutien logistique aux associations locales ADMR du département de La Sarthe.
A la fin de l'année 2007, elle a diffusé une annonce aux fins d'embauche, à temps plein, dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée de douze mois, d'un éducateur spécialisé, statut " agent de maîtrise ", moyennant une rémunération brute mensuelle de 1902 €.
Après avoir reçu une promesse d'embauche le 25 janvier 2008, le 3 mars suivant, M. Vincent X... a été engagé en qualité de chargé de mission pour le développement des prestations individuelles et/ ou collectives auprès de personnes handicapées, catégorie F no 3, bénéficiant du statut de " cadre ", moyennant un salaire brut mensuel de 2264, 53 €. Lui était alors remis un contrat de travail à durée déterminée de douze mois, daté du 3 mars 2008, comportant une période d'essai d'un mois, auquel était annexé une lettre de mission. Ce contrat n'a pas été signé.
Le 5 mai 2008, M. X... a sollicité un rendez-vous de son employeur afin de lui exposer les observations, constats et propositions contenues dans un rapport joint à son courrier. Il y relevait certains points traduisant, selon lui, des dysfonctionnements et concluait, notamment, à la nécessité d'augmenter son salaire.
Par courrier du 23 mai suivant, arguant de ce qu'une renégociation rapide de sa rémunération lui avait été promise lors de son embauche, il sollicitait que son salaire net mensuel soit porté à la somme de 2 300 €.
Le 17 juin 2008, la Fédération ADMR de La Sarthe a fait connaître à M. X... que, dès lors qu'il se trouvait en poste depuis trois mois sans que son contrat de travail ait été signé, en vertu de la loi, il était lié à elle par un contrat de travail à durée indéterminée qu'il convenait de régulariser et dont elle lui a remis le projet en mains propres.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 3 juillet 2008, après avoir souligné qu'il avait refusé de signer ce contrat en exigeant de signer un contrat à durée déterminée et en tentant d'imposer une modification unilatérale de ses conditions de salaire, elle l'invitait à régulariser ce contrat à durée indéterminée.
Le 11 juillet 2008, M. X... a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave le 22 juillet suivant. Le 15 juillet, il a été placé en arrêt de travail pour maladie.
Par lettre recommandée du 29 juillet 2008, la Fédération ADMR de La Sarthe lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Par requête du 6 août 2008, M. Vincent X... a saisi le conseil de prud'hommes pour contester ce licenciement et solliciter un rappel de salaire et diverses sommes à titre de dommages et intérêts.
Par jugement du 29 mai 2009, auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud'hommes du Mans a consacré la faute grave, débouté M. X... de l'ensemble de ses prétentions, l'a condamné à payer à la Fédération ADMR de La Sarthe la somme de 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Ce jugement a été notifié aux deux parties le 5 juin 2009. M. Vincent X... en a relevé appel général par lettre recommandée postée le 17 juin suivant.
Appelée pour la première fois à l'audience de la cour du 8 février 2010, l'affaire a, à la demande des parties, été renvoyée au 15 juin suivant. A cette date, elle a été plaidée et mise en délibéré au 28 septembre 2010.
Par mention au dossier, la reprise des débats a été ordonnée à l'audience du 31 janvier 2011.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 4 février 2010, reprises et soutenues oralement à l'audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, M. Vincent X... demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;- de juger que son licenciement est abusif pour ne reposer ni sur une faute grave, ni sur un cas de force majeure ;- à titre principal, retenant qu'il a été embauché dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de douze mois et que son contrat a, en l'absence de faute grave ou de force majeure, néanmoins été rompu avant son terme, en application des dispositions des articles L 1243-1 et L 1243-4 du code du travail, de condamner la Fédération ADMR de La Sarthe à lui payer la somme de 25 000 € à titre de dommages et intérêts ;- à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article L 1235-5 du code du travail et des articles 4 et 10 de la convention collective, de la condamner à lui payer les sommes suivantes : ¤ indemnité de préavis : 13 584 € ¤ congés payés sur préavis : 1 358, 40 € ¤ dommages et intérêts (six mois) : 13 500 € ; sans préjudice d'une indemnité de procédure de 2000 €.
