La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/04/2011 | FRANCE | N°09/02878

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 05 avril 2011, 09/02878


COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N
BAP/ CG

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02878.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 20 Novembre 2008
enregistrée sous le no 07/ 000213

ARRÊT DU 05 Avril 2011

APPELANTE :

LA S. A. S. SELHA
2-6 rue de la Forge
BP 33
53800 RENAZE

représentée par Maître Paul DELACOURT, avocat au barreau de RENNES

INTIMEE :



Madame Françoise X...
...
44670 LA CHAPELLE GLAIN

représentée par Maître Hervé CHAUVEAU, avocat au barreau de LAVAL

COMPOSITION DE ...

COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N
BAP/ CG

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02878.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 20 Novembre 2008
enregistrée sous le no 07/ 000213

ARRÊT DU 05 Avril 2011

APPELANTE :

LA S. A. S. SELHA
2-6 rue de la Forge
BP 33
53800 RENAZE

représentée par Maître Paul DELACOURT, avocat au barreau de RENNES

INTIMEE :

Madame Françoise X...
...
44670 LA CHAPELLE GLAIN

représentée par Maître Hervé CHAUVEAU, avocat au barreau de LAVAL

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Octobre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT,
conseiller, et Madame Anne DUFAU, Conseiller, chargées d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller
Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,

ARRÊT :

prononcé le 05 Avril 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCEDURE

Mme Françoise X...a été engagée par la société Electronique haut Anjou (SELHA) selon contrat de travail à durée indéterminée du 13 juin 2000, en qualité de chef d'équipe, niveau 4, échelon 2, coefficient 270, contre une rémunération forfaitaire brute mensuelle de 14 000 francs (à l'époque), pour 177, 50 heures de travail par mois, soit 41 heures par semaine.

Par avenant prenant effet le 1er juin 2001, Mme Françoise X...est passée à l'échelon 3, coefficient 285, son salaire brut forfaitaire mensuel étant porté à 15 000 francs.

Mme Françoise X...appartenait à la catégorie ouvrier-employé jusqu'en décembre 2005, où elle est devenue agent de maîtrise.

La convention collective applicable est celle de la métallurgie de la Mayenne.

****

Mme Françoise X...a été convoquée, par lettre remise en main propre en date du 9 juin 2006, à un entretien préalable en vue d'un licenciement, avec mise à pied à titre conservatoire.

L'entretien préalable s'est tenu le 23 juin 2006.

Mme Françoise X...a été licenciée pour faute grave, par courrier recommandé avec accusé de réception du 3 juillet 2006.

****

Contestant notamment cette mesure, Mme Françoise X...a saisi le conseil de prud'hommes de Laval le 22 octobre 2007.

Par jugement du 24 juillet 2008, le conseil de prud'hommes a :

- désigné deux conseillers rapporteurs, avec pour mission générale de mettre l'affaire en l'état et avec pour mission particulière :

1. Sur les faits du 6 juin 2006 :

* entendre Madame A...;

* entendre Madame X...sur les points suivants :
o explication et justification du rendez-vous annulé du kinésithérapeute,
o badgeage du 6 juin 2006,
o horaire de travail réalisé sur la période du 1er semestre 2006,
o dates et heures des rendez-vous chez le kinésithérapeute pendant cette même période ;
* entendre le responsable des ressources humaines de la SELHA sur les nombreuses fois où Madame X...aurait vaqué librement à ses occupations pendant ses horaires de travail.

2. Sur les horaires de travail :

* l'entreprise devra fournir :
o un récapitulatif des horaires effectués par Madame X...,
o son contrat de travail initial et ses éventuels avenants,
o des explications sur l'absence de badgeage pendant la période de janvier à décembre 2003,
o des explications sur les pratiques horaires au sein de la SELHA,
o la liste des personnes ayant un niveau de responsabilités identique à celui de Madame X...,
o la communication du badgeage de ces personnes ;

- dit qu'il sera procédé à l'audition, si nécessaire, des salariés de l'équipe de Madame X..., des responsables d'équipe,

- dit que les conseillers rapporteurs effectueront cette mission dans les locaux de la SELHA le 2 septembre 2008 à 15 heures, en présence des parties et de leur conseil, le présent valant convocation,

- dit que les conseillers rapporteurs devront déposer leur rapport au greffe du conseil de prud'hommes avant le 5 septembre 2008,

- dit que l'affaire sera rappelée à l'audience du conseil de prud'hommes-section industrie-le 2 octobre 2008 à 14 heures, le présent valant convocation,

- réservé les dépens.

Les conseillers rapporteurs se sont déplacés à la SELHA, ont procédé aux investigations et en ont dressé rapport, tout cela aux dates dites.

Par jugement du 20 novembre 2008, le conseil de prud'hommes a :

- requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- condamné la SELHA à payer à Mme Françoise X...de ce chef :
. 8 295, 66 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
. 829, 57 euros de congés payés afférents,
. 3 496, 74 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,
. 2 528, 54 euros de rappel de salaire pour la période de mise à pied,
. 252, 85 euros de congés payés afférents,

- accueilli la demande de Mme Françoise X...de rappel d'heures supplémentaires,

- condamné la SELHA à payer à Mme Françoise X...à ce titre :
. 11 979, 80 euros de rappel de salaire de novembre 2003 à décembre 2003,
. 25 641, 96 euros de rappel de salaire de 2004 à 2006,
. 2 564, 19 euros de congés payés afférents,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit sur les créances à caractère salarial, dans la limite de neuf mois de salaire, calculés sur la moyenne des trois derniers mois, soit 2 892, 49 euros (brut),

- débouté Mme Françoise X...de sa demande de dommages et intérêts de 50 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 2 000 euros pour licenciement abusif,

- rejeté la demande reconventionnelle de la SELHA en dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée, de même que sa demande sur la base de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SELHA à payer à Mme Françoise X...1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SELHA aux entiers dépens.

****

La SELHA a formé régulièrement appel de ce jugement le 17 décembre 2008.

