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22/02/2011 | FRANCE | N°09/02433

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 22 février 2011, 09/02433


COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

BAP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02433.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, en date du 05 Octobre 2009, enregistrée sous le no 08/ 00474
CONTREDIT ARRÊT DU 22 Février 2011

DEMANDERESSE :

Madame Noëlle X... ... 72000 LE MANS

présente, assistée de Maître Claude TERREAU, avocat au barreau du MANS

DEFENDERESSE :

SOCIETE LE MAINE LIBRE 28 place de l'Eperon 72007 LE MANS CEDEX

représentée par Maître Jean-Luc PUYET, avocat au barreau de NANTES

CO

MPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a é...

COUR D'APPEL D'ANGERS Chambre Sociale

BAP/ AT
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02433.
Jugement Conseil de Prud'hommes du MANS, en date du 05 Octobre 2009, enregistrée sous le no 08/ 00474
CONTREDIT ARRÊT DU 22 Février 2011

DEMANDERESSE :

Madame Noëlle X... ... 72000 LE MANS

présente, assistée de Maître Claude TERREAU, avocat au barreau du MANS

DEFENDERESSE :

SOCIETE LE MAINE LIBRE 28 place de l'Eperon 72007 LE MANS CEDEX

représentée par Maître Jean-Luc PUYET, avocat au barreau de NANTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, président Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, conseiller Madame Anne DUFAU, conseiller

Greffier lors des débats : Madame LE GALL,

ARRÊT :

prononcé le 22 Février 2011, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame BRETON, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE

Par arrêt en date du 22 juin 2010, auquel il sera renvoyé quant aux motifs, la cour a :

- rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par Mme Noëlle X... à l'encontre de la société d'exploitation du Maine libre,
- déclaré le contredit formé par Mme Noëlle X... au jugement rendu le 5 octobre 2009 par le conseil de prud'hommes du Mans bien fondé, en présence d'un contrat de travail unissant Mme Noëlle X... à la société d'exploitation du Maine libre, et ce à compter du 1er avril 1998,
- évoquant, ordonné la réouverture des débats à l'audience du 18 octobre 2010 à 14 heures,
- dit que le présent valait convocation des parties et de leur avocat,
- réservé les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- réservé les dépens.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

À l'audience, Mme Noëlle X... reprenant ses conclusions écrites déposées le même jour, sollicite que :

- la société d'exploitation du Maine libre soit condamnée à lui verser :
. 9 561 euros au titre des congés payés afférents aux rémunérations versées,
. 1 940 euros d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés corollaires,
. 30 600 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 49 187, 52 euros au titre des frais de route,
. 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- il soit ordonné à la société d'exploitation du Maine libre de lui remettre sous astreinte de 50 euros par document et par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, les bulletins de salaire du 1er avril 1998 au 20 juin 2008, le certificat de travail, l'attestation Pôle emploi,
- la société d'exploitation du Maine libre soit condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
À l'appui, elle demande, au préalable, que l'exception de prescription soulevée par la société d'exploitation du Maine libre soit rejetée comme inapplicable à la cause, son droit quant à l'existence d'un contrat de travail la liant à la dite société d'exploitation n'ayant été reconnu que le 22 juin 2010 par le précédent arrêt de la cour.
Sinon, elle chiffre le montant des rémunérations qu'elle a perçues du 1er avril 1998 au 20 juin 2008, soit un total de 95 618 euros brut, ce qui s'entend congés payés non compris, qu'elle réclame donc à hauteur de 10 %.
Quant au licenciement intervenu, qui est de fait sans cause réelle et sérieuse, elle établit également un décompte des sommes reçues les six derniers mois de son emploi, ce qui l'amène à une moyenne de 970 euros, à partir de laquelle elle calcule ses deux mois d'indemnité compensatrice de préavis. Elle fait valoir, par ailleurs, l'importance de son préjudice, n'ayant pu bénéficier d'aucun des accompagnements, ni des dédommagements, liés à sa qualité de salariée, alors que née en 1952, elle n'a pas pu, à la suite de son licenciement, retrouver d'emploi.
Elle justifie enfin des frais de route qu'elle a exposés, avec son véhicule personnel, afin d'accomplir les tournées prescrites par son employeur.
****
À l'audience, la société d'exploitation du Maine libre reprenant, elle aussi, au moins pour partie ses conclusions écrites déposées le même jour, soulève l'application de la prescription quinquennale des articles L. 3245-1 du code du travail et 2224 du code civil et demande en conséquence :
- à voir fixer :
. le rappel d'indemnité de congés payés à 2 736, 90 euros bruts,
. le remboursement des frais de route à 5 957, 40 euros nets,
. le montant de l'indemnité compensatrice de préavis à 1 418 euros bruts, et l'indemnité de congés payés afférents à 141, 80 euros bruts,
. le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 4 254 euros nets,
- qu'il soit dit qu'elle éditera les bulletins de salaire du 1er février 2007 au 30 juin 2008,
- que les dépens soient partagés.
Au soutien, pour limiter les prétentions de Mme Noëlle X..., elle oppose à cette dernière, outre la prescription évoquée, la convention collective des porteurs et les contrats de travail souscrits en application.
Elle ajoute, pour ce qui concerne les frais de route, qu'il y a lieu, par ailleurs, de soustraire des sommes auxquelles Mme Noëlle X... pourrait prétendre celles qui lui ont d'ores et déjà versées au titre de primes de carburant.
Quant aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle déclare qu'ils ne peuvent être supérieurs aux six mois de salaire prévus par l'article L1235-3 du code du travail, aucun élément du dossier ne permettant d'aller au-delà.