L'appelant indique qu'il ne reprend pas devant la cour sa demande initiale de rappel de salaire. Il soutient que la requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée pour absence d'écrit n'est pas automatique et il conteste que son refus de signer le contrat de travail qui lui a été soumis soit fautif dès lors que ce contrat ne correspondait pas aux accords résultant de l'annonce, de la promesse d'embauche et du contrat à durée déterminée qui lui a été initialement soumis.
Il conteste également que les autres griefs soient justifiés ou puissent caractériser une faute grave de sa part.
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 4 février 2010, reprises et soutenues oralement à l'audience devant la cour, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la Fédération ADMR de La Sarthe demande à la cour de débouter M. X... de son appel et de l'ensemble de ses prétentions, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner l'appelant à lui payer la somme de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que M. X... a bien commis une faute grave en refusant de signer, tout d'abord, le contrat à durée déterminée, en second lieu, le contrat à durée indéterminée. Elle ajoute qu'en l'absence de signature d'un contrat écrit, circonstance qui ne lui est pas imputable, ils étaient juridiquement liés par un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet et elle fait observer que le contrat à durée indéterminée qui lui a été soumis était conforme à la promesse d'embauche. Elle estime que c'est l'appelant qui, sous la pression, a tenté unilatéralement de modifier sont contrat de travail, notamment du chef du salaire. Elle fait valoir que le licenciement est encore parfaitement justifié par des actes de refus d'autorité et d'insubordination, par le défaut de réalisation de ses missions, le salarié se fixant des objectifs sans lien avec ces dernières, prenant des initiatives qui ne relevaient ni de sa compétence, ni de ses responsabilités.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la demande de rappel de salaires
Attendu que M. Vincent X... indique qu'il ne reprend pas devant la cour sa demande de rappel de salaires afférente à la période de mars à juillet 2008 ; que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de prétention ;
Sur le licenciement
Attendu que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que la preuve d'une telle faute incombe à l'employeur ;
Attendu que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; que la lettre du 29 juillet 2008 énonce les griefs suivants :- refus de régulariser sa situation contractuelle en subordonnant la signature du contrat de travail à l'octroi d'une augmentation substantielle de rémunération ;- multiplication des actes de refus d'autorité et d'insubordination par la remise en cause de l'autorité de l'employeur et du mode de fonctionnement de la Fédération ; comportement hostile à Mme A..., responsable du pôle handicap santé ;- planning prévisionnel montrant qu'il outrepasse très largement ses fonctions et multiplie les rendez-vous et activités sans lien avec sa mission ;- journée LAREF (Laboratoires de recherches en éducation et formation) du 25 juin 2008 consacrée à son laboratoire de doctorant et non à l'ADMR ou au GEM, sans avoir sollicité d'autorisation ;
Attendu, s'agissant du premier grief, qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'annonce à laquelle a répondu M. X... a été diffusée à un moment où les fonctions de direction de la Fédération ADMR de La Sarthe étaient occupées par M. Pierre-Yves Y..., lequel, en tant que " directeur fédéral ", a conduit le processus d'embauche de l'appelant et établi le courrier de promesse d'embauche du 25 janvier 2008 ; qu'il est encore à l'origine du texte du contrat de travail à durée déterminée daté du 3 mars 2008 et de la lettre de mission qui y était annexée, remis à M. X... dès l'origine de la relation de travail ;