L'affaire a été l'objet d'une ordonnance de radiation le 24 novembre 2009, avant d'être rétablie le 21 décembre 2009, à la demande de la SELHA.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions du 21 décembre 2009, reprises à l'audience, la SELHA sollicite l'infirmation du jugement déféré et que, Mme Françoise X...soit condamnée à lui verser 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée ainsi que 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, de même qu'aux entiers dépens, y compris ceux éventuels d'exécution.

Elle réitère que le licenciement de Mme Françoise X...pour faute grave était tout à fait justifié, pour diverses raisons qu'elle énumère.

Quant aux heures supplémentaires réclamées, elle déclare que :

- déjà Mme Françoise X...n'étaye pas sa demande,
. elle ne fournit pas même un quelconque relevé manuscrit des dites heures,
. les attestations qu'elle verse ne donnent aucune indication sur les horaires effectivement réalisés,

. les feuilles de présence établies à partir du moment où a été instauré un système de badgeage pour les salariés ne reflètent pas ses heures de travail effectif, mais tout au plus ses heures de présence dans l'entreprise, puisqu'elle ne respectait pas le système, ce qui est, d'ailleurs, à l'origine de son licenciement,
- en outre, Mme Françoise X..., soumise à l'horaire collectif de travail, ne pouvait effectuer des heures supplémentaires qu'à la demande expresse de son employeur, ce dont elle ne justifie pas,
- de toute façon, son poste ne nécessitait pas l'accomplissement régulier d'heures supplémentaires comme le démontre la comparaison avec les salariés occupant le même type de fonctions et, quand des heures supplémentaires se sont avérées nécessaires, elle en a été rémunérée,
- au surplus, Mme Françoise X...était sous le régime d'une convention de forfait,
- d'ailleurs, Mme Françoise X...n'a jamais formulé la moindre réclamation de ce chef au cours de l'exécution de son contrat de travail.

Elle termine sur le caractère manifestement abusif de la procédure menée, ne serait-ce que par le temps qu'a mis Mme Françoise X...a intenté son action.

****

Par conclusions du 20 octobre 2010, reprises à l'audience, Mme Françoise X...sollicite la confirmation du jugement déféré pour sa plus grande part, sauf à ce qu'elle :

- forme appel incident quant au licenciement advenu et que, celui-ci soit jugé sans cause réelle et sérieuse, la SELHA étant condamnée à lui verser, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, une indemnité de 52 064, 82 euros,

- demande que la décision soit complétée, en ce que les heures supplémentaires reconnues sur la première période couvrent les mois de novembre 2002 à décembre 2003 et que la SELHA soit condamnée à lui verser la somme de 1 197, 98 euros de congés payés afférents.

Elle sollicite, en outre, que la SELHA soit condamnée à lui verser 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, de même qu'aux entiers dépens, y compris ceux éventuels d'exécution.

Elle affirme que :
- elle n'a jamais reconnu les faits qui lui sont prêtés, comme il est pourtant écrit dans la lettre de licenciement,
- finalement, l'employeur ne s'appuie, afin de démontrer la véracité des faits ainsi reprochés, que sur une attestation qui interroge, son auteur, qui était en contrat de travail à durée déterminée ayant, à la suite, obtenu un contrat de travail à durée indéterminée dans l'entreprise,
- le témoignage recueilli lors des investigations auxquelles procédaient les conseillers rapporteurs n'a pas plus de valeur, d'autant qu'il a été suscité par la Selha,
- la véritable cause de son licenciement est l'épuration à laquelle se livrait la Selha des salariés percevant les rémunérations les plus importantes, l'affaire ayant été rachetée.

Elle déclare quant aux heures supplémentaires que :
- celles-ci sont acquises de par les témoignages qu'elle produit, qui sont corroborés par les relevés de badgeage que l'entreprise a fini par fournir,

- les salariés occupant des fonctions identiques à la sienne avaient, eux aussi, des horaires dépassant largement l'horaire collectif,
- elle ne faisait, en accomplissant ces heures, que suivre les consignes données par son employeur.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

Le juge, devant lequel un licenciement est contesté, doit, s'il est requis en ce sens par le salarié, avant même d'apprécier le caractère réel et sérieux des griefs énoncés dans le courrier qui notifie la mesure, rechercher au-delà de ces motifs, la véritable cause du licenciement prononcé, et ce en application de l'article L. 1235-1 du code du travail.

Afin d'asseoir le fait que la cause de son licenciement serait toute autre que celle avancée par la SELHA d'une faute grave, Mme Françoise X...verse un jugement du conseil de prud'hommes de Laval en date du 23 mai 2008.

Cette décision concerne bien un autre salarié de la SELHA, également licencié pour faute grave, dans un temps voisin puisque le 1er août 2006, et le licenciement est finalement jugé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La motivation adoptée par le conseil de prud'hommes ne permet pas pour cela d'évoquer " un système " mis en place par la SELHA.

En effet, les magistrats ont simplement indiqué que les fautes, dont la SELHA accusait son salarié, ne pouvaient être reprochées à ce dernier puisque n'entrant pas dans son champ de compétence du fait de la classification qui était la sienne. Et, les mêmes juges n'ont pas suivi le salarié dans sa demande de dommages et intérêts pour " comportement particulièrement fautif de son employeur ", indiquant que cette demande n'était pas développée et qu'aucun élément précis n'était apporté à l'appui.

****

L'on en passera, donc, à l'appréciation du caractère réel et sérieux des motifs contenus dans la lettre de licenciement, conformément à l'article L. 1235-1 précité.

La dite missive fixant les limites du litige, elle sera reprise en son intégralité :

" Suite à l'entretien préalable qui s'est déroulé le..., au cours duquel vous n'étiez pas assistée, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave, et ce pour les raisons suivantes :
A de nombreuses reprises, dont le mardi 6 juin 2006, vous avez quitté l'entreprise pendant vos horaires de travail afin de vaquer librement à vos occupations personnelles sans en avoir reçu au préalable d'autorisation expresse, et sans qu'aucun mouvement de badge n'ait été enregistré par notre système d'enregistrement automatique permettant la gestion des temps de présence sur le site.
Vous avez reconnu que vos déplacements étaient dictés par votre intérêt personnel, en avouant vous rendre régulièrement chez votre kinésithérapeute rue Victor Fourcault à Renazé.

