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20/05/2008 | FRANCE | N°274

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 20 mai 2008, 274


COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N
RJ / CG

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 01308

type de la décision déférée à la Cour,
juridiction d'origine,
date de la décision déférée,
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes d'ANGERS, décision attaquée en date du 08 Juin 2007
enregistrée sous le no 06 / 00119

ARRÊT DU 20 Mai 2008 <

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APPELANTE ET INTIMEE :

LA SAS UFIFRANCE PATRIMOINE
32 avenue d'Iéna
75783 PARIS CEDEX 16

représentée par Maître Eric PERES,...

COUR D'APPEL
D'ANGERS
Chambre Sociale

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N
RJ / CG

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 01308

type de la décision déférée à la Cour,
juridiction d'origine,
date de la décision déférée,
numéro d'inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud'hommes d'ANGERS, décision attaquée en date du 08 Juin 2007
enregistrée sous le no 06 / 00119

ARRÊT DU 20 Mai 2008

APPELANTE ET INTIMEE :

LA SAS UFIFRANCE PATRIMOINE
32 avenue d'Iéna
75783 PARIS CEDEX 16

représentée par Maître Eric PERES, avocat au barreau de PARIS

INTIME ET APPELANT :

Monsieur Michel X...
...
49320 BRISSAC QUINCE

présent, assisté de Maître Bruno SCARDINA, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur JEGOUIC, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur BOTHOREL, président
Monsieur JEGOUIC, conseiller
Madame RAULINE, conseiller.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,

ARRÊT :
prononcé le 20 Mai 2008, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur BOTHOREL, président, et par Madame Sylvie LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

Entré en 1977 au service de la Société UFIFRANCE PATRIMOINE, Monsieur X... a conclu avec la Société en 1998 un contrat de conseiller en gestion de patrimoine.

Il a saisi le Conseil de Prud'hommes, en mars 2006, de différentes demandes salariales et indemnitaires, relatives à l'exécution de son contrat.

Par jugement en date du 8 Juin 2007, le Conseil de Prud'hommes d'Angers a statué comme suit :

" Dit et juge illicite, et donc inopposable à Monsieur Michel X..., la clause 3. 1. 4. du contrat de travail.

Condamne la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE à payer à Monsieur Michel X... la somme totale de 21 356. 08 € au titre des frais professionnels, avec intérêts au taux légal partant du 24 mars 2006.

Condamne la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE à verser à Monsieur Michel X... la somme de 4 000 € à titre de dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance pour frais professionnels, ainsi que celle de 2 000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, avec intérêts au taux légal partant du présent jugement.

Déboute Monsieur X... du surplus de ses demandes.

Rejette toutes plus amples demandes et prétentions contraires de la SAS UFIFRANCE PATRIMOINE.

La condamne aux entiers dépens de l'instance.

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision pour le tout. "

La Société UFIFRANCE PATRIMOINE et Monsieur X... ont tour à tour relevé appel de cette décision.

Dans ses conclusions enrôlées le 2 Avril 2008, la Société UFIFRANCE PATRIMOINE a conclu à titre principal au rejet des demandes adverses.

Dans ses conclusions enrôlées le 7 Avril 2008 (conclusions récapitulatives) le salarié reprend ses catégories de demandes initiales, tout en en majorant le quantum par rapport à la première instance.

Pour un plus ample exposé des demandes, il est fait référence aux conclusions enrôlées aux dates susdites.

Il convient d'ordonner le rejet des débats des pièces 124 et 125 de Monsieur X..., versées juste avant l'audience. Une telle communication est tardive et ne permet pas le respect du principe de contradictoire.

Le débat porte en premier lieu sur l'obligation au paiement d'une rémunération de suivi client, sans plafonnement.

Le contrat de travail prévoit (art 3. 1. 6) le versement d'une rémunération de suivi client permanent en plus des commissions et du bonus d'activité.

Le contrat prévoit que cette rémunération est plafonnée au montant de la production directe de l'année.

Monsieur X... fait valoir que pendant les années 2002-2003 et 2004, la Société UFIFRANCE PATRIMOINE n'a pas fait application du plafonnement.

Il expose qu'à la fin de l'année 2004, UFIFRANCE PATRIMOINE a entendu revenir à la règle initiale du plafonnement, en concluant un accord avec deux délégués syndicaux, le 23 Décembre 2004. La Société a proposé au salarié un avenant en ce sens qu'il a refusé, étant précisé que Monsieur X... a été élu délégué du personnel en 2004, puis nommé délégué syndical, en 2005.

Monsieur X... considère que le déplafonnement opéré trois années de suite, constitue un avantage individuel acquis, sur lequel l'employeur ne peut pas revenir, sans l'accord exprès du salarié et l'autorisation de l'inspection du travail, en raison de son statut de salarié protégé.