Attendu que, si les pièces du dossier et les explications de ce dernier révèlent qu'il n'a jamais été satisfait du niveau de rémunération qui lui était proposé et qu'il l'a discuté dès le départ avec M. Y..., lequel lui aurait laissé l'espoir d'une possible négociation de son salaire à l'issue des trois premiers mois de la relation de travail (cf, notamment, la lettre de l'appelant à la présidente de l'ADMR le 23 mai 2008 et le courriel adressé à ce dernier par M. Y... après son licenciement), il n'en reste pas moins que, le 27 mars 2008, M. Vincent X... a adressé au directeur féféral un courrier électronique ayant pour objet : " Contrat Vincent ", au terme duquel il lui indiquait : " Pour moi, c'est OK pour la signature lundi 31. " ;
Attendu qu'il ne fait pas débat que l'absence de signature du contrat de travail à cette date, puis dans les semaines qui ont suivi, s'explique par le fait que M. Y... a été placé en congé de maladie fin mars 2008 et que son contrat de travail a été rompu en juillet 2008 ; que d'ailleurs, l'employeur rappelle ces circonstances en introduction à son courrier du 17 juin 2008 en indiquant : " Alors que votre recrutement avait été initialement envisagé dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée, vous nous avez indiqué qu'aucun contrat ne vous a été présenté par notre directeur pour régularisation, et ce alors que vous êtes en fonction depuis le 3 mars 2008. " ;
Attendu que l'appelant justifie avoir adressé par messagerie, le 23 avril 2008 à M. David Z..., responsable des ressources humaines, le texte de son CDD et celui de sa lettre de mission ; qu'au pied du courrier qu'il a adressé le 5 mai 2008 à la présidente et aux administrateurs de l'ADMR, il soulignait que son contrat de travail n'était toujours pas signé ;
Attendu que l'intimée ne justifie d'aucune invitation, ni mise en demeure adressée à M. X... d'avoir à signer le contrat de travail à durée déterminée établi le 3 mars 2008, dont les conditions étaient strictement conformes aux termes de l'annonce diffusée et du courrier de promesse d'embauche ; Qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, l'employeur est mal fondé à reprocher au salarié d'avoir refusé de signer le contrat à durée déterminée ;
Attendu, s'agissant du refus de signer le contrat de travail à durée indéterminée, que c'est pour la première fois le 17 juin 2008 que l'ADMR a remis à M. X... ce contrat et l'a invité à le signer ;
Mais attendu que c'est à juste titre que l'appelant oppose que, non seulement ce contrat n'est pas de même nature que celui sur la base duquel il a été engagé, mais qu'en outre, il ne reprend pas les conditions du contrat à durée déterminée ; que, notamment, il stipule une période d'essai de six mois au lieu d'un mois et les fonctions qui étaient initialement fixées tant dans le contrat de travail que dans la lettre de mission :- " 1) participation et coordination du groupe d'entraide mutuelle TEJIRA 72, 2) prise de contact avec des partenaires et financeurs éventuels (communes, hôpitaux, Conseil général, élus...) concernés par le développement de solutions d'accompagnement des personnes en souffrance psychique, 3) création et déploiement d'autres GEM (groupes d'entraide mutuelle) sur le département, 4) rôle de référent auprès du réseau ADMR pour les problématiques liées au handicap psychique, cognitif ou mental. " ont, dans le contrat de travail à durée indéterminée qui lui a été soumis, été réduites aux points no 1 et 3 ;
Or attendu que la présomption de l'article L 1242-12 du code du travail, selon laquelle, en l'absence d'écrit, le contrat de travail est présumé à durée indéterminée, est édictée dans l'intérêt exclusif du salarié, lequel peut rapporter la preuve que le contrat conclu verbalement était à durée déterminée ;
Attendu que cette preuve est rapportée en l'espèce par les termes de l'annonce, ceux du courrier de promesse d'embauche, ceux du contrat à durée déterminée établi en date du 3 mars 2008 et par ceux du courrier du 17 juin 2008 par lequel l'employeur reconnaissait expressément que le recrutement avait été opéré dans le cadre d'un contrat à durée déterminée ;
