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10/11/2009 | FRANCE | N°376

France | France, Cour d'appel d'Angers, 1ère chambre a, 10 novembre 2009, 376


ARRET No 376
AFFAIRE No : 09 / 00386
Jugement du 12 Décembre 2008 du Tribunal d'Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 08 / 718

ARRET DU 10 NOVEMBRE 2009

APPELANT :

Monsieur Bruno X... né le 11 Avril 1967 au MANS (72100)...- ...-72700 ALLONNES

(bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale numéro 09 / 001656 du 02 / 04 / 2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)
représenté par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour assisté de Me Agnès SERSIRON, avocat au barreau du MANS

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Monsieur François Z... né le 20 juin 1932 au MANS (72000) ...

représenté par la SCP GONTIER-LANGLO...

ARRET No 376
AFFAIRE No : 09 / 00386
Jugement du 12 Décembre 2008 du Tribunal d'Instance du MANS no d'inscription au RG de première instance 08 / 718

ARRET DU 10 NOVEMBRE 2009

APPELANT :

Monsieur Bruno X... né le 11 Avril 1967 au MANS (72100)...- ...-72700 ALLONNES

(bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale numéro 09 / 001656 du 02 / 04 / 2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ANGERS)
représenté par la SCP CHATTELEYN ET GEORGE, avoués à la Cour assisté de Me Agnès SERSIRON, avocat au barreau du MANS

INTIME :

Monsieur François Z... né le 20 juin 1932 au MANS (72000) ...

représenté par la SCP GONTIER-LANGLOIS, avoués à la Cour assisté de Me Nicole BEAUDOUIN, avocat au barreau du MANS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2009 à 14 H 00, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame VERDUN, conseiller chargé du rapport.
Ce Magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame VERDUN, conseiller faisant fonction de président en application de l'ordonnance du 7 septembre 2009, Madame RAULINE et Madame LECAPLAIN-MOREL, conseillers.

Greffier lors des débats : Madame LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 10 novembre 2009 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Signé par Madame VERDUN, président, et par Madame LEVEUF, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Suivant acte sous seing privé du 14 octobre 2004, François Z... a donné à bail à Bruno X... un appartement de type 2, situé ...(Sarthe), pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction, et moyennant un loyer mensuel révisable de 350 €, charges non comprises.
Par acte d'huissier de justice en date du 13 avril 2007, François Z... a fait délivrer à son locataire un congé en application de l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989, motivé par des retards répétés dans le paiement des loyers.
Par exploit du 28 juillet 2008, il a fait assigner Bruno X... en validité de ce congé et en libération des lieux et expulsion sous astreinte.
Par un jugement en date du 12 décembre 2008, le tribunal d'instance du MANS a constaté la validité du congé délivré le 13 avril 2007, ordonné la libération des lieux dans les 15 jours de la signification du jugement, sous astreinte de 10 € par jour de retard, et à défaut, l'expulsion du locataire, accordant à François Z... une indemnité de procédure de 350 €.
Bruno X... a relevé appel de cette décision par déclaration du 20 février 2009.
Les parties ont constitué avoué et conclu. La clôture de l'instruction a été prononcée le 7 septembre 2009.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions déposées par Bruno X... le 20 juillet 2009, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens en application des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, et aux termes desquelles il demande à la cour :
d'infirmer le jugement entrepris, d'annuler le congé en ce qu'il ne mentionne ni le mode de contestation de l'acte, ni la saisine possible du FSL pour l'aider à solder l'arriéré de loyers, par assimilation avec la situation du locataire assigné en résiliation-expulsion, de déclarer l'assignation irrecevable, en application de l'article 24 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989, faute d'avoir été notifiée au Préfet de la Sarthe, subsidiairement, au fond, de débouter François Z... de ses demandes dès lors qu'il ne justifie d'aucun motif légitime et sérieux au soutien de son congé, en regard de la situation financière particulièrement précaire de son locataire qui, tombé malade, n'a pu reprendre un emploi salarié et est actuellement bénéficiaire du RMI, et qu'il n'établit pas le montant exact de l'arriéré de loyers, de condamner François Z... à lui verser une indemnité de 1 500 €, par application de l'article 700 du Code de procédure civile, de le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Vu les dernières conclusions déposées par François Z... le 1er septembre 2009, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens en application des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, et par lesquelles il sollicite :

le débouté de l'appel, au constat que le congé délivré le 13 avril 2007 répond aux exigences de forme, de délai et de motivation qu'impose l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989, que l'article 24 de cette loi ne s'applique qu'aux expulsions consécutives à la résiliation du bail par l'effet de la clause résolutoire, et non à la délivrance d'un congé régulier, et que Bruno X... ne justifie pas, en toute hypothèse, que l'absence des mentions qu'il déplore lui ait été préjudiciable dans les termes de l'article 114 du Code de procédure civile, la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, la condamnation de Bruno X... à lui payer une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, sa condamnation aux entiers dépens, en ce compris le coût du congé délivré le 13 avril.

