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06/05/2008 | FRANCE | N°237/08

France | France, Cour d'appel d'Angers, Chambre sociale, 06 mai 2008, 237/08


Chambre Sociale
Numéro d'inscription au répertoire général : 05 / 02324.
Jugement au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 21 Septembre 2005, enregistrée sous le n° 17626
ARRÊT DU 06 Mai 2008
APPELANTS :
Madame Ginette X... épouse Y... ...

Madame Liliane Y... épouse A..., agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentante légale de son enfant mineur Julien, né le 27 juillet 1988. ...

Monsieur Patrick Y..., agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentant léga

l de son enfant mineur Maximilien né le 17 janvier 1998 à Saumur Chez Madame Michelle B... ......

Chambre Sociale
Numéro d'inscription au répertoire général : 05 / 02324.
Jugement au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du MANS, décision attaquée en date du 21 Septembre 2005, enregistrée sous le n° 17626
ARRÊT DU 06 Mai 2008
APPELANTS :
Madame Ginette X... épouse Y... ...

Madame Liliane Y... épouse A..., agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentante légale de son enfant mineur Julien, né le 27 juillet 1988. ...

Monsieur Patrick Y..., agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de son enfant mineur Maximilien né le 17 janvier 1998 à Saumur Chez Madame Michelle B... ...

Monsieur Eric Y..., agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de ses deux enfants mineurs Aléxia née le 28 décembre 1995 à Aubenas et Yohan né le 1er mars 2002 à Aubenas ...

Madame Valérie Y... épouse Z..., agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de ses deux enfants mineurs Marion née le 15 mars 1994 Paris 14e et Stécy née le 14 aôut 2003 à Angers ...

Madame Magali Y... épouse C..., agisant en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de ses deux enfants mineurs Charline née le 30 décembre 1991 et Marine née le 28 septembre 1994. ...

Madame Véronique Y... épouse D..., agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de ses deux enfants mineurs Adrien né le 14 juin 1994 et Dorian né le 7 septembre 1996. ...

Madame Jeanine Y... épouse F... ...

Madame Berthe Y... épouse E... ...

Madame Solange Y... épouse G... ...

Monsieur André Y... ...

Monsieur Joël Y... ...

Madame Bernadette Y... épouse H... ...

Monsieur Michel Y... ...

Madame Brigitte Y... épouse I... ...

UNION DEPARTEMENTALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES DE MAINE ET LOIRE, prise en sa qualité de curateur d'état de Mme Liliane Y... épouse A... 4 avenue Patton BP 90326 49003 ANGERS CEDEX 01

Monsieur Vincent A... ...

Monsieur Julien A... sous administration légale de Mme Liliane Y... ép A... ...

représentés par Maître David SIMON, avocat au barreau du MANS
INTIMES :
S. A. RENAULT LE MANS 15 avenue Pierre Pifault 72000 LE MANS

représentées par Maître MEMIN substituant Maître Alain PIGEAU, avocat au barreau du MANS,
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SARTHE 178 avenue Bollée 72033 LE MANS CEDEX 9

représentée par Madame Cécile LOHÉAC- CHOLET, munie d'un pouvoir spécial,
APPELEE A LA CAUSE :
DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE DES PAYS DE LA LOIRE (D. R. A. S. S.) 6 rue René Viviani- Beaulieu 44062 NANTES CEDEX 2 (sans observations écrites)

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2008, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur JEGOUIC, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur BOTHOREL, président Monsieur JEGOUIC, conseiller Madame RAULINE, conseiller.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie LE GALL,
ARRÊT : DU 06 Mai 2008, contradictoire, et mis à disposition au greffe,

Signé par Monsieur BOTHOREL, président, et par Madame Sylvie LE GALL, greffier présent lors du prononcé.
Monsieur Y..., né en 1940, est entré au service de la SAS RENAULT en 1960.
De juillet 1968 à octobre 1997, date de son départ en préretraite, il a été employé à l'atelier GG81 au montage de pièces par la RNUR.
Selon certificat de constatation en date du 10 / 10 / 2001, Monsieur Y... a déclaré une maladie professionnelle : asbestose.
Cette maladie a été prise en charge au titre professionnel (tableau n° 30) avec modification d'un taux d'incapacité de 50 %, par décision notifiée le 02 / 04 / 02.
Monsieur Y... est décédé le 03 / 03 / 2003 des suites d'un mésothéliome malin qui avait fait l'objet d'une reconnaissance à titre professionnel.
Les consorts Y... ont saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la SAS RENAULT Le Mans.
Par jugement en date du 21 / 09 / 05, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans a débouté les consorts Y... de leurs demandes.
Les consorts Y... ont formé appel de cette décision.
Dans leurs conclusions du 31 / 03 / 08, ils demandent à la cour de :
- reconnaître la faute inexcusable de la SAS RENAULT Le Mans.
- majorer la rente au taux maximal applicable.
- condamner la SAS RENAULT Le Mans à payer les sommes suivantes :
Au titre de l'action successorale :
-240 000 euros au titre des souffrances physiques-25 000 euros au titre du préjudice moral-15 000 euros au titre du préjudice esthétique-16 000 euros au titre du préjudice d'agrément