Attendu que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 3 juillet 2008, l'employeur a mis M. X... en demeure de signer le contrat de travail à durée indéterminée en lui indiquant qu'il ne comprenait pas qu'il lui soumette, de son côté, un contrat à durée déterminée et en lui reprochant de vouloir lui imposer de nouvelles conditions de salaire ;
Attendu qu'indépendamment de ces discussions reprises par le salarié quant au niveau de sa rémunération, la Fédération ADMR de La Sarthe est mal fondée à lui reprocher d'avoir refusé de signer le contrat de travail dès lors qu'elle lui a soumis un contrat de nature différente de celui conclu verbalement et comportant des modifications par rapport aux accords passés, énumérés dans le contrat à durée déterminée du 4 mars 2008, ces modifications tenant, notamment, en l'allongement très substantiel de la période d'essai et en la réduction très notable de ses fonctions ;
Qu'en effet, l'employeur ne peut pas imposer au salarié une ou des modifications unilatérales de son contrat de travail et le refus de ce dernier de les accepter ne saurait caractériser une faute de sa part ;
Que le premier grief est donc mal fondé ;
Attendu que le second grief tient en la multiplication des actes de refus d'autorité et d'insubordination à l'égard de l'employeur, à la remise en cause de son autorité et de son mode de fonctionnement et en un comportement hostile à l'égard de Mme Catherine A..., " responsable santé " ;
Que la Fédération ADMR de La Sarthe invoque à cet égard les refus répétés de signer le contrat de travail, le courrier adressé par M. X... le 5 mai 2008 à la présidente et aux administrateurs de l'ADMR et le rapport joint contenant, selon elle, des critiques relatives au fonctionnement de l'association, le fait qu'il ne se soit pas présenté à deux reprises à l'atelier " musique " du GEM TEJIRA, la volonté de s'imposer à une réunion à laquelle il n'était pas convié et un courrier électronique adressé à Mme A... le 1er juillet 2008 ;
Attendu que, pour les motifs ci-dessus énoncés, l'employeur est mal fondé à soutenir que M. X... aurait refusé de signer le CDD et que son refus de signer le contrat à durée indéterminée serait constitutif d'un acte d'insubordination alors qu'il ne pouvait pas lui imposer une modification de la nature du contrat convenu et de certaines de ses conditions ;
Attendu qu'il n'est pas justifié d'instructions ou de consignes données à l'appelant qu'il aurait refusé d'exécuter ;
Attendu qu'aux termes du courrier du 5 mai 2008 et du rapport interne de situation joint, M. X... se proposait de faire part à la présidente et aux administrateurs de l'ADMR, après quelques semaines de prise de poste, de ses observations, constats et propositions ; qu'il y pointait, effectivement, ce qu'il estimait constituer des dysfonctionnements et insuffisances, sans jamais mettre en cause qui que ce soit et en termes corrects et respectueux ; que le fait que le salarié y mentionne la nécessité de revaloriser son salaire ne saurait être, en soi, constitutif d'une faute ; que d'ailleurs, ce courrier n'a donné lieu à aucune réaction ni réponse de l'ADMR dans les deux mois de son envoi, l'employeur ne l'ayant pas même expressément cité dans la lettre de licenciement ;
Attendu que le 19 juin 2006, M. X... a adressé à Mme A... un courrier électronique aux termes duquel il lui indiquait quelle " pourrait " être la teneur du message à envoyer à la présidente de l'ADMR afin de solliciter sa présence, en tant qu'auditeur, à la réunion des membres du bureau du conseil d'administration du GEM TEJIRA devant se dérouler le 26 juin suivant ; que la teneur de son courrier, rédigé au conditionnel, ne permet pas de considérer qu'il entendait imposer sa présence à une réunion pour s'y faire valoir ; que d'ailleurs, là encore, il n'est pas justifié que Mme A... se soit offusquée de ce courriel et y ait répondu ;