Après vos séances de kinésithérapeute d'une durée moyenne de trois quarts d'heure, vous reconnaissez revenir sur le site de l'entreprise comme si de rien n'était, puis lorsque votre concubin Monsieur Frédéric B...décide de partir, et à fortiori, vous même, vous badgez consciencieusement.
En outre, votre présence dans la société ne correspond pas à votre horaire de travail collectif. Nous ne vous avons jamais demandé de rester sur le site après vos horaires de travail.
Vous avez reconnu badger à des heures tardives correspondant, non pas à vos horaires de travail, mais à des heures de fin de poste de votre concubin Monsieur Frédéric B..., après l'avoir attendu dans son bureau personnel, pour des raisons de co-voiturage.
Vous comprenez bien que, compte tenu, du caractère inacceptable de votre comportement, nous ne pouvons supporter plus longtemps de tels agissements, d'autant plus que votre position dans la hiérarchie, en qualité de Chef d'équipe, implique que vous donniez l'exemple.
Vous n'êtes pas notamment sans savoir qu'il est formellement interdit de vaquer librement à des occupations personnelles à l'extérieur de l'entreprise sans autorisation et sans badger, et qu'afin que les heures de travail effectuées par chaque salarié soient décomptées il est impératif de badger au début et à la fin de chaque période de travail.
Ces faits qui vous sont reprochés constituent une violation des obligations du contrat de travail d'une importance telle qu'ils rendent impossible votre maintien dans l'entreprise... ".

****

Il sera fait, tout d'abord, avant d'en venir aux motifs en eux-mêmes, un rappel des règles existant dans l'entreprise.

Il existait au sein de la SELHA un règlement intérieur en date du 24 juin 1983 qui stipulait, entre autres, que :

"... aucun salarié ne peut, pendant l'horaire de travail, ni quitter son poste de travail sans motif valable, ni quitter l'entreprise sans autorisation...
... toute absence ayant une autre cause (que maladie ou accident) doit, quelle qu'en soit la durée, faire l'objet d'une demande auprès de la direction au plus tard la veille et doit être justifiée. Si pour un cas de force majeure une telle demande n'a pu être présentée, l'absence doit être justifiée dans les 48 heures...
Chaque salarié, exception faite de la maîtrise et du personnel de bureau, est tenu de pointer sur un carton mis à sa disposition trois fois par jour, à l'embauche du matin, de l'après-midi et à la sortie du soir.
Chaque salarié est tenu de, exception faite de la maîtrise et du personnel de bureau, de remplir obligatoirement et quotidiennement une fiche de travail et de la remettre sur la table de pointage avant son départ... ".

Au mois de juillet 1998, la société a mis en place un système informatique, dit de badgeage.

Les salariés devaient, par ailleurs, avant toute absence, remplir une " fiche de situation " et la transmettre au service des ressources humaines. L'un des motifs mentionnés, en dehors de l'absence strictement comprise, était l'" erreur de pointage ".

Par une note de service du 17 mai 2005, intitulée " OUBLI DE POINTAGE ", la SELHA a rappelé à ses salariés que :

" L'inobservation des horaires de travail par le salarié peut constituer un acte d'indiscipline et justifier une sanction dans des conditions prévues dans le règlement intérieur.
Afin que les heures de travail effectuées par chaque salarié soient décomptées, il est impératif de badger au début et à la fin de chaque période de travail.
En ce qui concerne des oublis de pointage exceptionnels, le supérieur hiérarchique validera les heures d'arrivée et de départ.
Toutefois, les oublis répétés ou volontaires peuvent constituer un acte d'indiscipline et justifier une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement ".

Le 27 octobre 2005, la SELHA a édité une nouvelle note de service en direction de ses salariés portant sur le " RESPECT DE L'HORAIRE COLLECTIF ", qui précise :

" Nous vous rappelons que la journée de travail s'effectue dans le cadre d'un horaire collectif, fixé par l'employeur, indiquant les heures auxquelles commence et finit le travail, ainsi que les temps de pause.
L'horaire collectif s'applique à l'ensemble des salariés de l'établissement, à l'exception des membres du Comité de Direction composé des Responsables de Service.
L'heure de prise de travail correspond à l'heure où le personnel doit se trouver à son poste.
À l'avenir, tout retard répété et non justifié étant préjudiciable au bon fonctionnement du Service dans lequel vous êtes affecté, et constituant une inobservation des règles de discipline, fera l'objet d'une procédure disciplinaire ".

****
.
Mme Françoise X...a été embauchée le 13 juin 2000 et a été licenciée le 3 juillet 2006.
Elle était donc au fait des règles qui viennent d'être évoquées.

****

La SELHA reproche à Mme Françoise X...deux choses :

- d'avoir pris l'habitude de quitter l'entreprise durant ses heures de travail, pour des raisons strictement personnelles, sans avoir sollicité préalablement d'autorisation d'absence, et en n'enregistrant pas plus ses sorties et ses retours à ces occasions,

- de partir de l'entreprise bien après son heure de fin de travail, enregistrant cette sortie, alors que ce départ tardif n'est lié à aucune demande de son employeur, mais obéit à des considérations toutes personnelles.

On les examinera tour à tour, étant dit que la faute grave est celle qui rend, effectivement, impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et, qu'il incombe à l'employeur de l'établir.

A) Quant aux absences non autorisées durant le temps de travail et non décomptées

Il n'est pas nécessaire d'indiquer la date des griefs dans la lettre de licenciement. Il suffit que les faits dénoncés soient matériellement vérifiables.

La SELHA verse quatre attestations qui font allusion aux absences de Mme Françoise X...:

* de Mme Maud A..., au nombre de deux, mais identiques dans leur contenu, en date successivement des 20 février et 22 mai 2008,

- " Salariée de la société SELHA depuis le 19 août 2005, j'exerce le poste de Technicien Ressources Humaines.
À plusieurs reprises, en quittant mon lieu de travail aux alentours de 17h30, j'ai pu constater que la voiture de Madame X...était stationnée rue Victor Fourcault à Renazé...
Le 6 juin 2006, j'ai quitté la société SELHA à 17h30. C'est en empruntant la route de mon domicile que j'ai vu Madame Françoise X...au volant de sa voiture revenant du centre ville de Renazé vers la société SELHA.
Je déclare avoir téléphoné de suite à Mademoiselle Cécile C..., Responsable Administrative et Ressources Humaines de la société SELHA pour l'informer de ce fait, qui m'a confirmé qu'aucun mouvement de badgeage n'avait été enregistré ".