MOTIFS DE LA DECISION
I) Sur la régularité formelle du congé
Attendu que Bruno X... soutient que le congé délivré le 13 avril 2007, ne mentionnant ni le mode de contestation dont il est susceptible, ni la faculté pour le locataire de saisir le FSL, serait nul en ce que ces omissions feraient obstacle à l'exercice de ses droits fondamentaux par le destinataire, et plus généralement à la garantie de son droit fondamental au logement ; qu'il ajoute que ces omissions lui auraient causé un préjudice certain en permettant que le congé devienne définitif sans qu'il puisse le contester ni obtenir le concours financier du FSL pour parvenir à solder l'arriéré avant l'échéance du congé ;
Attendu qu'il est désormais acquis que le congé est soumis au régime des nullités édicté par l'article 114 du Code de procédure civile, ce qui en fait un acte de procédure ; que ses effets juridiques sur les droits du locataire, qu'il prive de son droit à renouvellement du bail par tacite reconduction, implique qu'il puisse être déféré immédiatement à un juge, et qu'il mentionne, par voie de conséquence, la faculté de recours et les modalités de son exercice ; que, toutefois, l'absence de mention du recours ne peut affecter la validité intrinsèque de l'acte contre lequel ce recours est ouvert ; que Bruno X..., qui conteste la validité et le bien fondé de ce congé par voie d'exception, a pu faire valoir ses moyens de défense à l'encontre du congé litigieux, de sorte qu'il n'établit nullement que l'absence de mention de son droit de recours par voie d'action lui ait préjudicié ;
Attendu, sur la faculté de saisine du FSL que le bailleur n'est tenu d'en informer le locataire, en application de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, que dans l'hypothèse où le défaut de paiement des loyers est invoqué comme une cause de résiliation du bail, sanction contractuelle qui n'est acquise qu'après la délivrance d'un commandement de payer resté sans effet pendant plus deux mois ; que, dans cette hypothèse, la saisine rapide du FSL, organisme qui a vocation à relayer le débiteur dans le règlement des loyers, peut faire échec à la résiliation du bail, ce qui n'est pas le cas lorsque le bailleur délivre un congé afin de reprendre la disposition de son bien au terme initialement convenu, fut-ce pour des motifs pris de retards dans le paiement des loyers, le règlement ultérieur des loyers ne faisant pas disparaître le manquement contractuel né de ces retards d'exécution ; qu'il s'ensuit que le moyen pris de l'absence de mention de la faculté de saisir le FSL est sans incidence sur la validité du congé délivré par le bailleur ;
Que le jugement sera donc être confirmé en ce qu'il a validé le congé litigieux ;
II) Sur la recevabilité de la demande d'expulsion
Attendu que Bruno X... invoque à nouveau les dispositions de l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, pris cette fois en son alinéa 2, pour soutenir que la demande d'expulsion serait irrecevable, faute d'avoir été notifiée au représentant de l'Etat dans le département ; qu'il rappelle que cette formalité étant préalable à la saisine du juge, ne peut faire l'objet d'une régularisation en cours de procédure et qu'elle est applicable quelle que soit le mode d'extinction du droit au bail du locataire ;
Mais attendu que cette notification préalable, destinée à pourvoir au besoin de relogement de la personne expulsée, n'est exigée par la loi que lorsque l'expulsion procède d'une résiliation du bail avant son terme, et non celle où le bailleur donne congé à son locataire, sous les conditions, notamment de préavis, prescrites par l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 ; que le préavis de 6 mois imposé au bailleur pour dénoncer le bail constitue alors une garantie suffisante pour permettre au locataire de se reloger avant la déchéance de son titre d'occupation ; que la demande d'expulsion est donc parfaitement recevable ;
III) Sur les motifs du congé
Attendu que Bruno X... conteste que ses manquements dans le règlement des loyers puissent justifier le congé, en raison des graves problèmes de santé qu'il a rencontrés et qui lui ont interdit de reprendre un emploi, et ainsi que des difficultés financières qui en ont résulté pour lui puisqu'il ne dispose plus, pour vivre, que du RMI ;
Mais attendu que le défaut répété de paiement des loyers aux échéances convenues constitue un motif sérieux et légitime au sens de l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 ; que le preuve de manquements anciens et réitérés de Bruno X... à son obligation de payer le loyer résulte à suffisance des décomptes produits par le bailleur, qui font apparaître un arriéré de l'ordre de 6 500 € au mois de juillet 2007, ainsi que de l'attestation de la CAF de la Sarthe du 19 novembre 2008, indiquant qu'elle ne verse plus l'aide au logement depuis le mois de mars 2008 en raison des impayés de loyers et du refus du FSL de prendre en charge cette créance ;
Qu'ensuite, les difficultés financières ou de santé invoquées par le preneur ne peuvent faire disparaître le caractère légitime et sérieux du motif, alors qu'il lui était possible d'invoquer cette circonstance au soutien d'une demande de délai de grâce et de se faire autoriser judiciairement à différer le paiement des échéances avant de parvenir à un arriéré de cette importance, qui pénalise lourdement le bailleur retraité, aux revenus modestes ;
Qu'en cet état, c'est à bon droit que le premier juge a validé le congé délivré par exploit du 13 avril 2007 ;
IV) Sur les effets du congé
Attendu que Bruno X... se maintenant dans l'appartement objet du bail, titre d'occupation dont il a été déchu par l'effet du congé, c'est à bon droit que le premier juge lui a enjoint de libérer les lieux, sous astreinte, et ordonné, à défaut, son expulsion ;
Que, toutefois, compte tenu de la précarité de la situation de ce preneur, hospitalisé à plusieurs reprises et titulaire du RMI, il convient de lui accorder un délai d'un mois pour quitter les lieux à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte provisoire de 10 € par jour à l'expiration de ce délai, et ce pendant 4 mois, à défaut de quoi François Z... pourra procéder à son expulsion dans les formes et conditions prescrites par les articles 61 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 ; qu'il convient, pour les mêmes motifs, de faire application d'office de l'article 62 alinéa 3 de cette loi, en décidant que le présent arrêt sera transmis, par les soins du greffe de la cour, au représentant de l'Etat dans le département en vue de la prise en compte de la demande de relogement de Bruno X... dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisés ;
Attendu que l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile à l'encontre de Bruno X..., en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions non contraires à celles du présent arrêt ;
Le REFORMANT,
ORDONNE à Bruno X... de libérer les lieux dans le mois suivant la signification du présent arrêt, sous astreinte de 10 € par jour de retard pendant 4 mois à l'expiration de ce délai ;
DIT qu'à défaut de libération effective dans le délai prescrit, François Z... pourra procéder à son expulsion dans les conditions prescrites par les articles 60 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 ;
Y ajoutant,
DIT qu'une copie du présent arrêt sera transmise, par les soins du greffe de la cour, au représentant de l'Etat dans le département en vue de la prise en compte de la demande de relogement de Bruno X... dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile, en cause d'appel ;
CONDAMNE Bruno X..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, aux entiers dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