Sur l'établissement des bulletins de salaire, elle fait observer qu'elle ne peut les dresser pour une part de l'activité de Mme Noëlle X..., lorsque cette dernière était sous contrat de vendeur-colporteur de presse avec M. Pierre A..., exploitant en nom propre.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription
Ce n'est qu'à la date du 22 juin 2010 que Mme Noëlle X... a vu judiciairement reconnaître son droit, soit le bénéfice d'un contrat de travail entre la société d'exploitation du Maine libre et elle-même.
Dans ces conditions, la prescription quinquennale des articles L. 3245-1 du code du travail et 2224 du code civil n'a pas lieu à s'appliquer.
Au fond
L'existence d'un contrat de travail entre Mme Noëlle X... et la société d'exploitation du Maine libre, contrat qui s'est exercé à compter du 1er avril 1998, a été affirmée.
Tout développement qui tendrait à remettre en cause le principe ainsi posé n'a plus à être examiné.
Le contrat de travail a été rompu le 20 juin 2008 sans recours par l'employeur à la procédure de licenciement ; le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse.
Mme Noëlle X... a effectué le total des sommes qui lui ont été versées entre les deux dates précitées du 1er avril 1998 au 20 juin 2008. Le montant s'élève bien, justificatifs à l'appui, à 95 618 euros.
Les congés payés correspondants se montent eux-mêmes, de fait, à un montant de 9 561 euros (montant auquel Mme Noëlle X... a limité sa demande).
Pour le préavis, il ne peut être que de deux mois, conformément à l'article L. 1234-1 du code du travail, vu l'ancienneté de Mme Noëlle X... au sein de la société d'exploitation du Maine libre.
L'indemnité compensatrice est proportionnelle à la durée du préavis non exécuté, ici deux mois (cf article L. 1234-5 du code du travail) et, doit être calculée sur la base du salaire qui résulte des dernières fiches de paie.
Mme Noëlle X... s'est encore référée au total des sommes qui lui ont été versées au titre de ses six derniers mois de son activité.
La société d'exploitation du Maine libre ne peut, en tout cas, lui opposer la rémunération qu'elle consent contractuellement à un porteur salarié, puisqu'elle a toujours refusé de reconnaître un tel contrat avec Mme Noëlle X....
Ce sera bien une somme de 1 940 euros qui sera retenue au titre de l'indemnité compensatrice de préavis due à Mme Noëlle X..., à laquelle sera ajoutée la somme de 194 euros de congés payés afférents.
Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, il faut se reporter à l'article L. 1235-3 du code du travail au regard de l'ancienneté de Mme Noëlle X... au Maine libre, société dont l'effectif est largement supérieur à onze salariés.

Dans ce cas, la dite indemnité ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire perçus et, il est question, là, de rémunération brute.