- " La société SELHA m'a informé que la partie adverse considérait dans ses conclusions récapitulatives que mon témoignage du 20 février 2008 était un faux.
Je maintiens ma déclaration du 20 février 2008 et confirme que j'ai bien été témoin de faits clairs et précis qui m'ont fortement interpellé.
En effet, je me souviens, le 6 juin 2006, en quittant mon poste de travail à 17h30, avoir vu Madame Françoise X...au volant de sa voiture revenant du centre ville de Renazé vers la société SELHA et avoir téléphoné de suite à Mademoiselle Cécile C..., Responsable Administrative et Ressources Humaines de la société SELHA pour l'informer de ce fait, qui m'a confirmé qu'aucun mouvement de badgeage n'avait été enregistré.
J'ai été informée de la procédure de licenciement et c'est en toute connaissance de cause que j'ai rédigé cette attestation ",

* de Mme Béatrice E...,

"... être entrée dans la société SELHA en 1988 et avoir intégré la cellule prototype en 2003 et ayant Mme Françoise X...comme responsable hiérarchique de puis 2004.
...
Je certifie avoir entendu Mr Frédéric B...dire à Mme Françoise X...qu'elle devait aller au centre des impôts sur son temps de travail.
Mme Françoise X..., dans nos conversations, nous parlait de ses séances de kiné auxquelles elle se rendait le soir après 17h ",

*de Mme Valérie F...,
"... employée à la société SELHA depuis 1996 et travaillant à la cellule prototype depuis fin 2003
avoir travaillé avec Madame Françoise X...qui était ma responsable hiérarchique... de septembre 2004 à juin 2006...
Je certifie avoir vu Madame Françoise X..., à la demande de Monsieur Frédéric B..., aller sur le temps de travail au Centre des Impôts de Château-Gontier... ",

Devant les conseillers rapporteurs, le 2 septembre 2008, Mme Maud A...a maintenu ses dires pour ce qui concerne le 6 juin 2006, déclarant pour les autres fois que le véhicule de Mme Françoise X...se trouvait à Renazé entre 17 heures 30 et 18 heures.

Les conseillers rapporteurs ont également entendu Mme Pierette G..., chef d'équipe, travaillant dans la même unité de production que Mme Françoise X.... Les propos de cette dernière sont retranscrits comme suit :

" Elle (Mme Pierette G...) dit avoir entendu Madame X...dire qu'elle partait.
Madame G...déclare ne pas savoir si Madame X...badgeait ou pas.
Elle dit également avoir vu Madame X...revenir toujours sans savoir s'il y avait badgeage ou pas.
Madame G...ne peut fixer vraiment l'heure précise à laquelle Madame X...a quitté l'entreprise ; il est possible que ces faits se soient déroulés après 17 heures 05, voire 16 heures 05 le vendredi, donc en dehors des horaires de travail de l'entreprise.
La périodicité est estimée à la semaine, voire la quinzaine ".

Or, l'horaire de travail de Mme Françoise X...est le suivant (cf son contrat de travail) :
- les lundi, mardi, mercredi, jeudi et vendredi de 8 heures à 12 heures et de 13 heures 05 à 17 heures 05,
- les vendredi, de 8 heures à 12 heures et de 13 heures 05 à 16 heures 05.

En conséquence, qu'elle soit vue sur la commune de Renazé, qui est aussi le siège social de la SELHA, après 17 heures 30 ou 18 heures, qu'elle se rende chez le kinésithérapeute après 17 heures ou 16 heures, ne représentent en rien des absences non autorisées, puisqu'en dehors de son horaire de travail.

Et comme aucune date ne peut être précisée par rapport à ces épisodes, il est impossible de dire si Mme Françoise X...a ou non badgé lors de sa sortie de l'entreprise.

Par ailleurs, de l'organigramme fourni par la SELHA, M. Frédéric B...est le responsable hiérarchique direct de Mme Françoise X...sur " la cellule prototype ". Il est, quant à lui, responsable de production au sein de l'entreprise.

Mme Françoise X...n'est donc pas en situation d'absence non autorisée, si son supérieur l'autorise justement à accomplir une démarche personnelle sur son temps de travail.

Et là encore dans l'ignorance de la date de ce fait, aucune recherche ne peut être entreprise quant au badgeage par Mme Françoise X...à son départ et à son retour.
Ne reste, dès lors, que ce 6 juin 2006 pour lequel, même si Mme Françoise X...insinue que le témoignage est un faux, elle ne le démontre pas non plus.

Mme Maud A...était employée au service ressources humaines de la SELHA, service qui avait d'ores et déjà son attention portée sur les pointages de Mme Françoise X.... Cela ressort des courriels de la responsable du dit service à M. Frédéric B...sur ce point, courriels tous antérieurs au 6 juin (15 et 22 mai 2006). Que Mme Maud A...signale la situation à sa responsable peut, dans ce contexte, se comprendre

Le 6 juin 2006 est un mardi, jour auquel Mme Françoise X...finissait son travail à 17 heures 05. Elle ne peut, du coup, et même si l'on est sur la même commune, être vue revenant du centre ville à l'entreprise à 17 heures 30, sauf

effectivement à avoir quitté la dite entreprise avant 17 heures 05, cette heure étant, au surplus, celle où elle quitte son poste et non la société.

Cette absence sur son temps de travail n'a pas été autorisée et, elle n'a pas badgé avant 19 heures, comme l'a vérifié Mme Cécile C..., responsable du service ressources humaines.

Ce 6 juin 2006, la faute de Mme Françoise X...est, de fait, acquise.