Attendu que par courriers électroniques adressés à cette dernière les 27 juin et 1er juillet 2008, M. X... a relevé des difficultés de communication entre la Fédération et le GEM TEJIRA et, manifestant son souhait de savoir de qui il dépendait et qui dirigeait, il lui a demandé des précisions sur le plan organisationnel et de la prise de décision, et ce qu'englobait le fait qu'elle soit coordonnatrice ;
Attendu que, si ces courriers pointent des problèmes d'organisation et la difficulté de M. X..., recruté comme cadre autonome, à cerner de quelle personne il dépendait hiérarchiquement et à quelle personne il devait rendre compte, ils sont également rédigés en termes corrects ; qu'en outre, ils ne sont pas dénués d'objectivité puisqu'ils se situent à un moment où le poste de directeur était vacant ; que, d'ailleurs, c'est seulement par LRAR du 3 juillet 2008 que Mme B..., bénévole-responsable des ressources humaines, soulignant elle-même les difficultés générées par la vacance du poste de directeur fédéral, lui répondra qu'il dépendait hiérarchiquement et fonctionnellement de Mme Catherine A..., l'intimée ne justifiant pas que cette précision ait été antérieurement donnée à l'intéressé depuis le départ de M. Y... ;
Attendu, enfin, que la réalité des difficultés d'organisation et de direction déplorées par l'appelant est corroborée par le courriel de M. Y... en date du 7 juillet 2008 et par celui du 1er juillet 2008 par lequel, M. David Z..., responsable des ressources humaines, a annoncé sa démission à effet au 30 août suivant ;
Attendu que les courriers adressés par M. X... ne permettent donc de caractériser de sa part, ni un refus ou une remise en cause de l'autorité de l'employeur, ni une attitude d'insubordination, bien au contraire puisqu'il demandait à être fixé sur la personne de son supérieur hiérarchique ;
Qu'ils ne caractérisent pas non plus une remise en cause fautive du mode de fonctionnement de la Fédération en ce que les difficultés de fonctionnement et d'organisation liées à des problèmes de direction sont avérées et confirmées par les responsables des ressources humaines, et qu'il était légitime que M. X... finisse par souligner, ce qu'il a fait en termes corrects, les difficultés qu'elles généraient au niveau du GEM TEJIRA qu'il était chargé de coordonner
Que ces courriers ne traduisent pas non plus une attitude hostile à l'égard de Mme Catherine A..., et le fait que celle-ci ait pu écrire, le 30 juin 2008, qu'elle se sentait " fortement mise en cause sur un mode d'absence de véracité et d'équité de sa pratique professionnelle de ce temps de coordination " ne traduit qu'un ressenti purement subjectif de la part de cette dernière ;
Attendu qu'au nombre des faits d'insubordination, l'employeur fait encore valoir que M. X... ne s'est pas présenté deux jours de suite à l'atelier musique ; qu'aux termes d'un courriel du 4 juin 2008, un certain M. C... a indiqué à Mme A... qu'il n'avait vu M. X... à l'atelier musique ni le jeudi, ni le vendredi précédents ;
Mais attendu qu'il n'est pas démontré que les fonctions du salarié, qui était cadre autonome, lui imposaient d'être présent à toutes les séances de l'atelier musique ; que la lettre de mission qui accompagnait le contrat à durée déterminée du 4 mars 2008, et qui, en l'absence de document postérieur, est le seul élément permettant de déterminer ses fonctions précises, mentionne qu'il devait consacrer seulement 30 % environ de son temps de travail à la " participation et à la coordination du GEM TEJIRA ", soit une dizaine d'heures par semaine ; que, d'ailleurs, l'employeur invoque ce fait uniquement dans le cadre de la présente instance du chef du grief d'insubordination, sans s'être jamais ému auparavant de cette absence ;
Attendu que la preuve du deuxième grief fait donc également défaut ;
Attendu qu'en troisième lieu, l'employeur reproche à M. X... d'avoir très largement outrepassé ses fonctions et d'avoir multiplié les rendez-vous sans lien avec ses missions ;
