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05/04/2011 | FRANCE | N°09/02501

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 05 avril 2011, 09/02501


COUR D'APPEL

D'ANGERS

Chambre Sociale

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N

AD/CJ

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02501.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LAVAL, décision attaquée en date du 06 Octobre 2009, enregistrée sous le no 166

Assurée : Mme Evelyne X...

ARRÊT DU 05 Avril 2011

APPELANTE :

C.P.A.M DE LA MAYENNE

37 Bd Montmorency

53084 LAVAL CEDEX 9

représentée par Madame LE LAY, munie d'un pouvoi

r spécial

INTIMEE :

S.N.C. L N U F

Boulevard Arago

Zone Industrielle des Touches

53810 CHANGE

représentée par Maître Jean-Jacques GODARD, avocat au ...

COUR D'APPEL

D'ANGERS

Chambre Sociale

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N

AD/CJ

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02501.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LAVAL, décision attaquée en date du 06 Octobre 2009, enregistrée sous le no 166

Assurée : Mme Evelyne X...

ARRÊT DU 05 Avril 2011

APPELANTE :

C.P.A.M DE LA MAYENNE

37 Bd Montmorency

53084 LAVAL CEDEX 9

représentée par Madame LE LAY, munie d'un pouvoir spécial

INTIMEE :

S.N.C. L N U F

Boulevard Arago

Zone Industrielle des Touches

53810 CHANGE

représentée par Maître Jean-Jacques GODARD, avocat au barreau de NANTES

EN LA CAUSE

DRASS DES PAYS DE LOIRE

Rue René Viviani

44062 NANTES CEDEX

Absente, avisée, sans observations

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Janvier 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DUFAU, conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Bernard BRETON, président

Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller

Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,

ARRÊT :

prononcé le 05 Avril 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

EXPOSE DU LITIGE

Madame Evelyne X... a été employée par la SNC L.N.U.F.à compter du 1ER février 1977 comme aide conductrice et a déclaré comme maladie professionnelle le 9 mai 2007 à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne, en produisant un certificat médical établi le 26 avril 2007, un syndrome du canal carpien bilatéral.

Le 3 août 2007, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne a informé Madame Evelyne X... et la SNC L.N.U.F. de l'ouverture du deuxième délai d'instruction de trois mois puis par courriers du 30 octobre 2007, la caisse a informé à la fois Madame Evelyne X... et la SNC L.N.U.F de ce qu'elle refusait de prendre en charge au titre de la législation sur les maladies professionnelles la pathologie déclarée par la salariée.

Le 14 décembre 2007, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne a avisé l'employeur de la transmission du dossier de la salariée au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Celui-ci a, le 15 janvier 2008, rendu un avis favorable et la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne a, le 25 février 2008, notifié à la SNC L.N.U.F. une prise en charge des maladies déclarées par Madame Evelyne X....

La SNC L.N.U.F. a saisi d'un recours la commission de recours amiable qui par décision du 1er septembre 2008 a déclaré opposable à l'employeur la prise en charge des maladies professionnelles de Madame Evelyne X... par la caisse d'assurance maladie.

La SNC L.N.U.F. a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Mayenne pour voir annuler la décision de la commission de recours amiable, voir déclarer inopposable à l'employeur la décision de prise en charge du 1ER février 2008, et subsidiairement voir désigner un autre comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, chargé d'émettre un nouvel avis sur le caractère professionnel de la pathologie déclarée.

Par jugement du 6 octobre 2009 le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Mayenne a déclaré inopposable à la SNC L.N.U.F. la décision de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne du 25 février 2008 de prise en charge au titre de la législation professionnelle les maladies déclarées par Madame Evelyne X..., débouté les parties du surplus de leurs demandes et condamné la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne aux dépens.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne a fait appel le 13 novembre 2009 du jugement qui lui avait été notifié le 15 octobre.

OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré et de déclarer opposable à la SNC L.N.U.F. la prise en charge au titre de la législation professionnelle les maladies déclarées par sa salariée.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne soutient que la décision de refus de prise en charge du 30 octobre 2007 n'était pas revêtue de l'autorité de la chose décidée et que la nouvelle décision du 25 février 2008, de prise en charge, devait être dite opposable à la SNC L.N.U.F.