Actualisant ses demandes à ce titre par rapport à la première instance, Monsieur X... réclame paiement de la somme de 68 612 € plus les congés payés (arrêtée à fin 2007), outre une somme distincte de 5 000 € à titre de dommages intérêts, pour indemniser le préjudice distinct du retard.

Il apparaît que la Société UFIFRANCE PATRIMOINE s'est rapprochée des organisations syndicales FO et CFTC dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire, et que la mesure de suspension de plafonnement a été décidée, à titre exceptionnel, pour l'année en cours, dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire. Toujours, dans ce même cadre, cette mesure a été reprise, selon des modalités différentes, trois années de suite. Elle n'a pas été reprise en 2005 en sorte qu'UFIFRANCE PATRIMOINE a fait application du contrat de 1998, Monsieur X... ayant refusé les avenants qui lui avaient été soumis.

Sur ce point, la Cour adopte l'analyse, et en tant que de besoin la motivation du Conseil de Prud'hommes, qui a indiqué que cette mesure de suspension était directement liée à la politique salariale de l'entreprise, arrêtée chaque année avec les organisations syndicales représentatives, et qu'elle s'inscrivait donc dans un processus de négociation collective sur une durée déterminée, sans certitude qu'elle se poursuive d'une année sur l'autre.

Dans ce cadre là, ni la thèse d'un avantage individuel acquis, ni celle d'une incorporation au contrat de travail, ne correspondent à la réalité.

En dernier lieu, Monsieur X... fait valoir qu'il avait été convenu d'un maintien de la suspension du plafonnement pour les salariés âgés de plus de 60 ans et se plaint d'avoir été le seul à ne pas bénéficier du maintien de cet avantage.

Monsieur X... n'établit pas de façon pertinente le fondement de cette prétention, qui n'est étayée par aucun procès-verbal de réunion ou de constat de négociation collective.

C'est donc à juste titre que le Conseil de Prud'hommes a rejeté cette demande et celle qui en est la suite.

Sur les frais professionnels

Sur la base du contrat de 1998, Monsieur X... était soumis à une clause d'intégration des frais professionnels aux commissions.

Ultérieurement, la Société UFIFRANCE PATRIMOINE a négocié un accord d'entreprise, en février 2003, prévoyant une indemnité forfaitaire de 230 €, outre 10 % au titre des commissions perçues.

Bien qu'ayant refusé de signer l'avenant qui lui était proposé en application de cet accord, Monsieur X... a été défrayé sur les bases à compter du mois de mars 2003. A compter de cette date, il a perçu une indemnité pour frais et une indemnité complémentaire, décomptées sur ses bulletins de salaire, d'un montant moyen mensuel de 284 € (16. 444 € / 58).

Monsieur X... fait valoir que la clause contenue dans le contrat de 1998 est nulle et que l'avenant de 2003 lui est inopposable.

Il demande le remboursement des frais effectivement exposés qu'il chiffre à 131. 429, 69 € sur la période d'emploi 1998-2007. Il forme une demande de 50. 000 € au titre de dommages intérêts pour préjudice distinct.

L'employeur oppose la prescription quinquennale, le caractère satisfactoire de la clause de remboursement des frais professionnels, à partir de 2003, négociée avec les représentants syndicaux, et l'absence de preuve du rattachement des frais invoqués à l'activité professionnelle pour la période antérieure à mars 2003.

C'est à juste titre que le Conseil de Prud'hommes a retenu la prescription quinquennale, applicable également à l'égard des frais professionnels.

En ce sens, le salarié ne peut pas former de demandes antérieures au mois de mars 2001. C'est encore à juste titre que le Conseil de Prud'hommes a indiqué que la clause d'intégration des commissions, contenue dans le contrat était nulle. (arrêt Y... c / UFIFRANCE).

Le débat porte sur l'appréciation du montant des frais professionnels de mars 2001 à fin 2007. Monsieur X... ayant actualisé ses demandes à cette date.

L'employeur conteste ces demandes et fait observer, que compte tenu de son activité de représentant du personnel et de délégué syndical, le salarié a ralenti de façon sensible sa prospection en clientèle, ce qui ne le dissuade pas de demander un niveau élevé de frais professionnels.

Le principe des frais professionnels est acquis. L'employeur qui n'a mis en place aucun système cohérent de collecte et de vérification des frais professionnels de ses salariés est assez mal venu de se plaindre de la relative indétermination du montant de ceux-ci, dont on doit pouvoir déterminer le montant plusieurs années après qu'ils avaient été exposés.

Le salarié doit visiter une clientèle, dispersée principalement dans les Pays de Loire. Il doit assurer régulièrement des frais de déplacement, des frais de repos et éventuellement d'hôtel et des frais de secrétariat, puisqu'il travaille principalement à partir de son domicile.