C. LEVEUF F. VERDUN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 376
Date de la décision : 10/11/2009

Analyses

BAIL D'HABITATION - Bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 - Congé - Validité - Conditions - Préavis - Délai

1 Soumis au régime des nullités édicté par l'article 114 du code de procédure civile, le congé est un acte de procédure qui prive le locataire de son droit à renouvellement du bail par tacite reconduction. Dès lors, il doit pouvoir être déféré immédiatement à un juge et, par là, mentionner la faculté de recours et les modalités de son exercice. 2 - Le préavis de 6 mois imposé au bailleur par l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 pour donner congé à son locataire constitue une garantie suffisante pour permettre au locataire de se reloger avant la déchéance de son titre d'occupation. 3 - Le défaut répété de paiement des loyers aux échéances convenues constitue un motif sérieux et légitime au sens de l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 que les difficultés financières ou de santé alléguées par le preneur ne peuvent faire disparaître, alors qu'il lui était possible d'invoquer cette circonstance au soutien d'une demande de délai de grâce et de se faire autoriser judiciairement à différer le paiement des échéances avant de parvenir à un arriéré important


Références :

article 114 du code de procédure civile

article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989

Décision attaquée : Tribunal de grande instance du Mans, 12 décembre 2008


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2009-11-10;376 ?
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