Au-delà de ce minimum légal, la fixation du montant de l'indemnité relève du pouvoir souverain d'appréciation des juges, qui peuvent retenir pour ce faire différents critères (ex. âge du salarié, ancienneté, durée du chômage, perte d'avantages en nature, dommage moral...).
Mme Noëlle X... était certes âgée de 56 ans lors de son licenciement. Certes également, le fait qu'elle n'ait pas bénéficié de son statut de salariée, ce qui l'a privée d'un certain nombre d'avantages, ne serait-ce que des indemnités de chômage. Néanmoins, Mme Noëlle X... ne verse aucune pièce qui justifierait de la situation dans laquelle elle se trouve aujourd'hui.
L'ensemble de ces éléments conduira la cour à lui accorder une indemnité à hauteur de 13 800 euros.
****
Quant aux frais de route, la société d'exploitation du Maine libre invoque la convention collective applicable, à savoir celle, nationale, du portage de presse.
La première chose qui peut être remarquée est que la dite convention ne date que du 26 juin 2007, alors que la période considérée est, dans sa quasi-totalité, antérieure. Or, une convention collective ne dispose que pour l'avenir.
Le défraiement des porteurs de presse est effectivement prévu dans une annexe à cette convention collective.
Il est bien indiqué dans la dite annexe que " si la tournée de portage ou son organisation nécessite un moyen de locomotion, celui-ci est déterminé par l'employeur ".
La même n'en renvoie pas moins, quant à la définition de " l'indemnisation des frais d'usage de ce moyen de locomotion ", " à l'entreprise ou au contrat de travail ".
Et, c'est bien dans le contrat de travail type du porteur de presse, par elle établi, que la société d'exploitation du Maine libre a retenu comme moyen de locomotion " le vélomoteur/ cyclomoteur du porteur ", limitant l'indemnité kilométrique, si le salarié a recours à un autre moyen, ainsi une voiture, à celle versée au titre du vélomoteur/ cyclomoteur.
L'objection déjà faite ne pourra qu'être reprise, en ce que la société d'exploitation du Maine libre ne peut opposer à Mme Noëlle X... une quelconque clause contractuelle, alors qu'elle a refusé l'octroi d'un tel contrat à celle-ci.
En l'absence de toute disposition contractuelle ou conventionnelle, l'employeur ne peut fixer unilatéralement les conditions de prise en charge des frais professionnels, soit ceux exposés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt du dit employeur, en deçà de leur coût réel.
Du coup, Mme Noëlle X... se verra remboursée de ses frais professionnels à raison de 47 368, 92 euros, et non des 49 187, 52 euros sollicités.

Mme Noëlle X... ne peut s'appuyer sur le barème fiscal relatif aux indemnités kilométriques et, dans le même temps, conserver les " primes carburant " allouées par son employeur. Le barème de l'administration fiscale fixe un prix de revient kilométrique par type de véhicule, incluant le coût du carburant.

Par ailleurs, la société d'exploitation du Maine libre s'est limitée dans sa demande de déduction de ce dernier chef à une somme de 1 818, 60 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Vu l'arrêt en date du 22 juin 2010 qui a reconnu à Mme Noëlle X... un contrat de travail avec la société d'exploitation du Maine libre à compter du 1er avril 1998,
REJETTE l'exception de prescription soulevée par la société d'exploitation du Maine libre,
DIT que le licenciement de Mme Noëlle X... par la société d'exploitation du Maine libre en date du 20 juin 2008 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
En conséquence de tout cela,
CONDAMNE la société d'exploitation du Maine libre à verser à Mme Noëlle X...
. 9 561 euros de rappel de salaire au titre des congés payés,
. 1 940 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 194 euros de congés payés afférents,
. 13 800 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 47 368, 92 euros de remboursement de frais professionnels,
ORDONNE à la société d'exploitation du Maine libre d'établir et de remettre à Mme Noëlle X... les bulletins de salaire, le certificat de travail et l'attestation Pôle emploi correspondants au présent arrêt,
DIT n'y avoir lieu à astreinte,
CONDAMNE la société d'exploitation du Maine libre à verser à Mme Noëlle X... la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société d'exploitation du Maine libre aux entiers dépens, de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALL, Marie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/02433
Date de la décision : 22/02/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-02-22;09.02433 ?
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