En fonction des éléments produits, il convient de retenir la somme arbitrée par le premier juge pour les années 2001 à 2004 inclus. A partir de 2005, compte tenu de l'importance des heures de délégation qui correspondait grosso modo à 25 % de son activité, il convient de retenir un montant des frais professionnels réduits dans la même proportion, soit 450 € / mois.

La créance de Monsieur X... à ce titre s'élève donc :

A) période du 1er Mars 2001 au 31 Décembre 2004
46 mois-4 mois (congés payés) = 42 mois

600 € x 42-284 € x 18 = 20 088 €

B) période du 1er Janvier 2005 au 31 Décembre 2007
36 mois-3 mois (congés payés) = 33 mois

450 € x 33-284 € x 33 = 5 478 €.

Il convient de réformer le jugement en portant le montant des remboursements de frais à 25 566 € avec intérêts au taux légal à compter de mars 2006.

Contrairement à ce que soutient Monsieur X..., cette somme devra être soumise à cotisations sociales, dès lors que l'employeur avait opté pour la déduction forfaitaire spécifique de 30 % pour frais professionnels et que ce choix est opposable au salarié.

Monsieur X... forme des demandes de dommages intérêts distincts. Il fait valoir que l'application d'une prescription spéciale conduit à le spolier et il invoque également un préjudice moral.

L'employeur conteste cette demande, en faisant valoir que le salarié qui n'a pas mis son employeur en demeure avant 2006 ne peut contourner les effets de la prescription en formant une demande pour préjudice distinct.

Le salarié oppose que l'absence de mise en demeure ne peut lui être opposée, lorsque la mauvaise foi de l'employeur est patente.

L'illicité de la clause d'UFIFRANCE PATRIMOINE n'est devenue patente qu'à compter de l'arrêt Y... (Cass Soc 24 Octobre 2001).

Le salarié ne peut donc se prévaloir pour la période antérieure de la mauvaise foi de l'employeur, qui a ultérieurement négocié une clause de remboursement forfaitaire des frais professionnels.

Le Conseil de Prud'hommes a estimé à juste titre qu'indépendamment des intérêts de retard, il y avait un préjudice matériel et moral, qu'il a exactement réparé en allouant une somme de 4 000 €.

Il convient de confirmer le jugement sur ce point.

Sur la nullité de la clause de protection de clientèle

Monsieur X... demande l'annulation de cette clause, qu'il considère comme une clause de non concurrence déguisée et qui n'est pas rémunérée.

Il résulte d'un arrêt (Cass Soc Z... C / UFIFRANCE 20 Mai 2007), que cette clause a été requlifiée en clause de non concurrence.

Elle est nulle faute d'une contrepartie financière de nature à indemniser le salarié des sujetions qu'elle lui impose.

Il convient de réformer le jugement en ce sens.

Sur la nullité de la clause de non-débauchage

Monsieur X... demande l'annulation de cette clause par laquelle il s'engage à ne pas embaucher dans son entreprise des salariés ayant travaillé à UFIFRANCE PATRIMOINE au cours des douze derniers mois, pendant deux ans après son départ.

Il s'agit d'une clause de non-débauchage.

Cette clause porte atteinte à la liberté du travail, puisque l'employeur peut proposer des contrats de travail à tous les salariés qui sont valablement libérés de leur précédent engagement.

N'étant pas rémunérée, elle est nulle en application des principes issus de l'article L 120. 2 du Code du Travail.

Monsieur X... demande 10 000 € de dommages intérêts pour mention au contrat d'une clause nulle.

S'agissant d'une clause post contractuelle, et Monsieur X... étant toujours salarié D'UFIFRANCE PATRIMOINE, il ne subit aucune sorte de préjudice, l'employeur ayant toujours la possibilité de le délier de cette clause à rupture du contrat.

Il convient de confirmer l'indemnité de procédure de première instance et d'allouer à Monsieur X... une indemnité de procédure de 1 200 € au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS :

STATUANT publiquement et contradictoirement,

ORDONNE le rejet des débats des pièces no124 et 125,

REFORMANT le jugement entrepris,

PORTE le rappel pour frais professionnels, arrêté au 31 Décembre2007 à la somme brute de 25 566 € avec intérêts au taux légal à compter de la demande,

DIT nulle la clause de protection de clientèle,

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions non contraires,

Y AJOUTANT,

DIT nulle la clause de non-débauchage en application de l'article L 120-2 du Code du Travail,

CONDAMNE la Société UFIFRANCE PATRIMOINE au paiement à Monsieur X... de 1 200 € au titre des frais irrépétibles d'appel,

DEBOUTE les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la Société UFIFRANCE PATRIMOINE aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sylvie LE GALLPhilippe BOTHOREL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 274
Date de la décision : 20/05/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Angers, 08 juin 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-05-20;274 ?
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