B) Quant au badgeage ne répondant à aucun travail effectif

La SELHA verse dix attestations qui illustre ce grief :

* de M. Jean-François H...,

" Je suis responsable qualité de la société SELHA depuis mille neuf cent quatre vingt treize et exerçais cette fonction au moment des faits.
Ce que j'ai pu constater sur l'attitude de Madame Françoise X...
. Présence répétée et prolongée aux points distributeurs à boissons après les heures réglementaires de travail
. Présence en fin d'après-midi dans les ateliers avec un café ou une boisson chaude devant les opérateurs eux-mêmes en train de travailler
. Présence auprès de ces mêmes opérateurs pour des discussions et des perturbations de leur assiduité, sujets vacances et autres thèmes n'ayant aucun lien avec le travail
En conclusion présence de Madame X...dans les ateliers après le temps de travail réglementaire en fin d'après-midi et certainement pas dans le cadre d'une mission d'encadrement mais dans le but d'attendre Monsieur Frédéric B...puisqu'ils venaient au travail avec le même véhicule ",

* de Mme Dominique I...,

"... employée au sein de la société SELHA en qualité de câbleuse depuis 1982, et en équipe depuis 2004.
J'avais comme responsable hiérarchique Mme J...Laure (chef d'équipe) jusqu'en février 2007.
Cette dernière était en journée, elle partait aux environs de 17H.
Elle nous disait de faire appel à Mme K...Ida et non à Mme X...Françoise en cas de problème après son départ ",

* de Mme Chantal L...,

"... employée au sein de la société SELHA en qualité de contrôleuse depuis 1982, et avoir été sous la responsabilité hiérarchique de Mme Laure J...jusqu'en février 2007, celle-ci était chef d'équipe.
Cette dernière exerçait une activité en journée normale et qu'à son départ vers 17Heures en cas de besoin ou de problèmes, j'avais recours auprès de Mme Ida K...en équipe sur l'unité 1 consigne donnée par Laure, étant moi-même en équipe depuis décembre 2005.
Je n'avais pas recours auprès de Mme Françoise M...",

* de Mme Josette N...,

"... employée au sein de la société SELHA en qualité de câbleuse depuis décembre 1988 et avoir été par la suite sous la responsabilité hiérarchique de Mme J...Laure, chef d'équipe jusqu'en février 2007. Cette dernière exerçait une activité en journée normale. Entre-temps j'ai commencé le travail d'équipe

en septembre 2004 en alternance matin/ après-midi. En dehors des horaires de Mme J..., en cas de réels besoins j'avais recours auprès de Mme Ida K...également en équipe sur l'unité 1 et non à Mme Françoise M...",

* de Mme Josiane O...,

"... employée au sein de la société SELHA en qualité de contrôleuse depuis l'année 1982, et avoir été sous la responsabilité de la hiérarchique de Mme J...Laure chef d'équipe jusqu'en février 2007.
À partir d'octobre 2005, j'ai effectué des horaires d'équipe, 1 semaine du matin, 1 semaine de l'après-midi.
Mme J...exerçait un emploi en journée normale et lors de son départ à 17H, en cas de besoin ou de problème, j'avais recours à Mme K...Ida qui était en équipe sur l'unité 1 suite au consigne donnée par Laure J....
Donc je n'avais pas recours à Mme Françoise M...",

* de Mme Ida K...au nombre de deux, en date successivement des 27 février et 23 mai 2008,

- " J'ai intégré la société SELHA en février 1992, comme opératrice de ligne, et depuis 1995 je suis " animatrice de zone autonome de production " anciennement libellé " chef d'équipe " et sous la responsabilité hiérarchique de Monsieur Frédéric B...de fin 2004 à fin 2006.
J'exerce mon activité depuis 1992 en équipe 2X8.
Mes principales activités sont :
Piloter la production, management des équipes de l'atelier " C. M. S. " et, étant en 2X8, j'intervenais auprès des équipes en 2X8 sur les autres ateliers, à leur demande, afin de résoudre les aléas qu'elles pouvaient rencontrer.
J'ai constaté sur la ligne THALES, après le départ de l'animatrice de zone autonome de production " Mme Laure J..." que Mme Françoise X...montrait et commentait des photos personnelles à des opératrices de ligne du soir sur leur temps de travail.
À plusieurs reprises, j'ai constaté que Mme Françoise X...était assise au bureau de Monsieur Frédéric B..., le soir, seule, en attendant son retour ",

- "... atteste après le départ des chefs d'équipe en journée, avoir en charge la responsabilité du personnel d'équipe, étant moi-même en horaires d'équipe et exerçant la fonction de chef d'équipe.
J'atteste également qu'à diverses reprises le personnel a fait appel à mes services ",

- de Mme Bernadette P...,

" Je suis entré dans la société SELHA le 5 octobre 1982 et j'exerce la fonction d'" Animatrice de ZAP " anciennement libellé " chef d'équipe " depuis 1998.
Mes principales activités sont : le pilotage de mon équipe, l'organisation, la communication, le management...
J'étais sous la responsabilité de Mr Frédéric B...entre juin 2000 et décembre 2006.
À la demande de la direction en septembre 2004, j'ai repris le pilotage de la ligne Artus et l'encadrement des équipes liées à ce client. Cette demande est intervenue suite aux problèmes rencontrés par Mme M...à manager son équipe.
J'ai constaté que Mr Frédéric B...et Mme M...Françoise venaient avec une seule voiture, à de rares exceptions près ",