Au nom propre de Madame Y... et de ses enfants :
- condamner la SAS RENAULT Le Mans à payer en réparation de son préjudice moral 100 000 euros.
- condamner la SAS RENAULT Le Mans à payer la somme de 35 000 euros au titre du préjudice moral de chacun des enfants.
Au nom propre des petits-enfants
- condamner la SAS RENAULT Le Mans à payer la somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral de chacun des petits-enfants.
Au nom propre des collatéraux :
- condamner la SAS RENAULT Le Mans à payer la somme de 15 000 euros au titre du préjudice moral de chacun des collatéraux
Dire et juger l'arrêt à intervenir commun et opposable à la CPAM de la Sarthe.
Condamner la SAS RENAULT Le Mans au paiement de la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La société RENAULT SAS, dans ses conclusions du 31. 03. 08, a conclu à la confirmation du jugement, subsidiairement, à la limitation des indemnisations, avec application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 09 / 11 / 06 et 18 / 06 / 07, la CPAM 72 a conclu au rejet des demandes d'indemnisation formées par les collatéraux, indiquant qu'elle entendait récupérer les indemnités et majorations mises à sa charge, en cas de reconnaissance d'une faute inexcusable.
Il résulte des éléments produits que Monsieur Y... est décédé d'une maladie professionnelle, liée à l'inhalation des poussières d'amiante.
Compte tenu du temps de latence de la maladie, et de la carrière de Monsieur Y..., celui-ci a été exposé uniquement aux risques d'inhalation de poussières d'amiante chez RENAULT, et en particulier, à compter de son passage dans l'atelier de montage de freins, auquel il a été affecté de 1968 à 1997.
Dans cet atelier, il était procédé au montage de plaquettes de freins sur différents types de véhicules, les plaquettes étaient recouvertes de poussières amiantées, et la retouche des plaquettes conduisait à l'émission de poussières, à la suite du meulage de ces plaquettes (cf enquête MT).
L'employeur concède qu'entre 1969 et 1993 (24 ans), Monsieur Y... a été soumis aux risques d'inhalation des poussières d'amiante dans le cadre de son activité de monteur à l'atelier GG 81.
En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui- ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment, en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié, du fait des produits fabriqués ou utilisés dans l'entreprise. Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
La société RENAULT fait valoir qu'elle ne participait pas au processus de fabrication et de transformation de l'amiante, que ce n'est qu'à compter du décret du 22 / 05 / 96 qu'ont été intégrés au tableau 30 des maladies professionnelles, les travaux d'équipement sur des matériels contenant des composantes amiantées.
Elle fait valoir qu'à compter de 1993, aucune partie d'amiante n'a été incorporée dans la résine utilisée dans les garnitures de freins.
Elle soutient qu'aucune pièce disponible ne permet de retenir qu'elle a eu ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié.
Elle fait valoir que Monsieur Y... a travaillé dans un atelier comportant une aération de nature à empêcher la stagnation des poussières, et que des analyses d'air réalisées en 1999 démontraient la faible concentration de fibres d'amiante dans l'air.
Il résulte cependant des éléments produits que la société RENAULT Le Mans a fait effectuer en 1989 des analyses pour déterminer l'importance de la présence des fibres d'amiante et a engagé, en 1993, un processus de suppression de la présence d'amiante dans les plaquettes de freins, ce dont il résulte que la société RENAULT Le Mans avait, ou aurait dû avoir conscience du danger auquel elle exposait son salarié (cass. civ 31 / 05 / 06) alors qu'elle n'a pas pris les mesures de l'en préserver. Il résulte de ce qui précède que la faute inexcusable de la société RENAULT SAS doit être reconnue dans la situation d'espèce.
Sur les demandes des consorts Y...
au titre de l'action successorale, il convient d'allouer les sommes suivantes :
-50 000 € au titre des souffrances physiques et morales-5 000 € au titre du préjudice esthétique-15 000 € au titre de préjudice d'agrément

Au titre du préjudice moral
Il sera alloué une somme de 20 000 € au titre du préjudice moral de la veuve, Madame Y..., et une somme de 10 000 € au titre du préjudice moral subi par chacun des enfants. Il convient d'allouer une somme de 5 000 € au titre du préjudice moral subi par chacun des petits-enfants.
Il convient d'écarter les demandes formées par les collatéraux, irrecevables en application de l'article L. 452-3 alinéa 3 du code de sécurité sociale.
Il convient d'allouer aux consorts Y... une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt contradictoire ;
Infirmant le jugement entrepris ;
Dit que la maladie professionnelle dont est décédé Monsieur Y... résulte de la faute inexcusable de la société RENAULT SAS ;
Fixe le taux de rente au maximum ;
Déclare irrecevables les demandes de dommages et intérêts formées par les collatéraux (Jeanine Y...- Berthe Y...- Solange Y...- André Y...) ;
Fixe ainsi qu'il suit les préjudices des autres consorts Y... :
Au titre de l'action successorale de Monsieur Y...
- souffrances physiques et morales 50 000 €- préjudice esthétique 5 000 €- préjudice d'agrément 15 000 €

Au titre du préjudice moral des ayants droit
- préjudice moral de la veuve 20 000 €- préjudice moral de chacun des enfants 10 000 €- préjudice moral de chacun des petits-enfants 5 000 €

Donne acte à la CPAM 72 de ce qu'elle entend récupérer les indemnités en application de l'article L. 452-4 alinéa 2 du code de sécurité sociale à l'égard de l'employeur ou de son assureur ;
Condamne la SAS RENAULT au paiement de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Angers
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 237/08
Date de la décision : 06/05/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale du Mans, 21 septembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.angers;arret;2008-05-06;237.08 ?
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