La caisse rappelle qu'elle dispose, en application de l'article R441-10 du code de la sécurité sociale, d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la maladie déclarée pour statuer sur le caractère professionnel de celle-ci et qu'elle peut proroger ce délai de trois mois, en en informant l'employeur, lorsqu'il y a nécessité d'enquête complémentaire ; qu'elle avait par courrier du 3 octobre 2007 informé l'employeur du recours au délai complémentaire d'instruction en indiquant qu'il ne pouvait excéder trois mois puis, les éléments en sa possession ne lui permettant pas de statuer sur l'origine professionnelle de la maladie, et le délai arrivant à son terme, notifié à Madame Evelyne X... un refus de prise en charge et transmis le même jour à l'employeur, pour information, le double de la notification.

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne rappelle que la jurisprudence dit constamment que la décision de refus de prise en charge n'étant, en application de l'article R441-14 du code de la sécurité sociale, envoyée à l'employeur que pour information elle ne peut acquérir un caractère définitif à son égard et que l'employeur ne peut invoquer l'autorité de la chose décidée attachée à cette décision lorsque la caisse prend une décision rectificative.

La SNC L.N.U.F. demande à la Cour à titre principal de confirmer le jugement en ce qu'il lui a dit inopposable la décision de prise en charge de la maladie déclarée et à titre subsidiaire, avant toute décision au fond, de dire que devra être requis l'avis d'un deuxième comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

La SNC L.N.U.F. soutient que la décision de refus du 30 octobre 2007 est revêtue de l'autorité de la chose décidée, les décisions de la caisse ayant un caractère définitif ; que les deux décisions notifiées à Madame Evelyne X... le 30 octobre 2007 ne mentionnent pas avoir un caractère provisoire, que la caisse n'y dit pas qu'elle envisage de saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et qu'elle rappelle à la salariée les voies et délais de recours qui s'offrent à elle ; que le courrier adressé à l'employeur ne dit pas plus que ce refus est provisoire.

La SNC L.N.U.F. soutient encore que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne ne l'a pas informée, en méconnaissance des dispositions de l'article D461-30 du code de la sécurité sociale, de ce qu'elle saisissait le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et ne lui a pas précisé les nouveaux délais à l'issue desquels la décision serait rendue, cette information de saisine du CRRMP ne lui ayant été donnée que le 14 décembre 2007 soit après l'expiration du délai imparti à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne pour statuer sur la demande de la salariée.

A titre subsidiaire, la SNC L.N.U.F. demande à la Cour, si celle-ci réformait le jugement, de dire en application de l'article R142-24-2 du code de la sécurité sociale que l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles autre que celui du comité initialement saisi par la caisse doit être recueilli ; que la relation directe entre la maladie déclarée et l'activité professionnelle de Madame X... n'est pas établie, ainsi que l'enquête administrative de la caisse l'a démontré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de l'employeur en inopposabilité de la décision de prise en charge

Il résulte des dispositions de l'article D461-30 et de l'article L 461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale que lorsque la maladie n'a pas été reconnue d'origine professionnelle parce que la condition tenant à la liste limitative des travaux n'est pas remplie, la caisse saisit le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles après avoir instruit les éléments nécessaires du dossier et en avise la victime ou ses ayants droit ainsi que l'employeur.

Ces textes n'impartissent aucun délai à la caisse pour aviser l'employeur de la saisine du comité et il est établi en jurisprudence que l'inobservation par celle-ci du délai maximum de six mois pour instruire le dossier, délai instauré dans le seul intérêt de l'assuré, n'a de conséquence qu'à l' égard de ce dernier et n'est sanctionné que par la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, dont seule la victime peut se prévaloir, mais n'est aucunement sanctionné par une inopposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge.

La SNC L.N.U.F. a été informée de la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne par courrier du 14 décembre 2007 et ne peut donc se prévaloir d'une inopposabilité de la décision de prise en charge du seul fait de la date de cette information.