- de Mme Christiane R...,

" J'ai intégré la Ste SELHA le 01. 02. 1982 en qualité de Compta. Personnel, puis Secrétariat Direction, puis Service du Personnel.
À son embauche, en 06. 2000, Mme X...a en charge le client Thales. Son manque de rigueur, ses difficultés à manager son équipe font que son Responsable Hiérarchique Laurent S...décide de s'en séparer et d'embaucher Mme Laure J.... Mme X...est dirigée vers la cellule réparation (? ? ?). Son " reclassement " aisé est dû à des liens de concubinage avec Monsieur Frédéric B...lui-même responsable d'un pôle atelier. En fin 2001, après le départ de Laurent S...une équipe est remise à Mme X...à manager par le nouveau Directeur Production proche du couple REBILLAT-DAIN et aussi pour calmer les autres chefs d'équipe qui ne comprenaient pas son salaire élevé par rapport à ses tâches effectuées. À diverses reprises le Directeur Production m'a fait part de la difficulté à mener une équipe par Françoise X.... Aussi devant ces faits il est évident qu'aucun Responsable ne lui a demandé d'encadrer les équipes du soir. En 2004 à la demande impérative d'un client, nous sommes encore amenés à remplacer Mme X.... Monsieur B...nouveau Responsable Production et concubin de Mme X...décide de la mettre au service protos (2 personnes). Dès cette date, se sentant protégée par Monsieur B..., elle commence à errer dans les couloirs, boire son café même devant les autres salariés, aller discuter avec le personnel et cela surtout après le départ des personnes en journée. Je l'ai vue à discuter tranquillement sur unité 1 en buvant son " coca ". À cette époque je partais aussi tard et j'affirme qu'en aucun cas elle n'encadrait le personnel mais attendait Monsieur B..., ne venant qu'à 1 seul véhicule à de rares exceptions avec sa voiture personnelle. De 2000 à 2004, nous prenions avec le PDG très fréquemment des " pots " et Madame X...de par son lien avec Monsieur B...participait et ceux-ci se prolongeaient. Il nous arrivait de discuter assez tard le soir pour voir les problèmes liés au contrat, au personnel, et Madame X...était dans le bureau de son mari à l'attendre. J'affirme de par mes différents postes qu'il n'a jamais été demandé à cette employée de rester tard le soir ni d'encadrer le personnel ",

* de Mme Aline T...,

"... atteste travailler dans la société SELHA depuis juin 1981.
Mon rôle dans la société est d'être animatrice de zone autonome de production (anciennement libellé chef d'équipe) et déclare avoir été sous la responsabilité hiérarchique de Mr B...entre juillet 2004 et décembre 2006.
Mes principales activités sont : planifier et organiser la charge de travail, d'animer des réunions et des entretiens individuels avec mon équipe qui comporte quarante deux opératrices.
Mr B...(responsable production) a été interpellé à plusieurs reprises par Mme J...(chef d'équipe) de la faible activité de Mme X..., tant en charge qu'en encadrement de personnel (2 à 4 personnes), par rapport aux autres chefs d'équipe qui manageaient entre trente et soixante personnes ".

Les conseillers rapporteurs ont également entendu Mme Christiane R..., le 2 septembre 2008, en tant que responsable des ressources humaines à la société SELHA avant 2005, où le poste a été attribué à Mme Cécile C....

Mme Christiane R...a indiqué :

"- n'avoir jamais demandé à personne de travailler après 19 heures,
- que les heures effectuées venaient en compensation des heures d'absence,

- que Madame X...attendait Monsieur B...car ils venaient avec une voiture ",

ajoutant que

-elle " ne vo (ya) it pas ce que Madame X...pouvait réaliser comme travail dans le bureau de Monsieur B.... Pour elle, il s'agissait de discussion.
- L'ancienne direction avait parlé du comportement de Madame X...mais il n'y avait pas eu de suite car il était difficile de faire des remarques, Monsieur B...étant responsable ".

Mme Cécile C...a dit, elle, aux conseillers rapporteurs que :

" sur l'activité prototypes, reprise par Madame X...en 2005, il y avait une grosse différence d'heures effectuées avec son prédécesseur. Les badgeages des personnes qui ont occupé le poste de Madame X..., avant ou après celle-ci, sont plus proches de la réalité des horaires de l'entreprise ".

Mme Françoise X...produit, de son côté, cinq attestations tendant à contrecarrer celles de la société SELHA :

* de Mme Laure J..., au nombre de trois, sous forme de lettres, en date successivement des 30 novembre 2007, 1er mai 2008 et 17 septembre 2008,

- "... chef d'équipe dans l'entreprise SELHA de janvier 2001 à mars 2007...
Je déclare avoir été témoin de la présence de Mme X...Françoise pendant cette période à des heures dépassant les huit heures de travail quotidien.
Sachant qu'après ma fin de journée à peu près vers 17h30 Françoise X...prenait le relais car les opératrices de production avaient des horaires d'équipe, c'est à dire 21h00 pour le soir.
Françoise X...s'occupait de l'encadrement des effectifs, environ une cinquantaine de personnes, suivi de la production, respect des règles de sécurité, en clair la mission d'un responsable d'équipe.
Par ailleurs, il était fréquent que Françoise assure les essais techniques pour les entretiens d'embauche à la demande du service du personnel.
Il faut savoir que sans Françoise les opérateurs auraient été seules dans l'entreprise sans aucun chef d'équipe car nous étions toutes en horaires de journée en ce qui concerne les ateliers de finition ",

- " En réponse à la lettre de Mme R...qui n'a jamais été présente lors des entretiens, je tiens à apporter quelques précisions sur mon arrivée et son but.
La société SELHA a procédé à mon recrutement en 2000... J'ai intégré la société en 2001 en qualité de responsable atelier sous la responsabilité directe de Mr S...qui occupait le poste de responsable de fabrication.
...
À court terme, je devais remplacer Mme X...qui elle-même avait été mutée à la tête du service prototype qui devait être la vitrine de la société... Le service prototypes avait comme mission également d'effectuer les tests d'embauche, managés par Mme X...de part ses connaissances techniques.
...
Les chefs d'équipe en poste avaient toutes bénéficié de promotions internes, mais sans les formations nécessaires pour ce type de postes.
Mme X...n'était pas concernée, car comme moi elle venait d'une grande entreprise extérieure et le directeur général ne le souhaitait pas.