Attendu, comme la cour l'a déjà souligné, et comme l'admet d'ailleurs l'employeur (page 15 de ses écritures), que celles ci sont définies aux termes du contrat à durée déterminée et de la lettre de mission établis le 4 mars 2008 ; qu'en vertu de cette dernière, M. X... devait, à hauteur de 30 % de son temps (soit environ 10 heures hebdomadaires), participer aux activités du GEM TEJIRA et coordonner, d'une part, l'équipe de professionnels de celui-ci, d'autre part, les relations entre professionnels et bénévoles, cette activité comportant la rédaction d'écrits de synthèse ;
Qu'il devait consacrer 60 % de son temps à la création et au déploiement d'autres GEM dans le département, ce qui impliquait, des rencontres avec des partenaires ; qu'enfin, lui était conféré le rôle de " référent auprès du réseau ADMR pour les problématiques liées au handicap psychique, cognitif ou mental ", lequel recouvrait des actions de formation et/ ou la préparation et l'animation de réunions thématiques sur le handicap psychique ;
Attendu que la Fédération ADMR de La Sarthe ne justifie pas avoir adressé à M. X... le moindre grief relatif aux activités qu'il a effectivement déployées et tâches qu'il a effectivement accomplies au cours de la période du 3 mars au 8 juillet 2008, et que la lettre de licenciement ne comporte aucune critique à cet égard, tous les reproches qui lui sont adressés concernant dix activités inscrites sur son planning prévisionnel du mois de juillet 2008, entre le 9 et le 24 juillet ;
Attendu que l'appelante procède par voie d'affirmation pour soutenir que le compte-rendu d'audit (11 juillet), les prises de contact sur le terrain à Saint-Calais et à Sablé (16 et 22 juillet), la réalisation d'un écrit de dynamique associative (17 juillet), le rendez-vous avec l'UNAFAM, la lecture du règlement intérieur, l'audit humain, la prise de connaissance d'extraits de procès-verbaux et de délégations de pouvoirs, une rencontre avec le cabinet du Préfet auraient été sans lien avec les missions de création et développement d'autres GEM et de référent auprès du réseau ADMR, recouvrant 70 % du temps de travail de l'appelant ;
Qu'elle reproche au salarié d'avoir programmé des travaux avec M. Y... les 9 et 21 juillet 2008 au motif que ce dernier n'appartenait plus au personnel fédéral ; mais attendu que M. X... a communiqué son planning prévisionnel de juillet le 14 juin 2008 ; et attendu que c'est seulement par courrier électronique du 7 juillet suivant que M. Y... a annoncé son départ, aucun élément objectif ne permettant d'établir que ce départ aurait été officiellement annoncé auparavant et, notamment, avant la mi-juin ; qu'il n'était donc pas fautif de la part du salarié de prévoir des échanges ou travaux avec celui qui était alors encore officiellement le directeur fédéral ;
Attendu que c'est de façon surprenante que l'employeur indique à M. X..., dans la lettre de licenciement, qu'il n'était pas autorisé à prendre rendez-vous avec l'UNAFAM, en tout cas, pas sans son aval, alors que la lettre de mission mentionne expressément, au titre de la mission " création et déploiement d'autres GEM ", qu'il devra mettre en oeuvre un partenariat avec les associations représentatives engagées et cite l'UNAFAM à titre d'exemple, et alors qu'il ne justifie pas lui avoir jamais précisé que ce type de prise de rendez-vous imposait son aval ;
Que, s'agissant du projet de rendez-vous avec le cabinet du Préfet, M. X... l'a assorti d'un point d'interrogation en précisant, dans le courrier électronique d'envoi de son planning, que les points d'interrogation sur ce document reflétaient un questionnement de sa part ; que ces indications permettaient à l'employeur de se convaincre que cette démarche vers le cabinet du Préfet était un simple projet qu'il n'entendait pas concrétiser sans l'aval de son employeur ; que, du reste, il n'est ni établi, ni même allégué que M. X... aurait arrêté un tel rendez-vous d'autorité ;
Attendu qu'il résulte de ces éléments que la preuve du troisième manquement n'est pas non plus rapportée ;