Il est encore acquis que la décision de refus de prise en charge de la maladie professionnelle par la caisse n'étant envoyée à l'employeur, selon les termes de l'article R441-4 du code de la sécurité sociale, que pour information, cette décision ne peut acquérir un caractère définitif à son égard et que l'employeur ne peut invoquer l'autorité de la chose décidée attachée à cette décision alors que la caisse a, postérieurement, pris une décision rectificative.

Le courrier adressé le 30 octobre 2007 à la SNC L.N.U.F. par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne est ainsi libellé :

objet : refus de prise en charge d'une maladie

Madame, Monsieur,

Ainsi que je vous l'indiquais dans un précédent courrier, votre salariée a formulé une demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie dont elle est atteinte.

Je vous prie de trouver, sous ce pli, pour information, le double de la notification comportant la décision motivée de la Caisse qui a été adressée à l'intéressée.

La décision de refus de prise en charge a bien été donnée à l'employeur pour son information et n'a donc pas eu à son égard autorité de chose décidée.

Le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Mayenne du 6 octobre 2009 est infirmé et la décision de prise en charge des maladies professionnelles déclarées par Madame Evelyne X... est dite opposable à la SNC L.N.U.F. son employeur.

Sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie

L'article L461-1 du code de la sécurité sociale dit que : si une ou plusieurs conditions tenant .... à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

L'article R142-24-2 du code de la sécurité sociale ajoute que : lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéa de l'article L461-1, le tribunal recueille préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L461-1 .

Le tribunal désigne alors le comité d'une des régions les plus proches.

L'enquête effectuée par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne sur la nature de la tâche réalisée par Madame Evelyne X... permet de savoir que celle-ci est employée comme aide conductrice à l'emballage des yaourts, ce qui l'amène à faire les gestes suivants :

Préhension des paquets sur palette.

Dépose sur chariot jusqu'au poste, préhension des paquets, dépose sur machine, défaire le cellophane et les déposer dans la machine.

Lavage le mardi et jeudi pendant trois heures.

L'enquêteur, après audition de la victime, examen du poste de travail et audition de l'employeur a conclu dans ces termes son rapport :

La liste limitative des travaux n'est pas respectée.

Madame Evelyne X... fait des gestes de préhension de paquets de carton d'une dizaine de kilos 2 fois toutes les 5 à 7 minutes .Cependant la répétition est faible.

Elle n'effectue pas les travaux figurant au tableau no 57 C : travaux comportant de façon habituelle soit des mouvements répétés ou prolongés d'extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main.

CONCLUSION :

Les conditions administratives nécessaires à la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle ne sont pas réunies.

Le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles des Pays de la Loire a cependant, dans son avis du 15 janvier 2008, statué en ces termes:

Le comité constate que l'intéressée, qui exerce la profession d'aide conductrice chez Lactalis, est soumise dans son activité professionnelle habituelle à des mouvements d'hypersollicitation des mains et des poignets nécessitant des gestes de préhension répétés.

Dans ces conditions, le comité établit une relation directe entre la pathologie présentée par l'intéressée (syndrome du canal carpien bilatéral) et son activité professionnelle habituelle. Avis favorable à la reconnaissance de la MP 57 ACG 560 des deux côtés.

Cette contradiction d'avis entre l'enquêteur de la caisse d'assurance maladie et le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des pays de Loire justifie la saisine du comité régional d'une des régions les plus proches, par application des dispositions de l'article R142-24-2 du code de la sécurité sociale.

Il n'y a pas lieu à statuer sur les dépens, la procédure étant gratuite devant les juridictions chargées du contentieux de la sécurité sociale.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 octobre 2009 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Mayenne,

DECLARE opposable à la SNC L.N.U.F. la prise en charge au titre de la législation professionnelle des maladies déclarées le 9 mai 2007 par Madame Evelyne X...,

ENJOINT à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Mayenne de saisir le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de la Bretagne sur le lien de causalité directe entre la maladie déclarée par Madame Evelyne X... et le travail habituel de celle -ci,

DIT que l'affaire sera rappelée à la diligence des parties,

DIT n'y avoir lieu à statuer sur les dépens.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALL Marie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/02501
Date de la décision : 05/04/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-04-05;09.02501 ?
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