Pour ce qui est d'avoir soit disant entretenu Mr B...sur l'activité de Mme X...aux dires de Mme T...ceci est totalement faux, cela n'était pas de mon rôle, mais de celui de son supérieur hiérarchique, si toutefois il y avait un problème ",

- "...
Cette lettre fait suite à la requête de Mme X...et n'ayant pas été convoquée lors de son entretien à la société SELHA, je me permets d'apporter quelques précisions par rapport aux lettres du personnel sous ma responsabilité jusqu'à mon départ de l'entreprise.
Lors de la prise de décision sur la responsabilité du management de mes équipes, il a été convenu avec ma hiérarchie que Mme X...était la plus à même de répondre aux besoins du personnel tant sur un aspect technique ou hiérarchique, de part ses connaissances et ses fonctions de chef d'équipe. Mme V...s'occupait de distribuer le travail que j'avais planifié ainsi que toute la manutention.
Il était convenu également qu'après le départ de Mme X..., Mme K...prenne le relais uniquement en cas de problème de sécurité ou d'environnement pour les opérations.
Il n'a jamais été convenu que Mme K...qui avait une charge de travail bien suffisante et aucune compétence technique sur les produits de finition puisse gérer l'équipe après ma journée de travail.
De plus, il faut savoir qu'une semaine sur deux ses horaires d'équipe étaient alternés, une semaine du matin, une semaine d'après-midi.
Sans compter que géographiquement elle était éloignée de plus de 600 m, séparée par plusieurs murs et couloirs munis de plusieurs portes, alors que Mme X...faisait face à mes équipes.
C'est avec ses arguments et éléments lorsque la décision fut prise par la hiérarchie.
Que se passait-il lorsque Mme K...travaillait du matin, Mme X...regardait sans intervenir ?
À moins d'avoir été frappés d'amnésie collective ou d'avoir reçu des pressions des ressources humaines de la société SELHA, permettez moi de ne pas comprendre les témoignages de mes ex collaboratrices et de suspecter des pressions.
Pour mémoire, la direction avait su toutes nous utiliser " les chefs d'équipe " afin d'effectuer des témoignages pour évincer Mme et Mr... les anciens responsables de production et industriels, pour ma part j'ai refusé de le faire contre Mme ",

* de Mme Michèle W..., (celle-ci précise sur son attestation être retraitée et, il est indiqué par Mme Françoise X...qu'elle était " formatrice dans la société depuis plus de 20 ans "),

" Je reconnais avoir vu Mme X...Françoise travailler le soir pour finir du travail en cours afin de pouvoir assurer la livraison auprès du client ",

* de Mme Annie XX...,

"... occupant le poste d'assistante de production en équipe dans la société SELHA du 26 juillet 2004 au 31 août 2007 déclare avoir eu Mme X...Françoise comme responsable après les départs des chefs d'équipe afin d'assurer l'encadrement du personnel de finition des équipes du soir ".

À l'issue de la lecture des pièces de la SELHA ainsi que des investigations menées par le conseil de prud'hommes, il était clair que Mme Françoise X...pouvait rester dans l'entreprise, une fois sa journée de travail terminée, sans production aucune de sa part, dans la seule attente de M. Frédéric B..., son compagnon avec lequel elle repartait.

Les derniers éléments apportés par Mme Françoise X...doivent-ils introduire un doute relativement à cette position première, doute qui, conformément à l'article L. 1235-1 du code du travail, " profite au salarié ".

La question doit certes être posée, mais la réponse donnée sera négative.

M. Frédéric B..., qui se présente, effectivement, comme le concubin de Mme Françoise X..., a fourni une attestation à cette dernière, attestation qui confirme les dires de Mmes Laure J..., Michèle W...et Annie XX...:

"... responsable prototypes de 2002 à 2004 et responsable de fabrication de 2004 à 2006, ayant quitté la société SELHA début décembre 2006 déclare que Mme X...F. restait le soir après les horaires théoriques afin de faire le travail en vue des livraisons des CDE aux clients.
À la mise en place des 2X8 sur les lignes de finition et en l'absence de chef d'équipe, Mme X...assurait le management ainsi que l'aide technique des opératrices du soir et c'est pour cela que Mme X...restait jusqu'à 19 h voire 21 h. Mme X...badgeait lorsqu'elle avait terminé son travail du soir et au départ des opératrices d'équipe du soir.
Mme X...ne partait pas systématiquement avec moi et possédait sa voiture personnelle ".

Pourtant, si les propos que M. Frédéric B...tient correspondaient à la vérité, il est parfaitement incompréhensible que :

- il n'ait pas élevé de protestations lorsqu'il a reçu de Mme Cécile C..., responsable ressources humaines à la SELHA, les courriers électroniques ci-après :

. " Date : 15/ 05/ 06 14h53
Objet : pointage françoise rebillat
frédéric,
françoise pointe à des heures qui correspondent à ta fin de poste et non à sa fin de poste. Merci de rectifier immédiatement et de lui demander de badger quand elle a terminé son travail ",

. " Date : 22/ 05/ 06 09h34
Objet : Faire suivre : pointage françoise rebillat
toujours pas appliqué à ce jour.
Merci "

- il n'ait pas plus réagi, par courrier au moins ou même en saisissant le conseil de prud'hommes, afin de solliciter l'annulation de l'avertissement qui lui a été infligé par la SELHA le 3 juillet 2006 et dont la teneur est celle-ci :

" Nous avons le regret de constater à votre égard les faits suivants :
Vous ne faites pas respecter par vos subordonnés, et en particulier vos chefs d'équipe, les règles en matière de discipline et d'horaires.
Ces règles, dont vous devez avoir une parfaite connaissance, sont reprises en partie dans une note de service... affichée en date du 17 mai 2005... (cf supra).
Par courriel du 15 mai 2006, nous vous avions averti qu'une de vos subordonnées, Madame Françoise X..., votre compagne, pointait à des heures qui correspondaient à la fin de votre poste et non à la fin de son poste. Nous vous avions demandé de rectifier immédiatement cette situation et de lui demander de badger quand elle avait terminé son travail.

Par courriel du 22 mai 2006, nous constations que la situation n'était toujours pas régularisée.
Ce jour, nous avons été contraints d'adresser à Madame Françoise X...une lettre de licenciement...
Il n'est pas tolérable que vous ayez laissé perdurer ces agissements.
Votre fonction de Responsable de fabrication, votre rôle de manager et d'encadrement d'équipes implique que vous preniez les mesures nécessaires afin de faire respecter la discipline de l'entreprise, et plus généralement que vous donniez l'exemple.
De tels faits préjudiciables au bon fonctionnement de l'entreprise nous amènent par la présente à vous notifier un avertissement... ",

- il a au contraire, à la suite de cet avertissement, envoyé le 5 juillet 2006 à 18 heures 04 aux chefs d'équipe le courrier électronique suivant :

" Je vous rappelle que vous devez impérativement respecter les heures de début et de fin de travail par rapport à l'horaire collectif et que le badgeage est obligatoire conformément à la note de service... en date du 17 mai 2005.
En accord avec la DRH, je n'autoriserai qu'un pointage 30 mn avant l'heure théorique le matin et 30 mn après l'heure théorique le soir.
Le non-respect de cette discipline pourrait m'amener à prendre des sanctions.
Toutefois, j'autoriserai un dépassement pour raison de service (Clients-Charges...) après une demande préalable, justifiée et signée de ma part sur ENRO99 ".

Dès lors, la faute de Mme Françoise X...est à nouveau acquise, cette dernière ayant bien pointé (ou badgé) à des heures qui reflétaient son temps de présence dans l'entreprise, mais non le travail effectif effectué en contrepartie.

****

La définition qui a été donnée de la faute grave ne sera pas reprise ; il suffit de s'y reporter.

En l'espèce, la SELHA ne caractérise pas l'existence de cette faute grave à l'encontre de Mme Françoise X....

La SELHA était effectivement au fait des comportements fautifs de Mme Françoise X...(cf les développements précédents et particulièrement les mails de la responsable du service des ressources humaines). Ce n'est pas pour cela qu'elle a engagé la procédure de licenciement à l'encontre de sa salariée, n'entamant cette dernière que postérieurement, soit le 9 juin 2006.

La décision des premiers juges sera confirmée sur ce point et quant aux conséquences financières qui en découlaient.

En revanche, le licenciement prononcé repose sur une cause réelle et sérieuse ainsi qu'en a aussi décidé le conseil de prud'hommes et, Mme Françoise X...devra être déboutée de sa demande d'indemnité de ce chef.

Sur les heures supplémentaires

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose :

" En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles... ".

La preuve des heures supplémentaires effectuées par le salarié est de fait partagée ; au salarié d'étayer préalablement sa demande et à l'employeur d'apporter les justifications nécessaires.

C'est quand même effectivement à l'employeur d'établir les documents nécessaires au décompte du temps de travail de son salarié (articles L. 3171-1 et D. 3171-1 du code du travail, D. 3171-8 et D. 3171-9 du même code).

****

En l'espèce, Mme Françoise X...étaye sa demande de rappel d'heures supplémentaires par les feuilles d'heures de présence qu'a versées la SELHA, qu'elle accompagne des attestations précitées de Mmes Laure J..., Michèle W..., Annie XX...et de M. Frédéric B....

Ces feuilles d'heures de présence ne sont, toutefois, pas probantes. Elles ne garantissent pas en effet, ainsi qu'il vient d'être démontré, qu'elles représentent autant d'heures de travail effectif de la part de Mme Françoise X....

Cette notion de travail effectif a été définie à l'article L. 3121-1 du code du travail comme " le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ".

Or, les éléments réunis par la SELHA, de même que les témoignages recueillis au cours de l'enquête conduite par le conseil de prud'hommes, amènent à conclure que, même si Mme Françoise X...se trouvait dans l'enceinte de l'entreprise en dehors de son horaire de travail, elle ne s'y livrait pas forcément à un travail effectif au profit de son employeur.

Le qualificatif " forcément " a été utilisé, car Mme Françoise X...a bien été rémunérée, certains mois, d'heures supplémentaires qu'elle avait accomplies pour le compte de la SELHA. Il suffit de se référer aux bulletins de salaire figurant au dossier, retraçant ses années d'exercice professionnel jusqu'à son licenciement.

Mme Françoise X...était payée sur la base, d'abord de 41 heures hebdomadaires, puis de 37, 5 heures hebdomadaires, lois sur la réduction du temps de travail obligent.

Pouvaient s'y rajouter des heures supplémentaires, majorées à raison de 25 %, voire de 50 % (mars, avril et juillet 2003, juillet, septembre et octobre 2004, octobre heures supplémentaires et rappel d'heures supplémentaires et décembre 2005, mai 2006).

Ceci recoupe les attestations de Mme Françoise X..., au moins dans le principe qu'elles affirmaient d'un temps de travail de cette dernière qui pouvait dépasser son temps de travail normal, n'étant pas possible d'aller plus loin sur la portée des dites attestations, au regard de leurs contradictions avec celles de la société SELHA (cf supra).

Le jugement sera infirmé quant au rappels d'heures supplémentaires et de congés payés afférents accordés, Mme Françoise X...étant de fait déboutée de sa demande de voir compléter la dite décision sur la période considérée comme sur la part de congés payés omise.

Sur la procédure abusive

La SELHA ne justifie pas en quoi la procédure intentée par Mme Françoise X...a dégénéré en abus.

Elle sera, donc, bien déboutée de sa demande reconventionnelle à ce propos.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré en ce que :

- il a requalifié le licenciement pour faute grave de Mme Françoise X...en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- il a condamné la SELHA à verser à Mme Françoise X...:
. 8 295, 66 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
. 829, 57 euros de congés payés afférents,
. 3 496, 74 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,
. 2 528, 54 euros de rappel de salaire pour la période de mise à pied,
. 252, 85 euros de congés payés afférents,
. 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- il a rejeté les demandes de dommages et intérêts de Mme Françoise X...pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et licenciement abusif,

- il a rejeté la demande de la SELHA de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi qu'au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- il a condamné la SELHA aux entiers dépens,

L'INFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau,

REJETTE la demande de Mme Françoise X...de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés afférents,

Y AJOUTANT,

DIT qu'il n'y a pas lieu, du fait de ce rejet de la demande de Mme Françoise X...de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, de compléter la première décision sur la première période d'heures supplémentaires réclamée et sur les congés payés afférents au titre de cette période,

CONDAMNE Mme Françoise X...à verser à la SELHA la somme de 500 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNE Mme Françoise X...aux éventuels dépens de l'instance d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLMarie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/02878
Date de la décision : 05/04/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-04-05;09.02878 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award