Attendu, enfin, que la Fédération ADMR de La Sarthe reproche à son salarié d'avoir consacré la journée LAREF (Laboratoires de recherches en éducation et formation) du 25 juin 2008 à son laboratoire de doctorant et non à l'ADMR ou au GEM ; que l'appelant ne conteste pas ce fait, mais soutient que, ce faisant, il ne s'est pas écarté de ses missions dans la mesure où il avait été embauché, notamment, en considération du travail de recherche qu'il poursuivait ; Attendu, en tout état de cause, que ce fait ne permet pas, à lui seul, de caractériser la faute grave alléguée, dans la mesure où le salarié était cadre autonome et où l'employeur ne justifie pas lui avoir adressé la moindre remarque sur ce point avant la lettre de licenciement ; Que le quatrième grief n'étant pas non plus fondé, la preuve de la faute grave n'est pas rapportée et le licenciement doit, par infirmation du jugement déféré, être déclaré abusif ;
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Attendu qu'il est établi par les développements qui précèdent que le contrat qui unit les parties et en vertu duquel M. Vincent X... a pris ses fonctions le 4 mars 2008 est un contrat de travail à durée déterminée de douze mois ;
Attendu qu'en application de l'article L 1243-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave ou de force majeure, faute de quoi, en application de l'article L 1243-4, la rupture anticipée du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L 1243-8 ;
Que, l'indemnité prévue par l'article L 1243-4 ayant le caractère d'une réparation forfaitaire, elle n'est pas susceptible de réduction ; qu'elle doit être calculée en fonction de la rémunération brute dont aurait bénéficié le salarié ;
Attendu que les bulletins de salaire versés aux débats révèlent un salaire brut mensuel de 2264, 53 € ; que l'appelant justifie (sa pièce no 11) avoir été admis au bénéficie de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er septembre 2008 et de ce qu'il était encore demandeur d'emploi en janvier 2011 ; que pour porter sa demande indemnitaire à la somme de 25 000 €, il argue du préjudice tant moral que matériel lié aux circonstances de son licenciement ;
Attendu que le montant de salaire brut et congés payés y afférents auquel M. X... aurait pu prétendre jusqu'à la fin de son contrat de travail, soit encore pendant sept mois, ressort à la somme de 17 436, 88 € (15 851, 71 € + 1585, 17 €) ;
Attendu qu'au regard de la situation particulière de l'appelant et des circonstances de la rupture, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer à 17 500 € le montant de l'indemnité qu'il convient de lui allouer en application de l'article 1243-4 du code du travail, sans préjudice de la somme de 2716, 80 € à laquelle l'appelant limite sa demande formée au titre de l'indemnité de précarité et que la Fédération ADMR de La Sarthe sera condamnée à lui payer ces sommes ;
Sur les dépens et frais irrépétibles :
Attendu, la Fédération ADMR de La Sarthe succombant en cause d'appel, qu'elle sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à M. Vincent X..., en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 000 €, le jugement déféré étant infirmé en ce qu'il a condamné le salarié au paiement d'une indemnité de procédure ;
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en qu'il a débouté M. Vincent X... de sa demande de rappel de salaire ;
L'infirme en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau,
Dit que les parties étaient liées par un contrat de travail à durée déterminée et que sa rupture anticipée ne repose ni sur une faute grave, ni sur un cas de force majeure ;
En conséquence, condamne la Fédération ADMR de La Sarthe à payer à M. Vincent X..., en application de l'article 1243-4 du code du travail, la somme de 17 500 € (dix-sept mille cinq cents euros) à titre de dommages et intérêts et celle de 2716, 80 € (deux mille sept cent seize euros et quatre-vingts centimes) à titre d'indemnité de précarité ;
La condamne en outre à lui payer la somme de 2 000 € (deux mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute elle-même de ce chef de prétention ;
La condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel.