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15/02/2011 | FRANCE | N°10/00526

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 15 février 2011, 10/00526


COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale AD/SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/00526.
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instanceJugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 25 Janvier 2010, enregistrée sous le no F 09/00053
ARRÊT DU 15 Février 2011
APPELANT :
Monsieur Charles X......49100 ANGERS
représenté par Me TOUZET, avocat au barreau d'ANGERS (SCP BDH Avocats)
INTIMEE :
S.A.R.L. MV OUEST AMENAGEMENT196 rue Paul Bellamy44000

NANTES
représentée par Me Catherine RAIMBAULT, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION ...

COUR D'APPELD'ANGERSChambre Sociale AD/SLG
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/00526.
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instanceJugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ANGERS, décision attaquée en date du 25 Janvier 2010, enregistrée sous le no F 09/00053
ARRÊT DU 15 Février 2011
APPELANT :
Monsieur Charles X......49100 ANGERS
représenté par Me TOUZET, avocat au barreau d'ANGERS (SCP BDH Avocats)
INTIMEE :
S.A.R.L. MV OUEST AMENAGEMENT196 rue Paul Bellamy44000 NANTES
représentée par Me Catherine RAIMBAULT, avocat au barreau d'ANGERS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 Décembre 2010, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Bernard BRETON, présidentMadame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseurMadame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,
ARRÊT :du 15 Février 2011 contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame BRETON, président, et par Madame TIJOU, adjoint administratif ff de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *******EXPOSE DU LITIGE
Monsieur X... a été engagé en contrat à durée indéterminée le 1er juillet 2008 par la société MV OUEST AMENAGEMENT, dont le gérant est Monsieur C..., en qualité de peintre, poseur de revêtement en bâtiment.
Il a exercé son activité sur un chantier sis à St Georges des sept voies, en Maine et Loire. Le 26 septembre 2008 il a été licencié pour motif économique et a, en janvier 2009, saisi le conseil de prud'hommes d'Angers en contestant le caractère réel et sérieux de son licenciement et en demandant des dommages-intérêts, ainsi qu'un rappel de salaires.
Par jugement du 25 janvier 2010 le conseil de prud'hommes d'Angers l'a débouté de ses demandes hors un rappel de salaires de 100,36 euros.
Monsieur X... a fait appel du jugement le 22 février 2010.
OBJET DE L'APPEL ET MOYENS DES PARTIES
Monsieur X... demande l'infirmation du jugement déféré et demande à la Cour de dire que son licenciement a été irrégulier, ainsi que sans cause réelle et sérieuse;

Il demande la condamnation de la société MV OUEST AMENAGEMENT à lui payer une indemnité de 1872 euros pour irrégularité de la procédure et celle de 10 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre un rappel de salaire de 1150,36 euros et 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .
Il demande enfin condamnation de l'employeur à lui délivrer les bulletins de salaire et une attestation ASSEDIC rectifiés, sous astreinte de 100 euros par document et par jour de retard à compter du 8èME jour suivant le prononcé de la décision à intervenir.
Il soutient:
-sur les irrégularités de la procédure : qu'il n'a pas eu d'entretien préalable, ce en méconnaissance des dispositions de l'article L1232-2 du code du travail ; il conteste avoir reçu la convocation produite par l'employeur et observe que la lettre ne porte au surplus ni l'adresse de la mairie, ni celle de l'Inspection du travail.
-sur la cause du licenciement : que la lettre de licenciement ne vise pas les mentions légales et ne dit ni la cause du licenciement économique, ni son incidence sur le contrat de travail ; que le contrat ne prévoyait pas qu'il était conclu pour un chantier déterminé et que ce n'est pas un contrat "de chantier";que la lettre de licenciement fixe le litige et que le motif invoqué dans celle -ci est économique.
-qu'on lui devait un rappel de salaire du 1er juillet au 26 octobre 2008 soit 8499,02 euros, qu'il a touché 7348,66 euros et qu'on lui doit encore 1150,36 euros ; que les acomptes invoqués par l'employeur servaient à acheter du matériel et des fournitures pour l'entreprise ; qu'il appartient à l'employeur de justifier du paiement du salaire, ce que la société MV OUEST AMENAGEMENT ne fait pas.
La société MV OUEST AMENAGEMENT demande la confirmation du jugement et la condamnation de monsieur X... à lui payer la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient :
sur le licenciement
-que le licenciement a été effectué selon les dispositions de l'article L1236-8 du code du travail; qu'il s'agit d'un licenciement de fin de chantier, avec une procédure de licenciement personnel et non pour motif économique ; que le salarié savait que le contrat devait s'exécuter exclusivement sur le lieu du chantier puisque c'est dit à l'article VI du contrat qui vise expressément comme lieu de travail le domaine du Plessis à Saint Georges les sept voies; que monsieur X... ne peut soutenir avoir brutalement appris son licenciement puisqu'il savait que le chantier était terminé.
- qu'il conviendrait, très subsidiairement et si la cour disait le licenciement irrégulier et infondé de diminuer les demandes d'indemnités, le salarié ayant seulement 3 mois d'ancienneté, et ne démontrant pas de préjudice.
-qu'en ce qui concerne les salaires, monsieur X... a eu deux acomptes, de 500 et 550 euros en août et septembre 2008, remis en espèces ; qu'il ne reste donc plus qu'un dû de 100, 36 euros.

MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nature du licenciement
L'article L1236-8 du code du travail énonce que le licenciement qui, à la fin d'un chantier revêt un caractère normal selon la pratique habituelle et l'exercice régulier de la profession, n'est pas soumis aux dispositions du chapitre III relatives au licenciement pour motif économique, sauf dérogations déterminées par convention ou accord collectif de travail. Ce licenciement est soumis aux dispositions du chapitre II relatives au licenciement pour motif personnel.
La jurisprudence subordonne la validité du licenciement prononcé en raison de la survenance de la fin d'un chantier à l'existence dans le contrat de travail d'une clause précisant que le contrat est conclu pour un ou plusieurs chantiers déterminés.
Le contrat conclu le 1er juillet 2008, ne contient pas une telle clause, ne mentionne pas de durée estimée de la durée du chantier et ne fait aucune allusion à la notion de chantier ou de tâche particulière, monsieur X... étant embauché en qualité de peintre et poseur de revêtement en bâtiment.
Le lieu d'exécution du contrat soit, Saint Georges les Sept Voies, ne constitue pas une tâche définie contractuellement et dont le juge peut vérifier qu'elle est achevée à la date de la rupture du contrat de travail.
La société MV OUEST AMENAGEMENT a, en outre, adressé le 26 septembre 2008 à Monsieur X... une lettre de licenciement ainsi libellée :
"MonsieurSuite à l'entretien préalable qui s'est déroulé le 23 septembre 2008, je suis contraint de procéder à votre licenciement. Je vous notifie donc par la présente, votre licenciement économique.
L'employeur a donc lui-même qualifié le licenciement notifié à monsieur X... de licenciement économique.
L'article L1233-3 du code du travail dit que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.
La jurisprudence a ajouté à cette liste non exhautive la réorganisation de l'entreprise destinée à sauvegarder sa compétitivité.
La lettre du 26 septembre 2008 n'énonce aucun motif économique du licenciement, qu'il soit légal ou jurisprudentiel.
A défaut de motif énoncé et justifié, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement du conseil de prud'hommes d'Angers du 25 janvier 2010 est infirmé en ce qu'il a retenu un licenciement pour fin de contrat dit de chantier.
Sur la régularité de la procédure
L'article L1232-2 du code du travail dit que l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable, et effectue à cette fin une convocation par lettre recommandée ou par remise en main propre contre décharge.
L'article L1232-4 du même code dit que le salarié peut se faire assister lors de cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, ou, si celle -ci n'a pas d'institutions représentatives du personnel, par un conseiller choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative et ajoute que la lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition.
La société MV OUEST AMENAGEMENT produit un courrier de convocation à l'entretien préalable qui n'est pas un recommandé, et ne porte aucune mention de remise en mains propres signée du salarié.
Ce courrier de plus ne mentionne pas l'adresse de la mairie, ni celle de l'inspection du travail qui sont les lieux où la liste des conseillers extérieurs peut être consultée.
La procédure de licenciement employée par la société MV OUEST AMENAGEMENT est irrégulière et le jugement du conseil de prud'hommes d'Angers est également infirmé sur ce point.
Sur les effets du licenciement
Monsieur X... ayant moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, il peut prétendre, en application de l'article L1235-5 du code du travail, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.
Monsieur X... a retrouvé un emploi de même nature en avril 2009 soit six mois après le licenciement. Il avait une ancienneté de trois mois dans l'entreprise, ce qui est peu .
Il est par conséquent justifié de condamner la société MV OUEST AMENAGEMENT à lui payer, à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 3700 euros correspondant à deux mois de salaire, le dernier salaire versé à monsieur X..., avant licenciement et après application de la majoration de 25 % due pour les heures supplémentaires, que l'employeur n'avait pas mentionnée sur les bulletins de salaire mais qui a été imposée par le contrôleur du travail, ayant été de 1872 euros.
En application des dispositions combinées des articles L1235-5 et L1235-2 du code du travail, lorsque les dispositions légales relatives à l'assistance du salarié par un conseiller ont été méconnues, le salarié a d'autre part droit au versement d'une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire, et qui s'ajoute à l'indemnité pour licenciement abusif.
La société MV OUEST AMENAGEMENT doit donc verser à ce titre à monsieur X... la somme supplémentaire de 1872 euros .
Sur le rappel de salaires
La société MV OUEST AMENAGEMENT ne conteste pas que monsieur X... ait perçu au titre de ses salaires, paniers et frais la somme de 7348,66 euros alors qu'il aurait dû toucher celle de 8499,02 euros soit une différence en sa défaveur de 1150,36 euros.
Elle soutient cependant que deux sommes de 500 et 550 euros lui ont été versées en espèces et en acomptes, reconnaissant de ce fait devoir la somme de 100,36 euros, tandis que monsieur X... affirme que ces remises n'étaient pas faites à titre de salaire mais pour acheter du matériel et des fournitures pour l'entreprise.
En application de l'article L3243-2 du code du travail l'employeur remet au salarié, lors du paiement du salaire, une pièce justificative dite bulletin de paie.
La société MV OUEST AMENAGEMENT ne justifie du paiement de ces 1050 euros à titre de salaire qu'en apportant des tickets de retrait d'espèces provenant d'un automate bancaire, ce qui ne prouve pas que ces sommes aient été destinées à rémunérer monsieur X....
A défaut de pouvoir justifier du paiement dans les termes prévus par le code du travail, la société MV OUEST AMENAGEMENT est condamnée à payer à monsieur X... la somme de 1150,36 euros à titre de rappel de salaires.
La société MV OUEST AMENAGEMENT est enfin condamnée à remettre à monsieur X... les bulletins de travail rectifiés, et une attestation assedic rectifiée, sous astreinte provisoire de 30 euros par jour de retard à compter du 15èME jour suivant la notification du présent arrêt et pendant 2 mois. Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X... les frais non compris dans les dépens et engagés dans l'instance ; il lui est alloué à ce titre une indemnité de 1200 euros.
La société MV OUEST AMENAGEMENT est condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement par arret contradictoire,
INFIRME le jugement rendu le 25 janvier 2010 par le conseil de prud'hommes d'Angers.
STATUANT à nouveau,
CONDAMNE la société MV OUEST AMENAGEMENT à payer à monsieur X... la somme de 3700 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
CONDAMNE la société MV OUEST AMENAGEMENT à payer à monsieur X... la somme de 1872 euros à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure.
CONDAMNE la société MV OUEST AMENAGEMENT à payer à monsieur X... la somme de 1150,36 euros à titre de rappel de salaires.
CONDAMNE la société MV OUEST AMENAGEMENT à remettre à monsieur X... les bulletins de salaire et l'attestation assedic rectifiés, sous astreinte provisoire de 30 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du présent arrêt et pendant deux mois.
CONDAMNE la société MV OUEST AMENAGEMENT en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à monsieur X..., la somme de 1200 euros.
CONDAMNE la société MV OUEST AMENAGEMENT aux dépens

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Annick TIJOU Marie-Bernard BRETON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00526
Date de la décision : 15/02/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2011-02-15;10.00526 ?
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